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Le sommet de la vieille la tour de garde offrait une vue imprenable sur le monde environnant le village et le plateau sur lequel il avait été bâti. Mais il n’y avait pas grand chose à voir à part la Forêt. La Forêt à perte de vue, du nord au sud en passant par l’est ; un océan de verdure s’étirant jusqu’aux confins de l’horizon et sans doute même au-delà. Cette étendue, d’un vert si profond qu’elle apparaissait quasiment noire, exhalait une menace sourde presque palpable. Sa présence écrasante étouffait le village, et elle donnait l’impression de retenir son souffle, attendant l’instant propice pour engloutir d’un coup ce minuscule promontoire rocheux qui lui tenait tête avec insolence.

 

Et à l’ouest ? A l’ouest il y avait le Pont. C’était une immense passerelle de pierre qui prenait naissance au bord de la falaise et qui s’éloignait vers le couchant avant de se perdre brusquement dans une brume étrange qui bouchait l’horizon. Personne ne savait ce qu’il y avait de l’autre côté du Pont car nul ne s’était jamais risqué à le traverser. « Le néant » murmuraient craintivement les anciens. Même les plus braves parmi les chasseurs préféraient mille fois affronter la Forêt et ses bêtes féroces plutôt que de poser un pied sur cet effrayant édifice.

 

Presque inconsciemment, les villageois avaient fini par évacuer le Pont de leur esprit, et ne s’en souciaient guère plus, complètement absorbés par leur dur labeur quotidien. Un homme faisait cependant exception. Il s’appelait Xyrf mais tout le monde au village ne l’apostrophait plus que par son surnom : Leste-plume. C’est son indéfectible attachement à l’écriture qui lui avait valu cet affectueux sobriquet. L’écriture…un art bien inutile pour un peuple luttant chaque jour pour sa survie.

 

Xyrf qui venait de vivre son trente-deuxième printemps, était relativement petit (même selon les standards des gnomes !) et chétif. Son physique fragile et une myopie congénitale l’exemptaient des durs travaux des champs ou des périlleuses expéditions de chasse. Il avait donc du temps pour vagabonder et laisser vagabonder son esprit. Le plus souvent il grimpait au sommet de la tour de garde et, comme en ce moment, il laissait son regard errer au loin. Pas trop loin tout de même car même chaussé de ses lunettes aux verres aussi épais que des fonds de bouteille, les abords du village lui apparaissaient constamment flous.

 

Le silence paisible de l’atmosphère matinale fut soudain brisé par le bruit de pas martelant rapidement le sol desséché et poussiéreux du village. Leste-plume devina que quelqu’un de plutôt pressé s’approchait de son refuge. Confortablement juché sur sa passerelle, le gnome rêveur ne fit cependant pas le moindre mouvement pour accueillir le nouveau venu.

 

-Leste-plume, oh Leste-plume ! appela une voix juvénile provenant du sol. Descends, vite !

 

Xyrf ne se pencha pas pour voir qui le demandait avec tant d’insistance. A cette hauteur, son acuité visuelle défaillante ne lui permettrait pas de distinguer des détails tels que des traits de visage. Et de toute façon il avait reconnu la voix de son neveu, le jeune et bouillant Mizfellt.

 

-Qu’y a-t-il encore ? lança-t-il en feignant la mauvaise humeur car en réalité il adorait le jeune garçon.

 

-C’est papa…les chasseurs…ils sont revenus ! répondit avec excitation l’adolescent visiblement essoufflé.

 

-Très bien, j’arrive. Attends-moi.

 

Mais le garçon, sans doute trop impatient de revoir son père, était déjà reparti en trombe.

 

Ah, bouillante jeunesse, songea Xyrf avec une pointe de nostalgie.

 

Après avoir jeté un dernier regard au Pont mystérieux, il entreprit de descendre avec précaution l’escalier en colimaçon qui lui permettait d’atteindre le sommet de la vieille tour. Mais même lorsqu’il ne l’avait plus sous les yeux, il lui était impossible de ne pas penser au Pont. Et alors qu’il se dirigeait d’une démarche calme et posée vers la place centrale du village, il ne pu s’empêcher de ressasser les éternelles mêmes interrogations :

 

Qu’est-ce que le Pont ? Où mène-t-il ? Qui l’a construit ?

 

Le Pont baignait dans un épais brouillard au sens propre comme au sens figuré. L’attitude des villageois vis-à-vis de ce mystérieux édifice était tout aussi incompréhensible. Voici une Tribu qui d’après la légende aurait traversé la Forêt, bravant mille dangers, pour finalement se fixer au bord de cette falaise, bloquée dans son exode par une étrange passerelle nimbée de brume. Xyrf entretenait quelques doutes quant aux mythes fondateurs de sa petite communauté mais à chaque fois qu’il avait tenté d’en débattre avec les plus érudits parmi les anciens, on l’avait voué aux gémonies et même menacé d’ostracisme.

