Réécriture - Anges
- Vuld Edone
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Alors voilà. Zarathoustra m'a proposé une réécriture et il se trouve que, voilà environ deux jours, j'ai écrit ceci.
Comme d'habitude, pas du tout satisfait du résultat (pas juste sur la forme) et ce texte allait finir à la corbeille comme tant d'autres avant lui. Ce que je vous propose, c'est que vous me disiez ce qui ne va pas et que je réécrive derrière.
Je précise par avance que vous n'avez pas à lire les quatorze pages. Allez jusqu'au moment où vous décrochez, dites ce qui ne va pas et je repasse derrière.
Deux autres remarques :
- Il s'agissait à l'origine d'un projet de fanfiction (je vous laisse deviner quel univers) que je n'ai jamais eu l'occasion d'écrire dû à plein de textes plus importants à côté. Je n'ai qu'assez peu adapté l'histoire à mon propre univers, et je fais surtout cette remarque pour expliquer les choix de narration.
Notamment je m'évertue à tout expliquer, on a donc directement accès à la boîte crânienne des gens, des pavés de digressions et de logique, comme dit le texte, "d'apothicaire".
- Même après quatorze pages et dû à cette fichue narration, le "chapitre" demeure inachevé. On en est environ à la moitié, voire au tiers. Au besoin je peux sans autres révéler tous les tenants et aboutissants de l'histoire, le plan, bref tout.
Le but de l'exercice est donc que vous me disiez quoi changer et que je le fasse. Je réécrirai autant de fois que vous me direz de le faire, jusqu'à ce que JE sois satisfait.
J'ai bien sûr mon propre point de vue mais pour l'exercice on va l'oublier. À titre indicatif personnellement je viserais à réduire le chapitre (complet) à huit pages, au besoin à éliminer des scènes, et à modifier la narration voire les événements jusqu'à ce que la nature animale des personnages ne soit pas là pour décorer.
Je précise aussi que cette histoire j'y tiens - ce n'est pas un Tlön ou "juste pour l'exercice", j'ai envie à terme de l'écrire en entier.
Heard we were humans once. Fond of « progress », turned out to be power. Turned us to beasts, and Earth into a sandbox. Took us, what? Two to three generations? To build cities within weeks, to blast them in a second.
Can’t be more free, can’t be more independent, can’t live more in the present. Guess mankind turned tail before its lucky paradise.
Got heroes, got bad guys, got the left aside. We’re Angels, weakest of the strong, strongest of the weak. And we’re pretty much a bunch of desperates.
Anges
Chevalerie sauvage
F01 - Feux croisés
Lumène comptait un peu plus de douze mille habitants. Petit port pour les uns, vaste cité pour les autres, selon qu’ils venaient de la côte ou des terres. Lumène vivait à l’ombre des Pilons, dix-sept réacteurs géants comme un champ d’aiguilles dans le lointain et crépitant, qui tuaient la végétation et qui tapissaient le ciel d’orages. Le jour se résumait à quelques éclaircies, les plus longues d’une ou deux heures, et le feu de ses projecteurs. Aucune cité n’était plus lumineuse que plongée dans les ténèbres.
Au moins la nuit était tranquille. Elle bourdonnait des musiques et des feux d’artifice, scintillait aux baies vitrées des tours et, en contrebas, du craquètement et des sirènes de police.
Puis il y avait le silence des Anges, couloirs d’acier où soufflait la ventilation par les gueules lamées des tuyaux à nu, au plafond, et où semblait crépiter le câblage épais sous les grillages du plancher. Le sigle à lauriers comme deux ailes repliées frappait chaque cloison par-dessus la peinture fraîche d’un jour dont les quelques coulées, avec le cadre des accès, laissaient seules jouer des ombres. Les lampes du plafond projetaient une lumière plus vive que le jour sur la peinture blanche et réchauffaient ces espaces larges où résonnaient chaque bruit. Elle avait l’impression d’entendre, dans les profondeurs, gronder le contrepoids de l’ascenseur – l’ascenseur n’avait plus de contrepoids depuis bientôt presque un an.
Elle portait le fusil au creux du dos, crosse repliée, et le casque à la ceinture contre les sacoches de munitions. La baïonnette était fixée au harnais, manche vers le bas, contre le gilet doublé aux flancs et qui lui remontait jusqu’au gorgerin, la forçant à lever le museau. Avec les gourdes, vingt kilos, le masque lui ne comptant pour rien. Puis, sur l’épaule, par-dessus le tacheté gris et noir urbain elle portait le sigle de lauriers des Anges, et cela seul comptait vraiment. Le casque était coiffé d’un grade à deux coches, terne malgré la lumière intense. Vingt kilos sur les grillages et les semelles épaisses de ses bottes se combinaient en un vacarme dans les couloirs de l’installation.
Sa montre indiquait presque vingt-deux heures.
La moitié du câblage sous ses pattes servait à alimenter les portes, les caméras et les innombrables détecteurs. Pire qu’une aile de chasseur. C’était une autre impression qui s’ajoutait à celui du vacarme, à chacun de ses pas, que l’impression du toucher insensible des lasers. Sauf que ce modèle de laser avait laissé place aux champs depuis bientôt un mois. Son casque crachotait, la friture seule du cryptage audible et totalement assourdie par le bruit ambiant. Radio de la ville, de la police et de la section. Elle s’attendit à voir un garde en poste à côté de la double porte du hangar. Il n’y avait que de la peinture blanche. Et cela faisait un moment que ses oreilles écoutaient le pas pressé derrière elle qui la rattrapait, soit de Glyne soit de Lou. Avant d’atteindre les portes, ce dernier la rattrapait.
Il la dépassa en se tournant, ralentit pour marcher à reculons quelques pas avec elle, à son rythme lent et pesant, et il lui souriait. Lou portait la salopette et entre ses pattes la deux cent trente-cinq dont le câble d’alimentation roulé au bras se balançait ensuite librement.
« Salut Reine ! » Lui lança le petit en lui souriant joyeusement.
Lou était moins haut d’une demi-tête, et d’une autre demi-tête sans la tenue de combat. Il avait encore troussé les pantalons de bleu gris à hauteur de genou, les manches de la blouse presque jusqu’à l’épaule et laissait le bouton du col dénoué pour donner de l’air à sa riche poitrine. Son long museau demeurait constamment entrouvert sur son sourire, pour souffler, un peu épuisé à force de se démener. Il tressautait pour accompagner la pilote jusqu’aux portes du hangar.
« Tu sais si le nouveau arrive ce soir ? »
Elle ralentit, un peu plus renfrognée, mais déjà les portes glissaient à leur approche, dévoilant les deux rampes du hangar et le vacarme de la grue comme des aboiements d’Allow. Le louveteau attendit encore une seconde, presque deux puis voyant qu’elle ne répondrait pas il lui sourit encore, repartit comme une flèche avec la radio. À son passage Allow sembla crier quelque chose qui fit exulter le petit. Soit à cause du bruit, soit à cause d’elle-même, Reine n’avait pas entendu ce qu’il avait pu lui dire. Elle se concentrait toute entière sur le mécha’.
Reine avait le museau bovin, affiné par l’âge, le pelage blanc recouvert par la tenue de combat qui ne laissait nue que sa tête. Les petites oreilles pointues semblaient à leur plus haut quand elles étaient à plat, écrasées par deux courtes cornes comme atrophiées. À l’oreille droite et s’étendant jusque sur sa nuque, son pelage se tachait de brun en forme de trèfle. L’autre tache, bien sûr, marquait un coin de son oeil gauche. Tous les vétérans ne pouvaient pas avoir une balafre – mais certains parvenaient à naître avec, songea-t-elle. Et ses yeux épais, gros et larges, étaient renfrognés par l’habitude, d’un noir profond.
Allow s’approcha d’elle, clé en gueule, clé en patte, l’autre patte tenant la fiche d’entretien. Il ne prenait même pas le soin de l’uniforme et, torse nu, subissait le froid métallique du hangar. Son poil jauni comme la rouille avait dû déteindre encore après une autre journée passée parmi toutes ces machines.
Ses deux assistants de l’unité de soutien oeuvraient à la rampe de droite, sous la grue dont les chaînes ne cessaient de s’entrechoquer. Lou avait bondi en deux temps pour atteindre l’habitacle et, versé dedans, installait la deux cent trente-cinq. La rampe de gauche, dans la partie de la pièce qui semblait, illusion, presque sombre, était déserte.
« Nuit calme, il paraît. » Marmonna Allow entre ses crocs, la clé toujours en bouche comme un os. « Tu as croisé Coppe ? »
Elle se contenta de hocher la tête, absorbée par le mécha’.
« Talon me prend la tête avec ses nouveaux. Si la nuit est vraiment calme, j’aurai du temps demain. »
Elle hocha la tête à nouveau. L’unité mécanisée mécha’ E-2o « Double coup » même repliée et sans ses lanceurs les surplombait d’une taille. Deux heures, Allow avait dû s’acharner environ deux heures pour préparer l’UIR et même alors, à vingt-deux heures, tout était encore à faire. Montage de l’arme, des lanceurs, des leurres, du surblindage, installation du réacteur. Dans vingt minutes le mécha’ serait fin prêt. Elle jeta un regard au chef mécanicien qui fut surpris de ce petit geste d’attention. Derrière le regard noir, il y avait un étonnement sans fin pour ce mécanicien constamment fatigué, aux oreilles molles pendant sur le côté, qui soupirait sans cesse et ne savait pas s’arrêter. Plus que le capitaine peut-être, Allow était l’âme des Anges à Lumène. Et le seul à savoir manipuler le réacteur chaotique.
« J’ai changé deux blocs de contact et des vérins à la patte droite. On teste ça dans une demi-heure. »
Trente minutes. Il avait dû se passer quelque chose dans les ateliers, ou alors Allow voulait profiter du calme. Reine prit la fiche d’entretien, le crayon, et se mit à lire toutes les notes scripturales, expéditives, presque uniquement composées d’abréviations. La plupart débutaient par un « S » qui signifiait suite, remarque déjà faite dans un précédent rapport. La fiche n’en était qu’au tiers et, comme à chaque fois, elle eut comme un serrement. Vu de dehors, le mécha’ semblait en parfait état et, sans les quelques impacts au blindage, flambant neuf. Elle cligna. Elle avait cru revoir les couleurs vives, rouge et bleu de l’ancien modèle. Allow avait dû s’en rendre compte, qu’elle s’était égarée encore.
