Incident
- Vuld Edone
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- San
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Après tes commentaires sur gender bender, je ne suis guère étonnée.
Quand même un peu, parce que le texte est écrit, tu sais, normalement. Oh, et la lecture m'a beaucoup plu. D'ailleurs ça tombe bien puisque je vais le repasser un coup au tamis, là tout de suite.
Une question tout d'abord : de quoi parle Incident? Comme ça, je dirais de souffrance, et de folie. De psychopathologie, de schizophrénie. Mais je ne suis pas sûre, a priori il ne parle pas de renard, et pourtant on s'en rapproche par moments. Il/elle me fait penser à un petit animal pris au piège, et couvert de sang, qui griffe, mord, tue, et finit par mourir, pas du tout comme un humain. Psychopathe ou animal, définitivement.
Un mot sur les clichés si clichés : la fille hyperémotive, qui hurle, se roule en boule par terre, hystérique, prise de crises de fou rire et de larmes sans aucune raison donnée, oui, bon. Je leur ai trouvé un intérêt assez anecdotique quasi tout du long, à ces crises délirantes. Comme un bruit de fond, enfin pourquoi pas. J'y reviendrai.
Oh, et puis bien sûr, la femme menteuse. Je me demande à la seconde lecture si c'est seulement plausible, que la personnalité de Gaillard, lorsqu'il était dans un corps d'homme, ne sache pas mentir, alors qu'il semble qu'il était déjà un psychopathe. Simple détail, on cherche sûrement à nous embrouiller.
Bref, le mot misogynie est balancé dès le début et répété régulièrement, mais il ne s'agit pas de ça, juste que tous ces clichés forment un bruit de fond à la tragédie que vit le personnage principal. Pourquoi pas... je ne suis pas convaincue.
Hé non. Et quoi, ce n'est pas particulièrement féminin, ça, si?[...] mais rien ! On ne s’énerve pas sur commande.
On attend vraiment beaucoup des femmes.Je suis là à la supplier d’insister, juste un mot ou une parole de plus pour me déstabiliser, qui m’obligerait à me trahir, à avouer que oui, c’est moi, c’est là moi derrière cette façade de planche à pain, et pour lui prouver je déboutonnerais ma chemise ! Ou peut-être pas, je ne sais pas mais par pitié, ne t’y laisse pas prendre.
J'aime beaucoup tout ce passage avec Flor. Bon, y'a juste "inconnu", qui ne me revient pas, mais je ne vois pas comment tu aurais pu l'écrire mieux. Bref.Insiste. S’il te plait. Insiste. Tu peux battre cette vouivre que je suis devenue.
Ensuite, Flor s’est excusée. Elle a caché derrière sa main les premières larmes. Sa voix s’est étouffée, je l’ai regardée s’éloigner. Celui qui m’a fait ça, les semelles à clou ne vont pas suffire. Au lieu de la poursuivre, au lieu de la rappeler, de m’excuser, de la supplier, je suis là comme une, mais comme une, mais vraiment, à passer en revue tous les supplices que je ferai subir à inconnu. L’inconnue, c’est moi. Je me hais. Je me hais doublement. Je n’en peux plus de suffoquer. Quitter la ville. Maintenant. Avant que je ne me détruise. Cesser de faire du mal à Flor qui n’y est pour rien. On n’a pas le droit de faire du mal à une femme, ou à quiconque, on ne devrait jamais les faire pleurer. Tordre des cous ne compte pas.
C'est une scène très bizarre. Dans un film, on n'y comprendrait rien, avec seulement les images, l'échange serait d'une banalité... Mais tes explications sont bonnes. Je ne sais pas, féminines je suppose.
Et ça m'a complètement sortie du truc. Quelqu'un faisait des blagues misogynes? Ah! Au secours. Ce personnage principal est horripilant.Résultat, j’ai encore moins envie de hurler, par contre quelque chose d’autre risque de sortir. On peut retourner aux blagues misogynes ?
