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Les premières lueurs de l’aube se reflétaient sur le casque finement ciselé dans l’Ithilmar de Terthaël. Il bailla longuement, son tour de garde allait bientôt s’achever et il avait hâte de retrouver sa couche. Se retournant, il vit une voile surgir à l’horizon, puis deux, puis trois, puis vingt, trente...Jamais il n’avait vu une flotte aussi imposante. Il resta pétrifié quelques instants, puis il saisit son cor et y souffla avec tout l’air que pouvaient contenir ses poumons. Après quelques secondes il entendit le même son au loin, se répétant encore et encore. D’ici quelques heures tout Cothique serait au courant. Bientôt, des guerriers elfes en armures furent massés sur la plage de sable blanc. Grande fut leur stupeur quand ils s’aperçurent qu’ils n’avaient pas à faire à un ou deux bateaux de pillards, comme d’habitude, mais bel et bien à une flotte gigantesque et bien organisée. Ils n’eurent que le temps de recommander leur âme à leurs dieux respectifs, que déjà les premiers Barbares se ruaient vers eux en hurlant...

 

Elbereth se réveilla en sursaut. Qui était l’insolent qui osait le faire lever à une heure pareille ? Le soleil venait tout juste de se lever et il ne s’était pas encore tout à fait remis de la fête du soir précédent.

 

- Sire Elbereth ! sire Elbereth !Un jeune page à l’air blême et effrayé se tenait à son chevet, votre père vous a fait mander, il doit s’être passé quelque-chose de très grave, tout le conseil est là !

-" Mpf... Soit, allons-y " fit à contre-cœurr le noble elfe en essayant de masquer sa peur et sa nausée, la voix du page résonnait douloureusement dans son crâne.

 

Il enfila en hâte ses vêtements, puis se dirigea vers la salle du trône. Quand il y pénétra, il s’aperçut qu’il était le dernier arrivé. En effet le grand prêtre de Malahndël- Gall, le général Tinuviel, le maire du palais Inkael et le devin du temple de Morai-Hegg étaient tous attablés avec son père. Ils se levèrent en signe de respect à son arrivée, puis le roi prit la parole.

 

" Messieurs, l’heure est plus que grave. Une horde de barbares humains a débarqué cette nuit à l’est de Limarin et a complètement submergé nos premières défenses. "

 

Il prit sa respiration et, après une courte pause, continua.

 

"Leur nombre est colossal et ils sont bien armés, j’ai peur que les repousser soit une tâche ardue et qu’il nous faille pactiser avec eux... "

 

Un murmure d’indignation fut poussé unanimement par l’assemblée.

 

-" Cela est grotesque ! Donnez-moi carte blanche et je rejetterai ces barbares à la mer ! s’écria le général Tinuvel, la colère empourprant son visage.

-" Jamais un elfe ne se verra obligé à pacctiser avec un de ces misérables barbares ! La mort est préférable à un tel déshonneur... " déclara le maire du palais, scandalisé par une telle proposition.

-" Il suffit ! Laissez-moi finir de parler ! "

 

Après que chacun ait marmonné des semblants d’excuses, le vieux monarque continua.

 

-" Mais cela n’est pas tout !Il semblerait qu’ils aient amené avec eux femmes et enfants voir même du bétail, ce qui m’induit à penser qu’ils veuillent s’établir durablement en Ulthuan... Nous ne pouvons pas tuer des femmes et des enfants, cela reviendrait à s’abaisser au même niveau que ces barbares... "

 

Comme toute réponse le roi obtint des jurons. En effet personne n’était prêt à laisser ne serais-ce qu’un seul humain profaner l’île de leurs ancêtres. Elbereth se racla la gorge et pris la parole d’un débit clair et fluide :

 

-" Messieurs, vous savez et je sais que tuuer des êtres sans défenses est contraire à nos principes, mais nous n’ignorons pas non plus que nous ne pouvons pas accepter qu’une bande de... buveurs de bière vienne souiller l’île immaculée... "

-" Que proposez-vous donc prince Elbereth ? " demanda d’un ton narquois le général Tinuvel.

