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Vous marchez vers chez vous. Vous cheminez loin de tout. Vous errez, tel un spectre possédé, votre démarche mécanique laisse votre esprit vagabonder au gré des rues, des allées des pensées.

Vous pensez au monde, à la vie, à vous. Vous pensez à Elle.

Un pas, puis l’autre.

Un choc, puis l’autre.

Les bruits vous environnant endorment votre corps et libèrent votre esprit.

Un pas, puis l’autre.

Un choc, puis l’autre.

Vous pensez à Elle.

Le vent qui caresse votre peau sont ses doux cheveux de lin, le ronronnement étouffé des activités alentours sont ses murmures agréables.

Elle est tout pour vous, comme vous voudriez être entier à elle.

Vous l’avez rencontrée, il y a peu. Il y a peu, vous décédiez, vous descendiez avec joie les marches de l’enfer, pour peu que Lucifer prenne les formes de votre Dulcinée. Vous vendriez votre âme pour avoir cette dame, vous seriez à la rue pour une simple entrevue, vous courriez à la mort juste pour la voir encore. Cette fille, cette déesse, si seulement elle vous aimait... Et qu’en savez-vous ? Peut-être vous aime-t-elle. Vous n’en croyez mot. Mais vous espérez.

L’espoir fait vivre, dit-on, votre vie, vous la lui donneriez si elle le demandait, alors l’espoir aussi. Vous le lui consacrez.

Ah, si seulement elle vous aimait... Si elle vous rattrapait, en route vers chez vous... Si elle vous hélait, vous demandant de l’attendre...

Vous vous retournez. Personne, quel idiot vous faites...

Mais qui sait ?

Si, là, tout d’un coup, elle vous appelait. « Attend moi ! ». Vous l’attendriez avec plaisir. Elle vous rejoindrait en courant. Vous l’accueilleriez en sourire. Elle vous répondrait en souriant. Sourire contre sourire, quel serait votre plaisir de la guider jusqu’à chez vous, en ne sachant que dire, se taisant tout du long, mais l’observant en coin pendant tout le chemin. Ah que ce serait bon ! « Voilà, c’est ici. ». Vous lui ouvririez la porte, elle s’avancerait timidement. Elle s’émerveillerait sur le moindre objet, elle trouverait beau le plus petit bibelot. Vous la guideriez jusqu’à votre chambre. Elle s’extasierait sur votre arrangement, essaierait votre lit, s’y coucherait en riant.

Mais ça n’est pas crédible !

On s’en fiche... tant que c’est beau...

Vous prendriez place à côté d’elle, n’oseriez prendre la parole. Un long silence d’étoffe envahirait la chambre, un silence de velours résonnant si doucement qu’il trahirait l’amour.

Alors vous lui prendriez la main, vous vous sentiriez de trop, vous qui n’étiez plus rien... Elle se collerait à vous, comme un coussin tout doux...

Vous lui caresseriez les cheveux, votre main s’y perdrait, elle les a si jolis...

Sa gentille frimousse vous fait frissonner, ses grands yeux d’amadou, la douceur de son cou...

« Attend moi ! »

C’est elle.

Vous vous retournez...

Personne.

Nul autre que la foule, rien qui ne soit d’ordinaire sur votre itinéraire, sur votre long chemin. Que des sons quotidiens, d’éternels va-et-vient, des murmures au loin...

Vous avez mal entendu, votre espoir vous joue des tours. Vous entendiez un spectre, un esprit, un fantôme.

Ah, si tous les spectres étaient aussi jolis que celui-ci...

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