Les paragraphes "nécessaires" mais inutiles
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il y a 8 ans 2 mois #20616
par Zarathoustra
Les paragraphes "nécessaires" mais inutiles a été créé par Zarathoustra
Les paragraphes nécessaires mais inutiles
Je voulais savoir comment vous gériez dans une histoire ces paragraphes de transition qui sont en soi nécessaire mais assez souvent inutiles. Je parle ici de récits assez conséquent set non d’une simple nouvelle (même s’il est fort probable qu’une nouvelle puisse également en contenir).
J’ai pour ma part plusieurs options :
- La première serait de les réduire le plus possible, voir même de les sauter. J’avoue ne pas apprécier cette option parce que si le paragraphe est nécessaire, procéder par ellipse revient pour moi à une sorte de démission. Je veux dire par là que je n’ai pas trouvé comment rendre cette séquence intéressante.
- La seconde est de les traiter sans flamme ni passion de manière à ce qu’ils ne soient que fonctionnel. Après tout, leur but n’est pas de capter le lecteur, mais juste de l’aider à arriver à la scène importante. A la limite, vouloir en faire autre chose, on capte l’attention du lecteur inutilement et on encombre sa tête de choses qui peuvent noyer l’essentiel à force de vouloir tout traiter sur le même niveau. Mais là aussi, je ne peux m’empécher de penser qu’on ne respecte pas le lecteur. Lui aussi n’aura aucun plaisir à le lire et pensera qu’il n’est pas très utile. A la lmite, il pourra fort bien le sauter s’il comprend qu’il est sur un tel paragraphe dès qu’il aura capté la teneur du message qui doit être diffusé.
- La troisième est de chercher à leur donner une portée plus grande ou de leur trouver des enjeux. J’avoue qu’idéalement c’est la solution qui me plait le plus. D’abord, ils offrent souvent de jolis défis à se lancer. D’autre part, ils peuvent être l’occasion de les transformer en temps forts ou en moment un peu héroïque d’écriture (longue description etc.). Bref, je dirais qu’ils peuvent presque être expérimentaux. J’ai en tête par exemple la façon dont Sergio Leone ou Tarantino peuvent étirer une scène qui en soit n’en avait a priori pas besoin. En fait, je me dis que le lecteur est souvent en situation d’attente passive et que ces paragraphes sont justement une situation de le surprendre dans cette attente. Mais ces paragraphes, du fait du faible intérêt narratif, sont souvent pour moi l’occasion de les remplir d’autres choses qui parfois débouchent sur de vraies trouvailles scénaristiques. Seulement, cela pousse à diluer l’histoire et parfois à se faire plaisir au détriment du lecteur. Enfin, cela oblige aussi un tout autre effort d’écriture qu’il est parfois difficile de trouver... Il m’est arrivé de caler sur un texte à cause de ça…
Bref, tout tourne autour du lecteur et de l’intérêt qu’il est censé y trouver. J’ignore si cela vous parle ou s’il vous faudrait des exemples ?
Je voulais savoir comment vous gériez dans une histoire ces paragraphes de transition qui sont en soi nécessaire mais assez souvent inutiles. Je parle ici de récits assez conséquent set non d’une simple nouvelle (même s’il est fort probable qu’une nouvelle puisse également en contenir).
J’ai pour ma part plusieurs options :
- La première serait de les réduire le plus possible, voir même de les sauter. J’avoue ne pas apprécier cette option parce que si le paragraphe est nécessaire, procéder par ellipse revient pour moi à une sorte de démission. Je veux dire par là que je n’ai pas trouvé comment rendre cette séquence intéressante.
- La seconde est de les traiter sans flamme ni passion de manière à ce qu’ils ne soient que fonctionnel. Après tout, leur but n’est pas de capter le lecteur, mais juste de l’aider à arriver à la scène importante. A la limite, vouloir en faire autre chose, on capte l’attention du lecteur inutilement et on encombre sa tête de choses qui peuvent noyer l’essentiel à force de vouloir tout traiter sur le même niveau. Mais là aussi, je ne peux m’empécher de penser qu’on ne respecte pas le lecteur. Lui aussi n’aura aucun plaisir à le lire et pensera qu’il n’est pas très utile. A la lmite, il pourra fort bien le sauter s’il comprend qu’il est sur un tel paragraphe dès qu’il aura capté la teneur du message qui doit être diffusé.
