Scène 1 :
Mr Renart, Mme Beaumont, Mr Bouvier, Enfant, Mr Beaumont
Mme Beaumont :
Regardez mon ami, ce panneau nous indique
Où trouver le banquet, enfin le sort abdique !
Ne perdons plus de temps à gémir et japper !
Le chemin à présent ne peut nous échapper !
Nous cherchions vainement depuis tellement d’heures,
Tous tournoyant en rond pour tenir nos gageures !
Tous ces efforts perdus font naître ma rancœur,
Ce panneau bienheureux provoque mon malheur !
J’y apprends le chemin, j’y retrouve l’espoir
Et j’enrage, je veux hurler sans le pouvoir !
Quel est ce coup affreux, quelle est cette insolence ?
Quel est ce coup fatal qui me rend au silence ?
Mr Beaumont :
Est-ce monsieur Renart qui s’agite à mes yeux ?
Pour quoi s’évertue-t-il ? S’adresse-t-il aux cieux ?
Mme Beaumont :
Laissez cet animal qui ne souhaite que mordre !
Ce n’est qu’un insensé qui se bat contre l’ordre !
Marion fit une erreur en voulant l’inviter,
Mais sa fille elle au moins le saura détester !
Sa pauvre éducation n’a pas prise sur elle !
Sans un père elle a su être une demoiselle !
Il faut la protéger d’un homme aussi trompeur,
L’éloigner de Renart, à Renart faire peur !
Il s’excite tout seul, il imite une plainte
Très mal, il n’obéit et n’est bon que par crainte !
Mr Beaumont :
Le voilà parlant seul, il a l’air confondu.
Croyez-vous qu’il ait pu nous avoir entendu ?
Mr Bouvier :
Laissez, mon étudiant, il me revient la charge
En tant que professeur d’inscrire dans la marge
Ce qui est en-dehors de tout raisonnement,
Puisqu’un discours sensé ne serait qu’ornement
Face au discours réel qui ne prie et ne juge
Que par la loi du tort, ou par un subterfuge,
Et c’est là tout l’objet de cette discussion,
L’effort par intérêt n’est que douce illusion
Pour les peines d’un coeur qu’un désaccord torture !
Parce que la raison à l’égal d’une armure
Destinée au tueur pour n’être pas tué,
Pour celui qui choisit mais n’a pas décidé
Passe le sentiment par qui le choix trépasse,
Qui cause et son accord et son refus embrasse,
Parce que ce propos échappe à notre effort,
Monsieur Renart se tait comme seul réconfort,
Tout seul doit s’agiter à propos de la lettre
Que monsieur Fakt avait, qu’il lui fallait soumettre,
Et le pauvre égaré se trouvant impuissant,
Le malheur dévoilé lui devient angoissant,
Mais ici permettez, vous deviez le comprendre,
Il est sans intérêt de vous le réapprendre,
Comme il faut éviter toute répétition
Qui mènerait sinon à notre perdition,
Je vous laisse juger s’il recherche la lettre
Ou si c’est monsieur Fakt que nous risquions d’omettre.
L’enfant veut répondre.
Mme Beaumont :
Allez-vous l’oublier ?! Ce n’est qu’un animal,
Qui nous déteste tous, qui ne veut que du mal !
Mr Bouvier :
Je le dis tout le temps par devoir et conscience...
Mme Beaumont :
Arrêtez de parler, vous faites sa défense !
Et vous êtes ennuyeux et lui ne dit pas mot !
Va-t-il se décider à nous parler tantôt !
Qu’il est bête à tourner, à s’agiter sur place !
De tels agissements sont bien ceux de sa race !
Cet espèce de loup ne vit qu’avec les fous !
Va-t-il quitter son mond- eh ! Il revient vers nous !
Mr Renart :
Je n’ai plus d’autre option, je vais tous vous conduire.
Le banquet n’est pas loin, vous pouviez le prédire.
Mais ne souriez pas, car je dois vous parler
De la terrible erreur que nous allons commettre.
Je ne vous parle plus en faveur de la lettre.
On ne peut l’éviter, la pluie va perler.
Mme Beaumont :
Qui va nous obliger à encore vous croire ?
Mr Beaumont :
J’aimerais bien manger et à peine un peu boire.
Mr Renart :
Comment le feriez-vous s’il pleuvait au banquet ?