 

Afin d’arriver plus rapidement à la place du village, Leste-plume bifurqua brusquement à droite pour couper par l’allée des cases vides. Ce surnom assez peu poétique masquait en fait un mystère presque aussi épais que celui du Pont. Hormis Xyrf, aucun villageois n’osait s’aventurer dans cette partie du village qui passait pour être hantée. Leste-plume, dont l’esprit plutôt rationnel offrait peu de prise aux superstitions, se riait des peurs de ses semblables. Pourtant, chaque fois qu’il empruntait ce sentier bordé de maisons aussi silencieuses que des tombes, il ne pouvait s’empêcher de ressentir une vague appréhension. Ces demeures étaient inhabitées, désespérément inhabitées. Et ce n’était pas le résultat d’un éventuel abandon par leurs propriétaires car de mémoire de gnome nul n’avait jamais vécu ici. Certains parmi les anciens du village se souvenaient avoir bâti quelques-unes de ces cases mais le fait est que personne ne s’y était jamais installé. C’est justement cela qui intriguait fortement Xyrf. Il connaissait bien les villageois. Il les savait trop économes de leurs forces pour construire tout un quartier sans que cela ne réponde à des impératifs démographiques. D’ailleurs les responsables de la communauté s’accordaient à dire que la population du village baissait lentement et inexorablement. Sans compter que pour trouver du bois de construction il fallait s’enfoncer loin dans les sous-bois, là où la Forêt guettait la moindre occasion de châtier ceux qui osaient la profaner. Avoir déployé autant d’efforts et avoir encouru de tels risques pour finalement construire des bicoques dont nul n’aurait l’utilité, voilà qui était profondément absurde et totalement incompréhensible. Mais le mystère ne s’arrêtait pas là. Ces maisons, pour désertes qu’elles soient, semblaient remarquablement bien conservées y compris celles qui dataient d’avant même la naissance de Xyrf. Etant donné l’absence d’occupants pour les entretenir, elles auraient du se trouver dans un état de délabrement avancé. Pourtant rien ! Aucune trace de dégâts dans les toitures, aucune cloison défoncée, portes et fenêtres vierges de tout dommage. En fait, mis à part quelques toiles d’araignées et quelques mauvaises herbes envahissantes, ces cases semblaient en aussi bon état que les autres maisons du village. Les villageois avaient trouvé une explication à cet étrange constat : des fantômes hantaient ces lieux. Xyrf entretenait, quant à lui, quelques doutes sur l’existence des spectres et autres ectoplasmes. De plus il avait du mal à imaginer des revenants donnant un coup de balai devant la porte, arrachant les mauvaises plantes du jardin et colmatant à la poix les fissures dans la toiture.

 

Si de tels fantômes existaient, je les inviterais à venir s’occuper de ma cabane, soupira-t-il en pensant au piteux état dans lequel se trouvait sa demeure, conséquence il est vrai d’une certaine négligence de sa part…

 

A peine avait-il quitté l’allée des cases vides que son odorat fut assailli par une épouvantable odeur. Il ne fut guère surpris car c’était presque toujours le cas à cet endroit précis ; et comme il passait souvent par là pour se rendre à la vieille tour, il avait fini par s’y habituer. Les villageois quant à eux restaient soigneusement à distance respectable. Déjà qu’il y avait les fantômes ! Mais cette puanteur en plus, c’était vraiment trop ! Xyrf décida de faire un petit détour avant de rejoindre son neveu qui devait déjà avoir atteint la place centrale. Il se dirigea vers une petite cabane isolée et paresseusement adossée à l’enceinte en rondins qui entourait le village. Les effluves nauséabonds semblaient s’échapper de la porte légèrement entr’ouverte. Leste-plume s’arrêta devant la sobre demeure et lança d’une voix forte :

 

-Maître tanneur ! Maître tanneur ! Sortez, voyons. Le temps est magnifique ce matin.

 

Une joyeuse cacophonie de vaisselle renversée et d’outils tombant au sol lui répondit aussitôt. La porte s’ouvrit brutalement, permettant à une fumée grasse et brunâtre de s’échapper de la cabane avant d’être calmement dispersée par la brise. Un individu vêtu d’une veste et d’une culotte en peaux se tenait à présent devant l’entrée. C’était un ancien qui devait son dos voûté plus à l’exercice de son dur métier qu’au poids de l’âge. Son visage rond et débonnaire encadré par une tignasse grisonnante et une barbiche taillé en pointe affichait un large sourire.

 

-C’est bien gentil de passer me voir, Leste-plume, s’écria le vieux gnome en guise de bienvenue.

