file Chimio' 3 : ........... -embre

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il y a 14 ans 3 mois #16733 par Vuld Edone
Chimio' 3 : ........... -embre a été créé par Vuld Edone
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il y a 14 ans 3 mois #16734 par Mr. Petch
Réponse de Mr. Petch sur le sujet Re:Chimio' 3 : ........... -embre
Une remarque générale sur la troisième partie de Chimio. Je l'ai bien mieux appréciée que les précédentes. J'entends par là : elle m'a paru plus claire, j'ai réussi à suivre les actions, les noms des personnages, les enjeux de l'histoire.

Je n'ai pas forcément envie de faire des remarques de fond. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas intéressant, et je laisse qui veut s'en occuper. Mais j'ai davantage envie de me pencher un peu sur le style. J'espère que ça t'aidera à travailler dessus pour de futurs textes.

***

Résumé des épisodes précédents : Feurnard teste un nouveau style d'écriture. Il nous fait l'honneur de le tester dans les Chroniques des Jours Anciens au moyen d'un texte appelé Chimio'. Mais qu'est-ce donc exactement que ce mystérieux style qui est dans toutes les bouches ?

Voyons ce que j'en ai compris. N'hésite pas à me corriger au besoin.
L'idée de ce style est l'économie de moyens et, surtout, l'économie de sentiments. Le texte se veut impersonnel, à l'image de cet univers d'humains qui confient leur existence à des machines. Le narrateur, donc, intervient le moins possible en tant que "juge" de son récit, et le lecteur est comme face à une image à deux dimensions : il lui manque la profondeur de champ. D'où une impression de confinement qui, là encore, sert plutôt bien un texte qui se déroule presque intégralement à bord d'un navire en pleine mer.
Pour servir ce style, tu utilises une technique. Je te cite dans un post précédent :

Je vais d'abord expliquer une technique que j'entraîne récemment. Elle consiste à réaliser une longue phrase avec plusieurs petites, dont le passage de l'une à l'autre n'est pas dirigé par la ponctuation. Pour cela j'essaie de trouver une structure où, à la transition, il y a un élément de sens commun aux deux parties.
C'est tiré par les cheveux mais c'est un expédient que j'ai trouvé pour, d'une, rythmer mes descriptions et de deux, éviter de hacher mon texte par la ponctuation (on me le reprochait). De trois, cela me permet de torturer mes phrases en toute quiétude. Le problème est bien sûr que quand ça ne marche pas... eh bien... ça ne marche pas.

C'est là ce qui m'intéresse. Cette technique a provoqué quelques étonnements dans ledit post précédent, de la part d'Ignit et Impe qui se demandaient si ton traitement de texte ne t'avait pas joué des tours en mélangeant des morceaux de phrases.
La question n'est pas celle de la pertinence de cette technique, mais de son bon usage.

Je vais donner des exemples :

Les canons chargés se dressèrent au ciel, aux cartes l’océan se couvrit de symboles adverses, le radar rendit d’innombrables échos. Dine en tête, l’ensemble de la seconde flotte déployé contre eux répondait à l’appel, malgré l’obscurité, guidée aux seuls instruments elle prenait position pour la bataille. Ils avaient entre eux plus de deux cents kilomètres, au-delà de toute portée envisageable pour le bord, sous le feu de toutes les batteries hostiles. Roland conseilla de déployer les fumigènes.

(Chimio'3, chap.II)
La première phrase possède cette incongruité du rythme dans la place de l'expression "aux cartes". Incongruité qui surprend. Ici, l'effet me paraît réussi, parce qu'on passe du "ciel" aux "cartes" et un lien est crée entre le mouvement des canons et l'apparition des adversaires sur les cartes, ce que vient confirmer le fait que les trois propositions (canons/se dressèrent ; l'ocean/se couvrit ; le radar/rendit) se situent dans la même phrase. Mentalement, le lecteur passe d'un espace extérieur à un espace intérieur.
Idem pour le "malgré l'obscurité" de la seconde phrase : il appartient autant à la proposition qui le précède qu'à celle qui le suit. Par ce petit jeu de rythme, tu résous d'une façon très simple un problème compliqué : moduler deux propositions avec une seule expression.
Donc là, je trouve que ça marche.

Les choses se compliquent en réalité dans les scènes de combat intense. N'y aurait-il pas moyen de jouer sur ta technique pour rendre compte de l'intensité, parfois, des retombées, d'autres fois, en clair du rythme des combats.
Par exemple, ici :

Déjà Radens avait ordonné trois nouvelles salves sur la division la plus proche, alors que pour la quatrième fois la chasse les engageait les tourelles pivotèrent, les six tubes se déchargèrent simultanément. L’officier de pont Hersant annonça, une minute et dix-huit secondes. En tourelle les canons retombaient, les culasses ouvertes encore brûlantes recevaient l’obus puis la charge, verrouillés déjà ils se redressaient, à quarante-deux Colin confirmait la seconde salve. Ils tiraient la troisième lorsque le poste les informa : « Manqué. » Puis : « Manqué. » Puis encore : « Manqué. » L’ennemi s’échappait au nord, une nouvelle escadre approchait pour les repousser, les presser encore plus contre la frontière.

