Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives
 

L’air est vicié autour de moi. Je jubile, je sens la présence d’une proie. L’Esprit de la Ruche m’ordonne de ne pas m’en occuper, mais elle est si loin, et cet être faible a l’air si appétissant. Je lis la terreur dans ses yeux déformés par l’effroi. Ma salive acide glisse le long de ma bouche sans lèvres et grésille quelques instants sur le sol. Je gratte la roche de mes pattes griffues. L’homme est armé, je sais que si je bondis, il utilisera un de ces bâtons qui crachent le feu. Ignore-t-il que ma carapace chitineuse peut facilement résister à ses coups ? Ignore-t-il que les longues griffes acérées au bout de mes bras peuvent le transpercer aussi facilement que si je fendais l’air ? Nul ne peut l’ignorer.

L’Esprit de la Ruche essaie de me contrôler, mais elle ne peut pas. Je suis trop loin, c’est trop tentant. Je ne tiens plus. Le Zoanthrope qui nous accompagnait s’est éloigné. Son odeur, l’odeur de la peur et de la nourriture. Je bondis sur lui. Mes griffes acérées lacèrent son torse alors qu’il tente vainement de se défendre. Mes dents tranchantes s’enfoncent profondément dans sa gorge, lui tranchant la carotide. Un sang chaud coule en abondance sur ma langue, me désaltère. C’est ma proie, je l’ai chassée, il me faut à présent la protéger des assauts des autres, attirés par l’odeur du sang.

Le vent m’apporte l’odeur des hommes, un important groupe se dirige sur nous. Leur boîtes qui crachent le feu sont avec eux. Ces boîtes sont solides et immangeables, elles ne représentent pour nous qu’un danger, un danger à éliminer au plus vite. Le sol tremble, derrière nous un immense Carnifex nous suit. Ces grandes brutes sont destructrices mais ne partagent pas. Aucun Tyranide ne partage ses proies. L’Esprit de la Ruche nous ordonne de lancer un assaut. Il est temps de se nourrir.

Quelle joie peuvent donc tirer ces êtres faibles à se défendre ? Quel intérêt ces choses mourantes ont-elles à s’opposer à nous ? Ils ne se nourrissent pas de nos corps. Ils feraient mieux de fuir, de se cacher. Mais non, ils restent plantés. Tentant de sauver leur misérable vie. Ils se battent, parfois l’un des nôtres tombe, mais à la fin, c’est toujours le même résultat : le sang baigne le sol, les corps jonchent les plaines. La fin de la bataille est le début du repas. Mais là, c’est différent. Cette fois, ils ont l’air plus solides, mieux entraînés. La chaleur qui se dégage de leurs membres est moins distincte, j’ai du mal à les repérer, à les percevoir. Je ne sens pas leur peur. C’est la première fois que nous allons nous battre contre des ennemis, non contre des proies.

Je me sens éloigné de la Ruche. Les cadavres de mes semblables freinent ma progression et m’empêchent de rejoindre l’Essaim, c’est la fuite ou la mort. Je déchiquette deux autres de ces guerriers engoncés dans des armures de fer et court dans les montagnes. Personne ne me poursuit, personne ne fait attention. Je sens des présences moins hostiles ici, je retrouve mon sentiment de puissance. Ils ont caché des proies, il me suffit de les débusquer. J’interroge l’Esprit de la Ruche, mais rien ne me répond. Il n’y a pas de synapse ici. Mon prince est trop éloigné. Mes pas laissent dans la poussière des traces étranges, je saigne, je perds mon sang. Comment cela est-ce possible ? Leurs faibles défenses ont-elles réussi à pénétrer ma cuirasse ? De rage, je griffe la paroi qui émet alors un crissement aigu.

J’entends quelques cris. Mes sens sont alertés, mon instinct me hurle de courir vers ce bruit. Je débouche dans une vaste salle, où effrayés par ma présence, se tassent des centaines d’animaux savoureux. Je bondis, mes griffes s’enfoncent profondément dans la chair, je laboure, je déchire, je broie, je me nourris. Le sang se répand sur le sol de la grotte, se mêle à la poussière. Le chœur des hurlements de douleur et de terreur se mêle au râle d’agonie de mes victimes. La peur viscérale que j’inspire, mes dents, mes griffes, mon poison, les ruisseaux de sang qui s’écoulent de ma mâchoire, tous ces éléments qui contribuent à faire de moi ce que je suis : Un prédateur.

Oui. Un prédateur. Le sang qui coule devant mes yeux obscurcit ma vue. La rage m’embrouille l’esprit. Frapper. Mordre. Dévorer. Voilà ce que me dicte mon intellect. Je n’entends plus rien. Les cadavres de mes proies tombent comme les gouttes d’eau sur un rocher. Ma salive corrosive gicle dans leurs yeux, sur leur peau, irrémédiablement brûlée et mutilée. Le temps s’écoule lentement. Les instants s’étirent. Enfin je m’arrête. Epuisé. Par terre, c’est un amas de chairs, de viscères. Un lac de sang, une rivière de corps, un torrent de victimes. Essoufflé, je regarde le carnage. L’Azote remplit mes poumons à un rythme régulier. Je n’ai plus faim pour l’instant. Je reviendrai avec le reste de la horde.

 

Après un court repos, je me remets en marche. Ma blessure est guérie, nos incubateurs nous confèrent une capacité de régénération incroyable. Il est temps de rejoindre ma ruche. Mon estomac gronde et toute cette chair qui commence à se putréfier n’est plus fraîche. Il est temps de repartir en chasse...

 

Fin

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