Il y a plusieurs subresauts de pensée de ce genre, dans le texte. Par exemple, là :
Et ça ne passe pas trop je trouve. La crise est, elle, intéressante, la mutilation, l'auto destruction, sortir de son corps tout ça. Mais avoir une réflexion teintée de sexe à ce moment là, c'est aberrant. (Ou alors c'est juste moi)Là, soyons francs, j’envisageais depuis un moment d’explorer mon corps. Je ne m’étais pas imaginé que ce serait en le lacérant.
J'ai l'impression qu'il y a quelque chose ici qu'on ne nous explique pas, quelque chose d'important. Mais, je ne sais pas quoi, ce n'est pas expliqué...En même temps je me raclais au sol à force d’agitation, je laissais au goudron le soin de labourer le dos. Et vous savez quoi ? C’était exactement ce que je voulais.
Haha... Bonne question, terrible formulation. Aucune idée de la réponse.Donc, en tant qu’homme je nie la liberté que j’exige en tant que femme parce qu’en tant que femme je suis un homme, ou bien parce qu’en tant que femme je suis libre ?
Ensuite, la gare. Pourquoi est-ce qu'il/elle essaie de s'enfuir? En quoi ça pourrait lui permettre de vivre? Sûrement parce que c'est un psychopathe, mais j'ai du mal à le garder à l'esprit.
C'est ce que je fais.En général je me mets debout désinvolte tellement près du bord que le train siffle systématiquement.
Un autre de ces subresauts de pensée, changement d'avis, ou changement de sujet du coq à l'âne au choix. Celui ci est sympathique, sauf que précédé de "On va dire que là mon côté masculin reprend le dessus." ça fait un peu thèse antithèse avec les adjectifs au féminin de la fin... enfin passons.Mon visage est farouche, celui d’une bête acculée. Je vais lui faire la peau. Celui-là me regarde, plein de défi, façon de dire, c’est trop tard, façon de dire que mon départ ne sert déjà plus à rien. Qu’ils vont me tuer plus tard. Non. Je réalise, et cette fois c’est du plaisir de voir que la gamme de mon visage est plus grande quand on ajoute un « e » à l’adjectif.
Mwarf. Aussi, je ne comprends pas.Je me mets à courir. J’ai dû être policier dans une autre vie. Ou psychopathe. Ou une femme.
Et donc, la fin du texte, je ne sais pas. Le personnage part en déliquescence, la scène au parc, l'intuition féminine... Tout est très bizarre, léger, et à la fin tellement calme. Moi, je pense qu'il est mort. Voilà.
Mais sinon j'aime bien quand même.
La dernière phrase casse toute l'image je trouve. L'image de nouer l'estomac n'est pas assez forte, pour moi, il aurait fallu au moins glacer les sangs, manquer un battement de cœur... Oui, purement subjectif.C’est à moi de conclure ce qu’il veut dire par là. Je n’en ai aucune envie. La mauvaise habitude d’envisager le pire. Il veut dire encore pire. Cela suffit pour me nouer l’estomac.
Bon j'ai scrollé dans tous les sens et mon cerveau fait des loopings. Fufu, si tu arrives à démêler tout ça... je reviendrai.
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- Vuld Edone
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Incident parle du changement de sexe comme d'un incident, un détail sur lequel le narrateur n'a pas le temps de s'arrêter, pris dans le cours de sa vie et ses obligations. Une idée permanente en moi a été : "qu'est-ce que ça change ?" Pour le texte, rien.
Il aurait presque été plus intéressant de l'écrire du point de vue de Flor, en externe. Et j'aurais pu changer l'histoire, massivement.
Elle pisterait Gaillard, remarquerait ces habits qui lui ressemblent - les habits sont des incidents - sur une femme. Et là... elle se met à suivre cette inconnue. Tout un lent travail de conviction, que c'est Gaillard.
Peut-être l'occasion de lui faire chercher des indices de comportement "masculins" mais elle n'en trouverait pas. Ou alors elle serait focalisée, et même les clichés "féminins" lui paraîtraient masculins.