La tempête nous suit, ses nuées en paquet
Peuvent nous faire voir qu’elle veut sa présence,
Qu’elle veut au banquet à défaut d’abstinence
Comme nous s’y asseoir avec ses torrents d’eau.
Mr Beaumont :
C’est fâcheux. Je dirais, ce n’est pas un cadeau.
Mme Beaumont :
Des mensonges surtout ! Je n’en croirai pas goutte !
Tout me tend à parier que vous voulez sans doute
Ou nous diminuer, ou abattre à vos pattes,
Dans la boue plonger nos corps comme des blattes !
Mr Beaumont :
Je connais l’animal, il fait de petits bruits.
Mme Beaumont :
Je m’en souviens, mon chéri, c’était au fond d’un puits.
Mr Renart :
C’est du fond de l’orage où pour notre malheur
Nous nous verrons bientôt que disparaîtra l’heur
Où nous pouvions encore un instant nous complaire.
Seulement monsieur Fakt était épistolaire,
Et vous tous empressés d’arrivée en quelque temps
Avez juste agité un ciel loin du printemps.
Cet orage est celui d’une lâche impatience
Qui de nous au banquet volera la présence.
Mr Bouvier :
Je ne suis pas pressé, j’aimerais discourir
Sur les fleurs de l’été qui nous font tant mûrir,
Mais à vos regards lourds mon amour s’abandonne
Et préfère patienter pour que l’orage tonne.
Il prendra à ma place un temps pour expliquer...
Mme Beaumont :
Pour vous taire faut-il vous faire suppliquer ?
Le temps manque déjà, je le sens qui oppresse !
Ces nuages là-bas, c’est le vent qui les dresse !
Je ne veux pas manquer le banquet de Marion !
Quel était mon penchant, quelle ma tentation ?
Dites monsieur Renart de quel côté s’y prendre
Pour au plus vite aller, dites, montrez-vous tendre !
Mr Beaumont :
J’aime au moins autant l’eau qu’une part de mon corps,
Mais elle a du chagrin, je serai donc d’accord.
Mr Renart :
Ne vous impatientez, de ce pas je déclare,
Nul orage jamais n’atteindra notre lare !
Parce que trop ancien et qu’il n’existe pas,
Nous ne craignons plus rien pour notre humble repas.
Néanmoins soyons sûrs par un accord tacite
De prévenir qu’un ciel sur nos têtes s’excite.
Quand s’abat une pluie elle écoute les sons,
Elle écoute fuyants le cours que nous faisons.
C’est parce qu’on la fuit que la tempête tombe !
Aussi notre lenteur au silence de tombe
La trompera assez pour là-haut la tenir,
Assurant de ce fait notre bel avenir.
Mme Beaumont :
Alors toutes les fois où moi la pauvre folle
Je courais pour la fuir, mon pas fait la décolle,
Je croyais échapper et la faisait rugir !
Maintenant nous savons, reste à voir où partir !
Mr Renart :
Vous nous condamneriez ! Est-ce la solitude
Qui vous fait oublier toute bonne attitude ?
Du village les gens viennent tous au banquet !
Si même moi j’y suis, jugez donc du succès !
Imaginez l’instant qu’un se mette à courir,
Un seul, c’est suffisant, faut-il en discourir ?
Il nous faut prévenir ces pauvres inconscients
Qui affrontent le ciel à très mauvais escient.
Mr Bouvier :
Ils ont nombre pour eux, veuillez en tenir compte,
Mais le point ne tient pas à ce que le mot dompte,
Seulement à ce qui en secret nous poursuit
Comme quelque beau lais que la course réduit,
Car il est en un mot du plus inconcevable
Que le beurre le lait soit jamais redevable
Et cela nous apprend combien le mot est dur
Quand il est isolé ou quand il n’est pas pur,
Mais qu’il cache en son sein un vacarme liquide
Qui sitôt en nos mains devient calme livide
Puisque nous ne savons ni de qui le coup vient
Ni qui déviera ou défiera rien,
Mais de tout ce discours nous pouvons jà conclure
Qu’il n’y a de réponse en aucune pâture
Et qu’il ne reste plus qu’à être vigilant,
Comme je le dis tant, n’est-ce pas mon enfant ?
L’enfant veut répondre.
Mr Beaumont :
Oui dis-nous mon petit quel est l’avis du jeune.
