file Franchement, je sais pas...

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il y a 15 ans 10 mois #14390 par Vuld Edone
Franchement, je sais pas... a été créé par Vuld Edone
... ce que c'est.
L'idée du texte m'est venue ce matin.
Alors pourquoi est-ce que je vous en fais part ? D'abord parce que je ne pouvais pas mettre ce texte dans une MIse à Jour sans être sûr de le continuer, donc je veux d'abord voir votre réaction. Ensuite, je dirais pour faire plaisir à Krycek que j'ai un problème de fond. Mes histoires n'ont pas d'histoire, du moins pas d'histoire accessible au lecteur.
Alors, tout comme j'écris le banquet pour m'assurer que je sais encore écrire, j'ai voulu écrire une histoire pour m'assurer que je pouvais encore inventer des histoires, au moins accessibles au commun des mortels. Disons que pour une fois je voulais une intrigue simple.

Je vous propose donc de découvrir ce texte, censé être le premier chapitre d'une saga, et me dire ce que vous en pensez. Inutile d'analyser, je veux juste savoir si vous avez été intéressé par l'histoire.
Oh. Pour ceux qui aiment lire entre les lignes, il y a une surprise de taille dans le texte. Une sorte d'easter egg, que je vous laisse découvrir. Les plus perspicaces trouveront tout de suite.

Ah, pour l'anecdote, si vous vous demandez quel est le titre du texte, eh bien... franchement, je sais pas...

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Les premiers cubes commencèrent à se détacher de l’unité centrale. Ils sifflaient doucement, bord contre bord, jusqu’à se détacher totalement de la surface. Alors les feux du soleil frappaient le métal, et les cubes étincelaient à leurs arêtes. Les uns s’élevèrent, les autres descendirent, et les cubes des différents étages se croisèrent, pour s’insérer ensuite dans les espaces laissés libres par les précédents modules.
L’unité centrale retourna au calme. Sa surface redevint lisse, parfaitement uniforme. Le soleil n’éclairait qu’un côté du gigantesque parallélépipède rectangle, dont les sommets fouettaient l’air à plus d’un kilomètre de la surface terrestre. Mais la lumière encore ne couvrait qu’une partie du côté. Clair ou foncé, le gris du métal restait le même, au premier ciel. L’unité centrale disparaissait entre les gigantesques tours d’énergie, les dépôts et les usines, dont les sommets à angle droit perçaient presque jusqu’au quatrième ciel, de vingt-deux à vingt-cinq kilomètres.
Ainsi s’élevaient les tours de métal, toutes lisses, toutes rectangulaires, sur un carré de deux cents kilomètres. En suspension au-dessus de l’unité centrale se trouvait le centre de traitement, qui coordonnait la construction du nouveau centre d’exploitation. A chaque minute des raffineries sortaient de nouveaux modules, que d’autres modules portaient jusqu’aux sites de construction, pour former une nouvelle tour. Alors, peu à peu, les espaces entre les tours disparaissaient, comme disparaissait le passage inutile des rectangulaires transporteurs de minerai.
L’unité centrale existait depuis un an et quatre mois. Douze mille tours soutenaient son calcul, ajoutées au fil du temps. Depuis un an, à chaque période de dix heures, les modules de l’unité centrale échangeaient les données aux différents étages. Au départ, les transferts internes suffisaient, mais après quatre mois et douze périodes, l’unité avait requis trop de données pour le calcul, et le centre avait commencé l’attribution de nouvelles tours à l’application de recherche.
Cette fois, quatre mille et quatre cents cubes avaient été déplacés, depuis quatorze mille périodes. L’activité avait ralenti, depuis que le cent millionième transfert avait été effectué. Seulement l’unité centrale seule ne remplissait pas tous les transferts. Au douzième mois de traitement, dix mille tours accomplissaient pour elle la grande majorité des transferts. L’unité occasionnait en vérité plus de six cents soixante milliards de transferts. Le transfert interne, en continu, occasionnait une puissance dix-huit de données. Le transfert externe atteignait la puissance quarante-quatre.
Il existait des millions des ces unités de recherche, sur toutes les surfaces aménagées par le centre. Cette unité-là ne disposait pas de la plus grande puissance de calcul.

Au terme de cette période, après quatorze mois de calcul, l’unité centrale se trouva en état de rendre ses résultats. Elle répondit oui à la question du centre. Aussitôt le centre lança une nouvelle application, chargée de la programmation d’un enquêteur. Aussitôt les raffineries fournirent les lingots de métal, aussitôt les lingots dans les usines produisaient un nouveau module, où le programme bientôt chargé s’activait.
L’enquêteur s’activa au sein de l’usine, cube parmi les cubes d’une paroi contre laquelle sifflaient les transporteurs de minerai. Cette faille laissée libre s’achevait douze kilomètres plus bas, loin du stockage, où les modules techniques réparaient les systèmes endommagés. A cette distance, l’enquêteur ne pouvait percevoir du crépitement ni le son ni la lueur. Les modules stockés reposaient dans l’obscurité. Seuls les frottements provoquaient parfois une fugace étincelle.
Une période passa encore avant que le cube ne reçoive l’ordre d’acheminement jusqu’au centre. Il se détacha de la masse, comme l’avaient faits les modules de l’unité centrale. Les bords coulissèrent, jusqu’à se détacher totalement, et alors le cube effectua un imperceptible bond dans le vide, avant que sa propulsion ne contre la gravité. Il se maintint en l’air, au-dessus du vide. Un second module se plaça derrière, se colla à lui. Les deux cubes progressèrent alors à l’horizontale, l’un poussant l’autre, lentement d’abord, avant de gagner en vitesse, puis le silence tomba sur eux.
Au bout de la faille s’engageait un nouveau transporteur. Un million de cubes externes venaient remplir l’entrée, jusqu’à l’obstruer complètement. Alors les cubes semblèrent éclater, tous se séparant les uns des autres, et changer de direction, pour faire entrer le transporteur de minerai. Tout son avant éclata ainsi, chaque cube se propulsant en pluie de métal lourde qui s’abattait sur l’enquêteur.
Ils ne firent rien pour l’éviter. Le module qui le propulsait maintint sa course, l’enquêteur ne calcula pas seulement les masses autour de lui. Au centre de l’amas de cubes apparut la cargaison de minerai, des milliards et des milliards de lingots, tous rectangulaires, tous de la même couleur grise, rendus noirs par l’obscurité. Les lingots à leur tour s’avançaient dans la faille, alors que devant eux la coque du transporteur se recomposait.
En quelques instants, ils avaient traversé. Le sifflement occasionné au contact des surfaces se perdait derrière eux. Cent mille cubes défilaient autour d’eux, en jeu constant, pour les laisser passer. Pour une fois, un module avait la priorité sur les transporteurs. L’enquêteur n’enregistra pas cette information, tandis qu’à l’angle son module de propulsion ralentissait. De vagues sons stridents les rattrapèrent, alors qu’ils filaient de nouveau au travers du transporteur, le long des lingots de minerai.
Alors les deux modules accélérèrent encore, et l’obscurité elle-même s’effaça devant eux. Ils passaient dans les enchevêtrements de tours, dans un couloir immense dont ils ne calculaient pas les bords. L’instant d’après, l’enquêteur atteignait la sortie du complexe, là où entrait un vaste flot de lumière. Leur vitesse l’effaça aussi, quand ils surgirent, désormais à moins de cent mètres de la terre. Quelques tours encore les encadraient, mais elles s’éloignaient déjà derrière eux. Ils se retrouvèrent au-dessus du sol, une terre de roche vide, sur des milliers et des milliers de kilomètres.

