Le biochimiste parlait pour lui-même au milieu de toute l'agitation.
Les lignes de code s'alignaient les unes après les autres, illisibles.
Jean en avait oublié l'attaque du site tout comme il ignorait les
gardes et la scientifique qui le côtoyaient.
Après avoir fait venir Akdov, après avoir ouvert les portes des
cellules, Jean s'acharnait à attirer le commandant dans cette pièce,
pour ouvrir le coffre-fort où se trouvaient les documents vitaux du
projet cinq. Il ne savait plus depuis combien de temps tout cela avait
été planifié : des mois, peut-être un an. Depuis qu'on l'avait écarté
du site B, sur la face cachée de la Lune, il n'avait plus eu d'autre
objectif que de s'emparer des secrets de la tore, au projet cinq, et
pour cela il avait déclenché l'inspection qui l'avait mené, lui, ainsi
que tous les autres au sein de cette base sous-marine. Ce n'était pas
bien différent de la W.H.W., en deux mille soixante-trois. Au final,
une fois encore, ils pliaient le monde à la volonté de leur seul
codage, à partir d'un seul ordinateur : le Libra.
Un grincement sinistre secoua les bureaux de l'administration. Il leva
la tête comme les autres, lui aussi craintif. La porte s'ouvrit, les
gardes se tournèrent prêts à accueillir leur commandant : ils firent
face à Naïa.
- Mains en l'air !
Les quatre gardes présents lâchèrent leurs armes face au pistolet
braqué sur eux. Ils reculèrent mains en l'air contre la paroi, laissant
la voie libre à la pilote qui saisit le biochimiste par le bras.
- Allez venez, le capitaine nous attend.
- Aucun risque !
La réplique de Jean était cinglante.
- Le colonel est piégé dans un couloir cerné des deux côtés par vingt
soldats ! Maintenant écoutez-moi, il faut que vous compreniez que la
thymine...
- On n'a vraiment pas le temps ! C'est Akdov au-dessus de nos têtes,
d'ici un quart d'heures la place sera remplie de soldats du Nouveau
Monde et ces gars-là ne plaisantent pas.
- Mais qui vous dit que je plaisante ?!
Ce disant le biochimiste s'était agrippé à son ordinateur et, l'air
vexé, se défiait de la pilote. Les scientifiques et soldats présents,
collés contre les cloisons, les regardaient faire sans comprendre :
- Je suis bien ici, j'ai tout ce qu'il me faut ! Un clé, il me manque
une clé et il me manque un document mais à part ça tout va pour le
mieux, merci ! Maintenant si vous n'êtes pas là pour parler de méïose
alors cessez de me déranger et allez vous enfermer dans votre
sous-marin !
Elle se dégagea avec violence :
- Vous êtes drogué !
- Et alors ?! Mon organisme n'en est pas pour autant plus instable !
Non, voyez-vous, je n'ai pas écarté le colonel pour que vous veniez me
déranger à sa place !
Il regarda alors distraitement l'écran de son ordinateur, et écarquilla
les yeux. Il se jeta dessus sans plus prêter d'attention Naïa qui, à
son tour, piquée par la curiosité essayait de comprendre ce qui se
passait. Le code défilait, se tronquait, se chargeait de symboles
insécables. Entre la frayeur et l'admiration, Jean cherchait à corriger
le flot d'erreurs qui commençait à recouvrir tout l'écran.
L'eau du quai éclata d'un coup sec puis la force du champ avala l'eau
dans une spirale. Entre les deux sous-marins, les renversant par sa
masse s'éleva un abordeur du Nouveau Monde, dont les portes
s'ouvrirent. Les soldats qui en sortirent furent cueillis par le feu
nourri des défenseurs. Le commandant, avec une section, cueillait
l'assaillant à bout portant. Plusieurs grenades secouèrent la salle
étroite puis les armements de l'abordeur se mirent à tirer. Le métal se
mit à fondre et à brûler. Une roquette éclata à l'intérieur de la soute
et l'assaillant, désemparé, fit une embardée jusque contre le second
sous-marin, plus petit, sur lequel il s'écrasa. Le premier assaut était
repoussé.
92 - Géo, projet
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- Écrit par Vuld Edone
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