Enfin, quand elle s'est suffisamment persuadée, sur cet échafaudage branlant, elle l'interpelle. Espoir en le voyant s'arrêter. L'attente. Espoir en le voyant se retourner. Puis l'édifice se fait laminer. Systématiquement.
Je pense que je n'aurais pas le coeur à lui faire prendre le train seule. Cela finirait probablement par la confrontation sur les quais, elle qui n'ose pas approcher, prend le train, ne le trouve pas. Et au moment où elle s'effondre, quelqu'un viendrait à elle, lui dirait "je cherche quelqu'un." "Un certain Gaillard." "Chemise blanche à boutons." Dans l'emballement qui suivrait, conclure.
Mais même comme ça, je ne vois pas là suffisamment de matière à un texte.
Revenons rapidement sur le mensonge.
Il y a une situation réelle où la personne paniquée s'enferme dans un rôle qui lui devient externe et naturel, de sorte que la personne peut s'observer agir en ayant l'impression de n'être pas même l'acteur.
Gaillard est dans ce cas : il ne peut pas mentir sur le fait qu'il est psychopathe parce que c'est effectivement ce qu'il est et que Gaillard homme est connu de Flor ; elle peut mentir sur le fait qu'elle est Gaillard parce qu'elle n'est pas un homme et que Gaillard femme est une étrangère à Flor.
Il s'est enfermé, paniqué, dans son rôle, et il veut être reconnu de Flor - parce qu'il est Gaillard - en même temps qu'il est paniqué à l'idée qu'elle le découvre - parce qu'il est psychopathe.
Je vais simplifier :
Gaillard homme est lâche - il ne peut pas mentir. Gaillard femme est lâche - elle est forcée de mentir. Rien n'a changé.
Ce qui me surprend, c'est que tu as interprété tout du long le texte comme si le narrateur était influencé par son statut de femme. Il ne l'est à aucun moment. Il utilise le changement pour excuser des comportements qui lui seraient tout à fait familiers.
Par exemple à la gare, se placer au plus près du bord, il ne l'aurait pas fait de toute façon parce que la rencontre avec Flor, homme ou femme, l'aurait miné. Par exemple à la place Du Muys, étrangler sa victime, il l'aurait fait de toute façon parce qu'il est lâche et a peur de laisser à l'autre la possibilité de réagir. Tout au plus le changement lui permet de se redécouvrir - même pas de se remettre en question.
D'ailleurs, réinterprétons le mensonge dans ce sens. Gaillard homme, de part sa lâcheté, aurait frappé Flor. Et quelque part il le sait. Gaillard femme peut éviter de la frapper en mentant. Rien ne dit que, son mensonge éventé, il ne l'aurait pas frappée - il l'aurait fait presque certainement.
À terme si le texte avait un sens celui-ci est complètement parasité par l'embryon d'intrigue bâclé doublé d'une absence totale de réflexion triplé d'un style au kilomètre quadruplé de personnages taille papier-plume quintuplé d'une méconnaissance royale du sujet.
Mais Incident, si je retentais le défi, se résumerait bien à cela, que le changement de sexe lui-même est un pur incident.
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- San
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En étant une, je ne peux qu'approuver, c'est tellement tentant.
En tout cas ce trouble mental conjugué au changement de sexe, ça donne un texte assez surprenant. L'intrigue, elle, est mince, et si je concluais à la mort du personnage à la fin du texte, je me dis qu'il pourrait aussi bien être mort dès le début. Comme tu le disais, un simple incident, une anecdote. Mais c'était intéressant.
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- Demosthene
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Si je devais commenter le style, je dirais que le début pourrait être revu pour donner une ou deux accroche, au moins jusqu'à la scène ou il rencontre Flor. Après, tout s’enchaîne et ça se lit pas forcément facilement, mais on a envie de s'accrocher, et l'histoire passionne. J'ai cherché longtemps L'Explication (avec un L et un E) avant d'accepter de la trouver moi-même, ce qui m'a finalement beaucoup plu.
Merci pour ce texte, tout à fait dans le sujet, original et particulièrement intéressant à lire.
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