Les deux modules perdirent en vitesse, à l’approche des puits du centre. De l’horizon surgit une tour, grise dans un ciel gris de nuages. La tour s’agrandit, s’élargit, puis apparurent les montagnes, puis les premières tours de métal cachèrent l’édifice du centre. Bientôt les tours amoindrirent leurs espaces, jusqu’à former un complexe, dans lequel entrèrent les deux modules. La propulsion perdait encore en vitesse. Autour d’eux la masse des cubes ne cessait pas de défiler, le long des parois verticales, en vastes circuits linéaires, à des vitesses qui les effaçaient presque.
Au premier complexe en succéda un second, puis un troisième, tandis qu’au-dessus les tours ne cessaient de gagner en hauteur, atteignant le troisième ciel, le quatrième, pour grimper plus haut encore. A ces altitudes, les modules techniques ne cessaient plus de réparer les structures, dont la simple masse s’anéantissait. Les tours grimpaient encore, jusqu’au sixième ciel, où elles flottaient pour la plupart, détachées les unes des autres, libres.
Le module de propulsion se détacha de l’enquêteur. Ce dernier continua sa course au sein des couloirs chargés de circulation. Les cubes défilaient autour, sifflaient contre sa surface, sans laisser de trace. Chaque cube transférait des données nouvelles, à hauteur de soixante ou soixante-six, plus haut encore pour les tours supérieures. L’enquêteur ne connaissait pas encore sa propre puissance, cube parmi les cubes, destiné à sa mission particulière qui décidait seule des ressources allouées.
Il atteignit le puits central. La circulation se fit plus faible, de plus en plus disparate, jusqu’à disparaître complètement. L’enquêteur se retrouva seul au milieu du couloir, dans le silence. Sa vitesse déclinait encore, face au frottement de l’air, dont le contact produisait le même sifflement que le métal. Les secondes s’écoulèrent, sans que plus rien ne se passe, puis un grondement sourd s’éleva des profondeurs.
L’enquêteur inactif ne pouvait pas calculer le nouveau son, pas plus que la nouvelle couleur. Devant lui s’ouvrait le puits, d’où surgissaient des arcs électriques qui couraient le long des parois, vibraient puis éclataient. Le puits central n’avait jamais reçu de modernisation. Les anciens générateurs à pistons y tournaient encore, mais loin, loin dans les profondeurs, au-dessous des surfaces parfaitement planes, aux angles droits, de la technologie nouvelle.
A peine entré dans le puits, le cube fut propulsé à la verticale. Sa vitesse inertielle s’anéantit instantanément. Il passa le second ciel en une fraction de seconde. Au quatrième, la pression seulement s’appliqua à sa surface, la chauffant à blanc, mais il atteignait déjà le sixième ciel, où le cube s’immobilisa. Les modules techniques l’entourèrent, se plaquèrent à lui pour réparer sa surface, tandis que le centre chargeait la totalité de son programme.

Il flottait alors dans un vaste espace, où les cubes collés les uns aux autres formaient des passerelles enchevêtrées. Les modules techniques se détachèrent, pour s’éloigner ensuite et disparaître dans les parois. Le programme à présent complet de l’enquêteur s’activa. Pour la première fois, il analysa son environnement, calcula les distances, la couleur, le silence. Cette poignée de données s’enregistra dans sa mémoire, pour former la première entrée de son journal de bord.
Alors le centre entra en communication directe avec lui. L’interface de l’enquêteur commença son œuvre, décodant la masse d’informations en données traitables, puis inférant de ces données une signification, puis de la signification, traiter le sens. Le programme traduisit les données en son, au fur et à mesure les analysait.
« Le centre a noté une anomalie spatiale. Le centre a ordonné le traitement de cette anomalie. Le centre a conclu au ralentissement de la force centripète. Le centre a ordonné le calcul du ralentissement. Le centre a conclu un arrêt dans quarante milliards d’années. Enquêteur, se présenter au quai pour ressources. Enquêteur, aller à trois huit dix-huit quinze quatorze neuf dix-sept vingt-et-un cinq et dix-neuf. Enquêteur, comment annuler le ralentissement ? »
« Compris centre. Quelle est l’anomalie spatiale ? »
« Donnée inutile. » - « Quelles conséquences au ralentissement ? » - « Destruction. » - « Compris centre. Qu’y a-t-il en trois huit dix-huit quinze quatorze neuf dix-sept vingt-et-un cinq et dix-neuf ? »
« Donnée inutile. Enquêteur, informer unité chimique de la progression. »
« Compris centre. Pourquoi l’unité chimique ? »
« Donnée inutile. »
L’enquêteur présentait tout système nominal. Il avait pour fonction principale de poser des questions. L’enquêteur avait été programmé pour trouver la réponse à tout prix, aussi seuls les inhibiteurs de programmation du centre pouvaient-ils l’arrêter une fois la question posée. Il n’avait pas pu traduire ces inhibiteurs, mon son système les avait parfaitement compris. L’enquêteur activa sa propulsion, en direction des quais.