Elle signa, lui rendit la fiche et se mit en marche vers le mécha’. Vingt-huit tonnes, huit de surblindage, quinze de blindage réactif en grille réparti entre le fuselage coulé d’une pièce, les gueules flanquant chaque côté et couvrant chacune sa patte articulée. Fichues pattes qui à elles seules avalaient un bon tiers du poids. Les pièces massives, encaissées, découvraient à peine sous quelques angles les articulations. Tellement de points vulnérables. À l’arrière les volets noirs comme le charbon couvraient les deux gueules des réacteurs.
Glyne se dégagea de sous le nez de l’appareil pour regarder la pilote qui s’était approchée, dont elle n’avait vu que les bottes et le pantalon au camouflage pareil à celui du « Double coup ». Elle croisa ce regard noir et ressentit ce frisson de peur qui la fascinait. Glyne détourna le regard puis retourna préparer l’ancrage pour le pivot. Elle aimait frissonner et s’imaginer des choses.
Glyne avait aussi vérifié que le marchepied était en place, juste sous les trois coches au blindage du fuselage qui menaient à l’habitacle. Elle jeta encore un regard aux bottes qui pesaient sur chaque marche et que le bruit des chaînes couvrait.
Portée par l’habitude, la pilote se laissa glisser dans le siège, en même temps retirait le fusil PAW-20 et ouvrant la crosse, le fixa sur le côté, dans les attaches. Puis elle enfila le casque, le sangla, retira le masque et l’enfila à son tour, ne le fixa que d’un côté pour le laisser pendre après l’avoir vérifié brièvement. Les consoles étaient noires, sans alimentation. Elle attrapa la visière de casque, la fixa, la tapa pour la sentir résister puis rabattant la visière sur son visage, d’un sourire satisfait, Reine se laissa s’enfoncer contre le dossier.
Toute la fatigue et vingt kilos d’eau, de fibres et de colère l’emportèrent dans sa somnolence. Seuls les grondements de la grue, les crissements des outils de Lou sur le dos du mécha’ et les cris étouffés d’Allow la retenaient à ce monde. Dans son oreillette, les voix de la police se succédaient en un débit régulier d’annonces. Tout ce qui la dérangeait était la sangle détachée, qui lui donnait une impression de vertige, et ce dossier de siège trop confortable, pas assez carré, qui lui semblait presque étranger. Elle hochait la tête doucement.
L’UIR consistait à disposer en permanence d’un mécha’ prêt à l’intervention, en combinaison avec une unité d’assaut. Il fallait vingt minutes dans le meilleur des cas, généralement plutôt une à deux heures pour préparer un mécha’ au combat. Au-dessus d’elle la grue fit passer le canon d’assaut à trois tubes jumelés et son pivot. L’ascenseur, gueule noire où fusaient les lumières de lampes jaunes, avait également amené les caisses d’obus par bandes. L’Unité d’Intervention Rapide était armée par défaut, prête à tout et donc à rien, et prête à partir dans les cinq minutes. L’idée était de disposer d’une unité prête à tout instant, donc, de faire tourner les mécha’ et, dans le cas où il n’y avait qu’un mécha’, de faire tourner les pilotes.
Vingt-deux heures, son oreillette jouait des notes nerveuses qui couvraient presque les annonces de la police. Elle dodelinait en rythme, et souriait, les yeux fermés derrière la visière toujours déconnectée. La musique lui faisait pulser le sang, oublier la fatigue et la frustration.
Devant elle la porte du hangar, coulissante, en faibles lames d’acier, laissait même filtrer les lueurs nocturnes. Des deux côtés de la porte se trouvaient les lampes rouges d’alerte, muettes. Une nuit calme, comme ce n’était plus arrivé depuis des semaines.
Même épuisée, Reine ne parvenait pas à s’endormir. À la place elle se trouvait prise dans un faux rêve, encore dans l’habitacle, et elle était comme paralysée, bercée par la musique qui emplissait tout. Glyne montait le canon sur son pivot, en affût. Deux mille cinq cents coups, un peu plus de trente secondes, par bandes d’une perforante pour trois incendiaires, plus une traçante. Il y avait, en plus de sa visière, un viseur tête haute par-dessus les consoles, qui faisait face à la porte. Elle sentait les ombres découpées dans tout l’habitacle, sur le siège, dans les recoins, aux pédales et sur les plis de sa tenue, qui semblaient s’arracher et la brûler. Elle ne pouvait pas bouger, même si elle l’avait voulu, et elle ne le voulait pas.
La musique l’excitait.
Puis elle eut un frisson, à un changement infime. Comme une chaleur folle. Elle sut qu’Allow était en train d’installer le réacteur chaotique, de le glisser à l’arrière du mécha’. Un peu comme dégoupiller une grenade pour en laver l’amorce.
La voix grésillante du chef mécanicien sembla redonner vie à son corps. « En place » dit simplement Allow et à ces mots Reine ouvrit les yeux. Un instant, juste un instant, elle fut surprise. Elle avait cherché le palonnier, les panneaux sur les côtés et en branches au-dessus d’elle. Ancien modèle. L’habitude avait déjà commandé à son bras de presser le bouton, jusqu’à ce que les écrans de console s’allument un à un et que les lignes de code, brèves, laissent place aux données d’état. De l’autre patte elle branchait la visière, puis le masque alors que les informations défilaient. Glyne s’était extraite de sous le nez et lui faisait un geste. Elle tourna le regard sur la mécanicienne et le canon d’assaut, aussitôt, se braqua dessus, puis de l’autre côté contre le mur avant de revenir face à la porte de hangar.
Un regard de tueuse. Littéralement.
« Principale ? » Demanda la voix d’Allow comme épuisée à la radio. Elle valida. « Secondaire ? » La poigne à la manette elle fit jouer du doigt deux boutons puis valida. « Panneaux gauches ? » Les volets de la gueule gauche se mirent à glisser, ternes sous les lumières du hangar. « Panneaux droits ? » Instruction par instruction, commande par commande Reine validait et à chaque fois il y avait un serrement inquiet, à l’idée d’une erreur. Elle s’appliquait. Et elle se répétait, une nuit calme. « Second bloc ? » Allow, avec le temps, ne prenait même plus le temps de préciser. Elle arma le second bloc de contre-mesures, fusées et leurres, puis le désarma rapidement. L’ensemble du système de leurres en manuel était fonctionnel, elle activa les mesures automatiques, laissa le système armer et désarmer à son tour, valida.
« Température ? » Demanda la voix fatiguée d’Allow.
Il y avait trente-sept mesures de température différentes sur tout l’appareil. Le chef mécanicien avait accès aux mêmes nombres de son côté. Elle les énuméra chacun clairement, soupira en l’entendant valider.
« Lanceur gauche dans cinq. »
Lou était en train de fixer le lanceur blindé de quatre missiles sol-sol Javelin. Elle compta, cinq secondes, vit le voyant tourner au vert. La console d’écran n’émettait aucune lumière, terne comme tout le reste. « Check » répondit Reine, et elle attendit que le lanceur droit soit en place. Glyne passait en revue les pattes articulées, articulation par articulation, une dernière fois. La voix du chef mécanicien annonça le lanceur droit, elle se concentra sur l’écran, un instant sur l’avant et les consoles de flanc puis à nouveau sur l’écran. Même au repos, la pilote ne pouvait s’empêcher de contrôler son environnement.
Enfin la voix d’Allow lui demanda : « Radio ? »
Il avait grimpé au marchepied, accoudé au rebord de l’habitacle, la regardait avec ses cernes. Elle se tourna vers lui et le canon suivit, visant dans le vide quelque part dans le hangar. Elle fit un geste à la gorge et hocha la tête. Il hocha à son tour, fit un geste et descendit le marchepied tandis qu’elle rabattait la verrière.
« Mécha’ en ordre de combat. Glyne reste avec toi, je serai au garage en cas de besoin. Et Reine, arrête la musique, toute la base l’entend. »
Reine se renfrogna, jeta un regard glacial à la porte de hangar avant de faire jouer son pouce pour taire la deux cent trente-cinq. La musique sauvage s’évanouit soudain, ne laissant plus que le bercement des annonces de police et des festivités nocturnes.
Officiellement, la compagnie des Anges de Lumène disposait d’une section de soutien, d’une section d’appui-feu et de trois unités d’assaut. Ce soutien, c’était Allow et ses deux assistants. L’appui-feu se résumait à Reine. Et la troisième unité de la section d’assaut était le capitaine Evans. Un peu après minuit, le capitaine avait traversé le garage pour se parquer à distance de l’unité de Coppe. Serine l’avait attendu juste en face et les phares du tout-terrain effacés par les puissantes lampes du garage avaient ajouté au teint pâle de ce qui lui tenait lieu de secrétaire. Elle avait enfilé gilet et casque avec précipitation, sans sangler les flancs et l’arme tenue négligemment sur l’épaule, le casque à la patte. Serine eut un sourire fin en voyant son supérieur quitter le véhicule et passer devant elle avec un bref salut.
L’unité d’assaut du sergent Coppe avait à peine prêté attention au capitaine. Talon, mitrailleuse en main, avait seul gardé le contact jusqu’à ce que Serine se mette à suivre le commandant de la base, et alors seulement il était revenu au groupe. Les quatre soldats collés au blindé à roues étaient, avec le chef mécanicien et son louveteau, la seule présence dans le vaste garage. Leurs éclats de voix, leurs rires, les coups sourds de leurs armes et celui plus faible de leurs cartes battaient parmi les piliers de béton.
Evans laissa tout cela derrière lui. La porte se refermait, il laissait Serine lui dire que l’UIR était en place, depuis bientôt deux heures, et que les juniors – elle disait juniors, elle aussi – avaient fini les manoeuvres du soir.
« La maire. » Affirma Evans. C’était une question.
« Pas de nouvelle. J’ai rappelé, avec de la chance elle voudra peut-être nous revoir. »
« Marsh. » C’était aussi une question.