- La troisième est de chercher à leur donner une portée plus grande ou de leur trouver des enjeux. J’avoue qu’idéalement c’est la solution qui me plait le plus. D’abord, ils offrent souvent de jolis défis à se lancer. D’autre part, ils peuvent être l’occasion de les transformer en temps forts ou en moment un peu héroïque d’écriture (longue description etc.). Bref, je dirais qu’ils peuvent presque être expérimentaux. J’ai en tête par exemple la façon dont Sergio Leone ou Tarantino peuvent étirer une scène qui en soit n’en avait a priori pas besoin. En fait, je me dis que le lecteur est souvent en situation d’attente passive et que ces paragraphes sont justement une situation de le surprendre dans cette attente. Mais ces paragraphes, du fait du faible intérêt narratif, sont souvent pour moi l’occasion de les remplir d’autres choses qui parfois débouchent sur de vraies trouvailles scénaristiques. Seulement, cela pousse à diluer l’histoire et parfois à se faire plaisir au détriment du lecteur. Enfin, cela oblige aussi un tout autre effort d’écriture qu’il est parfois difficile de trouver... Il m’est arrivé de caler sur un texte à cause de ça…
Bref, tout tourne autour du lecteur et de l’intérêt qu’il est censé y trouver. J’ignore si cela vous parle ou s’il vous faudrait des exemples ?
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- Vuld Edone
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il y a 8 ans 2 mois #20617
par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Les paragraphes "nécessaires" mais inutiles
J'aurais besoin d'exemples, pour le coup.
Je n'ai même pas en tête de tels paragraphes. Une fois encore, mon approche est de tout traiter comme important : si ce ne l'est pas, je coupe. Je suppose que c'est la première option.
Inversement... est-ce qu'on peut considérer l'ensemble d'un texte comme nécessaire mais inutile ?
Je n'ai même pas en tête de tels paragraphes. Une fois encore, mon approche est de tout traiter comme important : si ce ne l'est pas, je coupe. Je suppose que c'est la première option.
Inversement... est-ce qu'on peut considérer l'ensemble d'un texte comme nécessaire mais inutile ?
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- Zarathoustra
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il y a 8 ans 2 mois #20618
par Zarathoustra
Réponse de Zarathoustra sur le sujet Les paragraphes "nécessaires" mais inutiles
Tu as raison ce n’est peut-être pas très clair… Je vais utiliser ma tentative des clore le récit du Chant des Pierres. Cette histoire a été écrite de manière un peu indépendante du Rêve d’Ether alors qu’elle en faisait partie. Ma fin implique de réintroduire des éléments du Rêve que j’avais jusqu’à présent réussi à totalement éviter.
Voici un paragraphe de transition (ou récapitulatif) dans lequel j’ai essayé de résoudre cette impression d’inutilité en créant un minimum de tension :
Cachés sous un abri de fortune constitué de branchage, les vuldoniens et Gisère avaient passé une bonne partie de la journée quasiment sans bouger. Ils avaient eu tout loisir de voir débarquer les yhlaks. Comme personne n’avait pu les prévenir de la présence des enfants, c’est seulement la solennité du débarquement et les nettes différences vestimentaires qui les avaient mis en alerte. Cette nouvelle bouleversait leur plan, ou tout du moins faisait entrer une question morale supplémentaire… A la stupeur de Gisère, les religieux envisageaient sérieusement à ne pas le différer.
