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Harrisburg

Même tard le soir, il faisait encore chaud dans le train qui emmenait les trois amis vers la Pennsylvanie, mais la torpeur qui aurait dû les assoupir était freinée par les évènements de la matinée. Ils avaient trouvé une banque peu regardante et ouvert un compte commun prétextant avoir reçu l’argent de leur famille pour monter un projet ensemble. Afin de ne pas éveiller de soupçons ils n’en avaient déposé qu’une petite quantité sur le compte mais juste assez pour obtenir un coffre dans lequel ils avaient déposé l’arme et les documents.

Ils s’étaient trouvé un compartiment vide dans le train et échangeaient sur les différents projets qu’ils aimeraient mener grâce à l’argent récolté. Noé et Angie voulaient retourner en Europe, lieu de leur naissance, reprendre leurs études, dépasser leurs problèmes actuels. Amîn pensait plutôt s’acheter une maison et une voiture à sa majorité mais n’avait aucune idée de comment occuper sa vie ni où s’installer.

Ils avaient l’air détendus bien que le danger vécu plus tôt les tourmentait encore. Amîn se demandait pour qui travaillaient ces hommes qui leur avaient tiré dessus. Et l’homme mort, qui était-il ? Que faisait-il avec tous ces documents ? Pourquoi l'avait-on tué ? Etait-ce vraiment pour les documents ou l'argent ? Peut-être même les deux… Plus encore, la valise remplie de billets qu’ils transportaient avec eux n’atténuait en rien leur stress. Ils avaient préféré la prendre avec eux, ainsi s’ils devaient quitter la ville pour quelque raison, ils n’auraient pas à retourner à Montréal pour en avoir les moyens.

C’est ainsi qu’ils arrivèrent à Harrisburg, toujours aussi fatigués n’ayant pas trouvé le sommeil. Ils se dirigèrent vers les coffres-forts payants et y déposèrent la mallette avec le reste de l’argent. Après s’être assuré que personne ne les avaient observés ils quittèrent la gare qui était de toute façon déserte à cette heure de la nuit. Il était plus de minuit et décidèrent de se trouver un petit hôtel pour y passer la nuit avant de rechercher la possible aide qu’ils étaient venus trouver.

Le lendemain après-midi, après une matinée de repos et alors que Noé et Angie avaient prétexté se renseigner sur le prix des billets vers l’Europe, Amîn, lui, passait de rues en rues afin de retrouver la maison de son ami. Il devinait qu’ils avaient surtout préféré le laisser seul avec ses souvenirs. Retrouver cette connaissance de famille ne lui était en effet pas simple ; tous ses efforts déployés pour rompre le lien avec son enfance devaient être remis en question pour obtenir de l’aide. Il lui arrivait encore de repenser aux évènements qui l’avaient mené à sa situation d’orphelin mais pas au point d’avoir des remords. L’ambiance dans son foyer avait été si terrible à cause de l’addiction aux drogues de ses parents qu’il lui était difficile de regretter quoi que ce soit.

Travis, l’homme qu’il recherchait pour les aider, était un ami d’enfance de son père. Les raisons qui les ont menés à ne plus se revoir, Amîn n’en avait aucune idée, étant trop jeune à l’époque, bien qu’il se doutait de quoi il retournait. Il se souvenait surtout que Travis avait tenté de prendre sa garde à ses parents par la suite. Les quelques jours qu’il avait passé alors à Harrisburg lui semblaient être un film en couleur au milieu d’une vie en noir et blanc. Mais huit ans étaient passés depuis et il n’avait aucune idée de ce qu’était devenu Travis.

Ses états de service lui avaient permis d’acheter une maison assez aisée en cité. Il fut un temps où il se trouvait au poste de commandement scientifique de l'armée mais l’investissement professionnel demandé eut raison de ce poste et il retourna vers de simples laboratoires militaires, préférant une meilleure qualité de vie privée que professionnelle.