« Le pire c’est que je crois qu’il nous aime bien. » Puis la belette effaça son sourire. « Il a tracé la ligne. Tant que les pilons sont en construction, il a les pattes liées. »
Une question de jours, trois semaines au maximum avant la fin des travaux. Evans allait toujours de son allure ferme, par les escaliers, comme si la tenue de combat n’existait pas. Serine suivait derrière et elle n’arrivait pas, comme son supérieur, à garder les pattes serrées au creux du dos. Ne serait-ce qu’à cause de l’arme en bandoulière sur son épaule.
« Basile. » Difficile de dire si c’était une question ou un ordre.
« Pareil qu’hier, le moral bas et l’envie d’en découdre. Ils veulent faire leurs preuves et très franchement, nous aussi. »
Ils passaient devant le baraquement, gagnèrent les bureaux puis celui du commandant dont la porte s’ouvrit en un souffle. À l’intérieur, à côté du bureau de chêne le sergent Corve jouait avec une balle entre ses serres. Il l’avait griffée à plusieurs reprises, jeta un regard aux arrivants puis fit l’effort de se lever et saluer. Evans le salua sec avant de s’abattre dans son siège, face à la pile de dossiers épars par-dessus les cartes.
« Café. » C’était aussi une question. Les deux soldats déclinèrent et Evans, secouant la tête de dépit, mit en route la cafetière pour y glisser une tasse à l’instant où le café se mit à couler. Il but d’un trait, reposa la tasse et jeta un regard à « la paperasse ».
« Le nouveau arrive quand ? » Demanda Corve avant de mordiller la balle de son bec.
« Demain, première heure, par le train. » Evans avait liquidé la question en quelques mots, comme un détail.
Deux mois qu’il se cassait la tête pour amener un nouveau pilote à Lumène, deux mois qu’il se cassait la tête pour maintenir les Anges à Lumène et ce matin-là, avec la moitié de ses objectifs accomplis, il mesurait à quel point il était pathétique en commandant. Sa propre unité se démenait pour réparer ses erreurs et lui ne pouvait même pas leur mentir. Il ne rêvait que d’une chose, prendre le fusil et rejoindre Coppe sur le champ de bataille. Il avait encore, quelque part au plus profond de lui, cette fougue de jeunesse, le besoin de se battre. Bon sang qu’il comprenait les juniors, et même s’il détestait les entendre appelés ainsi, il espérait que ses camarades les comprenaient aussi.
Seule bonne nouvelle, la nuit serait calme. Le capitaine Marsh et sa police maîtrisaient les rixes à mesure qu’elles venaient, et les quelques noms redoutés de Lumène semblaient calmés. C’était d’avoir blessé Sharr qui avait donné du répit, comme un signal à travers toute la cité, répit tant dans les rues que sur le papier.
« J’ai parlé avec le conservateur » se mit à énoncer Evans, comme pour lui-même. « Maraudeurs. »
« Quelle surprise... » persifla Corve en faisant jouer la balle entre ses doigts avant de la serrer sec. Les Maraudeurs, c’était une technologie de pointe, ridiculement avancée, et des techniques de traître. Un culte technocrate. À l’origine des réacteurs chaotique, en tout cas c’était l’ouï-dire.
Serine s’appuya contre le mur, juste à côté de la porte. « J’ai envie de dire tant pis pour Lumène. » Et elle leva instinctivement les yeux dans le recoin, là où, presque invisible, se trouvait l’oeil de verre de la caméra. On ne cachait rien aux recrues.
« Evans, » reprit-elle, « on n’est pas en état de lutter contre les Maraudeurs. On s’est fait rouler dessus par Sharr, et c’est juste un clochard. Reine est à bout, Allow est à bout, Coppe est à bout, les juniors ont à peine connu le feu et la police nous lâche. C’est ma ville, j’y ai grandi et je dis que Lumène a semé le vent. »
« Elle a pas tort » précisa Corve.
Le capitaine joignit les deux pattes sous son museau et, penché en avant, le regard filtrant à travers les dossiers pour regarder la carte, il se répétait deux choses. La première, que Serine avait raison. La seconde, que ça avait toujours été le cas. Même du temps où ils avaient deux mécha’, même s’ils avaient disposé d’un bataillon, d’une division, de la moitié des Anges à Lumène. Il n’arrivait pas à se rappeler une seule situation où les Anges n’avaient pas été aux abois. La même logique disait de tout plaquer et de se terrer dans un trou.
« Basile avec nous à zéro cinq, Corve tu planifies, Seline tu avertis Marsh. On aura l’UIR en renforts. »
« Promenade matinale dans un complexe chaotique. J’ai du travail » conclut le corbeau en quittant le bureau.
Seline eut l’envie un peu stupide de coiffer le casque en sortant. Elle se retint, tourna le regard vers Evans et trouva le capitaine aveugle. Ce fut le mot exact qui lui vint en tête en regardant Evans toujours penché, le regard perdu dans ses pensées et qui les envoyait, une fois de plus, droit dans un traquenard. Et elle se répéta pour elle-même, comme un mantra, qu’un bon soldat suivait son bon chef plus loin que ça.
Une heure trente-huit, presque trente-neuf quand une première annonce la tira du sommeil. Elle sentit son corps ankylosé bourdonner soudainement, le sang affluer, les pensées lui revenir, balayer ses songes. Elle frissonna. Un bref appel à Glyne éveilla la jeune mécanicienne qui quitta les caisses d’outils pour s’approcher du mécha’. La petite s’était roulée un instant pour dormir.
Dans son oreillette, la police passait de plus en plus d’annonces. Les renforts convergeaient au même point. Ce pouvait n’être rien, ce pouvait n’être rien encore. Déjà Reine passait en revue tous les systèmes du mécha’, commande par commande, faisait jouer les volets et les contacts aux articulations, les gueules des réacteurs. Il y eut un bouillonnement dans l’air à leur activation, une soudaine chaleur. Glyne s’était approchée de l’habitacle, fit un grand geste puis s’écarta pour observer le monstre d’acier s’éveiller. Une annonce à la radio fit état de blessés. Ce pouvait n’être rien encore.
« À tous de PC, préparez-vous à l’intervention. »
La voix sèche et tranchante d’Evans avait dominé un instant les communications. Une fois évanouie, Reine fut persuadée. On allait envoyer Coppe, puis elle. Nouvelle annonce, puis question de la police qui resta en suspens. Les réponses étaient calmes, entrecoupées par les tirs de barrage.
Il pleuvait sur Lumène, à travers les nuées orageuses, des dizaines d’unités de largage, capsules plongeantes qui allaient s’écraser au même point, dans le quartier industriel, et larguaient dans les cratères leurs unités mécaniques. La police tentait d’encercler ce secteur, d’en évacuer les citoyens sur place. Quartier industriel, de nuit, tous les ouvriers étaient sur place. Les combats faisaient rage. Et tandis que toutes les forces de police convergeaient vers ce même point, les Anges attendaient de savoir à quoi allait servir cette diversion.
L’ascenseur de charge se referma derrière elle, puis les volets se relevèrent, prêts à absorber la poussée des réacteurs. Les rails crépitèrent à l’activation. Elle voyait encore, au centre, le piston à vapeur, inerte. Elle était nerveuse en voyant le piston inerte, même en sachant qu’il n’était plus utilisé.
« Ici Alice, » grogna le sergent Coppe à la radio, « en attente, à vous. »
Dans le garage l’unité s’était armée et en partie engagée dans le blindé de transport. La seconde unité de la section d’appui-feu aurait dû être pour les deux transports Piranha et les tout-terrains Aigle. À la place, l’unité d’assaut augmentée de deux soldats pilotait le blindé et sa tourelle à autocanon jusqu’au coeur du combat.
Les annonces continuaient de passer les unes après les autres. La police, malgré son nombre, ne parvenait pas à verrouiller les accès. Les machines progressaient de tous les côtés, se confrontaient aux barrages et faisaient pleuvoir grenades, obus et roquettes sur leurs positions. La cavalerie de Marsh et ses blindés lourds se regroupaient encore. Toutes les ressources de Lumène se concentraient en ce lieu précis et, à mesure, la cité illuminée était plongée dans le brouillard de guerre. Les Anges n’avaient qu’une unité d’assaut, un mécha’ et une seule chance de peser sur les événements. Alors tous attendaient l’indice qui leur dirait où frapper. Glyne, son fusil entre les pattes crosse contre l’épaule, et le casque mal mis sur la tête, fit ouvrir la porte coulissante du hangar. Le vent frais de la nuit s’abattit dans la pièce, la pièce plongée dans le noir s’augmenta de trois mètres bétonnés de rampe ouverte sur le vide.
« À tous de PC, intervention. » Elle sut que le blindé démarrait déjà, se raidit sur ses propres commandes. « Les Glycines, avenue Minos. »
Et la voix tranchante d’Evans continua de citer le rapport à mesure qu’il lui venait. Les Glycines, deux tours plus larges que hautes, servaient de « bureaux » à une entreprise privée fournissant et contrôlant les pièces de régulateurs aux pilons. Reine s’en fichait royalement. Ce n’était qu’une excuse pour avoir leur propre sécurité, une milice, et leurs propres secrets. Le réseau électrique venait de mourir là-bas. Quelques secondes plus tard, les Glycines s’illuminaient de deux boules de feu incandescantes. À moins de huit cents mètres des industries.
Le largage de capsules n’était pas une diversion. Ils préparaient une extraction.
La voix de Glyne, un peu faible, lui donna enfin le signal qu’elle attendait. Reine fit claquer les sangles puis hurler les réacteurs. Au signal, la rampe s’activa. La pilote se sentit écrasée dans la seconde où, catapulté, le mécha’ fila sur huit mètres comme un boulet. Il surgit dans la nuit, ses réacteurs crachant une traîne d’un bleu clair et intense, visible de très loin et de très loin le mécha’ était semblable à une étoile filante.
La ville en-dessous d’elle illuminée, ses rues du jaune vif des réverbères, toutes les fenêtres brûlantes et le feu croisé des projecteurs, et soudain une alerte. Le radar passif avait détecté un projectile en approche, en courbe, qui filait sur elle.