(Chimio'3 ; chap.IV)
Là, tu donnes l'impression que le combat obéit à un rythme fluide, ce qui est assez contradictoire avec l'idée que je me fais d'un combat. Pour le coup, j'aurais multiplié les points dans la première phrase pour rendre le caractère saccadé des ordres. Comme ça, par exemple : "Déjà Radens avait ordonné : trois nouvelles salves sur la division la plus proche. Alors que pour la quatrième fois la chasse les engageait. Les tourelles pivotèrent : les six tubes se déchargèrent simultanément."
Tu remarques que j'essaie de conserver l'ambiguité de la proposition "alors que...engageait". Je crée en même temps une structure qui met en parallèle "Radens/les tourelles" et "trois salves/six tubes". Les deux points expriment des liens de cause à effet, ils m'ont semblé utile dans le cadre d'un combat où des ordres entraînent des actions. Mais essaie aussi de voir en les remplaçant par de simples points. Ou des points-virgules, mais je crois me souvenir que tu n'aimes guère les points-virgules.
Comme ta technique permet de maîtriser le rythme, pourquoi ne pas tenter de faire coïncider le rythme et le type d'action, par exemple ?

Au contraire, je trouve que tu maîtrises bien ta technique dans les moments calmes. Là, elle devient expressive :

Comme le soir s’embrasait les mains du professeur tâtèrent la surface de son verre à moitié plein. On le resservit. Le large estuaire des trois îles lui paraissait toujours aussi tranquille, baigné de fausses lueurs dans le couchant. À cette heure le plus grand bruit venait du ressac contre les rochers en contrebas les coques des barques craquaient, le temps se dégradait. Jusqu’alors le vent avait frappé contre les crêtes, cela avait duré longtemps. Puis à un instant donné dans les pressions un nouveau courant assez faible avait réduit le vent au silence. Il regardait sur la table son jeu de cartes effondré.

(Chimio'3, chap.V)
Là, par exemple, ton rythme permet de rendre compte, à la lecture, du mouvement changeant du vent et du ressac, notamment dans la phrase qui commence par "A cette heure". Si on essaie de dire la phrase, il y a une tension jusqu'à "craquaient", puis tout retombe avec la proposition suivante. Comme si tu ajoutais une dimension autre à la seule lecture, dimension à la fois poétique et expressive.

Autre exemple que j'ai apprécié :

En trois minutes ils auraient quitté leur couvert. Un bref affolement remplit les consoles d’échos innombrables, le ciel se couvrait de chasseurs, l’ennemi tenait la position. Minsule apparut gigantesque, ses falaises ses plages, ses villes et ses villages ses sommets ses forêts son plateau de clairières, ses îlots de roche.

(Chimio'3, chap.V)
La dernière phrase permet de découvrir, presque visuellement, à la manière d'un paysage impressionniste, l'horizon de Minsule.

J'espère que mes remarques et mes quelques exemples t'aideront... Je pense que tu es sur la bonne voie pour réinventer l'écriture romanesque.

Atchao,
Mr Petch

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il y a 14 ans 3 mois #16738 par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Re:Chimio' 3 : ........... -embre
Le dernier exemple serait plutôt une simple énumération, non ? J'aurais trouvé cette description pertinente si elle avait été à la fin du chapitre XII, si Minsule avait été "éclairée". Ici, j'ai plutôt l'impression d'avoir fait du remplissage, et d'avoir surtout motivé la forme.
...

Revenons aux combats.
Tous les combats de Chimio' m'ont déçu, celui avec le Tregare ayant même bloqué le texte plusieurs mois. Les combats devaient être d'une lenteur méthodique, autant dire mécaniques.
En fait j'ai toujours été confronté à deux réalités différentes : l'une me disait de ne faire tirer qu'un ou deux bâtiments à la fois, à raison d'une salve de quatre à six missiles (voire seulement deux missiles) donc des salves courtes et sporadiques ; l'autre me disait de saturer et j'avais l'image de toute la flotte vidant une à deux rangées de lanceurs.
Après coup je me dis qu'il m'aurait fallu suivre plutôt la première, qui correspond plus aux exercices virtuels de guerre de surface et qui m'aurait permis plus de méthode. Si j'avais présenté les combats ainsi le lecteur n'aurait rien dit. Au lieu que je n'ai cessé de balancer de l'un à l'autre.
Le problème était bien sûr que, face au Dominant, la saturation était la tactique logique à adopter, d'autant que le Liscord ne devait pas s'inquiéter pour l'approvisionnement.

Tout cela pour dire que la technique n'est pas nécessairement utile aux combats de Chimio'. Mais du reste et personnellement j'aurais voulu la motiver un peu plus.

À part quoi je suis content de voir que la technique fonctionne, surtout pour les descriptions, et que je ne l'emploie pas trop au hasard.
L'exemple du ressac et typique et pour une fois volontaire, j'ai surtout pensé au vent. La dernière proposition, "le temps se dégradait", reprend et résume la phrase en lui donnant une interprétation littérale. Elle a pour but de pousser le lecteur à sa propre interprétation.
Pour ma part le vent du nord désigne le Liscord, la menace qu'il représente et la guerre. Cette phrase est entre la bataille et le naufrage...

Ce que tu dis du style est du reste exact et si je suis assez content de cette technique, elle n'est pas essentielle. Le plus important reste l'impersonnel.
Dans la réécriture que tu proposes du passage sur Radens, tu lui mets un double-point puis ce qu'il dit : c'est exactement ce que je ne peux pas me permettre de faire. Avec le double-point Radens parle, même au travers du narrateur ; sans le double-point le narrateur seul prend le contenu en charge.

Je crois avoir fait le tour.

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