 

Xyrf éprouvait une grande affection envers Tagzokt, le tanneur du village. C’était réciproque d’ailleurs car, à part le scribe myope, personne ne prenait la peine de rendre visite au vieux gnome. Il faut dire que l’atmosphère pestilentielle du lieu y était sans doute pour quelque chose.

 

-Je ne vous dérange pas au moins ? s’enquit Leste-plume.

 

-Absolument pas, répondit le tanneur. J’étais juste en train de surveiller ma bouillie de cervelle.

 

Le vieux gnome s’était légèrement écarté et Xyrf put jeter un œil à l’intérieur de la cabane. Sur le foyer allumé avait été déposé un large chaudron dans lequel mijotait un liquide pourpre et épais. A intervalle régulier des bulles venaient crever la surface, accompagnées d’une vapeur grasse et écœurante. C’était assurément cette étrange mixture qui dégageait l’immonde fumet dont le voisinage se plaignait tant.

 

-Voulez-vous m’accompagner jusqu’au chêne ? demanda Leste-plume tout en réprimant avec peine une grimace de dégoût. Mon frère et les autres chasseurs sont revenus.

 

-Parfait, je te suis ! s’exclama Tagzokt avec satisfaction. J’espère que la chasse a été fructueuse et qu’ils rapportent de nombreuses prises. L’hiver sera bientôt là et je commence à manquer de peaux. Je crains de ne pouvoir honorer toutes mes commandes, termina-t-il d’un air préoccupé.

 

-Et votre…bouillie ? demanda Xyrf en désignant la marmite au répugnant contenu.

 

-Oh ! Ne t’inquiète pas pour ça, répondit le vieil artisan. Elle n’est pas encore suffisamment épaisse et doit encore cuire quelques heures. Après seulement, elle pourra être appliquée sur le cuir.

 

Les deux amis se mirent en route tout en plaisantant joyeusement sur les désagréments olfactifs que l’activité du tanneur causait aux habitants du coin.

 

-Un jour, fit Tagzokt faussement sérieux, ils vont finir par me jeter du haut de la falaise, non sans d’abord m’avoir fait ingurgiter mes précieuses décoctions.

 

-Ils seraient bien peu inspirés de faire une telle chose, rétorqua Xyrf, hilare. Plus que les arbalètes de nos sentinelles, je suis persuadé que ce sont vos senteurs si…particulières qui maintiennent les bêtes sauvages à l’écart de notre village.

 

-Et pas que les bêtes sauvages ! Comprends-tu pourquoi à mon âge je suis toujours célibataire ?

 

Les deux gnomes, conversant et riant de bon cœur, ne tardèrent pas à arriver au pied du chêne qui s’élevait fièrement au centre de la place du village. La majorité des villageois s’étaient déjà rassemblés sous l’arbre gigantesque pour offrir aux chasseurs, absents depuis une semaine, un accueil des plus chaleureux. Zibnarf, le chef du village, avait même sorti sa flûte et en tirait de joyeuses notes, au grand bonheur des tout petits qui étaient présents en grand nombre. Xyrf réalisa que les chasseurs n’étaient pas encore là. Ils étaient sans doute passés à la réserve pour déposer armes, bagages et prises avant de venir saluer leurs proches et leurs amis.

 

Effectivement, ils ne tardèrent pas à arriver. Sept robustes gaillards revêtus d’armures de cuir bouilli et chaussant d’épaisses bottes fourrées. Sept hommes dont les visages fermés cachaient un courage sans bornes et un total dévouement pour leur communauté. Sept braves qui…

 

Etaient huit à leur départ, réalisa soudain Leste-plume, le cœur serré.

 

La flûte de Zibnarf s’était brusquement tue. Jetant un rapide coup d’œil à l’assemblée, Xyrf devina aux mines douloureusement figées que tous avaient compris : la Forêt avait une fois de plus prélevé son dû. Il fut soulagé de constater que son frère, le gigantesque Grazzt Tête-de-loup était rentré sain et sauf. Son soulagement était néanmoins teinté de tristesse car quelqu’un se retrouvait privé de cette joie de revoir l’être aimé. Une jeune femme ravissante et toute de blanc vêtue éclata en sanglots et quitta brusquement la foule, le visage inondé de larmes. Il reconnut la pauvre Mizène. C’était donc son fiancé, l’intrépide Munkark qui reposait désormais auprès de ses ancêtres vénérés.

 

Comme le voulait l’usage, les sept chasseurs allèrent s’agenouiller devant les parents de leur compagnon défunt afin de leur présenter leurs condoléances. Le vieux gnome et son épouse acceptèrent dignement l’hommage sans se laisser submerger par la douleur qui avait étreint leurs cœurs. Ils rejoignirent ensuite leur demeure, accompagnés par Zibnarf qui savait trouver les paroles réconfortantes. La foule se dispersa car il n’était plus question de faire la fête.