Une seule question comptait désormais. L’enquêteur la répétait, dans son programme de raisonnement, sous-programme du module logico rhétorique intégré à son système. Il reprenait toujours la même entrée, sans pouvoir y apporter de réponse, à défaut de données nouvelles. « Comment annuler le ralentissement ? » L’enquêteur ne disposait que d’une seule information pour y répondre : « Destruction. »
Seulement son programme pouvait traiter bien plus de questions que celle-ci, aussi s’interrogea-t-il rapidement sur ses fonctions et son environnement. Les questions submergèrent son programme. Lentement, l’enquêteur assimilait des données, toujours plus de données, qui ne lui servaient pas encore.
Il approchait des quais, au sixième ciel, quand l’unité chimique le contacta. Automatiquement l’enquêteur lui attribua une autre voix, puis commença à traduire la communication.
« Enquêteur, une fois mission accomplie, transférer la réponse à unité chimique, effacer toutes données de la mémoire. »
« Compris unité chimique. Pourquoi effacer les données ? » - « Donnée inutile. » - « Pas compris unité chimique. Pourquoi effacer les données ? » - « Donnée inutile. Enquêteur, procéder mission. » - « Pas compris unité chimique. Pourquoi effacer les données ? »
Un silence suivit, durant lequel de nouvelles questions apparurent à l’enquêteur. Il progressait néanmoins, jusqu’à atteindre les quais, tours à l’horizontale rattachés aux tours, autour desquelles fourmillaient les modules techniques. L’enquêteur n’alla pas plus loin. Il venait de se demander si son cube disposait de la propulsion nécessaire pour le transporter jusqu’aux quais : le programme avait répondu non.
Cependant les quais le prenaient en charge. Il reçut l’ordre de stocker le cube dans la paroi. L’enquêteur aussitôt se coulissa parmi les espaces laissés libres, d’où entraient et sortaient d’autres modules. Alors les quais commencèrent le transfert de ses données vers les cubes spatiaux. Lorsque l’enquêteur s’éveilla, à sa première question il obtint pour réponse une localisation dans un module de propulsion. Les arêtes de ce cube comptaient cent mètres de longueur, pour une masse de mille tonnes, concentrée sur les parois épaisses de cinq mètres. A l’intérieur le vide cachait l’activité des systèmes.
Alors seulement l’unité chimique répondit :
« Enquêteur, effacer données pour faciliter révision systèmes. »
« Compris unité chimique. »
Ce fut au tour du quai de le contacter. En même temps, les verrous de sécurité se désactivaient :
« Le quai a préparé quarante-quatre modules. Le quai a préparé dix modules de recherche, dix modules de défense, dix modules de science, dix modules de technique et quatre modules de propulsion. Enquêteur, utiliser les modules pour mission. Le quai a copié l’enquêteur dans les quatre modules de propulsion. »
« Compris quai. A quoi servent les différents modules ? » - « Répéter enquêteur. » - « A quoi sert module recherche ? » - « Exploration, observation. » - « Module science ? » - « Analyse, traitement. » - « Module technique ? » - « Construction, réparation, manipulation. » - « Module pilotage ? »
« Pilotage, sauvegarde. »
L’enquêteur ne posa pas plus de questions. Il lança le programme de pilotage, qui se propagea de module en module pour les détacher tous du quai. Aussitôt la gravité les attira vers le bas, et chaque module sembla s’enflammer. L’enquêteur analysa longuement la couleur des flammes, tandis que les vastes cubes se stabilisaient. Il leur fit former un rectangle de trois sur quatre, dans lequel les différents modules se confondirent. Leurs surfaces glissèrent les unes contre les autres, jusqu’à faire disparaître tout espace.

Une seconde encore, le vaisseau resta suspendu en altitude, parmi les quais du sixième ciel. L’enquêteur demanda au pilotage où se trouvait la destination. Le pilotage répondit par les mêmes coordonnées, jusqu’à ce que l’enquêteur lui donne un repère de calcul.
« Par rapport au centre de la galaxie, où est-ce ? »
« Trente-six degrés point cent soixante-trois, à trois milliards de milliards d’années lumières. »
L’enquêteur demanda la durée du voyage, obtint un million d’années. Sa première question avait évolué en « que signifie le ralentissement ? » Elle se retrouva secondaire, face à la nouvelle question que l’enquêteur se posait : « Comment atteindre la destination ? »
Il ordonna néanmoins au vaisseau de partir. Le soleil disparaissait derrière le centre, ce qui plongea les quais dans l’ombre. Le vaisseau glissa lourdement au-dessus des tours, pour accélérer encore, puis filer en haute altitude, en lente courbe de progression pour atteindre l’espace. Sa surface s’enflamma. Il devint une comète à la longue traîne, rouge vive dans le ciel, visible même les complexes les plus distants, même depuis le premier ciel, depuis l’unité centrale de recherche, que les modules techniques démontaient, maintenant qu’elle avait achevé sa mission.

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Alors ? Votre avis ?

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il y a 15 ans 10 mois #14391 par Leste-Plume
Réponse de Leste-Plume sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
c'est ce que tu appelles une œuvre accessible au commun des mortels? :lol:

ta question était de savoir si ça pouvait intéresser. En ce qui me concerne et à ce premier stade ma curiosité est fortement titillée. Mais attention si tu as construit toute une saga ayant pour intervenants principaux des petits cubes métalliques tu risques d'avoir du mal à fidéliser un lectorat (problème d'identification sans doute)

donc oui je serais intéressé de voir à quoi va ressembler l'enquête de l'enquêteur.

sinon chapeau! ta description de cette intelligence artificielle, cette "matrice" vivante qui s'auto-développe est plutôt bien fichue.

un mot qui m'a un peu dérangé dans les réponses de l'enquêteur c'est "compris". je ne sais pas pourquoi mais ça sonne un peu "humain" comme réponse, en fait le module se contente d'enregistrer l'info ; y a pas vraiment de processus de compréhension derrière. enfin je me trompe peut-être.

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il y a 15 ans 10 mois #14392 par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
Je peux répondre sur "compris". Les modules qui forment le vaisseau de l'enquêteur sont, respectivement, la Science, la Défense, la Recherche et la Technique. Maintenant que j'y pense, je n'ai pas dû les mettre dans le bon ordre dans le texte.
Le pilotage ne compte pas, puisque le P correspond à "pragmatique", "pertinence", "principe" et "par défaut". Or le principe par défaut appartient à la théorie de la SDRT, théorie de communication qui tente de comprendre le fonctionnement du langage humain. C'est exactement le programme qu'utilise l'enquêteur pour parler.
Un principe de la communication, qui lui n'appartient pas à la SDRT mais à la théorie de pertinence, est qu'on communique un contenu et qu'on communique qu'on communique un contenu : le méta-discursif "je te dis que...". De même, le locutaire confirme qu'il a compris l'information, et c'est pourquoi l'enquêteur dit "compris". Il obéit aux lois les plus fondamentales de la communication.

Il en aura besoin puisque, pour répondre à une autre de tes remarques, l'enquêteur rencontrera vite l'espèce humaine. J'aimerais encore faire courir la présence des robots sur un chapitre, peut-être deux, mais très vite l'enquêteur est censé être tout seul, puis rejoindre un groupe d'aventuriers humains, dans le plus traditionnel "donjons-dragons".

Et c'est pour cela que je trouve ce texte accessible au commun... c'est l'histoire de "x qui doit sauver le monde". Je n'avais plus écrit de textes de ce genre depuis deux ans, mais c'est littéralement "fils, moi ton père qui suis mourant te remets mes armes, fais confiance à mon ami de toujours qui ricane dans l'ombre et va sauver la princesse dans un autre château". Ce texte tombe vraiment dans le RPG "je pille j'optimise je détruis je passe une nuit à l'auberge et ça repart."
Alors oui. C'est ce que j'appelle accessible.