Un autre paragraphe (presque dans la foulée du précédent) où je resitue l’évolution d’un personnage. En l’occurrence, la nécessité vient aussi du fait que je vais utiliser un personnage qui n’était pas dans cette histoire mais dans la trame du Rêve d’Ether…
Un autre exemple de scène mais que je vais vous décrire parce que ce que j’ai écrit pour l’instant est vraiment nul. Il va y avoir une scène où des eldreds vont se rapprocher des yhlaks dans le cadre de festivités, que le lecteur sait pertinemment illusoire parce qu’il sait que l’un des camps a déjà tout planifié son action. En soi, cela n’a aucun impact sur l’histoire si ce n’est de rendre un peu plus crédible la situation globale. Pour l’heure, j’ai écrit un paragraphe de 4/5 lignes. Mais on pourrait en écrire une voire plusieurs pages… avec des descriptions, jouer sur les tensions des uns et les illusions des autres, mais aussi montrer que des peuples peuvent s’unir indépendamment de gnagnagni gnagnagna…
Autre exemple. Les vuldoniens du premier exemple sont témoins mais extérieurs à ces festivités et doivent agir juste après. Là aussi, il me parait un peu nécessaire de montrer leur attente, voire de frustrer un peu le lecteur avant de lancer ce qui doit être le dénouement final… Mais j’ai comme seul éléments moteur de cette séquence les tourments intérieur de l’un des vuldoniens… Je me dis que c’est important pour ce personnage, mais il reste un personnage très secondaire. Seulement, l’évolution psychologique aura des conséquences sur le déroulement… En l’état, je suis partie pour en écrire une page entière… Mais cela reste du blah blah psychologique qui n’intéressera pas tous les lecteurs, tout du moins tous ceux qui ne se projetteront pas dans lui... D’ailleurs, pas sûr que beaucoup le fassent…
Bref, cette réflexion se fait également dans mon questionnement sur l’efficacité de mon histoire… Il s’agit du dénouement. J’aimerai quand même arriver à captiver un peu… Soit je joue sur l’efficacité et je balaie la psychologie, soit je joue sur les projections des lecteurs sur les personnages et je dois développer l’aspect psychologique pour qu’ils s’identifient un peu (mais j’ai, comme souvent, un problème de focalisation car j’ai plusieurs personnages à traiter…). Soit j’essaie de jouer sur les deux tableaux (ce qui serait mon orientation actuelle) au risque que les deux se neutralisent…
Voilà mes questions existentielles…
Voici un paragraphe de transition (ou récapitulatif) dans lequel j’ai essayé de résoudre cette impression d’inutilité en créant un minimum de tension :
Cachés sous un abri de fortune constitué de branchage, les vuldoniens et Gisère avaient passé une bonne partie de la journée quasiment sans bouger. Ils avaient eu tout loisir de voir débarquer les yhlaks. Comme personne n’avait pu les prévenir de la présence des enfants, c’est seulement la solennité du débarquement et les nettes différences vestimentaires qui les avaient mis en alerte. Cette nouvelle bouleversait leur plan, ou tout du moins faisait entrer une question morale supplémentaire… A la stupeur de Gisère, les religieux envisageaient sérieusement à ne pas le différer.