-" Je vous déclare que la ruse serait bienn meilleure que la violence dans cette tâche... si nous arrivons à persuader ces barbares que l’île ne leur convient pas, ils partiront d’eux-mêmes... "

-" Et qu’allez-vous faire ? Demander audience à leur chef et lui dire que le climat est très mauvais pour ses rhumatismes, et qu’il se trouverait mieux en Lustrie ? " Asséna Tinuvel.

 

L’assemblée éclata de rire. Elbereth se sentit ridiculisé et insulté, chose qu’il n’oublierait pas de sitôt. Tinuvel prit à nouveau la parole :

 

" Je demande à sa majesté de me laisser lever une armée et d’aller écraser ces chiens. "

 

Le vieux roi soupira, puis baissa la tête, à contre cœur certes, mais en signe de consentement.

 

-" Qu’il en soit ainsi... "

 

L’assemblée acquiesça silencieusement. Les humains allaient apprendre que l’on ne se moque pas impunément des premiers parlants.

Il fallut quelques jours au général Tinuvel pour rassembler une armée digne de ce nom. En effet beaucoup de guerriers cothiquois étaient partis défendre les frontières du Nord d’une imminente attaque Druchii, et il ne pouvait pas laisser les côtes sans défenses. Pendant ce temps Elbereth avait continué sur sa ligne pacifiste, envoyant des messagers chez les humains, dans le bût d’ instaurer le dialogue. Ceux-ci eurent beaucoup de problèmes à accomplir leur mission car les norskiens ne les voyaient pas de bon oeil, les prenant pour des espions. Néanmoins, après maintes tentatives un jeune elfe à l’air éphèbe fut laissé entrer dans leur camp, et put alors exposer les requêtes de son maître.

Ce fut ainsi qu’au soir du deuxième jour après leur débarquement, Olaf Aghaerrisson, le chef des envahisseurs, accepta de recevoir le jeune prince.

Le matin suivant Elbereth arriva au campement humain. Ces barbares avaient construit une palissade en bois tout autour d’une colline qu’ils avaient aménagé comme une forteresse rudimentaire et étaient en train de bâtir des cabanes en bois dans la plaine avoisinante. Le prince elfique fut pris par la rage quand il vit les armes des guerriers ulthuanais morts en défendant leur patrie entassés dans un coin sordide. Ces barbares n’avaient donc de respect pour rien ! Une grande porte faite de troncs de chêne s’ouvrit devant lui et suivi de ses compagnons il se dirigea à travers un chemin boueux vers la tente d’Olaf. Il regarda tout autour de lui. Ici des femmes allumaient un feu, là des hommes érigeaient une palissade, plus loin un groupe d’enfants jouaient à cache-cache...une jeune fille passa à côté de lui, frôlant sa veste et lui guettant un regard très explicite. Il la dévisagea longuement, jusqu’à ce qu’un des membres de sa suite ne le fasse revenir à la réalité.

 

-" Prince, vous allez bien ? "

-" Oui Catharien, oui, je...je contemplais le paysage.. " bégaya Elbereth.

 

Ils entrèrent dans la tente du chef, non sans avoir d’abord ôté leurs armes et récité une courte prière incompréhensible à leurs oreilles, comme le veut la coutume norskienne. Olaf était assis sur un petit trône en bois, son interprète à côté de lui.

 

" Salut à toi noble et craint Olaf Aghaerrisson, chef des norskiens de l’est. Je t’apporte les vœux de bonne santé de tout le peuple elfique . " déclara solennellement le prince aux oreilles pointues.

-" Le seigneur de Köbenaben vous salue " bbalbutia avec un fort accent nordique l’interprète, après s’être brièvement consulté avec son seigneur.

-" Nous ne voulons pas la guerre entre noss deux peuples, au lieu de se battre entre eux, elfes et humains devraient s’unir dans la lutte conte le mal. "

-" vos paroles sont sages " décréta l’humaain par l’intermédiaire de son interprète.

-" Or voilà, beaucoup d’entre nous accepteent mal la présence d’humains sur nos terres, et il serait... " Olaf frappa fortement sur un des manches de son trône, le brisant.

-" Nous n’avons aucune intention de partirr !! " Cria t’il. " cette partie de l’ île est désormais nôtre ! Et quiconque si opposera aura à faire à moi...dehors maintenant ,vous m’importunez ! "Il souffla dans un cor, et après quelques secondes quatre barbares blonds à l’aire féroce invitèrent brutalement Elbereth et sa suite à quitter les lieux.

