Crescendo
- San
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- Mr. Petch
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En fait j'avais peur de "l'effet Shyamalan" (le gros retournement de situation final qui t'explique tout le texte) mais tu arrives à éviter ça, et c'est bien. C'est plus diffus, avec un système d'allusions qui permet de comprendre au fur et à mesure ("capsule", "vie commence à défiler devant ses yeux" "bêtise"...) jusqu'au mot final "cyanure".
Surtout, j'aime bien les "trucs" que tu as trouvé pour donner du rythme : les phrases courtes sans verbe, les onomatopées, et les ellipses dans l'action. Par exemple, le passage où il défonce la porte est vraiment réussi :
Il saute dehors, gravit quatre à quatre le perron. La porte est fermée... Défoncée.
Le choix de la fin ouverte est une bonne idée, aussi.
Le seul truc qui me chiffonne, c'est que le vocabulaire n'est pas assez homogène, je trouve. Au début, tu es dans un vocabulaire plutôt soutenu, presque poétique ("Et la peine est trop grande"), et par moment, il y a des écarts vers un langage plus familier ("trop bizarre"....). Ceci dit, un moment, je me suis dit que c'était justifié par la focalisation sur deux personnages aux caractères différents. Mais quand même, ça m'a choqué.
**
Bref : dans le genre court et efficace, je trouve ça réussi, même s'il y a une forme de romantisme dans le thème qui fait que j'accroche moins. Mais en tant qu'exercice de style, le rythme est bon : tu arrives à faire les césures au bon moment et on comprend de quoi il s'agit (par exemple entre les paragraphes 1 et 2).
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- San
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Cet exercice est vraiment intéressant je trouve, avec une contrainte aussi serrée sur le format, le choix des mots devient primordial. Aussi ta remarque sur les différences de tonalité est importante. Sur le passage que tu pointes avec "trop bizarre", je suis d'accord, et je vais l'amender.
Ce qui m'a posé souci aussi, c'est la ponctuation. Du suspense et de l'usage des trois petits points, des exclamations, interrogations, virgules, points et de l'expression du rythme en général, je ne suis pas du tout sûre de moi. En tout cas ça me rassure que tu aies jugé l'effet général plutôt réussi.
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- Imperator
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Au vu du rythme et la volonté de créer une transition, je conseille le " : ".Son coeur, qui ne battait que pour lui, sort de son engourdissement, s'accélère. Sa vie commence à défiler devant ses yeux.
Ainsi: "[...] sort de son engourdissement, s'accélère: sa vie commence à défiler devant ses yeux."
Ou alors séparer cette dernière phrase du restant du paragraphe.
Là aussi, mais pour d'autres raisons (l'application de la logique du double point en fait, si mon savoir sur ce sujet est correct), je préconiserais l'usage du double point. "[...] mais c'est insuffisant: il faut aller plus vite."mais c'est insuffisant, il faut aller plus vite.
La mise en évidence des liens de cause à effet me semble profitable à un texte à suspens. À voir ce que tu en penses.
Paradoxalement le pire et le meilleur usage des points de suspension qu'il m'ait été donné de voir à mon souvenir. Il faut que le lecteur soit très attentif, mais c'est superbe.La porte est fermée... Défoncée.
Pourquoi pas "Dans la pénombre, il la voit, immobile, par terre." ? On conserverait le rythme, non?Dans la pénombre, il la voit, immobile par terre.
Dans le langage parlé, c'est entièrement logique. Et tout porte à croire que tu veux te rapprocher au maximum du parlé. Ceci étant, on arrive à la limite à mes yeux. "Ce sont pourtant..." serait l'élément attendu pour respecter la logique du texte. Mais c'est là un débat un rien trop gros pour moi.C'est pourtant... ses traits...
Si on considère, comme en musique, que chaque virgule correspond à un temps de pause égal, alors je remplacerais la virgule du troisième stop par un double point.Stop, stop, stop, je ne veux plus mourir!
(ouais, ça ne fait jamais que le troisième que je placerais...)
Des points de suspension feraient probablement aussi l'affaire, mais j'ai l'impression que ça surchargerait le texte.
Je saute le fait que j'éviterais de nommer le poison, puisque j'imagine que le lecteur a lui aussi compris (après, je viens d'apprendre que le cyanure n'est pas dangereux, seulement l'acide cyanidrique, et... on s'en fiche ).Il a vu les emballages et a compris. Du cyanure...