Un autre paragraphe (presque dans la foulée du précédent) où je resitue l’évolution d’un personnage. En l’occurrence, la nécessité vient aussi du fait que je vais utiliser un personnage qui n’était pas dans cette histoire mais dans la trame du Rêve d’Ether…
Un autre exemple de scène mais que je vais vous décrire parce que ce que j’ai écrit pour l’instant est vraiment nul. Il va y avoir une scène où des eldreds vont se rapprocher des yhlaks dans le cadre de festivités, que le lecteur sait pertinemment illusoire parce qu’il sait que l’un des camps a déjà tout planifié son action. En soi, cela n’a aucun impact sur l’histoire si ce n’est de rendre un peu plus crédible la situation globale. Pour l’heure, j’ai écrit un paragraphe de 4/5 lignes. Mais on pourrait en écrire une voire plusieurs pages… avec des descriptions, jouer sur les tensions des uns et les illusions des autres, mais aussi montrer que des peuples peuvent s’unir indépendamment de gnagnagni gnagnagna…
Autre exemple. Les vuldoniens du premier exemple sont témoins mais extérieurs à ces festivités et doivent agir juste après. Là aussi, il me parait un peu nécessaire de montrer leur attente, voire de frustrer un peu le lecteur avant de lancer ce qui doit être le dénouement final… Mais j’ai comme seul éléments moteur de cette séquence les tourments intérieur de l’un des vuldoniens… Je me dis que c’est important pour ce personnage, mais il reste un personnage très secondaire. Seulement, l’évolution psychologique aura des conséquences sur le déroulement… En l’état, je suis partie pour en écrire une page entière… Mais cela reste du blah blah psychologique qui n’intéressera pas tous les lecteurs, tout du moins tous ceux qui ne se projetteront pas dans lui... D’ailleurs, pas sûr que beaucoup le fassent…
Bref, cette réflexion se fait également dans mon questionnement sur l’efficacité de mon histoire… Il s’agit du dénouement. J’aimerai quand même arriver à captiver un peu… Soit je joue sur l’efficacité et je balaie la psychologie, soit je joue sur les projections des lecteurs sur les personnages et je dois développer l’aspect psychologique pour qu’ils s’identifient un peu (mais j’ai, comme souvent, un problème de focalisation car j’ai plusieurs personnages à traiter…). Soit j’essaie de jouer sur les deux tableaux (ce qui serait mon orientation actuelle) au risque que les deux se neutralisent…
J'ai eu tendance à toujours vouloir écrire comme ça, sauf que j'ai tendance à trouver de l'importance à des choses que, toi, tu aurais certainement supprimées... Je dois dire que la lecture de Libra m'a justement montré que tu savais donner du poids à chaque séquence que tu avais choisi d'écrire. Je ne suis pas sûr de trouver ce poids, sans doute parce que mon récit se disperse sur trop de personnages....Une fois encore, mon approche est de tout traiter comme important : si ce ne l'est pas, je coupe. Je suppose que c'est la première option
Voilà mes questions existentielles…
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- Vuld Edone
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il y a 8 ans 2 mois #20619
par Vuld Edone
Réponse de Vuld Edone sur le sujet Les paragraphes "nécessaires" mais inutiles
Navré pour l'attente, déménager est... stressant. Bref.
Tu parles de paragraphes de transition comme exemples d'inutile nécessaire. Je parlerais plutôt d'introduction.
Ces derniers jours j'ai tenté de relancer les Anges, avec l'idée d'une nouvelle narration. Mais je bute constamment sur l'introduction. Pourquoi ? Toujours les mêmes raisons. J'ai dix millions de choses à introduire au lecteur, la première et pas des moindres étant ce qu'est une bête.
Et c'est un vrai bourbier.
Non seulement je dois dédier de la place, ne serait-ce qu'une phrase ou deux, pour décrire le concept de la bête au lecteur, mais je dois justifier d'en parler dans le texte, ce qui déjà en soi n'est pas évident. Mais même en le justifiant, ça reste... pas intéressant. Le narrateur est en train de donner un cours accéléré au lecteur, comme un didacticiel dans un jeu vidéo.
Mais je ne veux pas parler de ça -- même si maintenant j'ai du mal à m'en détacher -- je voulais parler de l'introduction du lieu.
- Dans un brouillon que je n'ai pas conservé, le récit débutait dans un village côtier un peu bucolique où un groupe de héros devait arriver, en route pour combattre Homs. Je n'avais eu aucun mal à décrire ce village jusqu'à l'arrivée du groupe, mais à peine celui-ci allait poser le pied à terre que le texte est mort.
- Dans un autre brouillon, avec Madèche qui se rend à Sédis (sauf erreur en TdE), je n'ai eu aucun mal non plus à introduire Sédis. Parce qu'elle est un peu plus originale et parce qu'on la découvre en même temps que Madèche, c'est donc motivé. Le texte est mort à la première scène "d'action", notamment parce que la narration était plutôt nostalgique et... résignée. Le ton d'une personne qui raccroche. Parfait pour Madèche mais complètement hors de propos pour le reste, surtout pour le "wtf" que représentent les combats et la routine d'Alquières.