 

Le prince était furieux. Traiter ainsi le fils du roi d’un des royaumes les plus anciens et prestigieux d’Ulthuan ! Celui-là aussi paierait ! Pendant qu’il se jurait de transpercer de son épée le ventre bombé de ce stupide humain, le bruit d’un galoppement attira son attention, en effet seulement un cheval élevé en Ellyrion pouvait faire preuve de telle élégance dans ses mouvements. Il se retourna et vit une silhouette au portement noble descendre de son cheval, un magnifique pur-sang ellirois, et entrer dans la tente d’Olaf. Avait-il de la concurrence ? Tracassé par cette pensée, il décida d’en savoir plus, et une fois rentré au palais royal de Tor Bandek, la capitale du royaume côtier de Cothique, il envoya un de ses plus fidèles conseillers au campement humain, dans le but de l’informer sur tout ce qui si passait d’étrange.


Tinuvel entra brusquement dans la tente du chef norskien, ce qui fit froncer les sourcils à celui-ci.

-" Alors Olaf ? Ou sont les pillages et les massacres que tu m’avais promis ? Vous êtes ici depuis bientôt une semaine et tes fétides guerriers n’ont autre occupation que de construire des cabanes minables et s’ emplir la panse de bière ! " dit le guerrier elfe en un norskien approximatif et au fort accent.

-" Comment oses-tu me parler ainsi misérabble elfe ? Je vais te faire ravaler tes paroles ! " rugit l’humain en ramassant son hache.

-" Balivernes que cela Olaf ! Tu dois resppecter nos pactes ! J’ai diminué la garde aux côtes ces dernières semaines, je t’ai indiqué comment contourner les navires de guerres Lothernois, maintenant c’est à ton tour de mettre à feu et à sang la région toute entière ! "

-" Mais tu ne comprends donc pas que tout ce que nous voulons c’est fonder une colonie pour nous établir ici durablement ? Si le reste de vos royaumes décidait d’agir contre nous, ce serait la catastrophe. Vous êtes peut-être efféminés, mais vous savez vous battre. Non, je ne peux honorer notre marché " expliqua calmement le fier norskien.

-" Tu ne comprends donc pas que ta vie et celle de tous ces misérables barbares dépend de moi ? un seul mot de ma part et une armée entière des meilleurs guerriers de tout Cothique vous feraient disparaître à jamais ! " affirma avec arrogance le général ulthuanais.

-" Sale vermine ! Tu ne me laisses guerre le choix ! Soit, ce soir même le village de Limarin sera rayé de la carte... " dit en soupirant Olaf.

-" Tu sais ce qui te convient mon ami ! " sibila en ricanant Tinuvel. Puis il ajouta en sortant : " Fais vite, le temps nous est compté... "

 

Elbereth était en train de jouer au Manakael, sorte d’échecs elfiques, tranquillement assis sur un fauteuil recouvert de la plus fine soie du Cathay quand un de ses espions fit irruption dans la pièce. Son regard était sombre et il semblait essoufflé. Il avait du parcourir le long corridor qui menait à la salle du trône en courrant.

-" Sire, sire !! Je dois vous parler avec urgence ! " s’écria l’espion épuisé.

-" J’arrive de suite mon brave Maelag... " aaffirma le jeune prince, anxieux d’apprendre ce que son espion avait à lui dire. Il salua brièvement son père, tout en s’excusant de devoir interrompre une partie si bien commencée, et suivit son serviteur vers sa chambre.

" Allons, dis-moi, les nouvelles sont-elles bonnes ?" interrogea t’il à peine eurent ils pénétré dans ses appartements.

-" j’ai bien peur que non sire... " chuchotaa Maelag, timoureux d’être à son tour espionné.

-" Que veux-tu dire par là ? "

-" Et bien, disons que les événements prennnent une tournure qui ne me plait guère... " répondit l’espion, les yeux rivés sur le plancher de marbre.

-" Parle alors ! Nom d’Isha !! " s’écria EElbereth, qui ne tenait plus dans sa peau.

-" Bien, comme vous me l’aviez demandé, j’’ai parsemé les alentours du campement humain d’espions, et grâce à la garde vigilante de ceux-ci j’ai appris des choses fort intéressantes... "

-" et... " questionna le prince.