 

Xyrf s’excusa auprès de son ami le vieux tanneur et alla rejoindre son frère qui avait déjà été assailli par son tumultueux gamin. Grazzt était grand : de mémoire de gnome on n’avait jamais vu quelqu’un d’aussi grand. Et il était fort : de mémoire de gnome on n’avait jamais connu quelqu’un d’aussi fort. Son gabarit peu commun doublé d’un courage à toute épreuve en avait fait le champion du village. Il y a quelques années, lors d’une expédition dans les bois, il s’était malencontreusement éloigné de ses compagnons et s’était retrouvé nez à nez avec un jeune loup. Armé d’une simple lance et d’un coutelas, le gnome avait courageusement fait face, décidé à vendre chèrement sa peau. Et il avait eu le dessus. Les villageois n’en avaient pas cru leurs yeux lorsqu’ils l’avaient vu émerger des sous-bois, épuisé, couvert de morsures sanglantes, mais brandissant fièrement un trophée macabre. C’est ce jour-là qu’il avait gagné le surnom de Tête-de-loup.

 

Leste-plume étreignit son frère qui le dépassait d’au moins deux têtes et lui souhaita la bienvenue. Le géant, au regard étonnamment doux, le remercia chaleureusement et lui exprima sa joie de le revoir en bonne santé.

 

-Et mon fils ? lui demanda Grazzt en ébouriffant de sa large paume la blonde tignasse de son rejeton. S’est-il montré digne de moi durant mon absence ?

 

-Lui ! s’exclama Xyrf en prenant un air outré mais non sans avoir discrètement adressé à son frère un clin d’œil entendu. Jamais on n’a vu un gamin aussi paresseux et indiscipliné. Lui assignes-tu une tâche que tu peux être certain que ce sera fait à moitié, à l’envers ou pas du tout.

 

-Mon oncle, mon oncle ! Je vous en prie ! implora le pauvre Mizfellt tout penaud, ce qui provoqua chez les deux frères un franc éclat de rire.

 

-Mizfellt, fit Tête-de-loup redevenu sérieux. Rentre à la maison et préviens ta mère que j’ai à faire à la réserve mais que je ne devrais pas tarder. Dis-lui également que j’ai l’estomac dans les bottes. Ah oui et qu’elle rajoute un couvert pour ton oncle, ajouta-t-il d’un ton qui fit comprendre à Xyrf qu’il était hors de question de refuser l’invitation.

 

Qui serait assez fou pour rater une occasion de manger l’excellente cuisine de Dixa ? songea Leste-plume alors que des gargouillis en provenance de son estomac lui rappelèrent soudain qu’il n’avait encore rien pris aujourd’hui.

 

-Suis-moi, fit simplement Grazzt.

 

Et les deux frères prirent le chemin de la réserve. Ils passèrent devant la Maison du Chêne ainsi nommée car elle avait été bâtie sur la place centrale, à l’ombre du grand chêne. C’est dans cette petite maison cossue que vivait Zibnarf et c’était ici qu’avaient vécu avant lui les précédents chefs du village. Souffle-flûte, comme le surnommaient affectueusement les villageois, s’était installé ici l’hiver dernier après que le vénérable et regretté Dnozguk eut été emporté par la maladie.

 

Le sentier qui partait de la place du chêne et allait vers le nord, conduisait directement au puits. Ce point d’eau, le seul du village, était le bien le plus précieux de ses habitants. C’est ici que les villageois se retrouvaient pour puiser de l’eau qui servait aussi bien pour boire, cuisiner, se laver ou arroser les maigres cultures que des paysans obtus s’acharnaient à faire pousser d’une terre ingrate. Mais ces dernières années, des sécheresses répétées avaient eu raison de la générosité du puits dont le niveau baissait de manière alarmante. A l’est, dans les sous-bois, coulait une rivière dont l’un des lacets n’était qu’à quelques centaines de pas des fortifications du village. Lorsque venait l’été et que le niveau du réservoir était au plus bas, les villageois étaient contraints d’aller y puiser leur eau. Ce n’était malheureusement pas sans danger…

 

Deux adolescentes s’affairaient autour du puits. Grazzt s’arrêta pour les saluer et leur proposa son aide qu’elles acceptèrent avec joie. Son bras puissant tournait la manivelle à une cadence impressionnante et le seau, bien que rempli à ras bord, remontait si vite des profondeurs du puits qu’on eut dit qu’il était vide. Les deux jeunes filles ayant amplement fait provision d’eau, remercièrent en rougissant le galant champion et s’en allèrent en prenant remarquablement soin de ne pas renverser une goutte du précieux liquide. Tête-de-loup et Leste-plume se remirent en route et à la demande de son frère, Grazzt, le visage grave, se mit à raconter comment le malheureux Munkark avait trouvé la mort.

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