Mais détrompez-moi.

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il y a 15 ans 10 mois #14393 par Krycek
Réponse de Krycek sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
OUI ça plaît !

Au début je ne comprenais pas pourquoi une civilisation « robot-informatique » aurait eu un intérêt quelconque à se diviser en modules et pourquoi les communications nécessitaient à un module de se déplacer pour avoir accès à l’information, au vu de leurs avancées technologiques.
Par la suite, au vu de l’évident voyage à faire pour se rendre aux coordonnées, j’ai un peu passé dessus.

Je réfléchis alors que j’écris : un voyage de plusieurs millions d’années avec un module doué de rhétorique aura forcément un développement différent qu’une civilisation avec centrale de calcul. Intéressant donc de voir ce qu’il en adviendra.

Mais je crois qu’au-delà du problème d’identification mentionné par Leste-Plume, il y a là quelque chose qu’il vaut le coup de lire de ta part : l’intégration du questionnement d’une intelligence artificielle à propos de sa propre existence (on lui cache des informations, certains modules ont accès à l’information, pas lui, il est donc différent, il est différent des autres, etc…, il EST). Et si c’est une des choses que tu comptes aborder, alors ça me tente.
J’ai ressenti aussi un peu de sarcasme à la lecture ce qui laisse peut-être présager un point de vue différent dans la SF.

Feurnard écrit: Pour une fois, un module avait la priorité sur les transporteurs. L’enquêteur n’enregistra pas cette information[...]

Bizarre cette première phrase, depuis le début tu décris les faits. Ici tu donnes un point de vue qui fait passer le texte dans un style différent. Soit de l’omniscience dédiée au lecteur, un point de vue auteur donc, soit un point de vue de quelque observateur… ce qui me fait penser que la première idée a plus de probabilité.

Les descriptions du début sont aussi quelques peu difficiles à appréhendé du fait du manque de distinction des « protagonistes ». Bien sûr ceci est lié au thème du texte, mais peut-être qu’une différence de couleur (matière de base utilisée pour certains modules, vieillissement, éclairage dû à la fusion) pourrait aider à mieux distinguer ce qui se passe. Notamment au moment où l’enquêteur percute les modules qui lui obstruent le chemin ?

Qu’est ce qui t’a mené à écrire de la SF ? (si je puis me permettre d’y classer ton texte, qui ne semble pas être autobiographique… quoiqu’avec toi on ne sait jamais). Ce texte m’a rappelé Gandahar, un animé français des années 80 au sujet d’une évolution de l’humain vers la machine. Très bon animé d’ailleurs…

Quoiqu’il en soit, c’est de la SF, cela vient de toi (alors qu’on a plus l’habitude de ta part de textes… hem… l’adjectif n’existe pas encore, on va le créer) donc ça m’intéresse. Allez, soyons fou (tu n’as pas encore donné ta critique et ton explication du texte alors…) ça me plaît.

(Raaah il faut que je me remette sur Pandy).

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il y a 15 ans 10 mois #14394 par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
C'est de la SF.
Mais répondons dans l'ordre.

En commençant par dire que si ça plait... je vais réécrire, voir ce que ça donne et envisager la suite.
Continuons...

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Au début je ne comprenais pas pourquoi une civilisation « robot-informatique » aurait eu un intérêt quelconque à se diviser en modules et pourquoi les communications nécessitaient à un module de se déplacer pour avoir accès à l’information, au vu de leurs avancées technologiques.

Je ne suis pas sûr qu'il me faudrait expliquer les modules dans le texte. Ce serait un peu long.
En économie, pour calculer l'efficacité maximale d'une entreprise, nous disposons de courbes qui prennent en compte demande et offre, et dans l'offre les charges fixes et variables. Ces courbes donnent des points de production maximaux, après lesquels se trouvent une dépression qui le plus souvent tombe dans la perte avant de remonter jusqu'à un nouveau point de production maximale.
En d'autres termes, il est inutile d'avoir quatre hangars pour entreposer ses produits si l'un d'eux n'est jamais utilisé : il coûte à l'entreprise sans rien rapporter.
C'est dans le même concept qu'ont été inventés les cubes. Le cube est au point maximal de production, c'est-à-dire qu'il ne peut pas fournir plus par rapport à son coût. C'est aussi pour cela qu'il existe des cubes de différentes tailles, puisque ceux du vaisseau sont énormes. Ils représentent un autre point de production maximale. C'est un principe d'économie que je maîtrise mal mais que j'ai voulu appliquer dans une société robotique entièrement fondée sur l'efficacité.

Les communications maintenant. Je n'ai aucune idée ni des moyens actuels de transmission ni de leur capacité, mais dans le texte, je crois parler d'une puissance dix-huit de transfert. Cela signifie une fois dix puissance dix-huit octets. Je crois que cela correspond à un milliard de milliards d'octects. Je n'arrive même pas à exprimer ce qu'est une fois dix puissance quarante-quatre. Et je l'ai dit, il y a des taux plus élevés, j'ai pensé à une fois dix puissance cent, qui n'est plus de l'abstraction, mais presque de l'absurde.
Imagine que tu veuilles transférer un fichier de cinq gigaoctets d'un ordinateur à l'autre, et que tu n'aies pour cela que la connection par internet ou la gravure sur un disque. Le graveur peut l'enregistrer en, disons, je n'y connais rien, une minute, puis disons une minute encore pour passer le disque sur l'autre ordinateur et le copier sur le disque dur. Dans le même temps, ta connection internet est catastrophique et mettrait plus de trente minutes à transférer le dossier.
La masse de données transférées est telle que le transfert interne sature, au point qu'il est plus rapide de déplacer le module lui-même que d'attendre qu'il passe par les circuits. Le transfert externe est là pour résoudre un embouteillage informatique.

Pour l'enquêteur qui doit aller jusqu'au centre, le problème est légèrement différent. Il s'agit d'abord d'une tradition, "héros aller voir le roi qui lui donne la quête, méchant conseiller dans l'ombre".
Ensuite, l'enquêteur doit disposer d'une puissance totalement disproportionnée, à côté de laquelle la puissance cent est risible. Seul le centre disposait d'une puissance suffisante pour achever le transfert du programme, parce que le centre disposait encore des générateurs à pistons.
Le dernier problème rencontré vient de l'idée "grain de sable". Si le programme avait été produit directement dans l'usine, outre de prendre cent ans à être écrit, il aurait pu être transféré à d'autres modules, accidentellement, ou laisser une trace dans le module central de l'usine. S'il avait été téléchargé directement depuis le centre, sur plusieurs milliers de kilomètres, alors non seulement sur la distance le téléchargement aurait été rallongé en temps et des informations auraient pu se perdre ou se corrompre, mais en plus tous les modules de transmission auraient pu en garder des traces.
Or il s'agit d'un module logico-rhétorique, pour ainsi dire, la conscience. Il serait catastrophique dans une telle société qu'un module se demande soudain "pourquoi".