Mme Beaumont :
Ne le dérangez pas, vous le voyez si...
Mr Beaumont :
...
Mme Beaumont :
...
Mr Bouvier :
...
Calmez votre sourire et dites-leur plutôt,
Monsieur Renart, d’aller voir les gens au plus tôt !
Mr Renart :
Toute de suite ! Aussitôt ! Laissez-moi encor rire,
Et rappelez-vous bien, en lenteur allez dire !
Mr et Mme Beaumont sont repartis en silence, le dos rond sur la pointe des pieds, par la gauche.
Scène 2 :
Mr Renart, Mr Bouvier, Enfant
Mr Bouvier :
Voilà, ils sont partis. Monsieur Renart, parlez,
Cessez là farce et tour, ou riez-moi au nez,
Je sais que vous cachez un secret qui vous trouble,
Je l’ai vu comme on sait que le doute redouble
Quand on veut s’en défendre ou qu’on veut protéger
Ce qui compte le plus dans ce monde léger
Où chacun ses profits lentement accumule
Et ne parle que pour agir en bête ou mule,
Préférant autrement à la science un troquet,
Au savoir le plaisir, au bon mot le banquet,
Pour finir se dédit de ses bonnes pensées
Pour sombrer dans le jeu de ses billevesées
Et je suis bien placé pour savoir tout cela :
Pour l’avoir tant vécu, le temps me morcela,
Mais laissez-moi le temps d’ajouter à la somme
Quelque égalisateur pour qu’enfin je vous somme
De me tout révéler quand à la volonté
Qui vous faire tenir tant à nier la bonté
Et tenir tout le monde en suspens à la longue,
Comme un chien à la laisse ou l’ancienne diphtongue.
Mr Renart :
Vous manquez tant d’humour, par ailleurs ignorez
Qu’à l’étage en cherchant vous oubliez le rez.
La réponse souvent prie pour qu’on l’entende,
Et vous n’écoutez pas, vous mettez à l’amende
Tous vos enseignements ? Répondez à l’appel,
Ou bien continuez à chanter le gospel.
L’enfant veut répondre.
Mr Bouvier :
Nous manquerons de temps pour le sujet conclure,
Triste objet qui n’est pas pour une ère future
Où nous en parlerions, mais vouée à l’oubli,
Répétée sans cesse à l’accord établi,
Savez-vous qu’il m’est dur de dire une évidence,
Qu’il me faut pour tenir distancer la cadence
Pour ne juger autrui non pas sur ce qu’il dit,
Mais sur ce qu’en seul droit je juge du dédit,
C’est la plaie au fin fond de sa sinistre panse
Qui dicte, s’il la sent, ou l’ignore ou la panse.
Mr Renart :
Je sais bien qui je suis et pourtant je rêvais,
Mais le rêve est mortel quand on est une bête,
Pour avoir écouté, je me trouve d’un bête,
Par là, monsieur, c’est tout ce que je vous devais.
Il lui a montré la droite.
Mr Bouvier :
Vous faites d’un propos un dramatique sort,
Comme s’il s’agissait de votre seul ressort,
Mais l’aveu est moins cher et au moins lui ne blesse,
Quand le mensonge en fait tout le temps vous oppresse,
Jusqu’à expiration, vous ne saurez jamais
Que vous êtes entouré, que le plus beau des lais
Ne vaut pas le dernier qui vous sera aimable
Au point de tout tenter pour abattre la fable,
Mais vous êtes un renard à votre malfaçon,
Vous jouez sur les mots pour donner la leçon
En croyant échapper au jugement sinistre
Qu’un ministre inconnu le coeur froid administre,
Que pourrait-il sinon puisqu’il est ce qu’il est,
Comme un loup est un loup, un valet un valest.
L’enfant veut répondre.
Mr Renart :
Laisse, mon jeune enfant, ça n’a pas d’importance.
Je voulais être un autre en allant au banquet,
Devant moi pour les gens Marion sourirait,
Mais cela sonne faux, j’ai cru trop à ma chance.
J’ai donné le chemin, partez dès à présent,
Dites-le à tous gens, je me ferai absent.
Scène 3 :
Mr Renart, Mr Fakt, Mr Bouvier, Enfant
Monsieur Fakt entre par la gauche, essoufflé.
