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Les Chroniques des Jour Anciens, comme tout bon phare perdu loin du rivage, sont peuplées de fantômes qui s'échouent momentanément sur les curieux récifs protégeant le blanc torchis de notre refuge. Récits égarés, ayant cru découvrir chez nous la place nécessaire à leur croissance, ils s'abandonnent rapidement et demeurent, manuscrit déposé sur l'étagère, livre sans reliure, à l'encre encore humide et pourtant rongé par les poissons d'argent. Notre bibliothèque s'empoussière quand on ne vient pas y faire le ménage. Alors sortons de leurs cartons humides des fantômes sur lesquels personne n'a jamais voulu poser le mot fin, cette extrême-onction de tous les récits. Qui sait, peut⁻être que leurs propriétaires s'aventureront à les ressusciter, et à animer les lettrines qui dorment, et les lignes.
Vous l'avez compris, rien d'achevé dans cette sélection : la bibliothèque des Jours Anciens est pleine de grandes sagas épiques qui ne possèdent qu'un seul chapitre, ce qui est bien un comble pour un saga épique. Qu'ils soient prometteurs ou en devenir, ces textes méritent qu'on parle d'eux. Et après tout, ce n'est pas parce qu'un texte n'a pas de fin qu'il ne doit pas être lu... Autant de "parties 1" s'affichant répétitivement sur votre écran sans espoir de trouver leur jumeau.


Le chapitre 4 du "Dernier homme" affiche son imperturbable "A suivre" comme s'il ne voulait pas mourir, à l'image de son héros, survivant éternel condamné par la justice, puis par le hasard d'une catastrophe, à la solitude. Un récit post-apocalyptique, tout en finesse et en cheminement psychologique, mais inachevé, voilà qui est ironique. Et Art le tueur continue d'errer dans les rues de New York pour se persuader qu'il n'est pas le dernier...

Plus épique et plein du vacarme de l'espace en guerre, "les Parias", de Falc'hun, pour les amateurs de SF directe et rythmée. L'escadrille des Parias, sorte d'agence tout risque spatiale, n'est guère appréciée de ses supérieurs, mais ils ont besoin d'eux. Si leur mission n'est finie elle n'en est pas moins musclée...

Avec "Chute", Ignit redonnait au genre de la fantasy, parfois tristement oublié dans notre bibliothèque, une noblesse et un imaginaire démesuré, fait d'aristocratiques peuplades volantes et de magie. Des intrigues de cour se mêlent à des souvenirs lointains de guerre. Mais quelle était cette chute dont Ignit voulait nous parler ? (attention, ne pas confondre avec "La Chute", du Warza, qui, lui, est achevé !)

La scène ne dure que le temps d'un dîner, mais qui suffit au "nationaliste", du récit éponyme d'Imperator, pour prendre vie et douter de ses propres croyances, dans un monde où règne un autoritarisme bienveillant. Mais quel est ce bruit entendu par Jean dans les dernières lignes ?

Leurs sagas d'héroïc-fantasy sont arrivées en même temps : "Quand l'oracle se tait" de Zikl et "Maledictions" de Kalystah. Elles se sont également tues dans un même souffle. Pourtant n'y avait-il pas là des essais prometteurs dans un genre désormais classique sur les Chroniques ? N'hésitez pas à pénétrer dans leurs deux univers presque antagonistes, celui d'une famille princière en plein doute chez Zikl, ou celui de villageois en proie à la superstition chez Kalystah.

Enfin, parlons de SoK qui repasse à l'occasion sans nous donner loisir de connaître la suite de "Désacralisation". Son court texte labyrinthique, presque hypnotique, n'avait pourtant rien de commun et laissait tout en suspens, y compris son interprétation. Un cauchemar ? Une prison ? Un néant ? Un warp temporel où se concentre une magie ancienne ? Le saurons-nous seulement un jour ?


Si ma suggestion peut permettre de donner une suite à un seul de ces textes, par un appel transocéanique à ses auteurs qui, je le sais, nous rendent visite parfois dans le silence, alors son but aura été atteint. Car il n'y a rien de plus angoissant qu'une saga inachevée... En attendant, penchez-vous dessus, cela leur rendra peut-être la vie. Vous ne pouvez pas lire la suite ? Alors imaginez là !

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