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Depuis l’abandon d’Orion, au début de la guerre, Aïo était la seule station spatiale et la possession de la CITL. Sans cette station et les deux sites Alpha et Béta sur la Lune, depuis longtemps cette confédération aurait été réduite en cendres par les deux puissances mondiales. Ils survivaient grâce à la suprématie spatiale. Or le Nouveau Monde venait de rayer le site B. Kyréna comprenait parfaitement la précarité de leur situation.
L’ascenseur se referma sur lui. Il glissa sans bruit le long de l’anneau vertical en direction des hangars, à la base de la station. Alignés sur des centaines de quais des milliers de vaisseaux fourmillaient de techniciens, d’apponteurs et d’équipages. Ils se rangeaient face au vide, séparés de l’espace seulement par les champs électriques. Et ils causaient, travaillaient, agissaient absorbés par leur travail, insouciants. La Terre après tout, ruinée par la guerre, n’étaient qu’une surface bleue et lointaine.
À l’ouverture des portes, deux soldats l’arrêtèrent. Il s’agissait des sentinelles au poste de sécurité. Les contrôles étaient fréquents.
- Veuillez décliner votre identité. Lui demanda l’un des soldats.
- Capitaine Kyréna, de code 035ATI.
- Votre ordre, capitaine.
Il leur tendit sa carte magnétique et l’ordre écrit de mission qui lui donnait accès aux quartiers d’équipage et au quai trente-cinq.
- Veuillez attendre.
- Veuillez procéder.
- Excusez-moi ? Capitaine ?
- C’était de l’humour, soldat.
L’humour n’atteignait pas le poste de sécurité pour qui le capitaine n’était qu’un officier de plus parmi tous ceux de la station, une des milliers de personnes qu’ils contrôlaient chaque jour. Une confirmation apparut à l’écran. Il passa aux rayons puis reprit son ordre et le mit en poche, à l’épaule.
- Bonne journée capitaine.
Kyréna ne répondit rien. Il traversa un couloir vitré au-dessus des quais mêmes puis s’enfonça dans les quartiers. Il arrivait à présent au niveau des équipages encombrés de personnel, dans des passages aux portes gardées ouvertes. Ce n’était rien comparé à l’activité des entrepôts qui recevaient les produits d’Indonésie et du Groenland – l’Australie elle-même fournissait peu de matériaux : elle en avait trop besoin pour elle-même.
La salle de réunion avait été mise à sa disposition pour la préparation du vol. La porte avait été laissée ouverte, les lumières allumées. Quand il entra, Kyréna tomba nez-à-nez avec un homme du CRIJ. Bronzé, solide, il tirait sur le côté de ses lèvres comme un tic nerveux. Son uniforme bleu marine était froissé, mal tenu. Le lieutenant portait un début de barbe.
- Le CRIJ ? S’étonna Kyréna.
L’inconnu, au repos, lui coupa la parole.
- Le Corps de Répression et d’Intervention Juridique, j’espère que vous ne nous avez pas oublié capitaine Kyréna.
- Vous vous êtes trompé d’étage.
- Pas du tout. Vous allez inspecter un projet de tore à la frontière du Groenland et cela alors que l’Eurasie impose le blocus énergétique au Nouveau Monde, cela a semblé suffisamment important à mes chefs pour que je me joigne à votre équipe. À ce propos, votre biochimiste doit être aussi calé en énergie nucléaire que moi en jardinage.
- En effet, vous auriez plutôt la main lourde.
L’individu éclata de rire :
- C’est le sort de tout célibataire ! Lieutenant Immons, prêt à partir.
Il ne serra pas la main tendue, ne demanda pas son ordre de mission. Le capitaine avait détourné son attention sur le biochimiste qui, au tableau blanc, agissait de façon étrange.

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