-" ce matin même ils ont vu une horde de guerriers sortir du camp, et se diriger vers Limarin...cela n’aurait rien de spécial si ce ne serait qu’ils ont averti le général Tinuvel, et que celui-ci a refusé catégoriquement d’envoyer des troupes aider les Limarinois, sous prétexte qu’il s’agissait certainement d’une manœuvre de diversion, dans le but d’éparpiller nos forces...en plus, en chemin, ils ont été attaqués par des humains, et un seul a réussi à échapper au massacre, mais il est mort de ses blessures peu après m’avoir rejoint "

-" Cela est scandaleux, ce soit disant génnéral commence vraiment à m’énerver ! Il faut faire quelque chose ! Fait appeler la garde de mon père ! Si Tinuvel à peur d’agir, et bien je le ferai à sa place ! " rugit le jeune et impétueux elfe, puis il ajouta " quand la diplomatie échoue, il faut savoir prendre les armes. "

 

Après ces mots il s’empressa d’aller préparer l’expédition, et trois heures plus tard il galopait dans les plaines fertiles du Nord de Cothique, à la tête d’un petit contingent de la garde d’élite de son père. C’était là les meilleurs guerriers de tout Cothique, et chacun d’eux était prêt à donner sa vie pour celui qui un jour était destiné à devenir leur roi.

Le soleil était en train de se coucher quand ils arrivèrent sur une colline surplombant Limarin. Une colonne de fumée s’élevait à l’horizon, ce qui ne présageait rien de bon. En arrivant aux abords du village ils virent de nombreux barbares en train de dévaster les environs. Certains détruisaient les récoltes, mettant le feu aux champs de blé, d’autres s’acharnaient sur les ruines de ce qui seulement quelques heures auparavant était un autel dédié à Isha, la déesse mère. Elbereth n’arriva pas à maîtriser sa colère, et après avoir contemplé cet affreux spectacle, il se rua sur les humains, bientôt suivi par sa petite garnison, prête à le suivre jusqu’à la mort.

Le combat fut relativement court, vu la supériorité numérique et tactique des elfes. Le gros des troupes humaines devait se trouver à l’intérieur des murs de la ville. Sans penser, le jeune elfe se précipita au galop à travers la porte et se retrouva devant un spectacle désolant. Partout les maisons étaient en flammes, et de nombreux cadavres d’humains et de guerriers elfes jonchaient le sol. Néanmoins la petite forteresse située sur une colline surplombant la ville semblait résister aux assaillants. Elbereth espéra de tout son cœur que les habitants de la bourgade y aient trouvé refuge, ’puis il se lança au galop suivi par ses soldats, en fauchant sans pitié tout homme croisant son chemin.

Arrivés à quelques mètres de la citadelle, ils s’aperçurent que la bataille était en son plein. La solide porte en chêne massif avait cédé aux coups de bélier, et de fiers guerriers elfes défendaient comme ils le pouvaient l’accès au fortin, harcelés par un nombre impressionnant d’humains. Ils n’allaient pas tenir longtemps, et si lui et son escorte n’intervenaient pas, tous les habitants de Limarin seraient massacrés sans aucune pitié.

Elbereth était devant un choix difficile, en effet lui et ses compagnons n’avaient que très peu de chances de sortir vivants du combat, mais d’autre part il ne pouvait laisser ses frères de sang a la merci d’une bande de barbares ivrognes. Son seul espoir était que Tinuvel change d’avis et envoie un contingent en aide aux assiégés. Il leva la tête au ciel, et après avoir récité une courte prière il s’élança encore une fois au galop vers les assaillants, bientôt suivi par sa troupe. Ils passèrent comme des éclairs au milieu des files humaines, fauchant tout sur leur passage, et après moins d’une minute ils étaient devant le portail, prêtant aide à leurs camarades en difficulté.

Moins d’une demi-heure plus tard, et après avoir subi de lourdes pertes, un cor se fit entendre au loin, et les guerriers humains se retirèrent cahotiquement du pont, laissant derrière eux beaucoup de leurs compagnons morts ou agonisants.

Le prince elfe savait néanmoins que la bataille était loin d’être terminée, en effet il ne s’agissait que d’une retraite stratégique, histoire de remplacer les guerriers fatigués et loqueteux après une journée de dure bataille par d’autres plus frais et combatifs.