En fait, je remplacerais le point par un... oui mesdames messieurs... par un double point. Et à ce titre, les points de suspension par un point tout court.
Mais enfin, ce sont deux manières de faire qui ne sont pas plus correctes l'une que l'autre, qui relèvent simplement de deux conceptions différentes.
***
Difficile de juger de l'usage de la ponctuation. À part qu'il me semble que ceci:
Est normalement interdit (bien que personnellement, ça ne me choque pas), il n'y a rien à reprocher ou à fondamentalement corriger, à mes yeux, dans la mesure où ton style est cohérent d'un bout à l'autre. Apprécier le style est une question subejctive. (et à mes yeux, le tiens convient tout à fait).sa vie supportable, et digne
Je dirais que tant qu'à s'attaquer à la ponctuation, il serait intéressant d'envisager le double point (nooooooooon... ) et le point virgule dont tu ne fais jamais usage. Les points de suspension me semblent toujours appropriés. Il n'y a que neuf occurrences et aucune que je remettrais franchement en question.
Mieux encore, un seul point d'exclamation. Entre nous, ça me semble symptomatique . Et en soi, très bien.
***
En terme de suspens, je suis peu touché par la problématique (Roméo et Juliette, les drames quotidiens, le suicide, etc...). Mais il y a une ambiance qui est créée, notamment par la simplicité de la description, par le non-dit.
Difficile à dire pour moi (surtout vu le temps qu'il m'a fallut pour comprendre l'histoire).
Quoi qu'il en soit, le récit reste agréable. Mais vraiment, "C'est pourtant... ses traits", je crois qu'il faudrait le changer. Je me cogne à chaque fois dessus.
Étrangement, je n'ai pas été choqué par le "trop bizarre", mais il faut avouer que j'ai peut-être manqué un peu d'attention durant la lecture. En fait, à ce moment du texte, j'étais totalement perdu.
Personnellement, c'est l'arrivée d'un bruit de moteur (et donc d'une magnifique turbine poussée à pleine puissance dans mon esprit) qui m'a pas mal dérouté. La transition peut être mise en cause, malgré le changement de paragraphe.
Enfin bref, l'exercice semble chouette, je devrais l'essayer.
Impe.
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- San
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* * *
En somme tu es passé sur beaucoup de points qui me posaient souci, et j'adhère à tes corrections sur quasi tous, notamment "Ce sont pourtant ses traits" qui m'avait complètement échappé.
"Il était tout ce qui rendait sa vie supportable, digne d'être vécue." Ça coule mieux effectivement.
J'aime bien le rendu et les structures se répondent, je ne sais pas si ça aide la transition mais enfin, j'aime bien.Son coeur, qui ne battait que pour lui, sort de son engourdissement, s'accélère : sa vie commence à défiler devant ses yeux.
Le moteur vrombit dans un bruit d'enfer, mais c'est insuffisant : il faut aller plus vite.
"Oh non, stop, stop, stop! Ne fais pas de bêtise."
Puis
"Stop, stop, stop! Je ne veux plus mourir."
J'ai longtemps hésité sur ceux là, et je pense que ça va mieux comme ça.
Par contre,
"Il a vu les emballages et a compris. Du cyanure."
Je tiens à ce "Du cyanure." pour moi c'est le côté verdict final de ces mots. Je les veux lourds.
"Dans la pénombre, il la voit, immobile, par terre."
Effectivement.
Je crois que j'ai fait le tour. Plus tard je mettrai à jour le texte sur le site, enfin quand j'y repenserai.
Merci pour tes commentaires
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- Imperator
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Et dire que je le croyais volontaire .notamment "Ce sont pourtant ses traits" qui m'avait complètement échappé.
Au niveau de cette fameuse transition, j'ai peut-être mis le doigt sur quelque chose (totalement par hasard, mais là n'est pas la question).je ne sais pas si ça aide la transition mais enfin, j'aime bien.
Et si je disais:Son coeur, qui ne battait que pour lui, sort de son engourdissement, s'accélère : sa vie commence à défiler devant ses yeux.
Le moteur vrombit dans un bruit d'enfer, mais c'est insuffisant : il faut aller plus vite.