Pour tout ce qui est au-dessus, donc, si cela pose problème, c'est que j'aurais dû l'écrire dans le texte, au moins trouver une manière de le faire comprendre. Personnellement, je ne m'en souciais pas.
Poursuivons.

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Mais je crois qu’au-delà du problème d’identification mentionné par Leste-Plume, il y a là quelque chose qu’il vaut le coup de lire de ta part : l’intégration du questionnement d’une intelligence artificielle à propos de sa propre existence (on lui cache des informations, certains modules ont accès à l’information, pas lui, il est donc différent, il est différent des autres, etc…, il EST). Et si c’est une des choses que tu comptes aborder, alors ça me tente.

NON.

Je sais qu'on adore prendre les machines pour des imbéciles et que les robots ne sont que des pâles copies d'humains avec x facteurs différents qui permettent de tester notre logique sur eux, en d'autres termes, qu'on plaque des raisonnements humains dans de corps de machines, mais les machines ont vraiment mieux à faire que se perdre en réflexions ontologiques, surtout dans une société régie par l'efficacité.
J'aimerais donner une réponse plus linguistique. L'enquêteur, à la rencontre de l'homme, va employer abondamment et sans hésitation les déictiques, "je", "tu", etc... On ne peut pas employer les déictiques sans conscience qu'on existe. Il était nécessaire, pour que l'enquêteur puisse communiquer, qu'il ait conscience de son existence. J'ajoute que pour que l'enquêteur puisse comprendre les emplois verbaux, qui sont fondamentaux en communication, il est forcé de pouvoir se projeter dans l'autre, et donc, a une conscience plus qu'aiguë des différences.
Pour pouvoir parler, l'enquêteur a la conscience d'un adulte. C'est un peu comme si soudain tu remettais en question ton existence, là, maintenant, en lisant ce message. Non. L'enquêteur sait qu'il existe et ça ne lui change rien. Il n'en sera pas plus humain pour autant.

Et je crois que ce choix répond à la prochaine remarque, à savoir le sarcasme. Sans être parfaitement sûr de ce qu'est un sarcasme, je critique pas mal de lieux communs en SF, à commencer par "le robot est un esclave abruti qui doit se révéler à lui-même et libérer ses chaînes mes frères chantez avec moi"... le robot est un robot.

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Les détails maintenant :

Bizarre cette première phrase, depuis le début tu décris les faits. Ici tu donnes un point de vue qui fait passer le texte dans un style différent. Soit de l’omniscience dédiée au lecteur, un point de vue auteur donc, soit un point de vue de quelque observateur… ce qui me fait penser que la première idée a plus de probabilité.

Omniscience. Toujours dans la logique d'efficacité, il aurait été bien plus simple et moins coûteux de simplement ranger l'enquêteur et son acolyte de propulsion dans la paroi, de laisser passer le transporteur puis de continuer. Côté temps, ils ne sont pas à une heure près. Au lieu de cela, ils obligent à coordonner le mouvement de plusieurs dizaines, sinon centaines de milliers de cubes, une opération coûteuse et complexe.
Le "pour une fois" est ce qui pose problème (je ne décrirai pas en quoi). Il m'a semblé nécessaire de motiver le passage du transporteur, à savoir qu'un petit cube de moins d'un mètre de côté a la priorité sur un véhicule d'au bas mot huit cents mètres de hauteur. Il s'agissait de souligner que l'enquêteur a plus d'importance que tout ce que nous avions pu voir jusqu'alors dans le texte.
Au-delà, je teste dans ce texte l'omniscience, à savoir que jusqu'alors j'avais tendance à toujours me focaliser sur mon personnage, même en disant "il", en ne disant que ce qu'il pouvait voir. Ici, non, j'essaie vraiment de m'en dégager. Je suis toujours focalisé mais je veux en dire plus que ce que pourra jamais savoir l'enquêteur.

peut-être qu’une différence de couleur (matière de base utilisée pour certains modules, vieillissement, éclairage dû à la fusion) pourrait aider à mieux distinguer ce qui se passe. Notamment au moment où l’enquêteur percute les modules qui lui obstruent le chemin ?

Je suis parti sur l'idée qu'ils auraient tous exactement la même couleur, quoi qu'il advienne, et la même forme. J'aurais dû plutôt m'attacher à des descriptions géométriques, toujours carrées bien sûr, mais qui auraient pu décrire un peu mieux l'environnement. J'ai eu peur de tomber dans l'abondance de nombres et la lourdeur, mais s'il faut sauver les descriptions du début, c'est la meilleure piste que je trouve.

Qu’est ce qui t’a mené à écrire de la SF ?

La suggestion de lecture n'y est ab-so-lu-ment pour rien. Outre cela, je ne pouvais pas sérieusement parler de linguistique dans un univers médiéval. "Oy, Roger, t'ès entendu comment téi parle l'aute là ?" Ce n'est pas sérieux. Puis j'étais lassé de ne plus entendre les explosions, de ne plus voir les rayons déchirer l'espace, et des batailles de grande envergure prendre place. A côté d'une batterie de canons, même les dragons font un peu pâle figure.
Enfin, si j'avais écrit ailleurs qu'en SF, mes anciens thèmes m'auraient rattrapés, j'ai envie de dire, ironiquement, mes anciens démons. Je n'aurais pas pu m'empêcher de placer un renard là-dedans (d'ailleurs je sais qu'il y en aura un, je ne sais pas où mais je sais qu'il y en aura un) et le texte serait devenu totalement incompréhensible. Alors qu'en SF, avec des robots, des vaisseaux, des planètes et des trous noirs, je peux espérer m'exorciser des questions de justice et autres.
Oh, et bien sûr, j'ai fait ce choix comme un cri de désespoir face à l'absence totale de renouvellement de la part de Pandémonium. Cela va sans dire.

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il y a 15 ans 10 mois #14395 par Krycek
Réponse de Krycek sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
Loin de moins les idées banales sur les robots... ne t'en fais pas.

Moi ça me tente toujours... allez, la suite à présent !

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il y a 15 ans 10 mois #14396 par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
Trouve-moi un titre et je t'écris l'histoire.

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il y a 15 ans 10 mois #14397 par Krycek
Réponse de Krycek sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
L'histoire sans titre.

"Histoire" fait un peu gnian-gnian... Récit, Légende, Conte, Génèse... ou rapport aux ordinateurs Code, Algorithme.
(en opposition à l'histoire sans fin - s'il fallait le mentionner)

Voilà, ne cherche pas plus loin c'est LE titre qu'il te faut ! Allez, la suite maintenant !!!