Cela faisait trois heures qu’Amîn sillonnait dans la ville, interrogeant les passants, feuilletant les annuaires… tentant de se rappeler dans quelle partie de la ville habitait Travis. Il commençait à désespérer au moment où il reconnut enfin la maison. Il y était venu alors qu'il n'avait que huit ans et maintenant il se souvenait : oui, c'était bien cette grande maison avec son garage et sa véranda, la haie de thuyas qui bordait le côté de la route et la boîte aux lettres bleue. La plupart des maisons alentour partageaient quelques unes de ces caractéristiques, mais l’ensemble correspondait exactement aux souvenirs d’Amîn.

Il s'arrêta un instant, ne sachant que faire. Maintenant qu'il l'avait retrouvé, il avait une certaine appréhension à revoir cet homme. Peut-être qu'il ne se souviendrait plus de lui, après tout ce n'était qu'un ami de son père… Il repensa alors aux brutes à leur recherche, il pensa à Noé et Angie qui comptaient sur lui, et se dit que de toute façon, ils n'avaient rien d'autre à faire.

La sonnette retentit dans la maison avec un étrange écho. À l'inverse de l'appartement de Donny, celle-ci semblait propre et entretenue de l'extérieur. Personne ne se trouvait dans la cité à cette heure. Il faisait plutôt frais, le soleil allait bientôt se coucher. Amîn jeta un œil à sa montre, il devait retrouver Noé et Angie d’ici une demi-heure. Et son ami qui ne répondait pas. Il tendit l’oreille mais aucun bruit ne venait de la maison, aucune lumière ne filtrait par les rideaux. Il se résolu à rejoindre ses amis, se promettant de repasser le soir, ou le lendemain, mais il reviendrait et verrait cet homme. Il n'y manquerait pas. Il s'éloigna en silence de la cité.

***

Les trois amis revinrent le soir même ensemble dans la cité vers la maison du scientifique. Amîn fut surpris de voir que maintenant, de la lumière filtrait de part des rideaux de la maison de son ami.

Il sonna à nouveau, son cœur battant la chamade. Les aboiements d'un chien les firent sursauter : il n'y en avait pas tout à l'heure. Il commença à reculer se demandant s'il ne s'était pas trompé de maison. Finalement, en cité elles se ressemblent toutes…

La porte s'ouvrit, découvrant un homme d'environ trente-cinq ans. La tête d'un chien apparaissait de temps en temps entre les jambes du gars. Amîn se rendit compte qu'en fait de fox ou de labrador comme il l'avait d'abord pensé, c'était un pitbull. Le temps de se ressaisir, il lui demanda s'il était bien là où il pensait être :

_ Oui, c'est bien ici, qui êtes-vous ? Demanda l'homme.

_ Amîn. Tu te rappelles de moi ? Enfin de mon père…

_ Amîn ?! Qu'est ce qui t'amène ici ? Je ne t'ai pas revu depuis…

Il se tu. Craignant avoir blessé Amîn en lui remémorant de mauvais souvenirs.

_ Excuse-moi.

_ Ce n'est rien. Dis-moi, on peut entrer ? On est dehors depuis le début de l'après-midi et c'est pas qu'il fait froid, mais presque, demanda-t-il.

_ Oui bien sûr…  N'aie pas peur de lui, fit il désignant le chien, il est mauvais quand il le faut, il s'appelle Sempras.

Il s'écarta pour laisser passer Amîn et fit signe à Noé et Angie de rentrer.

Amîn les lui présenta. Son ami, que l'on surnommait Tray, les invita à passer dans le salon tandis qu'il retenait Sempras de partir à la recherche de chats dehors.

_ Souhaitez-vous quelque chose à boire ? Chocolat, café, thé ?

Il s’éloigna dans la cuisine.

_ Trois cafés, confirma Noé, connaissant leurs habitudes.

_ Qu’as-tu fait depuis ton… départ ? Tu es toujours en maison d'accueil ? fit-il d'un ton qu'il voulait doux.