Mr Bouvier :
Il n’est pas de plus triste avenir en ce monde
Que la maudite piste à l’entraille profonde
Par où vous cheminez. Vous vous trompez sur moi...
Mr Fakt :
J’ai vraiment, tout tenté, pour l’atteindre, ma foi !
Mr Renart :
Vous étiez ridicule à courir solitaire
Pour ce quelque devoir soit-disant salutaire,
Et vous avez raté l’un des meilleurs moments.
Nous partons au banquet, à défaut d’arguments,
Tous ensemble en un corps Marion va nous entendre.
Elle ne dira rien pour avoir dû attendre.
Mr Fakt :
Qu’en est-il du panneau ?
Mr Renart :
Vous êtes tombé dans.
Mr Fakt :
Il disait le chemin ?
Mr Renart :
Ne le dit plus céans.
Mr Fakt :
Pourtant je le vois bien, il indiquait à gauche,
Ou ma droite selon, ou bien selon l’ébauche,
Mais c’est bien la couleur qui indique les bois ?
Le banquet n’y est pas, je me trouve aux abois.
Mais enfin c’est par là, c’est à n’y rien comprendre,
J’ai fouillé le versant sans pouvoir rien surprendre.
Mr Bouvier :
C’est troublant en effet, il y aurait plus d’un ?
Je veux dire chemin, mais enfin c’est commun,
Je veux dire que c’est suffisant pour le doute,
Pour qu’on perde soudain la trace de la route,
Ce qui n’est pas permis, pas plus de bon aloi
Que la gravitation sans sa suprême loi,
Ridicule importun des bonnes théories
Ou du pire combat les pires tueries
Qu’oeuvrent dans notre esprit des chimères de feu
Contra raison d’acier qui demande l’aveu,
Que recelle la lettre et la raison peut-être
Un substitut détient telle la feuille à l’hêtre
Qui s’emporte au-delà de toute déraison
Et s’affole au-deçà du loup et sa leçon,
Mais le plus important qu’il vous faudra nous dire
Est de cette raison s’il peut s’ouïr le rire,
Enfin le vent hurler et battre torrents d’eau,
Sans quoi l’affolement n’est que morne ruisseau.
Mr Fakt :
Je comprends assez mal.
Mr Renart :
Avec sagesse il parle.
Mr Fakt :
Votre avis est égal ?
Mr Renart :
Son mot est une perle.
Mr Fakt :
Je m’y perds sûrement mais j’ai toujours en main
Ce message blessé autant qu’est un humain,
De n’être pas livré, de toujours faire attendre,
Que faut-il dire encor pour me faire comprendre ?
Mr Renart :
Reposez votre ardeur, calmez votre passion,
L’admirable notion sera tôt satisfaite.
Nous attendons les gens pour faire prossession
Pour aller au banquet sans nouvelle défaite.
Patientez un instant, ils seront de retour,
Ne donnez pas au temps quelque mauvais atour,
Car il joue pour vous, tend sa patte amicale
Et veut voir réussir votre prochaine escale. (560)
Mr Fakt :
Soit, je patienterai par fatigue surtout,
Je suis découragé d’avoir cherché partout,
Je n’ai plus de moyen qu’accepter de vous croire,
Plutôt qu’un écriteau aussi aléatoire.
Scène 4 :
Mr Renart, Mr Fakt, Mr Beaumont, Mr Bouvier, Enfant
Mr Bouvier :
Pendant que nous parlons, voilà que nous revient
De discuter sur tel et voir ce qu’il devient,
Voilà monsieur Beaumont sans sa femme adorée,
Que ne séparerait ni torrent ni marée,
C’est la seconde fois que cela leur advient
Comme si la tempête après que tant s’abstient
Arrachait tous les liens pour les mettre en déroute
Au point que ces deux coeurs du malheur à l’écoute
S’y retrouvent happés, mais dites-nous monsieur
Ce qui est arrivé, si pour le sieur les cieux
Se sont montrés cruels ou si l’on envisage
Qu’à la dame le ciel a montré son visage.
Mr Renart :
J’ai trouvé admirable au sujet de l’azur
Cette belle inversion qui souffre la brisure.
Mr Beaumont :
Après tout ce propos, ma faim a sa mesure.
Je n’y ai rien compris, j’ai le crâne un peu dur.
