La navette reprit de l'altitude. Immons jeté au sol grommela tandis que défilaient les tirs et les nevs par la verrière. Il voulut se relever, fut rejeté à terre par de nouveaux chocs, alors que Naïa manoeuvrait pour éviter les rafales. Ils ne voyaient plus l'Ange, ils ne voyaient plus rien. Tout allait très vite.
- Bon sang mais fais-nous partir !
- Un peu plus d'une minute avant d'enclencher la propulsion.
Elle paraissait calme mais penchée sur les commandes, en vérité, elle était la plus tendue d'eux tous. À chaque seconde il lui fallait faire de nouvelles manoeuvres pour éviter d'être abattu.
- Pourquoi est-ce qu'ils ne tirent pas ?!
Immons parlait des Pornevs, dont les batteries s'étaient tues désormais.
- C'est l'Ange. Répondit Kyréna. S'ils nous détruisent, l'Ange anéantira la flotte.
- Ils ont déjà détruit leurs propres hangars sans remords, ce n'est pas quelques vaisseaux qui vont les arrêter !
- Sauf si Akdov est encore à leur bord.
- Le général Akdov ? Vous voulez dire qu'il est là, quelque part ?
L'officier regarda Immons avant de se détourner. Il oubliait facilement que le lieutenant, pas plus que la pilote, ne savaient rien des dernières heures qui s'étaient écoulées. Ils sauvaient leurs vies, c'était tout ce qui comptait.
Les nevs leur venaient dessus par trois côtés, depuis le haut et en poursuite. À plusieurs reprises des tirs avaient touché la coque mais ils volaient encore. Leur gardien les défendait toujours, passant d'un ennemi à l'autre quand soudain il se tourna vers les Pornevs. Quelles pensées eut l'intelligence artificielle ? La connection était parasitée, quelqu'un cherchait à la rompre. Il repéra la source, il se préparait à l'anéantir quand les nevs revenant à l'assaut tombèrent de tous côtés sur la navette.
- Attention !
Naïa pressa de toutes ses forces sur les commandes. Un instant le vaisseau de liaison sembla s'immobiliser dans les airs avant de briser son axe et de glisser sur la droite. Quelques secondes, l'assaillant reprit l'axe et déjà ils avaient acquis leur cible. Les premiers tirs s'abattirent, elle évita la plupart mais une série frappa l'un des réacteurs tandis que les lasers mordaient dans l'habitacle. Le métal se referma en sorte d'aspiration.
- Combien de temps ?
- Dix secondes !
- On n'a pas dix secondes !
La machine regardait la navette à l'hallali, puis le Pornev d'où provenait le piratage. Il n'avait pas de priorité. Il n'était pas conçu, à l'origine, pour protéger. Il ne restait que quelques secondes, soudain l'Ange Noir s'abattit sur les nevs. Les tirs de lasers dévièrent sur sa surface, les séries d'obus ricochèrent. En un instant deux escadrons s'embrasèrent et s'abattirent en flammes.
- Naïa !
- Deux secondes ! Un !
Elle lança la propulsion, le vaisseau passa enfin la barre, le paysage disparut tandis qu'alignés ils filaient parallèles au Saint-Laurent, en direction de la mer. Eux partis, comme la flotte ne pouvait plus les atteindre, l'Ange se retourna contre le piratage. Il traversa les formations de Pornev, la seconde d'après il faisait face au poste de pilotage, la seconde suivante celui-ci explosait, une seconde encore et il faisait face au général Akdov.
À cet instant le scientifique à côté du général se tira en arrière des deux ordinateurs, pour contempler la merveille de technologie d'ex-RPE. L'Ange s'était arrêté. Sans connection, il était retourné à son processus moléculaire qui prendrait encore des jours entiers. En attendant il faisait face à Akdov, immobile, comme un présage.