- À présent, mon récit commence dans un village bucolique que je dois donc introduire et décrire au lecteur. Et... je n'arrive pas à le faire. La narration est cette fois adaptée (plus ou moins, j'y travaille) à l'absurde de ce monde, avec un narrateur (double) qui en pointe constamment du doigt l'absurdité, mais le village est... juste hors-sujet.
Et ça, pour moi, c'est un cas de paragraphe nécessaire et inutile.
Je dois décrire ce village. C'est là où le faux héros de l'histoire débute, ainsi que le vrai héros de l'histoire. Il doit y avoir plusieurs chapitres sur place, avant le départ, et le bucolique des lieux influe sur la mentalité des protagonistes. Je n'ai pas le choix de le décrire, et si possible avec force détails.
Mais à l'inverse, c'est complètement inutile, parce que complètement à côté de la plaque. Le texte commence en disant que tout le monde craint Homs et tout le monde veut tuer Homs et Homs est tout-puissant et c'est pour ça qu'on veut le tuer Homs Homs Homs tuer Homs tuer tuer Homs tuer Homs. Et soudain là paf, un village.
Pourquoi ? Quand comment où de quoi ?!
Il y a une transition que j'essaie d'établir, en expliquant que les habitants vivent sur des ruines qu'ils ne remarquent plus, et je décris le village au travers de ce filtre : le contraste entre ce qu'ils veulent (un endroit paisible) et ce qu'il y a (des ruines, des cratères, etc...) et qu'ils ne voient plus. L'idée étant que pour eux c'est tellement normal qu'ils ne le remarquent plus.
Mais cette transition ne fonctionne pas. Pourquoi ? Parce que Homs tuer tuer Homs tuer Homs. Kekonsenfich du village.
En y réfléchissant -- à chaud, pendant que j'écris -- une bonne transition serait de dire que Pontier (le village) est l'exception. Un village où au contraire les bêtes défient la loi universelle en... ne voulant pas tuer Homs. Une sorte d'îlot préservé miraculeusement, avec peu à peu des indices qu'il n'y a aucun miracle derrière, et à mesure que l'histoire avance on voit qu'il n'en était rien. Les ruines serviraient à démasquer la tromperie : non, ce village est comme les autres, les bêtes veulent tout autant tuer Homs.
Cette transition peut fonctionner. Et cela souligne peut-être comment rendre un paragraphe nécessaire... "nécessaire".
Le thème.
Plus précisément, ici, on parle plutôt d'une attente. Si j'introduis le texte en disant explicitement que le but dans la vie de toute bête, dès la naissance, universellement et nécessairement, sans exception, est de faire la peau à Homs, je ne PEUX pas parler de quoi que ce soit sans que le lecteur ne puisse avoir l'arrière-pensée "comment cela va me servir à tuer Homs". Tout doit transpirer la haine de Homs et la volonté de le combattre, aussi indirectement que ce soit.
Le résultat serait probablement un monde haineux, où tout s'explique avec cet instinct primaire -- ce qui, en fait, est très proche de ce que j'essaie de faire avec les Anges -- et la narration suivrait cette même logique, en regardant tout ce qui se passe sous le filtre de cet objectif. Le narrateur peut être une bête qui veut tuer Homs, ou une bête qui contre toute attente ne veut pas tuer Homs, ou Homs qui regarde les bêtes vouloir le tuer. Quelque chose comme ça.
Disons maintenant que, pour une raison qui m'échappe, dans mon texte on aurait une scène où des enfants vont à l'école. On entend la sonnerie, les enfants rentrent et s'installent en classe.
Au-delà de la bizarrerie de la scène, comment rendre ce passage supposément nécessaire... "nécessaire" ?
Maintenant j'ai un thème, entre guillemets. Tout doit vouloir tuer Homs. Je peux comparer la sonnerie d'école à une sirène militaire. Je peux décrire des élèves très agressifs, la sauvagerie quand ils se bousculent pour rentrer. Je peux décrire des peintures limite guerrières sur les murs. Inversement, je peux décrire un bâtiment endommagé, aux murs fissurés, une vitre neuve au milieu des autres salles (vitre cassée remplacée), etc... et une sorte d'hostilité générale moins des bêtes entre elles que de l'école vis-à-vis des écoliers. Comme si les lampes, les bancs, les portes, la craie du tableau noir voulait leur mort.