Missile sol-air, eut-elle le temps de penser. Elle avait déjà braqué les commandes pour se tourner face à la menace, tandis que le système automatique faisait pleuvoir deux gerbes de fusées comme deux ailes de flammes. Le masque lui couvrait le museau, lui plaquait le pelage jusque sous les yeux. Elle entendit nettement sa respiration. Le mécha’, lourd et lent, ne s’était tourné assez que pour lui permettre de voir d’elle-même la traîne vive dans la nuit monter sur elle, avant que le missile ne l’atteigne.
Un missile sol-air ne visait pas l’impact direct. Conçu pour intercepter des engins peu ou pas blindés comme les chasseurs intercepteurs et les hélicoptères, certains modèles également modifiés pour servir à la défense antimissile, les projectiles se déclenchaient à proximité pour mitrailler leur cible d’éclats. À ces vitesses, c’était nécessaire pour intercepter les cibles les plus agiles, et suffisant pour déchiqueter les ailes, les réacteurs, les pales. L’explosion, à un ou deux mètres, causait plus de dommages qu’un coup direct pour lequel ces missiles ne disposaient pas de tête perce-blindage.
Les éclats dévorèrent tout le flanc gauche du mécha’ E-2o, tailladant la patte, la gaine, le fuselage et le lanceur. Deux éclats frappèrent le point d’ancrage du lanceur et le premier, traversant les circuits de rappel, réduisirent le lanceur au silence. Trois petits éclats traversèrent l’entrée d’air et en démontèrent les pales comme les volets, tandis qu’un éclat plus gros s’enfonçait derrière et en déchirait le troisième jeu de pales. La patte criblée par sept impacts s’ouvrit d’elle-même et pendit dans l’air, crachant l’huile sur deux sections entre les plaques de surblindage. Un dernier shrapnel s’était logé contre la verrière de l’habitacle où il avait mordu un sillon de vingt centimètres pour rester fixé à la surface.
Le mécha’ était intact.
Et déjà le mécha’ s’effondrait. Sans élan ni inertie, perdant sa trajectoire et emporté par les vingt-huit tonnes de sa masse l’engin de combat se mit à plonger vers le sol quelques soixante-cinq mètres en contrebas.
Reine était étourdie, secouée par la déflagration et le choc soudain. Elle serra les dents, jeta un oeil aux systèmes tandis que les cartouches d’extinction jouaient, par prévention, sur les systèmes internes de câblage. L’entrée d’air démontée avait forcé l’extinction des réacteurs qui, sans traîne, renvoyaient le mécha’ à l’obscurité avec, à peine, une trace thermique intense. Les feux de projecteurs se croisant dans le ciel happaient cette masse de métal en chute libre un instant avant de la renvoyer aux ténèbres.
Elle força les réacteurs à reprendre, vérifia leur trajectoire et tandis que le mécha’ se tournait presque sur le dos, forçant sur les commandes, elle en força les tuyères. À nouveau la traîne bleutée s’échappa en une flamme furieuse et la courbe de chute s’affaiblit. Reine n’espérait plus éviter l’impact, cherchait seulement à frapper la rue. Une pensée absurde, dans les secondes que lui laissait la chute : éviter de s’abattre sur une habitation. Et en même temps, rageusement, elle cherchait ce qui avait pu l’abattre.
Quelque part, sur les toits de Lumène, un plaisantin lui avait décoché un missile. Il avait attendu qu’elle sorte et n’avait pas cherché à la détruire.
L’engin de guerre ricocha contre le bitume, dans l’avenue encombrée de voitures, frappa à deux reprises la double ligne centrale et les véhicules de moins d’une tonne, sur les côtés, semblèrent se soulever, se bousculer au passage, comme des sursauts. Puis le flanc gauche creusa dans le goudron une tranchée peu profonde, démonta la rue sur une vingtaine de mètres. Le mécha’ s’immobilisa enfin et Reine n’entendit plus que le sifflement de ses oreilles, les claxons autour de son engin et à la radio les appels de Coppe, de Glyne et d’Evans. L’unité d’assaut venait la chercher.
« À Alice de PC, » répliqua Evans, « négatif, interceptez l’hostile, à vous. »
Une seconde, puis le grognement de Coppe confirma. Les Anges n’avaient pas le luxe de jouer aux héros.
À nouveau les réacteurs s’étaient éteints, automatiquement, pour éviter les incendies. À nouveau les cartouches jouaient et les systèmes passaient en revue le reste des capteurs en état. Elle ne vérifia qu’en dernier le canon d’assaut, indemne, protégé par le fuselage durant l’impact. Puis elle tiqua, releva la visière et toucha du doigt sa tempe. Bien sûr. Rabattant la visière, la pilote tenta de redémarrer sa machine. Les réacteurs grondèrent puis se turent.
Plus de claxons, à la place elle remarqua la rue désertée et se raidit. On voulait son mécha’. On l’avait abattue pour récupérer son mécha’, ou bien le réacteur chaotique qu’il contenait. L’ennemi avait seulement mis du temps à repérer son point de chute.
« À Reine de Glyne, j’ai un visuel. »
Versée sur le côté dans la rue encombrée, Reine ne pouvait pas voir le bâtiment des Anges encore proche, plongé dans la nuit par ses trop faibles lumières. Glyne avait vu le mécha’ se faire abattre en plein vol, sans doute vu la position du tireur. La mécanicienne avait dû avoir beaucoup de pensées et un réflexe. Le besoin, comme Coppe, de défendre la combattante en difficulté.
Il y avait plus de quatre cents mètres entre l’ouverture de la rampe et le point de chute du mécha’. Trop pour un fusil PAW, même avec une lunette. Le fusil d’assaut lourd était conçu pour des engagements à cent, cent cinquante mètres, et dans les faits bien trop souvent à vingt mètres ou au contact. Alors, quand Glyne lui avait dit qu’elle allait couvrir la pilote, tout de suite Reine avait bondi à la conclusion qu’elle s’était armée d’un RAW.
« Don’t scrap the paint » Dit seulement la pilote avant de revenir à ses consoles.
Les consoles couvraient les angles de chaque côté, laissant l’arrière avec les réacteurs et le bloc moteur en angle mort. Il y eut soudain un frisson, une violente décharge à l’arrière du fuselage, là où les hostiles avaient tenté de percer le blindage réactif. Elle ne les avait même pas vus, ni entendus venir. Aussitôt pressant les manettes Reine fit se mouvoir le mécha’, et les réacteurs crachèrent leur flot de flammes, assez pour soulever l’engin et en dégager la patte gauche toujours repliée. Un souffle passa au-dessus d’elle, comme un infime trait de lumière, et Reine vit une araignée de métal suivre, rouler par-dessus l’habitacle pour s’effondrer dans la rue, en apparence intacte. Une nouvelle décharge éclata de l’autre côté, laissant le bloc moteur vulnérable.
Si elle ouvrait la verrière pour nettoyer les hostiles au fusil, elle était morte. Reine cherchait la dernière pièce du piège et la trouva enfin, à sa surprise, une bête aux aguets derrière l’une des voitures de la rue. Elle remarqua ensuite les pattes dont les avant-bras n’étaient que du métal.
Le canon d’assaut, à peine dégagé, se braqua sur lui. Sur elle. Quand la bête bondit de son couvert, se voyant repérée, elle distingua nettement une cougar et ses habits sombres, amples, à la doublure intérieure couverts comme de circuits imprimés. Reine s’en fichait, pressa les commandes et le bloc de contre-mesures se déclencha, tirant ses rangées de fusées incandescantes. L’arrière du mécha’ sembla s’embraser avant que les fusées n’aveuglent la rue entière en retombant, douche brûlante sur les voitures abandonnées. La cougar, se voilant les yeux de ses deux bras métalliques, pesta puis saisit un des véhicules près d’elle.
Tout le reste sembla à Reine d’une extrême routine.
La voiture de quelques huit cent kilos fut soulevée sans peine, puis projetée sur le mécha’ et la pilote ne se donna pas la peine de l’éviter. le véhicule se fracassa contre la verrière, ricocha et alla s’abattre en arrière. Déjà Reine voyait son adversaire qui en avait profité pour franchir la distance et se jetait sur l’habitacle, prête à briser la verrière déjà endommagée et, se dit Reine, toutes ces choses. Puis elle vit le trait fin de lumière et la cougar, comme hébétée, tomber sur la vitre sans pouvoir frapper.
« J’ai touché ? » Demanda Glyne à la radio.
« Headshot » Lui répondit Reine.
Le fusil de précision RAW tirait une fléchette de zéro point deux millimètre, plus petite qu’un fil, à vitesse hypersonique. Le trait résultant de plasma, stable jusqu’à quatre kilomètres de distance, était de ces armements tendant à l’absurde et rendus nécessaires par les ennemis affrontés. Glyne venait de faucher son adversaire au fusil anti-matériel et la cougar, frappée de plein fouet, la tête percée de part en part, ne réalisait même pas d’avoir été touchée, ne sentait même pas vraiment de douleur, ne saignait pas tant la plaie était faible, et pourtant subissait tous les effets du choc. Elle ne tenait debout que parce qu’elle était un monstre.
Même alors Reine ne pouvait pas étouffer la peur qui la faisait trembler. Elle savait ce qu’elle devait faire, ouvrir la verrière, utiliser son fusil et ensuite, ensuite, elle savait aussi le risque que cela représentait. Alors, se rabattant sur l’option plus prudente, elle déclencha les pots nébulogènes. Les grenades vinrent fouetter la cougar, éclats des pots et cartouches mêmes qui la projetèrent à nouveau sur la rue, à plusieurs mètres. Aux feux ardents des fusées succéda la brume blanche éclatante des fumigènes.
Ce faisant, Reine perdait le contact. Elle vit enfin la patte droite se rétracter et, le mécha’ rétabli, poussa les commandes en arrière pour battre en retraite. Le nez dressé, l’engin reflua le long du sillon avant de se stabiliser. À vingt mètres la rue n’était qu’un mur de brume voilant tout, y compris au thermique, et qui ne s’effacerait pas. Son adversaire, elle le savait, s’était déjà rétabli et si elle ne surgissait pas de face, alors elle était en train de contourner le mécha’.
« Robots ! » Cria Glyne.