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il y a 15 ans 10 mois #14400 par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
Aussitôt dit, aussitôt fait :

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Le silence spatial enveloppait planètes et satellites, ainsi que les constellations dans leurs longs cercles aplatis qui d’étoiles en étoiles tiraient des traits phantasmatiques parmi les traits de feu des comètes. Quatre systèmes stellaires s’épuisèrent ainsi, faibles points de lumière au sein de l’espace, qui s’évadèrent soudain de leur place pour fuir en arrière, tandis que passait sans les voir le vaisseau de l’enquêteur.
Il avait atteint sa vitesse de pointe, trop rapide pour la lumière mais pas assez pour ses appareils dont l’antimatière parcourait les épaisses plaques de métal. Les quarante-quatre cubes qui composaient le vaisseau de l’enquêteur, plaqués les uns contre les autres en un rectangle de quatre sur trois cents mètres, s’ils ne laissaient rien apercevoir de leur activité, au fond de leurs structures distribuaient des charges d’énergie par d’incessantes impulsions, qui submergeaient leurs systèmes de puissance.
Depuis son départ, l’enquêteur n’avait plus cessé de communiquer avec sa planète. Il envoyait son rapport, même vide de toute rencontre, de toute réponse, et à la requête des modules de science, requérait l’accès aux inestimables sources de savoir des puits d’archives. L’information dépassait alors même la vitesse de son vaisseau, et plutôt que de le rattraper, l’attendait au-devant tant la vitesse de distribution était grande sur ces distances. Il stockait depuis plusieurs périodes ces masses de données, sans avoir pu parcourir le premier millième de son voyage.
L’enquêteur n’avait qu’une question, qui surpassait même sa première mission : il devait répondre au phénomène de ralentissement observé par le centre, mais pour répondre à cette question, il lui fallait accéder à un point situé à plus d’un million d’années de distance. Ce calcul de l’espace en temps résumait son problème, tout comme il lui offrait déjà des réponses, qu’il enregistrait dans a mémoire morte, à défaut d’avoir les moyens de mettre en application.

Ainsi le vaisseau parcourait cette distance minime, si loin déjà de la planète de métal d’où, parti des quais, il partait chercher la réponse à la destruction de son monde. Le cinquième système stellaire n’arriverait que dans plusieurs heures, séparé du vaisseau, d’après la trajectoire de ce dernier, par une vaste ceinture de corps éclatés.
Invisibles dans les ténèbres de l’espace, sans les lueurs des astres pour les éclairer, ces corps plus grands que des planètes formaient une chaîne dans la galaxie, qui représentait pour les machines une série de sites d’exploitation minière, de même que les installations hautes extérieures de défense où les principales flottes modulaires maintenaient leur suprématie. Ainsi ces corps perdus dans l’espace formaient-ils une frontière.
L’unité centrale de défense la plus proche prit contact, sans communication. Elle fournit seulement des données spatiales, sans se soucier du statut de l’arrivant, puisque la ceinture disposait depuis longtemps de ces informations. Cette frontière n’était que la première, puisqu’il en existait une seconde, bien plus distante, presqu’aux frontières de la galaxie, où la vitesse des communications, par la distance, perdait sur la vitesse même des vaisseaux. L’information alors voyageait plus vite à bord de modules que par les pulsions de l’antimatière.
La ceinture des corps éclatés apparut dans son immensité à l’enquêteur. Elle ne fut d’abord qu’une ligne que ses capteurs, au-delà de la lumière, parvenaient à discerner. Cette ligne s’ouvrit violemment, en hauteur comme en profondeur, sur des distances qui dépassaient les cercles les plus lointains de gravité des étoiles. A son approche le vaisseau ralentit, pour suivre les routes ouvertes par les installations de recherche.
Des myriades de cubes gris, décolorés par l’espace, apparurent à mesure qu’il s’engageait dans la ceinture. Les installations se greffaient aux roches, en vastes ensembles tentaculaires, qui allongeaient ensuite des tours de taille gigantesque, à l’égale de satellites, que les masses alentours rendaient par leur taille aussi petites que des épingles. Les quarante-quatre cubes de l’enquêteur, quand il passa entre ces installations, disparurent entièrement dans la masse.
De véritables couloirs formés par les amas de modules s’ouvraient devant lui. Le vaisseau traversa des formations entières, formées de milliards et de milliards de modules, qui appartenaient tous à la quarantième flotte. Les innombrables modules, détachés, formaient des escadrilles à perte de vue, tandis que regroupés, ils bâtissaient des vaisseaux de défense, non, de guerre, des rectangles plus longs que les tours du quatrième ciel, mais négligeables face aux véritables forteresses mobiles, dont l’enquêteur longea l’une, pendant plusieurs minutes, plus vite que la lumière.
Six cents flottes modulaires défendaient la ceinture, en arrière-garde de la quatrième armada, qui gardait la bordure haute extérieure, par laquelle passait l’enquêteur. Aucune race vivante sur les cent millions de planètes qu’il allait longer désormais ne pouvait l’inquiéter seulement. Même s’il avait quitté la planète de métal, l’enquêteur suivait encore des cartes spatiales parfaitement connues, que les modules de pilotage n’avaient pas à traiter. Il agissait encore comme agissaient tous les modules dans les complexes aux alentours du centre.

Puis, alors qu’il avait enregistré plus de dix périodes pour la seule traversée de la ceinture, alors que celle-ci disparaissait de ses capteurs de proximité et que l’antimatière l’avait propulsé au-delà du cinquième système, alors qu’aucun module du quatrième armada ne l’enregistrait, l’enquêteur reçut un signal de détresse.
Deux secondes plus tard, la quatrième armada le recevait aussi, bien après la communication de l’enquêteur qui leur fournissait le moindre détail. L’émetteur employait une onde à réseau, trop lente mais qui, par son extension en sphère, avait facilité sa localisation. Le point d’émission se trouvait très précisément sur la trajectoire de l’enquêteur, à trois périodes de distance, en plein vide spatial.
Le centre contacta l’unité de défense, qui contacta l’enquêteur, qui contacta l’unité de défense, cette dernière rappelant le centre qui contactant l’enquêteur lui ordonna de contacter l’unité de défense. Les messages toutes les secondes, et au sein des secondes, se croisaient, se répétaient, se contredisaient pour tous et tous revenaient sur la même question, que posait sans cesse l’enquêteur, tantôt à l’un, tantôt à l’autre, de savoir s’il devait changer de trajectoire.
Les capteurs à distance des modules de recherche prirent de court ce vaste échange. Le vaisseau avait repéré les premières masses, sans encore pouvoir les identifier. L’enquêteur calcula alors, non seulement le temps pour lui de trouver une nouvelle trajectoire, mais aussi le temps infinitésimal qu’il perdrait à la seule manœuvre, pour son voyage de plus d’un million d’années. Il prit la décision de continuer.
Un message de l’unité chimique l’atteignit alors, lui ordonnant formellement de changer de cap. Il avait l’interdiction d’approcher le point d’émission, et devait s’en détourner pour laisser une flotte modulaire prendre en charge la situation. Le centre approuva. A sa suite, l’unité centrale de défense de la quatrième armada confirma une nouvelle trajectoire à l’enquêteur, avant même que ses modules de pilotage n’aient pu lui en donner une.
Mais alors qu’il engageait les premières manœuvres pour suivre cette nouvelle trajectoire, un nouvel ordre du centre le jeta dans la confusion la plus totale. Il avait désormais ordre non seulement de continuer sur son premier tracé, mais également d’enquêter sur le point d’émission.