La scène elle-même resterait, mécaniquement, la même. C'est juste des enfants qui rentrent en classe. Mais désormais cette scène contribue à l'atmosphère et te rappelle le but de tout ce qui respire sur cette planète : tuer Homs.
Je ne me rappelle pas vraiment quel pouvait être le thème d'Ether. On avait toute une série de personnages face à un phénomène qu'aucun d'eux ne comprenait vraiment. Ils avaient tous leur vie, leurs objectifs, et ce phénomène venait juste mettre un coup de pied dans la ruche. Tout le texte était, au final, à mon souvenir la manière dont chaque personnage interprétait les événements.
Donc.
Supposant que la subjectivité soit le thème, je vois plusieurs problèmes au paragraphe que tu proposes ("Cachés sous un abri de fortune...").
Premier problème : ce n'est pas subjectif. Le débarquement est un fait, l'abri est un fait, ce qui les a alertés est un fait. Au final, la seule subjectivité est le regard de Gisère sur les religieux, et c'est accessoire. Second problème : l'enjeu du paragraphe est de se cacher, ou de réorganiser les plans, ou de se questionner moralement... ce qui, à nouveau, n'a rien à voir avec la subjectivité. Le véritable enjeu est la manière dont les personnages perçoivent la situation.
Commence le chapitre par les vuldoniens qui veulent appliquer le plan (quel qu'il soit). "Malgré le débarquement, les vuldoniens voulaient mener le plan à terme." Et déjà là on est dans la perspective de Gisère. Tu n'as même pas besoin de dire qu'il est stupéfait, le paragraphe va le montrer pour toi. Tu vas développer en montrant qu'ils ont été surpris, pris de court et qu'ils se sont abrités visiblement à la hâte, à ce stade le lecteur peut effectivement supposer que suivre le plan n'est plus une option. Mais, tout du long, il y a cette idée que non, les religieux sont religieux, ils vont quand même le faire. Ils ne voient pas tout ce que le paragraphe donne comme un fait au lecteur, et là tu joues sur la subjectivité.
Et là ton paragraphe n'est plus inutile. Si le coeur de l'histoire est la subjectivité, le paragraphe y participe désormais.
Après c'est de la spéculation, avec de vieux souvenirs et sans contexte, mais c'est l'idée.
Toute ma théorie littéraire repose sur l'idée du "core", un dénominateur commun à toute l'histoire et qu'on retrouve partout. Je caricature un peu en disant que c'est "tuer Homs" (c'est plus complexe que ça) ou en disant que c'est "la subjectivité" (c'est un peu court), en général on n'arrive même pas à décrire ce concept fondamental. Mais l'idée est là.
Tant que le paragraphe parle de la même chose que tous les autres paragraphes du texte (principe d'unité), ton paragraphe ne sera pas inutile.
La même logique s'applique à Krintal et à ses champignons. Mais bref.
Tu parles de paragraphes de transition comme exemples d'inutile nécessaire. Je parlerais plutôt d'introduction.
Ces derniers jours j'ai tenté de relancer les Anges, avec l'idée d'une nouvelle narration. Mais je bute constamment sur l'introduction. Pourquoi ? Toujours les mêmes raisons. J'ai dix millions de choses à introduire au lecteur, la première et pas des moindres étant ce qu'est une bête.
Et c'est un vrai bourbier.
Non seulement je dois dédier de la place, ne serait-ce qu'une phrase ou deux, pour décrire le concept de la bête au lecteur, mais je dois justifier d'en parler dans le texte, ce qui déjà en soi n'est pas évident. Mais même en le justifiant, ça reste... pas intéressant. Le narrateur est en train de donner un cours accéléré au lecteur, comme un didacticiel dans un jeu vidéo.
Mais je ne veux pas parler de ça -- même si maintenant j'ai du mal à m'en détacher -- je voulais parler de l'introduction du lieu.