_ Non, répondit-il, j'ai rencontré Angie puis Noé, qui sont frère et sœur, et on en est parti. Depuis, on vit dans un squat', on essaie de gagner notre vie en faisant de petits boulots, on se débrouille. Mais on est libre et ça n’a pas de prix, ajouta-t-il en percevant le regard réprobateur de Tray.

_ Qu'est ce qui vous amène ici ?

Il revenait avec les cafés et s'assit face à Noé après avoir ranimé  le feu dans la cheminée.

_ C'est une longue histoire, fit Amîn. A vrai dire je ne savais pas quel accueil tu nous réserverais et j’avais déjà préparé une histoire bidon mais…

Il jeta un coup d’œil à ses amis qui acquiescèrent imperceptiblement et continua :

_ … je pense qu’on peut se confier à toi. Nous avons besoin de conseils.

_ Oh ! C'est sérieux à ce que je vois, fit Tray en souriant.

_ Bien plus que tu ne le penses… Il montra sa blessure à la jambe qui n’évoluait pas très bien. On en veut à nos vies. Mais tu n’es pas obligé de …

Tray était déjà parti en courant pour revenir avec une trousse à pharmacie, leur demandant d'expliquer ce qui c'était passé par-dessus son épaule. Pendant qu'il soignait la jambe d'Amîn, Noé et Angie lui racontèrent leur journée passée. De temps en temps, Tray faisait une grimace. Ce qui leur arrivait était étrange et dangereux à la fois.

_ Voilà. Noé a déchiffré quelques mots du dossier trouvé et nous sommes venus ici afin d’obtenir des conseils. On veut juste en finir et retrouver la paix, termina Angie.

Tray les regarda uns à uns. Ils étaient fatigués et avaient sûrement faim. Il leur proposa d'examiner les feuilles pendant qu'ils mangeraient.

Après ça, ils partirent se coucher sur un lit de fortune, composé d'un matelas et de couvertures, laissant Tray à ses recherches. Ils étaient crevés mais au chaud et en sécurité, ils se sentaient mieux qu'à Montréal, et la fatigue eut raison de leur tension.

Noé fut réveillé par le soleil filtrant entre les rideaux du grenier. Il se tourna et regarda tendrement sa sœur puis Amîn. Il valait mieux les laisser dormir. Il scruta sa montre : 11h15. Ils devaient être très fatigués. Même en tendant l'oreille, il n'entendit aucun bruit dans la maison, Tray semblait être parti. Il descendit l'escalier et le petit Pitt l'accueillit avec joie. Un mot sur la table leur demandait de ne pas s'inquiéter. Tray était parti au boulot.

Avec toutes ces émotions, il ne voyait même pas passer le temps et ne savait plus quel jour ils étaient. Il regarda à nouveau sa montre. Lundi. Il se fit chauffer un café et s'installa à table. Les fenêtres de la maison laissaient passer le soleil qui se reflétait sur le sol, donnant une douce atmosphère à la pièce.

A présent loin de Montréal, ils ne craignaient plus rien, mais Noé avait un étrange pressentiment. Il savait que cette histoire n'était pas terminée bien sûr, et redoutait quelle se finisse mal. Tout en réfléchissant, il inspectait la maison. La veille au soir ils n'avaient pas vraiment eut le temps de la découvrir. Il aperçut sur la table du salon les documents qu'ils avaient confiés à Tray. Apparemment il faisait assez confiance à son chien pour les laisser à portée de tout le monde.

Il les feuilleta lisant les annotations de leur hôte dans la marge. Elles parlaient du volume d'une machine, il pensa tout de suite aux Tokamaks, environ 4000m3. Noé sursauta. Le JET, premier prototype du Tokamak faisait 100m3, le second devait au maximum faire 2000m3 si ses souvenirs étaient bons. Il suivait les sujets scientifiques de près et était assez bien informé.