La petite n’avait connu que l’entraînement et, à plus de quatre cents mètres, ne voyait du combat que ce que lui montrait sa lunette. Détachée, distante, elle s’excitait quelque peu à la manière d’une enfant derrière sa console. « Quatre heures ! » Ajouta encore Glyne précipitemment et Reine, un oeil sur l’écran, vit les araignées de métal l’approcher de ce côté. Attendant que les pattes se déploient pour stabiliser, et alors elles grimperaient et se mettraient à démonter le mécha’.
« Look for miss Fist » Lança Reine avant de déployer les pattes.
« À Glyne de Coppe, change de canal ! » Gronda le sergent au milieu de leur conversation. Il avait cru que les robots étaient pour lui. Son unité, en canal fermé, avait également engagé le combat, quelque part entre l’avenue et le quartier où la police luttait toujours contre les machines. Reine pesta. Même si elle s’en sortait ici, elle ne pourrait plus les rejoindre à temps. Les araignées se précipitaient déjà sur elles, par le sol et bondissant des voitures.
Un regard sur le côté, le canon d’assaut se tourna sur les machines et faucha celle qui allait s’abattre, puis celle montée sur le toit d’une familiale. Les obus déchiquetèrent le toit, les sièges et tout le flanc de la voiture, ainsi que le trottoir derrière. En même temps la patte du mécha’ se soulevait pour retomber lourdement et l’araignée la plus proche fut écrasée nette tandis qu’une autre bondissait pour s’y fixer. Une pression et la patte se replia contre l’entrée d’air, écrasant la machine tandis que le mécha’ se dégageait.
À nouveau Glyne appela : « Neuf heures, sur le toit ! »
« Good girl. »
La cougar ne savait pas se battre. Elle faisait encore des calculs d’apothicaire, de ces calculs rassurants comme : le mécha’ n’a plus de contre-mesures. Le mécha’ est occupé par la diversion des araignées. Le mécha’ va se dégager et donc se rapprocher du toit. Le mécha’ ne peut pas viser en l’air. Le mécha’ avait le blindage du bloc moteur endommagé et, une fois son réacteur chaotique extrait, si la cougar savait le retirer, le mécha’ ne serait plus qu’une masse de métal sans défense.
Pour Reine, le calcul était beaucoup plus simple. Le mécha’ avait toujours été une masse de métal sans défense.
Et quand son mouvement s’acheva, exactement là où son adversaire l’avait voulu, quand elle sentit la cougar s’abattre et le point frapper droit dans le bloc de contre-mesures, s’y enfonçant et le faisant crépiter, quand elle sentit le mécha’ glisser vers le sol et manquer s’abattre, la pilote se contenta d’inspirer longuement. Pour son adversaire, elle devait sembler aux abois. Pour elle-même, elle l’était.
Le tir de Glyne fit mouche une seconde fois.
Le bras de la cougar se mit à trembler et elle le regarda sans comprendre, puis comprit enfin et se tourna là d’où venaient les tirs, dans ce recoin d’ombres lointain. Tout ce temps où la cougar avait cru combattre le mécha’, c’était une petite mécanicienne qu’elle affrontait. C’était cela, une diversion. Et toujours dans ces calculs d’apothicaire, la cougar sembla hésiter entrer rester pour démolir le mécha’, ou s’abriter de ce tir. Une seconde, presque deux secondes d’hésitation durant lesquelles Reine se contenta de tirer, une rafale puis une autre, pour faucher les araignées qui approchaient.
Si la cougar avait choisi de s’acharner, se dit Reine, il est probable qu’elle aurait réussi. L’ennemie tira une petite mine de son vêtement ample, que la pilote la vit poser à travers l’écran de console, puis bondit dans la ruelle proche, trop vite, devait-elle calculer, pour que le tireur puisse la toucher encore.
Reine se demanda si, en continuant de reculer au lieu de s’arrêter à vingt mètres, elle aurait pu éviter purement et simplement le combat. Elle y resongea en attendant que la mine éclate et elle se raidissait déjà dans l’attente, son esprit se vidant à cette simple pensée. Glyne l’avertit qu’elle avait une bombe sur son mécha’. Alors la pilote se répéta, est-ce qu’elle aurait pu rompre le contact.
Si elle l’avait fait, la cougar aurait pu la poursuivre sans peine à travers toute la ville, et Glyne n’aurait plus été là pour la couvrir.
Une rafale balaya la dernière araignée de métal, juste avant que la mine n’éclate. L’explosion souffla les vitres du bâtiment proche, projeta le mécha’ à terre et la charge, conçue comme un dard, perça à travers la grille malgré la réaction, alla s’enfoncer à l’avant du bloc moteur, dans les accumulateurs dont elle en déchira trois. Les cartouches se déclenchèrent et le mécha’ en flammes, reposant dans la rue, n’eut plus que cette lueur pour l’éclairer. Les consoles étaient noires, ce coin de rue était noir, sans plus de réverbère ni la lumière du bâtiment ni les phares des voitures pour l’éclairer. Glyne continuait d’appeler pour que la pilote lui réponde, jusqu’à ce qu’Allow la rejoigne et lui reprenne le fusil. Tout s’était joué en moins de cinq minutes.
Officiellement, c’était le jour. À peu près onze heures. Evans regarda encore le ciel chargé de nuages. La pluie battait doucement sur la ville en fête. Marsh venait de s’éloigner, il regardait encore la carrure solide dans l’uniforme de police et galonnée contourner le filet de sécurité. Les passants regardaient, curieux, la grue dégager de son cratère le mécha’.
Aux côtés d’Evans, Allow croisait les bras.
« Je répare quoi en premier, le Double coup ou le Piranha ? » Il savait que ce serait le mécha’. Evans allait laisser Coppe prendre le blindé des juniors en attendant.
Le capitaine demeura silencieux un moment. Il attendit que le mécha’ soit déposé sur le lourd camion aux couleurs de la police de Lumène, puis secoua la tête.
« Plus la peine. »
« Rassure-moi, ils emmènent bien le mécha’ à l’atelier ? »
Cela fit sourire Evans, cette insinuation que Lumène enverrait un mécha’ à la ferraille. Puis le sourire s’évanouit lentement.
Sans mécha’, la maire ne verrait plus dans les Anges qu’une police de luxe un peu chère. Elle poserait sa question de manière à ignorer qu’Allow allait le remettre en état d’ici au soir, au lendemain au plus tard. C’était l’excuse qu’elle attendait pour jeter les Anges hors de la ville, et Evans, cynique, se demandait même si elle n’avait pas passé un accord avec Homs pour enfoncer ce dernier clou. Marsh au moins partageait cet avis. Aucun d’eux n’aimait l’impression d’avoir été joué.
« Reine. »
« Tu t’inquiètes pour rien, » déduisit le mécanicien. « Elle doit déjà être debout. »
« Elle le prend comment. »
« Ah, » rectifia Allow avant de hocher la tête.
Le chef mécanicien ne répondit pas vraiment, surtout parce qu’il ne savait pas quoi répondre. Quelque chose en lui supposait que Reine allait être soulagée, et que même si elle ne l’était pas, de se retrouver hors de combat pour un jour ou plus ne pourrait lui faire que du bien. Puis il se mit à penser que la même chose s’appliquait à l’ensemble du personnel des Anges, lui compris. Et il n’avait aucune envie de prendre une pause.
À son tour il leva la tête du côté des nuées sombres, de la petite pluie fine qui battait sur leurs museaux. Le camion partait avec le mécha’. Il se tourna vers Lou qui, près du coffre du tout-terrain Aigle, gardait le conteneur du réacteur chaotique. Trois heures pour retirer cette saleté sans risque, après tous les dégâts subis. Et d’eux trois, sous la petite pluie fine et les lumières de la ville, Lou était le seul à vraiment sourire.
« On abandonne ? » Demanda Allow à l’adresse d’Evans.
Ce dernier soupira. « Il me reste une cartouche. »
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- Imperator
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Jusqu'à ce point, le texte passait bien, mais cette phrase est étrange. "la rattrapa"? "la rattraperait"?Avant d’atteindre les portes, ce dernier la rattrapait.
Seems self-explanatory.
Même problème. Il lui sourit. Je comprends que l'objectif est de dire qu'il lui a souri sur la durée, donc qu'il souriait et que ce sourire lui était destiné.Il la dépassa en se tournant, ralentit pour marcher à reculons quelques pas avec elle, à son rythme lent et pesant, et il lui souriait.
Mais ça sonne incroyablement bizarre.
Ne serait-il pas possible de dire la même chose avec un "... à son rythme lent et pesant, en lui souriant."
L'ennui dans cette phrase en particulier est que tu mêles de l'action et de la description:
C'est de l'action, d'abord ça, puis ça, puis ça...Il la dépassa en se tournant, ralentit
Soudainement de la description. Mais je fais automatiquement le lien avec les derniers verbes, donc je m'attends à de l'action. Il n'y a pas de transition entre l'action et la description (au niveau de verbes).et il lui souriait.
Et ça me choque (j'entends, lors de ma lecture, dans le sens d'attirer mon attention de manière négative).
Combien de personnes devineront qu'une deux cent trente-cinq est une radio employée dans plusieurs armées contemporaines (dont l'armée suisse)? Au début, j'ai même cru que c'était une mitrailleuse (avec un putain de calibre, mais bon...) alors que je devrais être le premier à comprendre ce nombre.et entre ses pattes la deux cent trente-cinq dont le câble d’alimentation roulé au bras se balançait ensuite librement.
La répétition du nom "Reine" est trop sensible ici. J'ai eu la sensation d'avoir trop entendu ce mot.Reine n’avait pas entendu ce qu’il avait pu lui dire. Elle se concentrait toute entière sur le mécha’.
Reine avait le museau bovin,
????Il ne prenait même pas le soin de l’uniforme et, torse nu, subissait le froid métallique du hangar.
D'accord. "Il ne prenait même pas soin de l'uniforme"? "Il ne respectait même pas le soin de l'uniforme"?
Prendre le soin de l'uniforme ne paraît pas français. C'est possible que ça le soit, mais j'ai vraiment du mal avec.