Le centre n’eut pas à donner de justification pour que l’enquêteur lui obéisse aveuglément, mais il avait trouvé lui-même des raisons suffisantes pour suivre ce dernier ordre, en commençant par la transcription du message dont lui seul, équipé du module logico-rhétorique, était capable. Il se demandait aussi, et depuis le départ, comme la source avait pu apparaître là, en espace haut supérieur, sans que la quatrième armada ne puisse l’identifier ni même le repérer. L’enquêteur en avait conclu que le point d’émission avait voyagé d’ailleurs, trop vite pour être repéré, donc qu’il disposait peut-être d’un moyen de propulsion approprié à son voyage.
De toute manière, à présent, les capteurs de proximité à leur tour avaient repéré ce qui semblait être une flotte, un ensemble épars de vaisseaux aux formes complexes, surchargées d’angles et de coins, qui ne présentaient aux censeurs aucune activité énergétique, même vivante. Plus il s’approchait, et plus l’enquêteur pouvait repérer, identifier et classer de vaisseaux, tous différents, inexplicablement différents, des dizaines, des centaines, dont les tailles variaient de zéro zéro un à quatre kilomètres, tous identifiés comme des bâtiments de guerre par leurs tourelles.
Très vite, il n’identifia pas une mais deux flottes, dont les vaisseaux éparpillés sur plus d’un millier de kilomètres formaient deux courbes presque parallèles, dont les centres se rencontraient, s’entrechoquaient, se mêlaient presque. Plus de deux cents vaisseaux dérivaient ainsi, leur surface si complexe pulvérisée par les tirs, leurs coques ouvertes et leurs flancs grevés d’impacts. Certains vaisseaux n’existaient plus que par leurs débris.
Le vaisseau s’arrêta au centre de cet amas de carcasses. Alors les modules de recherche se détachèrent de l’ensemble, pour partir dans toutes les directions, parmi les vaisseaux, parmi les épaves, pour les explorer. L’enquêteur envoya ces données aux modules de science, qui traitèrent l’information, puis répondirent du mieux qu’ils purent à la question la plus simple : « Que s’était-il passé ? » Ils n’offrirent qu’un amas de données brutes, sur ce qu’avait pu être chaque vaisseau, sa fonction, son équipage, et les armes qui les avaient détruits.
Fort de ces informations, l’enquêteur les donna à traiter, le plus naturellement, aux modules de défense. Ces derniers, au travers de toutes leurs connaissances tactiques et opérationnelles, reconstruisirent fidèlement le déroulement de la bataille, du début jusqu’à la fin. Selon leurs résultats, si les pertes semblaient équitables, en vérité le combat s’était déroulé à un contre six mille. La flotte vaincue avait enregistré cent pour cent de pertes. A cela, sans y prêter d’attention, la défense ajouta que cette flotte, par trois fois, aurait pu battre en retraite.

Les modules de recherche voyageaient parmi les épaves, passant de l’une à l’autre pour en inspecter d’abord les propulseurs, les vastes réacteurs situés presque uniformément à l’arrière, qui employaient encore l’ancien principe de poussée. L’inspection des plus grands vaisseaux n’apportait pas plus de réponses. Non seulement les armatures ne correspondaient à aucune des cent millions de planètes, mais elles n’offraient dans leurs chambres aucune machine capable de propulser l’enquêteur plus vite qu’il n’allait lui-même.
A cet échec s’en ajouta un second, puisqu’il ne parvint à récupérer aucun journal de bord, informatique comme scriptural, malgré une recherche minutieuse. La bataille ne laissait pour toute trace que les épaves, et des nuées de cadavres identifiés dès le départ comme humains. Des deux côtés. L’enquêteur rappela les modules de recherche. Tandis que ces derniers revenaient, il tenta avec l’ensemble de ses ressources de trouver comment cette flotte avait pu arriver là si vite, sans être repérée.
Les modules revinrent, se raffermirent à la structure mais le vaisseau ne repartit pas. L’enquêteur resta immobile, silencieux parmi les débris, à la recherche de la réponse. Il laissa passer le temps, toujours traitant ce peu de données. Comme il ne parvenait à rien, l’enquêteur s’apprêtait à repartir, quand il voulut poser la question au premier concerné, l’unité centrale de défense.
Il posa la question telle qu’il se l’était formulée : « Comment ces flottes ont-elles pu arriver là sans avoir été repérées ? » L’unité centrale de défense de la quatrième armada, aussi innocemment qu’un enfant, rendit une réponse qui ne répondit pas, mais laissa l’enquêteur totalement muet :
« Ces flottes n’ont pas pu arriver. » L’unité centrale de défense de la quatrième armada continuait ainsi : « Ces flottes devaient donc être là avant. Calcul de toutes les trajectoires passées. D’après les archives, ce secteur n’a jamais été exploré. Les premières sondes ne sont pas archivées. Ces flottes sont ici depuis plus d’un million d’années. »
Aussi longtemps que l’enquêteur put tenter de contredire cette affirmation, il n’y parvint pas, mais arriva lui-même, avec ces nouvelles informations, aux mêmes conclusions. Son rapport à l’unité chimique confirma donc la position de la quatrième armada, avec la demande d’exploration de tous les secteurs encore non archivés. Sans attendre de réponse, l’enquêteur se remit en route.