Etant petit on avait vite diagnostiqué chez lui une prédisposition intellectuelle du fait de son QI élevé. Malheureusement on lui avait souvent répété qu'il devrait partager le même budget que ses camarades d'accueil, et qu'il ne fallait pas qu'il vise la lune, qu'il ne faisait pas partie des enfants auxquels on donne une chance.

Pourtant, il savait très bien que si le plasma devait occuper un espace de deux mille mètres cube, c'est bien parce qu'au delà de cette dimension, il était très instable.  Pourquoi un volume si grand ? Il faudrait une énergie considérablement supérieure aux projets de départ pour alimenter le plasma et l'amener à l'ignition[1]. De plus, le plasma serait extrêmement dense et la réaction d'autant plus difficile à contenir.

Mais il n'était qu'un ado de dix-sept ans et les scientifiques avaient dû le prévoir. C'était bien des américains de toujours vouloir faire plus fort. A son sens, contrairement à l'Europe sa contrée natale qui avait un passé et beaucoup d'erreurs derrière elle lui permettant de ne pas faire les mêmes, l'Amérique, elle, n'en avait pas réellement et jouait avec le feu tout le temps.

Il leva la tête. Amîn et Angie descendaient enfin.

_ Alors ! Vous croyez vraiment que vous avez le droit de faire la grasse mat' ? demanda-t-il en blaguant.

Angie tenait Amîn part le bras. À froid, sa blessure lui faisait mal et l'empêchait de marcher. Amîn sourit en faisant une grimace.

_ Tu peux parler, on attendait notre petit dej' au lit !

_ Vous êtes renvoyé mon cher, renchérit Angie. Un domestique qui ne prend même pas soin de ses invités.

_ Vos cafés sont chauds, répondit Noé en riant

Il était agréable de rire après ce qu’ils avaient vécu. Il ne parla pas de ce qu'il pensait au sujet de la taille des tokamaks préférant laisser un peu de distance entre eux et les ennuis, De toute façon cela ne les intéresserait pas. Il partit se doucher pendant qu'Amîn et Angie mangeaient. Ceci fait, Angie défit le pansement d'Amîn, la plaie semblait mieux se porter suite aux soins prodigués par Travis la veille.

Au moment où Noé fut prêt, Tray revenait du travail, souriant et heureux qu'ils se fussent reposés et remis de leurs émotions. Le midi il leur apprit qu'il avait en partie découvert ce que voulaient dire tous ces papiers. Il leur parla d'une lignée des projets concernant Manhattan et surtout des Tokamaks. Comme Noé, il avait remarqué la grande ambition des USA quant à la taille des tores[2]. C'était, d'après les renseignements fournis, afin d'alimenter quelque chose sous le nom de Site B. Tout de suite, ils pensèrent à la Lune et à sa station d’extraction. Les hommes avaient effectivement commencé à coloniser la face visible de la Lune, en apprenant énormément sur leur histoire. Un gisement d’hydrogène à son pôle avait permis la création d’une base d’opérations : le site A.

Mais où se situerait le Site B ? Autre part dans le système solaire ? Mais ils n'atteignaient encore que difficilement la planète Mars, bien que les voyages dans l'espace soient devenus communs et que n'importe quel milliardaire pouvait y voyager en navette privée.

En effet la station internationale ORION avait été mise en orbite autour de la Terre où les pilotes de navettes se ravitaillaient. Une police de l'espace, la B.I.S.A (Brigade d'Intervention du Site A) avait elle aussi été fondée pour permettre aux citoyens de la Terre de connaître le vide sidéral sans danger. Beaucoup d'endroits restaient néanmoins limités à leur libre circulation de part des restrictions de sécurité ou technologiques. Le Site B serait-il un nouveau programme de station orbitale ?

_ De toute façon, ce ne sont que des projets qui n'aboutiront peut-être pas. Je pense que vous êtes simplement tombés sur un dossier en attente d'un accord, objecta Tray.

_ Et qu’en est-il du résultat des essais, est-ce concluant ? poussa tout de même Noé.

_ C’est difficile à dire. C’est une grille de résultats sans paramètres à comparer. D’ailleurs la page en question ne fait pas partie du rapport original, elle semble avoir été ajoutée.