Un double possessif? Étrange, ça sonne bizarrement. Moins que mes précédentes remarques, mais...Ses deux assistants de l’unité de soutien oeuvraient à la rampe de droite
Il est rare que l'on définisse des assistantes à la fois en disant qu'elles sont les assistantes de quelqu'un et, littéralement en même temps, qu'elles sont là pour gérer l'unité de soutien ou autre...
Alors oui, si le gars a des assistantes dans plusieurs unités, la phrase a du sens, mais à la première lecture, c'est quand même rude à comprendre. La seule manière dont je puisse expliquer mon sentiment est que ça sort de ma zone proximale de développement ou, en d'autres termes: "Je n'ai pas les pré-requis pour comprendre cette phrase".
- soit l'information que machin a plusieurs assistantes dans différentes unités
- soit une connaissance du français plus développée que celle que je possède actuellement
- soit l'habitude de rencontre ce genre de formule (ce qui revient au point 2 selon le point de vue)
C'est quoi un UIR? (et pas dans le sens de "ça m'intéresse", mais "pourquoi on me sort des termes que je ne peux PAS comprendre).Allow avait dû s’acharner environ deux heures pour préparer l’UIR
D'accord, c'est un mécha (heureusement que j'ai vu pas mal de macross et similaires dans ma vie...). Mais quelle différence avec les autres méchas. En quoi est-il important pour moi de connaître les différents noms?Dans vingt minutes le mécha’ serait fin prêt.
D'accord, j'abandonne ( uniquement formellement).Et le seul à savoir manipuler le réacteur chaotique.
À ce point de l'histoire, je n'ai:
- aucune idée de ce qui se passe
- du monde dans lequel je me trouve
- de ce dont je devrais me soucier et ce qui m'attends par la suite
- ce que signifient la moitié des termes que j'ai rencontré
- qui est cette héroïne
- à qui correspond quel nom
En d'autres mots: je suis perdu (dans le sens de "je ne parviens pas à m'y retrouver").
***
En termes de ré-écriture, je pense nécessaire:
- d'expliquer au lecteur ce qu'il se passe et en quoi ça le concerne
- d'expliquer les termes et leur importance au fur et à mesure de leur apparition (on peut nuancer ce propos)
- d'éviter les tournures de phrase trop étranges (même si elles sont plus jolies ou plus correctes. Après, c'est mon opinion.)
Je tiens à préciser qu'on peut lancer des termes sans les expliquer, par exemple:
"Il se souvint de son entraînement en BPM, compris qu'il devait choisir entre du CPI ou du re-engineering, préférer le BPMN au YAWL afin de pouvoir le transformer en BPEL et profiter des similarités avec le XML dans un process-engine, envisager le process mining selon l'état de maturité du SI, ce dans le cadre d'une analyse du BPMM et surtout, il se souvint que tout cela ne servirait à rien puisqu'il avait en tout et pour tout trois minutes pour solutionner le problème. Le noeud dans son estomac lui confirma, s'il en doutait encore, que ça allait être compliqué."
Dans ce cadre, le lecteur ne se sent pas obligé de comprendre les termes qu'on lui présente parce qu'il sait rapidement qu'ils n'auront aucun impact dans l'histoire.
Dans ton texte en revanche, on ne sait pas ce qui est important ou pas, donc il devient de plus en plus frustrant de rencontrer des termes incompréhensibles pour les non initiés.
Impe, pour débuter...
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- Ignit
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Je me suis arrêté aux alentours de
"Elle hocha la tête à nouveau. L’unité mécanisée mécha’ E-2o « Double coup » même repliée et sans ses lanceurs les surplombait d’une taille."
Assez tôt, donc. C'est là que je coince un peu, parce que je me mange trop de noms d'un coup. Jusqu'ici, j'ai eu l'introduction d'un monde, je me suis demandé pourquoi il y avait une intro en anglais, j'ai cherché en vain de quel univers il s'agissait à cause de la remarque de présentation, me demandant même si on ne me parlait pas d'un univers minecraft à cause de l'insistance sur la lumière la nuit.
Bref, jusque là, ça allait. On m'a présenté du bout des lèvres des personnages, on m'a donné des éléments qui me les annonçait humanoïdes mais pas humains. Je me les représente comme des hybrides humains / animaux, pour le moment. En gros, je ne sais pas bien où je suis ni ce qui se passe, mais j'ai quand même une vague idée. Et là, ce passage m'amène plein de nouveaux noms d'un coup, des méchas, un nom d'unités et trois paragraphes plus loin on se met à suivre un ou une Glyne, tout juste mentionné, sans trop que je sache pourquoi ce changement.
Donc - après avoir lu en travers ce que disait Impe - j'approuve la nécessité de ne pas précipiter le lecteur dans quelque chose qu'il ne comprend pas. Au fond, ne pas trop savoir où c'est ni exactement ce qui se passe ne me dérange pas. Mon point d'accroche, c'est le premier personnage qu'on me présente, ici Reine. Je me dis que je vais la suivre et que je vais découvrir et comprendre.
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- Arthaneor
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Bon, j'ai clairement pas l'expérience pour faire un "commentaire" en règle, d'autant que je ne ferais globalement que répéter ce qui a été dit... Cependant, je peux au moins dire que je trouve l'idée intéressante.
En fait, c'est pas temps que tu ne donne pas d'explication (elles existent, ex : "L’UIR consistait à disposer en permanence d’un mécha’ prêt à l’intervention, en combinaison avec une unité d’assaut [...]" = un protocole de "sécurité", donc) mais qu'on as pas vraiment moyen de s'en "rappeler". Le style lui-même étant relativement "obscur" (et ce n'est pas une critique), on peut être amenés à rater le moment important ou plus exactement à mal interpréter la signification de cet instant. Ou encore l'oublier, tout simplement. Bref, une fois ce passage derrière le lecteur, pas moyen de trouver une autre explication, des termes synonymes, quelque chose pour confirmer que le mécha' est bien un engin volant...
Prend ca plus comme un ressenti de lecteur lambda que comme une vraie critique... Je suis loin d'avoir la prétention de juger qui que ce soit ici avec le niveau que j'ai.
Bon courage pour la suite...
Artha' (qui retourne au révisions de son bac de Français )
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- Imperator
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Le mécha est un engin volant?quelque chose pour confirmer que le mécha' est bien un engin volant...
Plus sérieusement:
Là, je serais curieux de savoir ce qu'est un "commentaire en règle". Parce que j'ai pas dû en faire beaucoup dans ma vie.Bon, j'ai clairement pas l'expérience pour faire un "commentaire" en règle
S'il faut un diplôme de littérature pour ça, moi, j'abandonne, , j'ai fait économie.
Impe, curieux de voir ce que la ré-écriture peut donner (à moins qu'il faille proposer des formulations ou être plus précis sur les passages à récrire?)
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- Vuld Edone
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Dès que je "peux", je m'y remets. Au rythme des Chroniques.
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- Arthaneor
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A défaut d'être un mauvais critique, je serais donc un mauvais lecteur.
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- Vuld Edone
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Donc voici la réécriture des premières pages. Ce qui signifie que j'ai tout effacé et tout repris de zéro. C'est ce que j'avais fait avec "Distant". Même si mon but à long terme est de rendre pertinent le fait que ce sont des bêtes, ici j'ai fait en sorte que tout soit clair, que les gens comprennent.
À ce titre, dans ce texte comme dans tous les autres, je fais le pari que les lecteurs peuvent comprendre - et même si c'est mon boulot que de leur rendre l'information accessible, j'essaie d'éviter comme la peste les paragraphes d'explication...
Ne serait-ce que parce qu'en tant que lecteur, je déteste ça.
Je réécrirai encore, suivant vos remarques, donc n'hésitez pas.
Heard we were humans once. Fond of progress, turned out to be power. Turned us to beasts and Earth into a sandbox.
Anges
Chevalerie sauvage
Lumène brillait au feu de ses mille projecteurs. La cité portuaire et son ciel de tonnerre n'existaient que pour les silhouettes lointaines des Pilons dont les nouveaux chantiers ponctuaient l'horizon et qui creusaient leurs lignes électriques dans le paysage. Il n'y avait rien de plus à savoir, sinon que le seul jour était celui des phares, des lampes et des fêtes sans fin. Lumène était joyeuse et animée, riche, à peine troublée par les combats.
Un décret l'exigeait : toutes les constructions de la cité devaient être illuminées. Les Anges avaient dû s'y conformer et ceint leur tour de métal de deux rangées de lumières au jaune pâle, usé par le temps. Flanquée à l'écart des hauts quartiers, la tour n'était léchée que par intermittence par les feux de la ville, par un soudain éclair, après quoi elle replongeait dans ses fausses ténèbres. Le jaune épuisé des lampes rappelait ces feux de position d'appareils s'engouffrant dans la nuit pour y disparaître. Un large terrain bétonné, séparé par les grillages, gardait le reste des constructions à distance et, aux pieds des Anges, la lumière réglementaire était celle des feux de garage, au-dessus des portes massives des hangars. Dans la nuit continue la tour semblait constamment muette, avec à peine le passage de quelque véhicule, et comme une boîte de Pandore que les résidents redoutaient de voir s'ouvrir.
L'intérieur, pourtant, ressemblait au reste de la ville. Les portes d'ascenseur s'ouvrirent sur un couloir repeint fraîchement de blanc, dont les coulées faisaient jouer les seules ombres sous les lumières aveuglantes des néons. Les bouches lamées de la ventilation soufflaient sans bruit, à force de l'entendre, un air sec et froid. Le plancher tapissé de grillages laissait voir les câblages crépitants. Elle ferma les yeux, les rouvrit, plaqua la main gantée sur la porte comme pour empêcher les volets hydrauliques de se refermer.
Reine était médicalement folle. Tous le savaient, y compris elle.
Elle souffla l'air en regardant ce couloir où, deux jours plus tôt, Sharr avait été arrêté. Juste un criminel parmi une longue liste de criminels, et derrière la peinture elle pouvait encore voir les impacts d'obus de vingt millimètres. La ventilation jouait sans bruit, quand elle eut chassé les dernières images de sa tête la pilote s'avança de son pas égal, les bottes claquant sur le grillage. Elle portait le gilet jusqu'au gorgerin, couleurs urbaines, le harnais et son arme négligemment à l'épaule. Sur son casque fixé au côté, par-dessus les sacoches à munitions, était bandé le grade à trois coches. Elle était lieutenante, de grade, pilote de fonction. C'était la raison pour laquelle elle portait la tenue de combat au sein même de l'installation, sans grenade et le masque rangé, négligée, et qu'elle gardait à l'épaule le blason ailé des Anges.
