On restait encore bien loin de l’anomalie détectée.

Un confrère toussant et crachant ses poumons non loin de lui fit revenir Roland sur Terre. Ainsi le flot continu de propositions plus absurdes les unes que les autres ne s’était interrompu. Six heures à présent que ses oreilles bourdonnaient des conneries proposées par ces soi-disant scientifiques de renom. Oh, il ne leur avait pas fallut longtemps pour déchanter et s’apercevoir que le fameux objet découvert utilisait l’orbite gravitationnel du système solaire dans le seul but de repartir de plus belle vers de lointains horizons en utilisait ce qui était communément appelé « fronde gravitationnelle ». Rapidement s’était imposé le fait que rien n’allait le faire dériver de sa trajectoire et que l’humanité perdrait là sa première opportunité de contact avec une vie extra-terrestre. S’en était suivi le consensus qui s’imposait, qu’il fallait se faire remarquer pour ne pas rater cette occasion.

 Ainsi l'interminable défilé d'idées plus minables les unes que les autres avait déclenché une migraine des plus tenace chez Roland. Comment un seul de ses confrères pouvait-il ne serait-ce que juger leurs propositions dignes d’être énoncées à haute voix ?!

Depuis une décharge sonique en orbite terrestre, au flash lumineux répété, en passant par des toiles de feuilles d’aluminium et or tendues et éclipsant le soleil voire l’ionisation d’un nuage de gaz se trouvant entre la Terre et l’objet à l’aide d’un laser si puissant qu’il n’avait pas encore été inventé, l’assemblée de physiciens réinventaient la science-fiction façon Hollywood ! Ce qui gênait le plus Roland était que le ridicule de leurs propositions s’étendrait à sa personne si quelque profane venait à écouter ce qui se passait dans la salle.

Il en avait assez de leur débit de connerie incessant.

- Assez ! Avait-il martelé en frappant du poing sur la table. Avez-vous fini de me ridiculiser ?!

Un murmure traversa la salle attribuant la réaction de saint Roland au temps prolongé passé en réunion sans même une pause ou un repas. Oui, il était sûrement temps de prendre soin de leurs collègues les plus âgés… mais Roland n’en aurait pas plus supporté et réitéra d’une voix de stentor :

- Vous voilà à débattre de la solution sans même avoir étudié le problème ! L’objet est à l’extérieur du nuage de Oort, à un peu plus d’une année lumière et il se rapprochera un peu plus comme l’ont estimé nos amis de l’EELT –Extremely Large Telescope, Argentine-.

Voilà où lui en était arrivé : passer de la pommade permettait de calmer les personnes citées, puis leur entourage attendant eux aussi leur tour à être citer.

- Dans « année lumière » il y a année !

Le silence retomba sur ce mot lourd de contrainte. Oui, il fallait faire une pause : Roland Depôtre surchauffait.

- Ce qui mène à penser qu’aucune de vos médiocres tentatives n’arrivera à atteindre l’objet avant une longue année de toute façon !

Silence de Roland. Gêne de l’assemblée.

- Comment pouvez-vous ne serait-ce que passer à côté d’une telle évidence ?! Rien de conventionnel ne saurait atteindre l’objectif avant son départ.

Silence gêné chez les astrophysiciens.

- Alors prenez vos affaires, rentrez dans vos pays et demandez à parler à vos gouvernements ! Faites rêver vos dirigeants d’armes, de richesses, d’avancées technologiques majeures, de parts de marché étendues à d’autres planètes, d’autres civilisations, mais obtenez cette foutue mise en commun de vos connaissances ! Oh ne feignez pas l’incompréhension ! Obtenez de partager vos dernières découvertes en matière d’espace-temps, le temps d’une mission commune, car c’est là votre seule chance.

La rage du physicien s’estompait peu à peu, à mesure que l’évidence prenait forme dans l’esprit de ses collègues.

- Inutile de rêver, l’objet sera reparti bien avant que vos idées conventionnelles n’atteignent le bureau des commissions budgétaires !