- Dans un brouillon que je n'ai pas conservé, le récit débutait dans un village côtier un peu bucolique où un groupe de héros devait arriver, en route pour combattre Homs. Je n'avais eu aucun mal à décrire ce village jusqu'à l'arrivée du groupe, mais à peine celui-ci allait poser le pied à terre que le texte est mort.
- Dans un autre brouillon, avec Madèche qui se rend à Sédis (sauf erreur en TdE), je n'ai eu aucun mal non plus à introduire Sédis. Parce qu'elle est un peu plus originale et parce qu'on la découvre en même temps que Madèche, c'est donc motivé. Le texte est mort à la première scène "d'action", notamment parce que la narration était plutôt nostalgique et... résignée. Le ton d'une personne qui raccroche. Parfait pour Madèche mais complètement hors de propos pour le reste, surtout pour le "wtf" que représentent les combats et la routine d'Alquières.
- À présent, mon récit commence dans un village bucolique que je dois donc introduire et décrire au lecteur. Et... je n'arrive pas à le faire. La narration est cette fois adaptée (plus ou moins, j'y travaille) à l'absurde de ce monde, avec un narrateur (double) qui en pointe constamment du doigt l'absurdité, mais le village est... juste hors-sujet.
Et ça, pour moi, c'est un cas de paragraphe nécessaire et inutile.
Je dois décrire ce village. C'est là où le faux héros de l'histoire débute, ainsi que le vrai héros de l'histoire. Il doit y avoir plusieurs chapitres sur place, avant le départ, et le bucolique des lieux influe sur la mentalité des protagonistes. Je n'ai pas le choix de le décrire, et si possible avec force détails.
Mais à l'inverse, c'est complètement inutile, parce que complètement à côté de la plaque. Le texte commence en disant que tout le monde craint Homs et tout le monde veut tuer Homs et Homs est tout-puissant et c'est pour ça qu'on veut le tuer Homs Homs Homs tuer Homs tuer tuer Homs tuer Homs. Et soudain là paf, un village.
Pourquoi ? Quand comment où de quoi ?!
Il y a une transition que j'essaie d'établir, en expliquant que les habitants vivent sur des ruines qu'ils ne remarquent plus, et je décris le village au travers de ce filtre : le contraste entre ce qu'ils veulent (un endroit paisible) et ce qu'il y a (des ruines, des cratères, etc...) et qu'ils ne voient plus. L'idée étant que pour eux c'est tellement normal qu'ils ne le remarquent plus.
Mais cette transition ne fonctionne pas. Pourquoi ? Parce que Homs tuer tuer Homs tuer Homs. Kekonsenfich du village.
En y réfléchissant -- à chaud, pendant que j'écris -- une bonne transition serait de dire que Pontier (le village) est l'exception. Un village où au contraire les bêtes défient la loi universelle en... ne voulant pas tuer Homs. Une sorte d'îlot préservé miraculeusement, avec peu à peu des indices qu'il n'y a aucun miracle derrière, et à mesure que l'histoire avance on voit qu'il n'en était rien. Les ruines serviraient à démasquer la tromperie : non, ce village est comme les autres, les bêtes veulent tout autant tuer Homs.
Cette transition peut fonctionner. Et cela souligne peut-être comment rendre un paragraphe nécessaire... "nécessaire".
Le thème.
Plus précisément, ici, on parle plutôt d'une attente. Si j'introduis le texte en disant explicitement que le but dans la vie de toute bête, dès la naissance, universellement et nécessairement, sans exception, est de faire la peau à Homs, je ne PEUX pas parler de quoi que ce soit sans que le lecteur ne puisse avoir l'arrière-pensée "comment cela va me servir à tuer Homs". Tout doit transpirer la haine de Homs et la volonté de le combattre, aussi indirectement que ce soit.
Le résultat serait probablement un monde haineux, où tout s'explique avec cet instinct primaire -- ce qui, en fait, est très proche de ce que j'essaie de faire avec les Anges -- et la narration suivrait cette même logique, en regardant tout ce qui se passe sous le filtre de cet objectif. Le narrateur peut être une bête qui veut tuer Homs, ou une bête qui contre toute attente ne veut pas tuer Homs, ou Homs qui regarde les bêtes vouloir le tuer. Quelque chose comme ça.