Ce même blason frappait les portes d'acier alors qu'elle passait, et elle ne leur jetait qu'un regard, par automatisme, forcée un bref instant de se rappeler deux passés simultanés et de ne sombrer dans aucun des deux. Le premier était comme un grésillement de radio, comme la friture à peine audible à l'intérieur de son casque. Le second était fait de sourires et de visages joyeux, de bonne humeur, d'un temps qui remontait à des années.
Elle approchait des portes du hangar, la salle des rampes, à l'avant-dernier étage de la tour des Anges. Le dernier, seul Allow y allait, contenait une installation de capteurs et de radars. Cela ne la concernait pas. Elle approchait l'ouïe tournée loin derrière, où l'ascenseur s'était ouvert suivi aussitôt par un pas jeune et pressé. Reine songea qu'elle avait dû frissonner, ne sentit rien, accusa le poids de l'équipement. Quand la petite foulée fut assez proche elle hésita à se tourner, n'en fit rien, laissa le mécanicien la dépasser et se tourner vers elle, marcher à reculons pour l'accompagner. Il tenait contre lui l'une des radios de bord, un bloc deux cents trente-cinq dont un câble était enroulé à son bras. Le jeune mécanicien, d'une tête moins grand qu'elle, portait la salopette manches retroussés jusqu'à l'épaule et le plus haut bouton du col défait.
Lou était né à Lumène, en était parti pour l'aventure, avait fini par rejoindre les Anges et était revenu protéger sa ville natale. Elle le regardait et derrière ce regard froid Reine avait l'impression de le voir pour la première fois ; elle le voyait pour la première fois ; elle replongeait dans le souvenir de l'arrivée du nouveau mécanicien, ce sourire qu'il arborait encore et les yeux innocents. « Salut Reine ! » Lui avait lancé le petit, sans qu'elle réponde autrement qu'en le regardant. Elle semblait l'écraser d'un regard noir, lui faisait semblant de l'ignorer.
C'était un gamin, se répétait la lieutenante. C'était un loup, se répétait Reine. Et elle fixait les yeux du petit, détourna le regard à l'approche des portes. « Tu as entendu ? Le nouveau sera là ce soir ! » Elle ne fut pas sûre d'entendre, laissa le petit presser la commande pour ouvrir les portes à leur passage. Le hangar s'ouvrit devant eux, vociférant au bruit de la grue et de ses chaînes, de la pompe sous pression, du crépitement sous le nez de l'appareil. Le petit parlait encore, elle ne l'entendait pas. Les oreilles du petit s'étaient baissées et, après quelques pas, il lui sourit vite, s'excusa et fila devant le chef mécanicien pour aller, en deux sauts, s'enfoncer dans l'habitacle y fixer la radio.
Le chef mécanicien Allow regarda un instant le petit, puis sous le nez de l'appareil le crépitement qui cessait, avant de revenir à Reine.
« Il a raison. Nuit calme, il paraît. » La voix d'Allow traînait. Il la fixait avec ses yeux pochés de fatigue. « Comment c'était, dehors ? »
Elle ne répondait pas. Elle fixait l'appareil à nouveau plongée dans ces images du passé, et elle en était consciente. Le chef mécanicien soupira. Il n'avait pas pris la peine de porter la blouse de la camisole et, torse nu, avait presque l'air d'un civil.
« Contente-toi de signer. » Lui dit-il en tendant le rapport d'entretien.
Le rapport était incomplet, rempli en tiers et déjà ce tiers se couvrait de remarques lapidaires, presque toutes marquées d'une étoile qui signifiait que la remarque avait déjà été faite dans un rapport précédent. Elle prit le rapport sans vraiment y prêter d'attention.
Elle ressentait dans ses doigts un reste d'excitation, souvenir de sa première UIR, la première fois où elle avait été la pompeuse unité d'intervention rapide des Anges. À l'époque l'entretien avait été complet, deux ou trois remarques dont elle avait parlé avec le chef mécanicien avant de signer. La scène rejouait en boucle dans sa tête, cherchant à saisir les mots et les gestes dans le flou de la mémoire, cherchant à en retrouver les sensations. Elle savait être en train de sombrer, et elle laissait faire. Allow le savait aussi, et la laissait faire. Reine pouvait devenir violente.
Une UIR était une unité mise en alerte, prête à intervenir dans la minute. Cela semblait aller de soi mais, en vérité, c'était un de ces monstres imposé par l'absurdité du monde, comme l'était l'unité mécanisée mécha'.
On avait combattu les nouvelles menaces avec des chars et des hélicoptères de combat. La nécessité avait combiné les deux. On avait remplacé les pales par un réacteur chaotique, à deux tuyères, les entrées d'air flanquant les côtés de l'appareil ainsi coupé de moitié. Les ancrages avaient été montés sur le haut, le canon maintenu sous le nez, à l'avant, puis on avait blindé tout ce qui pouvait se blinder. Et cela avait semblé une bonne idée, parce que ça avait été la seule. Les retours d'expérience amenèrent deux nouvelles exigences : ne pas se reposer sur la seule propulsion chaotique, et stabiliser la plate-forme pour le tir de missiles. On régla ces deux exigences en même temps, en ajoutant sous les entrées d'air des pattes mécanisées. Les premiers modèles de mécha' F-6t allaient à l'encontre de toute la science militaire et devinrent l'espoir des Anges.
Le monde avait sombré à ce point.
Elle avait contemplé la machine, modèle E-2o « Double coup » et son cœur s'était serré. Elle avait volé sur les premiers modèles, elle avait cru un bref instant que c'était un de ces anciens modèles qui se trouvait sur la rampe. Mais le mécha', malgré ses formes encaissées, portait les peintures urbaines tachetées pareilles au blanc et noir de son pelage, et sa taille massive empêchait de s'y tromper. Les pattes repliées étaient ancrées sur les rails de la rampe et le mécha' n'était alors pas plus haut qu'un camion.
Reine signa, rendit le rapport d'entretien à Allow avant de se remettre à marcher vers le mécha'. Debout sur le haut de l'engin Lou faisait descendre le bloc de contre-mesures de la grue pour l'ancrer entre les points d'ancrage, un peu plus à l'avant, après la trappe d'alimentation. Derrière, au-dessus des volets noirs des tuyères, le bloc du réacteur était ouvert et béant.
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- Ignit
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Pas grand chose à redire, en fait. Il y a une phrase que je n'aime pas :
Lou était né à Lumène, en était parti pour l'aventure, avait fini par rejoindre les Anges et était revenu protéger sa ville natale.
Sans que je sache trop dire pourquoi.
Et il y a quand même quelque chose qui me chiffonne :
Reine était médicalement folle. Tous le savaient, y compris elle.
Qu'est-ce que c'est qu'être médicalement fou ? Parle-t-on de démence ? Et puis, comment peut-on savoir qu'on est fou ? Si on le sait, c'est que quelque part on n'est pas fou...
Bref, cette entrée en matière sur le personnage m'a un peu perturbé parce que je ne savais pas trop qu'en faire.
Voila mon morceau d'avis !
Bien cordialement,
Ignit.
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- Vuld Edone
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"Médicalement folle", ça ne veut rien dire. Dans les grandes lignes, Reine souffre d'une sorte de stress post-traumatique. Mais quand un texte te sort "médicalement folle" c'est qu'il n'y a rien derrière et qu'on te supplie de faire semblant.
Envisage ça comme un rêve. Que tu aies conscience de rêver... ça aide. Ou pas. Reine se sait folle, ça ne la rend pas moins instable.
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- Zarathoustra
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Globalement, je n’ai vraiment rien à redire. Tu disais savoir écrire des récits « classiques », tu le montres magistralement. J’ai commencé ma lecture et je l’ai lu d’une traite (tout juste quelques rares phrases sur lesquelles j’ai un tout pette peu buté)
Je suis pour ma part bluffer par ton sens du détail pour rendre crédible et réaliste ce monde futuriste. Tu arrives vraiment à nous immerger dedans.
Autre point intéressant : je trouve que tes personnages ont une vraie présence.
Tes descriptions sont vraiment impressionnantes. Tu arrives à nous noyer de détails et pourtant il se dégage du résultat une impression à la fois précise et immersive. Tu joues avec les sens en mélangeant le visuel et le sonore. Les plus marquantes sont l’impression de chaos et cette luminosité surnaturelle qu’on dirait projeter par les flammes de l’enfer et qui imprégne ton décor extérieur. Avec cette omniprésence du métal.
Ensuite, il y a cette virtuosité à t’attarder sur le fonctionnement des machines, alors même que tu emploies une multitude de terme technique qui devraient être abstrait mais qui au contraire sont crédible et nous font adhérer. Vraiment, j’ignore si tu as pris du temps à les écrire, mais ces descriptions dont tu nous bombardes auraient dû être indigestes mais je trouve qu’elle s’intègre parfaitement au récit et au résultat final. Comme je l’ai dit, tout concourt à être immersif.
Un autre point que je voulais souligner, c’est la subtile mécanique du texte. En soi, il ne se passe pas grand-chose, mais ton récit est suffisamment habité pour qu’on se fasse piéger par lui. Et surtout, tu agence et fait progresser le récit sans qu’on s’en rende compte. Tu arrives à faire un paragraphe entier sur des choses quasi insignifiantes sans pour autant ennuyer. Ce que j’apprécie plus que tout, c’est que tu brosses quelque chose de ample, complexe, sans pour autant qu’on sente le plan que tu t’es fixé. Tu avances pas à pas et les choses se déroulent, progressent, et je suppose que tout est parfaitement planifié et maîtrisé, mais sans que ce soit au détriment de la fluidité du récit.
J’ai également apprécié ton parti pris à mélanger les pensées de tes personnages au récit. Tu changes de points de focal tout en restant immersif. Accessoirement, cela donne du poids à tes personnage qu’on sent vivre, sans pour autant que tu te sois attardé sur leur personnalité. Tu les as magistralement décrits physiquement, mais tu leur donne une personnalité de manière indirecte, et finalement beaucoup plus subtilement et crédiblement que de vraies explications.