_ Les documents n’ont pas de lien mais sont reliés ensemble ?

_ En effet, ça a l’air d’être la méthode qui a été utilisée pour sortir des informations.

Cette remarque intrigua Amîn :

_ Les informations auraient été volées ?

_ Quand je travaillais au poste de commandement scientifique, répondit Tray, nous avons eu affaire à des personnes mal intentionnées qui incluaient les informations volées dans des documents reliés sans rapport pour passer les postes de contrôles. Cela se jouait surtout sur le manque de vérification des personnes posant les scellés.

Noé réfléchit et relança :

_ En supposant que les documents liés au Tokamaks sont donc volés, il faudrait que la personne les volant ait accès à un haut niveau d’informations pour avoir le droit de sortir des papiers déjà secrets défense. Et si le rapport lié aux Tokamaks est classé plus haut d’un point de vue sécurité, cela veut dire qu’ils étaient vraiment très importants… on pourrait donc supposer que les tests de fusion nucléaire ont porté leurs fruits.

_ C’est donc cela qui t’intéresse le plus, avança Travis, non pas qui a volé les documents mais ce qu’ils impliquent vraiment sur les Tokamaks, termina-t-il tout sourire.

_ On dirait bien, fit Amîn circonspect.

Le repas du midi touchait à sa fin et Tray devait retourner travailler. Les trois amis eux, jugèrent moins risqué à présent de sortir dans l'après-midi pour se changer les idées. Ils choisirent de ne pas tenter le centre-ville mais plutôt de faire un tour dans la cité et pourquoi pas d’aller faire un tour dans les commerces de quartier alentours.

Ils profitèrent ainsi d’une belle journée d’automne, le visage réchauffé par le soleil bien que rafraichis par l’air sec et froid que le vent soufflait. Ils discutèrent de tout et de rien, évitant surtout les évènements de la veille. Quelque part ils eurent l’impression que rien ne s’était passé, à part Amîn qui sentait sa jambe l’élancer à nouveau.

Alors qu'ils passaient devant un kiosque, Amîn fut attiré par les gros titres et acheta un journal canadien. La première page étalait les détails d’une fusillade qui avait mal tourné, si tant est que cela puisse bien finir :

Deux hommes meurent dans la fusillade d'un restaurant chinois. Un des tueurs présumés meurt lui aussi dans l'explosion qui a soufflé sa maison. De source policière, aucun témoin ni autre victime pour le moment. Les inspecteurs avancent la thèse d'un trafic qui a dégénéré menant les personnes impliquées à s’entretuer. D'après l'agent spécial du FBI Sam Jennings, un homme s'en serait sortit avec l'objet de la tuerie. Ils ne savent toujours pas ce qu’ils recherchent mais le FBI semble déployer de grands moyens pour résoudre cette affaire. (Suite en page 3)

Sur la colonne de droite s'étalait une photo de l'agent Jennings évitant les journalistes. Au dessus, grand format, la maison détruite dans l’explosion dont Amîn et ses amis avaient été témoins. Il appela ses amis et leur lu l'article.

_ A présent, cette mallette est aussi recherchée par le FBI. Mais contrairement aux gars qui nous ont tiré dessus, ils ne savent pas que nous l'avons. Cela nous donne une longueur d'avance.

_ Une longueur d'avance sur quoi ? Et pourquoi ? coupa Angie. Tu ne penses pas que l'on devrait la leur remettre pour qu'ils arrêtent les frais ?

_ Pour qu'ils nous réclament l'argent ? Tu oublies aussi que ce sont des documents secrets sur lesquels on est tombés. Ils ne voudront pas simplement l'argent mais notre peau aussi, remarqua Amîn.

_ Mais nous ne sommes que des ados ! s'écria Angie.

_ Oui, mais surtout trois jeunes gens parmi plusieurs millions d'américains, et connaissant certains secrets d'état. Tu sais, pour eux, trois de plus ou de moins… rétorqua Amîn. Sinon ce seront les chinois qui nous rechercheront !