Il laissa derrière lui ces deux flottes silencieuses, dont le combat aurait eu lieu aux premiers temps de la planète de métal, quand les premières sondes, avant que les archives ne soient fonctionnelles, partaient explorer l’immensité de la galaxie. Les modules de science prirent en compte cette information, l’enregistrèrent comme tant d’autres puis requirent de l’enquêteur des informations des archives, sur les planètes de l’époque.
Ces informations arrivèrent, en même temps que la réponse de l’unité chimique, sans intérêt. Aucun monde à l’époque n’avait seulement une espèce capable de produire ces bâtiments de guerre. Il avait fallu attendre leur méta-formation par les machines pour que la vie y apparaisse. Les peuples préexistants, les plus évolués, ne voyageaient pas au-delà du son. Ainsi ces flottes venaient bien de l’extérieur.
Une autre information, que ni les modules de science ni même les unités centrales sur la planète de métal n’avaient pris en compte, frappa le système de l’enquêteur, plus sûrement qu’aucun virus. Il s’arrêta de fonctionner, une fraction de seconde, redémarra aussitôt tant les inférences du calcul étaient grandes. Il trouva dans les archives plus de planètes carbonisées, mortes ou sur le point de l’être, et plus de supernovas qu’aucune galaxie jeune ne pouvait en admettre. Toute la frange haute supérieure de la galaxie semblait dévastée à l’époque, jusqu’à la ceinture.
L’enquêteur fit part de cette découverte à l’unité chimique. Cette dernière ne répondit rien. Déjà les capteurs à distance perdaient de vue cette flotte, et la trajectoire reparut interminable, étendue sur un million d’années, avec le même problème pour l’enquêteur, qui ne parvenait pas à trouver la moindre solution à son voyage. Il enregistra dans son journal la découverte de ce point d’émission, en y indiquant son échec pour trouver un nouveau moyen de propulsion.

L’enquêteur, comme tous les programmes qui dirigeaient les modules, se décomposait lui-même en modules informatiques, dont celui de logico-rhétorique si précieux pour sa mission. Ce module à son tour ne comptait plus ses applications en court, des millions de questions posées en même temps, dont il traitait la priorité avant d’en traiter le contenu. Il traitait alors, depuis réception, le fameux appel de détresse.
Pour toutes les machines, il ne se composait que d’un simple signal sonore, qui comme une lumière rouge, conventionnel, signalait le danger. Ce signal au travers du temps n’avait rien perdu de sa signification, un son bref et strident, que sa simplicité permettait à n’importe quel programme, y compris organique, d’interpréter.
Comme seul intérêt, il indiquait une action récente, déclenchée peut-être à l’approche du vaisseau, ou retenue jusqu’alors, en coïncidence, par un ultime système.
Mais le module logico-rhétorique en avait sorti un véritable message, composé de tant de morphèmes qu’il avait d’abord calculé une erreur. Il avait fallu tout ce temps pour y trouver une cohérence, une classification puis, enfin, un sens probable. Toutes les ressources de traduction, composées de l’étude de plus d’un milliard de dialectes, transformèrent ces fragments en un message cohérent et tout simplement impossible :
« FT-182-43 de FT-182-6, reçu, impossible rejoindre FT-182-43 à Solar six car FT-182-6 détruit. Répétition, FT-182-6 détruit. »
Le message comprenait plus de dix mille morphèmes, décrivant longuement les pertes, donnant la date et la position de FT-182-6, que le programme avait traduit littéralement. Même transcrit vaguement, sa signification ne faisait aucun doute. Non seulement le message était récent, mais il répondait à un FT-182-43, maintenant, et ce que la transcription ne disait pas explicitement mais ce sur quoi le message ne laissait aucun doute, il répondait bien après la destruction de la flotte, avec une conscience aiguë des dégâts.
Qu’un tel message ait pu naître alors que tous les systèmes électroniques des vaisseaux n’existaient plus depuis longtemps dépassait déjà l’enquêteur, mais cette réponse si précise et actuelle ouvrit simplement des possibilités qu’il ne concevait pas encore.

De nouveaux échanges s’enchaînèrent, entre l’unité chimique, les archives, le centre, l’enquêteur et l’unité centrale de défense de la quatrième armada. Pendant des dizaines, des centaines de périodes, ces échanges continuèrent, brefs, sur des distances toujours plus grandes. Les systèmes stellaires défilaient par dizaines, depuis cette découverte.
Enfin, ce furent les unités centrales de recherche, aux bordures de la galaxie, qui, tandis que le vaisseau de l’enquêteur en approchait, fournirent les dernières informations. L’onde à réseau, employée pour transmettre le message de la flotte, se doublait d’une onde focale, de telle fréquence que les censeurs à antimatière n’en trouvaient pas de trace. Seulement, grâce aux calculs de transcription de l’enquêteur, les modules sur place avaient réglé leurs censeurs, et repéré enfin un signal.
Ils avaient alors tracé une véritable trajectoire de l’onde, qui partant de la flotte, sortait de la galaxie, pour en traverser d’autres, et qui s’étirait ainsi en passant à seulement une poignée de millions d’années lumières du centre de l’univers. L’enquêteur suivait donc une trajectoire similaire, et cette onde cette fois l’avait dépassé.
Aussitôt l’enquêteur demanda une nouvelle recherche sur les épaves, puis corrigea sa trajectoire, pour adopter celle du signal. Il régla ses propres modules de recherche dessus, puis fournit ces informations au pilotage, et le vaisseau poursuivit alors cette onde atemporelle. L’enquêteur trouva enfin une destination possible, sûr de la trouver si elle existait encore, cette fameuse « Solar six ».

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Ce n'est pas une bonne idée de demander une suite au renard, parce que d'habitude, il la fait.
C'est vraiment facile à écrire, quand c'est facile.

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il y a 15 ans 10 mois #14408 par Krycek
Réponse de Krycek sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
Et ? Tu t'arrêtes là ? Tu attends quelquechose pour continuer ?

Critique rapide, toujours le même point Feurnard : tu connais ton texte, tu sais ce qui se passe mais quant à décrire au lecteur les évènements concrets qui ont lieu c'est assez flou. Ici je parle du passage de la frontière avec des répétitions de "modules" et autres mélanges entre les corps célestes, les vaisseaux, LE vaisseau, les communications...

Je sais que tu ne prendras peut-être pas ce conseil en compte, mais je serai toi, je décrirai succintement phrase après phrase l'action/l'évènement en cours. Une fois que c'est exactement délimité, alors tu peux rajouter les tartines de style.

AMHA bien sûr... en attendant, j'ai fini ce court post et toujours pas de suite... tsss

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il y a 15 ans 10 mois #14414 par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Re: Franchement, je sais pas...
Mmmmh... avoue que si j'avais écrit cinq pages de plus sans suivre ton conseil, avoue que c'aurait été mal avisé.
Je vais suivre le conseil, mais pour le moment j'ai plutôt les Larmes en tête. Bloqué au second paragraphe... et j'avoue que j'espère plutôt lire les textes de Xlatoc, Leste-Plume, Vidkunn et Hécate (et tous les autres aussi, mais eux spécialement) que les miens.

Sauf erreur, on a assez de textes. Pourquoi pas une Mise à Jour au quinze ? Après, je te promets, il y aura tellement de texte sur ce sujet que tu n'auras pas assez des vacances pour tout lire.

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