En donnant deux minutes à Akdov le général de la CITL avait sacrifié
ses agents. Il n’avait pas d’autre choix. L’une des raisons était que
l’Eurasie pouvait à tout instant décider l’annexion de ses terres, de
l’Australie au Groenland, parce qu’elle était aussi la seule puissance
à disposer de la technologie pour abattre Aïo. C’était l’Eurasie qui
faisait trembler le monde et qui en dictait la loi. Ce n’était pas la
seule raison. Il y en avait d’autres, certaines plus importantes
encore, et une mineure, discrète.
Durant la première tentative d’évasion Kyréna avait inscrit dans le
Libra deux choses. La seconde était qu’ils disposeraient d’un appui
orbital. La seconde minute passée les Pornevs étaient à hauteur de la
navette, à quelques centaines de mètres seulement. Des rayons de feu
traversèrent le ciel, s’abattirent sur les vaisseaux dont ils firent
éclater le blindage. Éventré l’un d’entre eux s’abattit dans la mer.
L’un de ces rayons passa si près de la navette qu’il aurait pu la désintégrer.
- Commandant. Faites tirer les Do-Lô.
- Sur la navette, général ?
- Sur le croiseur.
De nouveaux rayons s’abattirent sur la flotte qui surplombait à présent
la malheureuse navette. Celle-ci semblait un puceron pris de vitesse au
ras des flots. Les Pornevs chargèrent leurs canons, l’air s’électrifia,
un courant foudroyant parcourut tous les membres d’équipage. Soudain,
sur toute la flotte, s’abattit un silence tel qu’ils en eurent le cœur
soulevé. Dans la navette de liaison, Naïa aux commandes pâlit à vue
d’œil.
- Ils… ils vont tirer.
Sa voix était devenue blanche, presque inaudible pour ses compagnons.
Il y eut un vaste silence au moment où les pièces ouvrirent le feu.
Mais des deux choses qu’avait inscrites Kyréna dans le Libra, la
première était le sabotage du canon. La barre de sécurité céda, la
réaction en chaîne déchargea l’impulsion dans toute la structure.
Le puissant Pornev et la frêle navette, tous deux leurs systèmes anéantis par l’impulsion, s’effondrèrent en même temps.
Les trois chroniqueurs chutèrent les uns sur les autres dans l’étroite
pièce de l’administration. Leur chute fit voler dans tous les sens les
paquets de feuilles volantes qui pour une fois portaient bien leur nom.
Quirinal, tout dessous, chercha de sa main ses lunettes qui étaient
tombées plus loin. Ou bien à se dégager, il n’était pas sûr tant
l’odeur et le contact de Vlad le dégoûtaient.
Finalement se bousculant les trois chroniqueurs se relevèrent et se
regardèrent un peu bêtes, enfermés à l’étroit dans cette pièce. Akdov
les dévisageait encore puis :
« Bravo, bien joué. Vous avez tout fichu en l’air. »
Ses deux amis le regardèrent sans rien comprendre. Du moins Quirinal le
regarda ainsi, Vlad était plus occupé à chercher dans sa bourse un peu
de poudre.
« Des heures de planification fichues en l’air, je ne vous félicite
pas. À l’heure qu’il est j’aurais déjà retrouvé Noé, récupéré les
documents et confondu Naem, mais non, il a fallu que vous interveniez. »
Le drogué regarda Quirinal qui, à son tour, regarda Vlad et sans trop
savoir quoi dire ils avisèrent ensuite le chroniqueur plutôt grand et
fier qui les jaugeait. Enfin :
« Salut… Naïa ! »
Et ils s’esclaffèrent.
« Ca va comme ça, je devais brouiller les pistes. »
Sans plus s’expliquer il se mit à fouiller parmi tous les papiers
dispersés qui tournaient encore autour d’eux. Il les attrapait au vol,
les regardait et les rejetait. Les deux Libra étaient toujours posés
sur le bureau, l’un sur l’autre. Un troisième ouvrage les avait
rejoints. Quand Akdov s’en aperçut, il cessa tout pour le prendre.
130 - Géo, ils vont tirer
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- Écrit par Vuld Edone
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