_ D’où ils arrivent ceux-là ? fit Angie en s’arrêtant de marcher.

_ Il est connu que les italiens font leur trafic dans les restaurants chinois, insinua Amîn avec force de sarcasmes. On parle de documents confidentiels défense, c’est donc une affaire d’espionnage !

Noé les poussa dans le dos, les incitants à se remettre en route.

_ Rentrons… et je pense plutôt qu'on devrait garder les papiers, objecta Noé, ils ne savent pas où ils sont et qui les a. On peut jouer là-dessus et leur demander quelque chose en échange.

_ Un peu foireux comme plan, fit remarquer Angie. Hier on voulait juste se débarrasser des documents et aujourd’hui vous cherchez à obtenir plus. Qu’est ce qui, depuis, a changé et vous fait penser que nous sommes en position de force ?!

_ Je suis sûr que ce dossier est plus important qu'il n'en a l'air. Si les projets sont terminés, pourquoi s'acharner à retrouver ces dossiers ? Quant aux Tokamaks, on ne les cache pas, une nation en possédant au moins un devrait s'en vanter à moins de chercher à déstabiliser les marchés. Non, je pense qu'il y a quelque chose qui a échappé à Tray, De toute façon il nous l'a dit lui même, il n'a pas pu tout déchiffrer. On doit en tirer parti. Imaginons que l'on menace de divulguer aux plus grandes nations du monde ces documents en échange d'autre chose.

_ Comme quoi ? De l'argent ? On en a déjà assez comme ça, répondit Angie, excédée.

_ Une immunité diplomatique, proposa Amîn.

_ Mais sur quelle planète êtes vous ?! Révéler le tout au monde, pour peu que cela intéresse vraiment quelqu’un… n’as-tu pas dit toi même Noé que des guerres avaient éclaté pour moins que ça ?

_ Là c’est toi qui surestime l’importance de notre découverte, railla Amîn.

_ Un vol ! Ton vol ! explosa Angie. Ce n’est pas une découverte, c’est de ta…

_ Arrêtez ! coupa Noé. Ca ne nous avance pas ! D’accord, la rançon est une mauvaise idée. Mais alors pourquoi ne pas mettre les documents dans une poste restante et proposer au FBI de les récupérer qu’on en finisse une bonne fois pour toutes ?

Sa proposition fit taire ses amis. Tous deux recherchaient les implications. Les documents hors de leur possession ils pourraient alors partir loin et profiter de leur pécule.

_ On prépare notre départ à l’avance, on fait en sorte que rien ne puisse remonter jusqu’à nous. Avant de partir on leur envoie l’adresse de la banque et le numéro du coffre.

_ Envoyons-leur les copies, proposa Amîn.

Angie et Noé se tournèrent, étonnés, vers lui qui reprit :

_ On leur prouve qu’on a les documents pour qu’ils obtiennent le mandat pour ouvrir le coffre, si besoin est, sans avoir à nous chercher. Ca nous laissera par la même occasion de la marge avant qu’ils ne les reçoivent.

_ A ce moment là on sera déjà en départ pour une lointaine destination, conclut Angie, que la perspective de voir la fin de ces tourments réjouissait.

_ Mais on ne leur demande rien d’autre, rien pour nous en tout cas. Pas de garantie ou immunité, rien qui ne nous force à les rencontrer, ajouta Noé. Discutons-en ce soir avec Tray histoire de valider le tout mais je suis certain qu’il verra ça comme la meilleure porte de sortie.

Amîn sourit, il savait que la destination que Noé et Angie avaient en tête était l’Europe.  Il se décida à ce moment de les suivre là-bas et voir ce qui adviendrait par la suite sur place.



[1]Température à partir de laquelle la combustion s'entretient d'elle-même, environ dix fois la chaleur du soleil dans ce cas.

[2]Lieu où se trouve confiné le plasma lors de la fusion.

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