Remplacer "le" par "un" n'est pas totalement anodin. Alors certes, on quitte cette perspective interne de l^homme qui était voulue au départ. Donc, dans la même phrase, on passe d'une perspective à l'autre (d'abord externe, puis interne).Son coeur, qui ne battait que pour lui, sort de son engourdissement, s'accélère : sa vie commence à défiler devant ses yeux.
Un moteur vrombit dans un bruit d'enfer, mais c'est insuffisant : il faut aller plus vite.
Ceci dit, tu le fais déjà ailleurs dans le texte, donc ça ne me semble pas si problématique.
L'idée est qu'en disant "Le" moteur, on sous-entend que le lecteur sait de quel moteur il s'agit, alors qu'il n'en est rien. J'ai pensé à un moteur d'avion, mais on pourrait penser au coeur (qui est une pompe, donc un moteur en quelque sorte).
Enfin, au final, il se pourrait que commencer par un indéfini montre au lecteur qu'on entre dans une nouvelle perspective et une nouvelle partie du texte, bref, aider à la transition.
Pas sûr que ce soit convaincant, mais enfin, c'est une piste.
Et si je te propose:Je tiens à ce "Du cyanure." pour moi c'est le côté verdict final de ces mots. Je les veux lourds.
Il a vu les emballages. Il a compris.
Du cyanure.
Est-ce que ça rend les mots plus lourds? (par pure curiosité)
Toujours un plaisir.Merci pour tes commentaires
Impe, content d'être en vacance.
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- San
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Hmmm oui, j'ai l'impression que ça marche.
"Il a vu les emballages. Il a compris.
Du cyanure."
Oui et non, je trouve que ça déséquilibre le texte. Mais au final oui. Il faudrait juste que je rajoute une phrase avant peut-être pour que ça marche. Je vais y réfléchir.
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- Demosthene
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Je limitais jusqu'ici mes récits à des virgules, des points et un point virgule ou deux, voici une nouvelle corde intéressante.
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- San
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Demo, si tu souhaites que je passe faire un brin de relecture sur le brouillard de Londres, tu me fais signe
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- Demosthene
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- Vuld Edone
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La seconde lecture m'a donné au moins un axe.
Le début est très travaillé, "ridicule - capsule" la transition est indéniable et ainsi de suite, on peut lire en étant sûr que le prochain mot ne sera pas gâché. Et puis vient ceci :
"Il était tout ce qui rendait sa vie supportable, digne d'être vécue."
Pourquoi "digne d'être vécue" ? Cela va d'ailleurs briser en partie la surprise après "sereine", qui est cet effet "tout finit bie- ah bah non". Si le mot "supportable" n'est pas assez fort, il faut le changer, mais pas compléter, pas dans un texte aussi court. Rien, à mes yeux, ne le justifie.
Une remarque encore, je n'avais pas noté qu'au moment de "le poison va l'arracher..." elle ne l'avait pas encore pris. C'est presque regrettable qu'elle le fasse après.
Mais venons à mon axe, qui est tout simple :
"quelques pâtés de maisons"
"Boum... boum..."
Tout cela n'est pas très sérieux. Sans vouloir être radical, je veux bien admettre que "pâtés de maisons" puisse être poétique-ou-quelque-chose, même si dans mon registre ce n'est vraiment pas le cas - mais une onomatopée ? Je n'arrive pas à ressentir les derniers battements d'un coeur à travers ça.
Alors le lecteur arrive facilement à passer dessus, et lier "boum" au battement de coeur, et c'est même plaisant de voir comme la forme est subordonnée au sens au point que, tant qu'on voit le sens, la forme est quasiment oubliée. Pour ma part, à la seconde lecture, j'ai croché dessus résolument.
Bref...
Je suis en train de regarder le texte et je me pose une question, on va dire, un peu radicale, qui est de savoir ce qu'on pourrait retrancher au texte sans nuire à l'effet... Le paragraphe "tout reprend du sens..." par exemple, à mon avis, pourrait être rayé sans grandes conséquences...
J'avoue aussi, à la première lecture, avoir totalement effacé le mari, de sorte qu'il n'est vraiment apparu dans le texte pour moi qu'à la toute fin, quand j'ai compris que quelqu'un essayait de la sauver. C'est vraiment un manque d'attention de ma part, mais le passage central bien découpé a pratiquement été effacé de ma mémoire à la lecture.
Voilà voilà...