Mr Fakt :
Ne nous obligez pas, dites-nous pour les autres,
Viennent-ils de ce pas ? Que deviennent les notres ?
Ne restez pas muet, il me faut tout savoir,
La lettre en dépendra autant que mon espoir.
Mr Beaumont :
Je vous expliquerais que je suis en retard,
Mais j’ai faim avant tout, et j’ai mal à mes jambes,
Et je souffre du dos, je ne suis plus ingambe,
Pardonnez ces propos, je suis un vieux renard.
Mr Fakt :
Mais qu’en est-il des gens ? Qu’en est-il du banquet ?
Auraient-ils disparus ? Ce serait le bouquet !
Mr Renart :
Ne parlez du malheur sans craindre qu’il invoque
Ce que quelque propos candide lors provoque.
Mr Beaumont :
Ecoutez sa raison, car votre empressement
Ferait que la tempête adviendrait prestement.
Mr Renart :
Je devine bien sûr que votre chère amie
Est restée en arrière en bonne compagnie
Sans doute pour parler de ce qui les attend.
Je suppose que d’elle à présent tout dépend,
Mais le doute me prend, vous hochez de la tête,
Me serais-je trompé ? Aurais-je été bête ?
Mr Beaumont :
Cinquante mots sont peu pour vous dire le fait.
En un mot je dirai que le monde est parfait.
Mr Fakt :
Après ? Monsieur Beaumont ? Quelle est cette fatigue,
Quelle est cette tension, qu’est-ce que cette intrigue
Qui m’empêche partout ma lettre d’apporter ?
Qu’est-ce qui fait partout mon devoir avorter ?
Si des larmes coulaient dessus son beau visage,
Que ne pourrait y faire un plus beau paysage,
Que me plonger entier dans un plein désespoir.
Si j’étais chevalier, je serais d’acier noir.
J’aurais un coeur de cendre avec un bras de glace
Et la flamme froideur pour oeil en lieu et place.
Je commence à saisir quelle est votre vécu,
Monsieur Renart, partout a de valeur l’écu
Plus que votre confiance, et moins que votre absence,
Comme si alentours tout tenait en essence
A toujours repousser, à tenir à l’écart
Qui se fait appeler du nom de sieur Renart.
Mr Renart :
Vous dites une sottise et en avez conscience.
Reconsidérez-vous, nul n’a eu l’omniscience.
De voir votre abandon me rappelle le mien.
C’est une tentation que ne surpasse rien.
Attendez de savoir, le banquet est tout proche,
Votre missive en poche, que le devoir s’accroche !
Relevez-vous, monsieur ! Je promets sur mon coeur
Que votre seule main donnera lettre et heur
A Marion et sa fille et à toute la fête !
N’oubliez pas autrui, gardez ces mots en tête !
Mr Fakt :
Vous qui êtes menteur, réputé pour félon,
Pour détester les gens, c’est là votre leçon ?
Mr Beaumont :
Ne me racontez pas que vous croyez aux fables !
Mr Renart :
Je suis un doux agneau de même assis aux tables.
Mr Bouvier :
Du moins le voudriez mais ce n’est pas le cas
Ou ne l’était pas tant jusqu’à l’heur de l’en-cas
Où Marion vous trouvait et si vite l’invite
Et là-bas au banquet par la parole dite
Vous espérez vraiment être l’agneau des gens
Qui pour vous sont des loups, vous loup à leurs dépens,
Mais mon brave étudiant, rien ne doit nous surprendre,
Tant le monde animal à l’humain pour apprendre
Nous honore toujours plus que nous honorons
Notre propre existence et nos propres horizons.
L’enfant veut répondre.
Mr Fakt :
Vous vous arrêtez là ? Vous n’avez rien dit presque,
Et faites presque sens à peindre votre fresque.
Mr Beaumont :
L’en-cas est important, pour ma part j’aurais faim,
Parlez donc de vos loups, je parlerai de daim.
Mr Renart :
Tout le monde à présent trouve de bonne entente
Que je suis un gentil méchant, lequel vous tente,
Mais madame Beaumont manque toujours ici.
Il nous faut aller voir, pour elle j’ai souci.
Monsieur Bouvier, venez, monsieur Fakt, en cadence,
De madame Beaumont nous rendrons la présence !
Ils partent tous par la gauche, sauf l’enfant.