Disons maintenant que, pour une raison qui m'échappe, dans mon texte on aurait une scène où des enfants vont à l'école. On entend la sonnerie, les enfants rentrent et s'installent en classe.
Au-delà de la bizarrerie de la scène, comment rendre ce passage supposément nécessaire... "nécessaire" ?
Maintenant j'ai un thème, entre guillemets. Tout doit vouloir tuer Homs. Je peux comparer la sonnerie d'école à une sirène militaire. Je peux décrire des élèves très agressifs, la sauvagerie quand ils se bousculent pour rentrer. Je peux décrire des peintures limite guerrières sur les murs. Inversement, je peux décrire un bâtiment endommagé, aux murs fissurés, une vitre neuve au milieu des autres salles (vitre cassée remplacée), etc... et une sorte d'hostilité générale moins des bêtes entre elles que de l'école vis-à-vis des écoliers. Comme si les lampes, les bancs, les portes, la craie du tableau noir voulait leur mort.
La scène elle-même resterait, mécaniquement, la même. C'est juste des enfants qui rentrent en classe. Mais désormais cette scène contribue à l'atmosphère et te rappelle le but de tout ce qui respire sur cette planète : tuer Homs.
Je ne me rappelle pas vraiment quel pouvait être le thème d'Ether. On avait toute une série de personnages face à un phénomène qu'aucun d'eux ne comprenait vraiment. Ils avaient tous leur vie, leurs objectifs, et ce phénomène venait juste mettre un coup de pied dans la ruche. Tout le texte était, au final, à mon souvenir la manière dont chaque personnage interprétait les événements.
Donc.
Supposant que la subjectivité soit le thème, je vois plusieurs problèmes au paragraphe que tu proposes ("Cachés sous un abri de fortune...").
Premier problème : ce n'est pas subjectif. Le débarquement est un fait, l'abri est un fait, ce qui les a alertés est un fait. Au final, la seule subjectivité est le regard de Gisère sur les religieux, et c'est accessoire. Second problème : l'enjeu du paragraphe est de se cacher, ou de réorganiser les plans, ou de se questionner moralement... ce qui, à nouveau, n'a rien à voir avec la subjectivité. Le véritable enjeu est la manière dont les personnages perçoivent la situation.
Commence le chapitre par les vuldoniens qui veulent appliquer le plan (quel qu'il soit). "Malgré le débarquement, les vuldoniens voulaient mener le plan à terme." Et déjà là on est dans la perspective de Gisère. Tu n'as même pas besoin de dire qu'il est stupéfait, le paragraphe va le montrer pour toi. Tu vas développer en montrant qu'ils ont été surpris, pris de court et qu'ils se sont abrités visiblement à la hâte, à ce stade le lecteur peut effectivement supposer que suivre le plan n'est plus une option. Mais, tout du long, il y a cette idée que non, les religieux sont religieux, ils vont quand même le faire. Ils ne voient pas tout ce que le paragraphe donne comme un fait au lecteur, et là tu joues sur la subjectivité.
Et là ton paragraphe n'est plus inutile. Si le coeur de l'histoire est la subjectivité, le paragraphe y participe désormais.
Après c'est de la spéculation, avec de vieux souvenirs et sans contexte, mais c'est l'idée.
Toute ma théorie littéraire repose sur l'idée du "core", un dénominateur commun à toute l'histoire et qu'on retrouve partout. Je caricature un peu en disant que c'est "tuer Homs" (c'est plus complexe que ça) ou en disant que c'est "la subjectivité" (c'est un peu court), en général on n'arrive même pas à décrire ce concept fondamental. Mais l'idée est là.
Tant que le paragraphe parle de la même chose que tous les autres paragraphes du texte (principe d'unité), ton paragraphe ne sera pas inutile.
La même logique s'applique à Krintal et à ses champignons. Mais bref.
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