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- San
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Je plaide coupable. Mais je l'ai laissé volontairement... avec un sentiment mitigé. En fait je pense ne pas avoir trouvé le mot, effectivement. Tout ça pour ne pas dire "Il était la lumière de sa vie", qui serait plus vrai, mais trop lumineux dans ce texte. Je suis ouverte à une proposition qui traduirait quelque chose de positif, mais pas trop, et sans que la tournure sous entende sa vie comme misérable.
Quelques pâtés de maisons, oui, il y a sûrement quelque chose à faire pour eux. Les boum boum par contre, je les garde, à défaut d'autre chose peut-être, mais j'aime bien comme ils tombent.
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- Zarathoustra
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Puis, tilt, Eternal Sunshine of the Spotless Mind! Il s'agit d'un film qui parle finalement exactement de ça: du moment où la vie disparait et où on veut d'un coup la reprendre parce qu'elle parait intensément belle. Je ne vous raconterais pas le film, que je trouve très beau et qui parle merveilleusement du sentiment amoureux (et qui ne parle pas de suicide), mais la plus belle scène du film parle de cet instant où on se raccroche à la vie, à l'amour.
Donc voilà pour le hors sujet. Maintenant, pour ce qui est de l'idée du crescendo, je n'ai pas été pris complètement parce que l'on sait assez à quoi s'attendre au bout de quelques phrases. Certes, on veut savoir si elle va survivre, mais finalement, il n'y a pas vraiment de crescendo en soi. Le crescendo aurait, me semble-t-il, plus été dans le sentiment même de la femme qui resent à nouveau l'envie de vivre, l'envie de vivre son amour et qui la fait lutter de plus en plus fort pour ne pas mourir. Tu le fais, mais comme tu fais des plans paralléles femme/homme, cela casse le crescendo car on a l'impression de lire des choses qui étaient déjà sous-entendues dans les pensées de l'autre.
Pour ce qui est des boum boum et des stop stop, je trouve qu'il s'intégre bien dans le ton de l'ensemble qui conserve une certaine légèreté. Même s'il y a un travail sur l'émotion, il n'y a pas de partie pris pour la tragédie ou le dramatique. On est plus sur une sorte de thriller sentimental (il n'y a aucune conotation péjorative), je veux dire que l'on est plus sur le suspense des sentiments.
Donc je pense qu'il y a matière à couper un peu et à jouer davanatge sur le non-dit et sur les projections du lecteur.
Exemple:
A ce niveau du texte, dans la mesure où on veut faire court, il y a comme des redondances dans la scène, sans que ça apporte vraiment au crescendo. Je pense que le texte gagnerais en force à ne prendre que le point de vue de l'un des deux, en l'occurence la femme puisque c'est quand même là ton point de focal. D'ailleurs, il aurait été intéressant d'inverser les rôles que ce soit l'homme qui se suicide et que la femme qui le sauve car je pense qu'on aurait gagner en originalité sur les situations (aucune vue machiste dema part, mais en l'occurence, je pense que le traiter ainsi aurait été moins convenu). Mais bon, ce n'est plus du tout le même texte et toute la sensibilité que tu y as mis n'aurait pas pu sortir de la sorte.Il saute dehors, gravit quatre à quatre le perron. La porte est fermée... Défoncée. Dans la pénombre, il la voit, immobile, par terre.
Dans une sorte de nuage ouaté elle voit la porte s'ouvrir, et une forme approcher. C'est... Lui? Impossible! Que ferait-il là? Ce sont pourtant... ses traits... Qu'il serait doux de les toucher.
En tout cas, j'ai été très heureux de relire quelque chse de toi, car j'aime bien ta façon que tu as de ne jamais basculer dans les excès. Tu sais toujours garder une certaine sensibilté enfantine dans des histoires d'adultes qui leur rend une ambiance dans laquelle je me sens bien.
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- San
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- Hors Ligne
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Eternal sunshine of the spotless mind, c'est un film qui est depuis longtemps sur ma pile "à voir"...
L'idée sur le double point de vue lors de l'arrivée du "sauveteur" est à creuser. En fait, je voulais garder la dualité mais exprimer quelque chose de plus, qui n'a pas été transcrit : l'angoisse de l'homme, le soulagement de la trouver, et encore plus d'inquiétude en voyant sa posture. Hmm...
Pour ce qui est des rôles, c'est très personnel, et pour moi ils sont en fait déjà inversés.
Merci pour ton commentaire, je vais creuser...
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