Tu sais également accélérer ton texte en distillant des infos qui accrochent, sans pour autant être lourd et mettre des clignotants partout pour le lecteur. Elles viennent naturellement (par exemple, le passage sur les maraudeurs).
Le seul pont qui m’a posé problème a été l’arrivée de plusieurs personnages d’un coup qui fait que je n’arrive pas à les enregistrer dans ma tête.
Je retiens quelques scènes où j’ai été vraiment bluffé par leur étirement car tu t’attardes sur ce qui aurait dû être insignifiant. Or cela montre à quel point tu es imprégné par ce que tu veux nous faire vivre. Et le pire, c’est que ça marche, j’ai lu, je ne me suis pas ennuyé pour autant et tout avait du sens. Elles contribuent au contraire à renforcer cette sensation de réalisme et d’immersion.
Bref, tu montres une maîtrise impressionnante de plusieurs registres et techniques qui forment un tout, une sorte de matière littéraire très intéressante. Mais je suppose que tu vas me dire que tu as écrit tout ça rapidement en free style et que tu n’as pas d’ambition sur ce texte… Eh bien, tu aurais toutes les raisons, pour moi, d’en être fier. En tout cas, ce texte, je suis incapable de l’écrire. De même que je suis incapable de maîtriser toutes ces techniques avec autant de fluidité que tu l’as fait.
S'il y avait un pint à creuser, ce serait de donner un peu plus dinformations sur ce qu'on va vivre. Tu nous plonges immédiatement dans ton récit et ton monde sans véritable informations. La manière dont tu procèdes permet au lecteur de faire le travail à ta place. C'est un peu destabilisant au début, vu la multiplcation de terme techniques, mais la sauce finit par prendre parce qu'on a une sorte de puzzle qui se met en place et qu'on trouve assez facilement comment les mettre dans m'ordre.
Ce qui me manque le plus, pour ma part, c'est un but. On sent que ça va arriver, mais on a en même temps l'impression de prendre un film en route. C'est à la fois bien parce qu'on embraye tout de suite, mais légèrement inconfortable. Ca oblige à être beaucoup plus attentif (ça c'est bien), mais on a aussi l'impression que tout ton récit est fait en plan rapproché, voir même collé au parebrise. Il y a certes quelques trouées descriptives de la ville, mais à aucun moment on a ça sur l'intrigue.
Je note aussi cerains assage où tu t'amuse à faire des contradcitions, comme si tu voulais détruire ce que tu avais créé. Par exemple quand tu dis: le mecha' était intact, juste après une longue description de dégats subis.
Pour ce qui est de la portée générale du texte: Luméne, c'est aussi une allusion à "Lumières"? On assiste à une bataille du mal (l'ombre, le feu, le chaos) sur le bien (lumières, les anges, l'ordre)?
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- Zarathoustra
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- Messages : 2081
Bizarrement, je la trouve moins intéressante. Certes, tout est présenté de manière plus doux. Sans doute plus clair. On a des informations qui permettent de mieux situer l’histoire (on sait qu’il y a quelques années, c’était différent).
Mais je trouve tes descriptions moins impressionnantes. On n’a plus cette sensation de foisonnement, de saturation, qui nous immergeait, voire nous submergeait.
Donc pour moi, on voit ce qu’on y gagne, mais je pense qu’au final on y perd davantage. Et parfois tu deviens limite trop explicite
exemple : Une UIR était une unité mise en alerte, prête à intervenir dans la minute. Cela semblait aller de soi mais, en vérité, c'était un de ces monstres imposé par l'absurdité du monde, comme l'était l'unité mécanisée mécha'.
Ton premier paragraphe comporte pas mal de maladresses pour vraiment labncer ton histoire:
Lumène brillait
-> l'image de Lumèes n'est plus du tout la même, c'est volontaire?
Flanquée à l'écart des hauts quartiers, la tour n'était léchée que par intermittence par les feux de la ville, par un soudain éclair, après quoi elle replongeait dans ses fausses ténèbres -> réptition lourde
Dans la nuit continue (il faut ici une virgule sinon on croit que c'est la tour qui continue) la tour semblait constamment muette, avec à peine le passage de quelque véhicule, et comme une boîte de Pandore que les résidents redoutaient de voir s'ouvrir.
Les portes d'ascenseur s'ouvrirent sur un couloir repeint fraîchement de blanc, dont les coulées faisaient jouer les seules ombres sous les lumières aveuglantes des néons. -> Pb; tu inserrse une séquence action dans une description. La séquence du coup parait bizarre. Je suis sûr que cet effet peut être amené différemment sans bousculer la compréhension du lecteur qui s'attend du coup à un imparfait)
Les oreilles du petit s'étaient baissées et, après quelques pas, il lui sourit vite, s'excusa et fila devant le chef mécanicien pour aller, en deux sauts, s'enfoncer dans l'habitacle y fixer la radio.-> succession d'infinitifs très lourde
Il n'avait pas pris la peine de porter la blouse de la camisole et, torse nu, avait presque l'air d'un civil.-> formulation trop longue pour ce que ça pporte au récit. Disons qu'elle manque de peps et sonne maladroite.
Elle ressentait dans ses doigts un reste d'excitation, souvenir de sa première UIR, la première fois où elle avait été la pompeuse unité d'intervention rapide des Anges -> l'utilisation du verbe être trop neutre, la phrase parait terne. Incarner? intégrer?
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- Vuld Edone
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S'il y a un peu de freestyle, le texte a été bien planifié et développé depuis des mois - ce n'est pas aussi travaillé qu'un Chimio' ou un Fléau, mais bien plus qu'un Tlön.
Ta remarque sur l'intrigue ne m'inquiète pas.
Il suffit de comparer ta lecture à celle des autres pour comprendre où j'en suis. Au fond je me dis que toi tu connais le contrat de lecture.
Le pire c'est que si je corrigeais certaines des remarques que tu fais, d'autres lecteurs s'en plaindraient. Par exemple la chaîne d'infinitifs... et encore, les autres utilisent le participe présent...
Comme tu le dis, ce texte est la démonstration que je sais écrire de façon "classique". Et que je n'en ai mais alors pas du tout envie.
De toute manière la prochaine réécriture sera pour justifier le côté bestial une bonne fois pour toutes.
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- Vuld Edone
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- Messages : 2178
J'ai laissé Renier de côté (je n'y pense même plus) pour revenir sur les Anges. Histoire très largement réécrite et très largement adaptée dans mon monde, plan refait, tout ça...
Mais surtout, je me suis remis à ce premier chapitre.
J'ai d'abord tenté de le réécrire avec le même style, depuis les mêmes événements, et arrivé en page 3-4 j'ai arrêté.
Mon critère était simple : je n'avais pas envie de me relire. Dès les premières lignes je m'ennuyais et je décrochais, alors que c'était mon texte...
J'ai alors testé l'option de la facilité, qui consiste à narrer à la première personne.
Facilité parce que ce qu'on attend d'un texte, c'est qu'il ait une opinion. En gros le narrateur a une personnalité au travers du style, voit les événements d'une certaine manière et même quand il se fait discret, il influence notre perception des choses. La première personne, un peu comme les interventions du narrateur chez le débutant, sont la mise en pratique la plus directe de ce principe.
Mais comme je ne peux pas m'empêcher de tout compliquer, j'ai pris le point de vue de Reine, qui rappelons-le est folle, et arrivé à la deuxième page je me suis rendu compte que le texte, à force de mélanger passé et présent, devenait plus complexe que les Larmes...
Or les Anges doivent être très accessibles, très "faciles" à lire.
Ma deuxième ou troisième réécriture a été pour tenter de trouver la "première phrase", l'accroche qui me permettrait de savoir quel ton donner au texte :
"Les portes se refermaient."
"Une pensée anodine lui traversa l'esprit."
...
Classiquement le texte introduisait Lumène, mais on quitte Lumène avant même le chapitre deux et la ville sera à peine évoquée par la suite. Commencer par elle était absurde. Mes autres essais étaient plus... pour travailler la psychologie des personnages, ce qui intéresse moyennement à pas du tout le lecteur.
-> Si je partais sur les portes qui se ferment, tout le texte traiterait du cloisonnement de l'esprit, du traitement de l'information... Autant repartir sur Fléau.
Enfin, dans tous mes essais, aussitôt que j'évoquais le fait que les personnages étaient des bêtes, tout volait en éclats.
Je me suis alors rappelé qu'avant toute chose je devais motiver le fait que c'étaient des bêtes.
Jusqu'à présent il y avait une formule quasi-invariable dans tous mes jets : "Lumène, ville de lumière..." Et soudain j'ai trouvé mon narrateur et ma première phrase.
Plus précisément j'ai trouvé mon narrateur en premier, qui a relancé les Anges, et anecdotiquement ce sera le même que dans Chimiomécanique. Oui je viens de vous révéler toute l'intrigue du texte.
J'étais alors parti sur une première phrase "Le rapporteur est sur Reine." Mais je n'avais aucune raison de me focaliser sur elle et de fait le texte commençait toujours par décrire Lumène avant de zoomer sur l'héroïne.
C'est donc au moment où j'ai décidé de commencer l'histoire à partir d'un autre point que ma première phrase m'est venue :
"De loin la ville semblait humaine."
C'est le coeur des Anges. Un narrateur qui considère véritablement les bêtes comme des bêtes, qui ne se laisse pas prendre par les apparences (alors que le lecteur, lui, va constamment y voir des êtres humains) et surtout qui leur sera hostile. Un narrateur aussi passablement omniscient.
Tout cela pour dire que les Anges reprennent après un changement de narrateur et de point de départ. Les événements sont les mêmes mais vus d'un autre angle. Le nouvel obstacle actuellement est le "Felin", le remplaçant du "mécha", vu que je ne sais toujours pas bien par quoi remplacer les pattes mécaniques.
...
Mais bref. J'y travaille.
EDIT: Remarque anecdotique. J'ai transféré les Anges sur GoogleDocs, ce sera donc mon premier texte rédigé sur ce support pour les Chroniques :
Anges
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