En plus beaucoup de ses soldats étaient blessés, voir même morts, et ceux qui se portaient bien étaient bien trop épuisés pour continuer à combattre. Elbereth était pessimiste quant au sort ultime du combat, et il décida de gagner le plus de temps possible. Il ne s’occupa même pas de panser ses blessures que déjà il donnait des instructions pour construire une barricade, s’activait pour renforcer les défenses, revigorait les blessés... en tant que futur roi, il se sentait responsable de la vie de ses sujets, et était bien disposé à donner la sienne pour les sauver.

Pendant qu’il essayait de réconforter un petit enfant en pleurs, le même cor qu’auparavant résonna au loin. Cela signifiait sans doute que les humains étaient prêts pour un deuxième assaut, probablement le dernier. Une poignée de minutes plus tard, des cris sauvages et glucturaux, dans une langue incompréhensible aux oreilles pointues des elfes se firent entendre, et après quelques interminables secondes, des dizaines de guerriers aveuglés par la rage et l’alcool se ruaient vers le maigre pont de bois qui séparait le fortin du reste de la ville.

Elbereth tourna les yeux vers le ciel, puis dégaina son épée et se prépara à la mort.


Tinuvel était en train de siroter l’une des meilleures liqueurs Lothernoises, tranquillement assis sur son lit de camp, tout en s’imaginant déjà sur le trône de Cothique. La destruction de Limarin serait un excellent prétexte pour prendre les choses en main, et par la suite renverser le vieux roi. Ulthuan avait besoin d’hommes forts, et lui en était un ! Il fut ramené à la réalité par un jeune garde qui fit irruption dans sa tente.

 

-" Mon seigneur, un envoyé du roi désire vvous voir, il dit que c’est très urgent. "

-" Hmmm, bien, fait-le entrer. attends !Tuu assureras la garde nocturne pendant les trois prochaines semaines comme punition pour m’avoir dérangé ! " ordonna méchamment Tinuvel. La visite de cet envoyé ne lui disait rien qui vaille.

-"Très bien mon général, il en sera fait sselon vos désirs " répondit le soldat, en s’empressant de sortir, non sans avoir maudit mentalement son arrogant supérieur.

 

L’officier se dépêcha de saisir une coupe et d’y verser une poudre blanchâtre qu’il gardait dans le creux de l’une de ses bagues. Il se rassit en hâte et essaya de prendre un air le plus naturel possible. Un personnage à la silhouette fine et au portement régal entra dans la tente. Tinuvel le reconnut aussi-tôt. C’était Yulmariel, cousin et conseiller du roi. Il ne se déplaçait que rarement, et le général comprit que les choses allaient se gâter pour lui s’il n’agissait pas vite.

 

-" Bonsoir maître Yumariel, vous me voyez fort honoré par votre visite. Que puis-je pour vous ? " dit le général tout en essayant de sourire.

-" Ce soir est loin d’être bon général... " sibila l’envoyé royal, puis il continua " les barbares ont complètement rasé la bourgade de Limarin, et nous n’avons pas de nouvelles du petit contingent de la garde personnelle de sa majesté envoyée à la rescousse des villageois... "

-" Ce que vous m’apprenez là est fâcheux iil est vrai, mais nous sommes en train de préparer une offensive à large échelle qui nous permettra de bouter les envahisseurs hors de l’île...vous ne devez pas vous inquiéter pour cela, j’ai la situation bien en main... " s’exclama l’officier, qui savait très bien oú son interlocuteur voulait en venir.

-" je n’en doute pas général, je n’en douute pas...ce dont je doute c’est de vos intentions finales... "

-" Que...Que...que voulez vous dire ? Je ne coomprends pas... " marmonna Tinuvel, tout en s’essuyant les grosses goûtes de sueur qui lui coulaient abondamment sur le front.

-" ce que je veux dire général, c’est quee nous savons que vous auriez très bien pu intervenir pour sauver la vie de centaines de villageois, et que vous n’avez rien fait ! " s’écria l’envoyé du roi.

-" De quel droit osez vous dire cela !?!Saachez monsieur que je ne permets à personne de douter de ma bonne foi ! J’ai juré sur le grand livre de L’Eriatis de servir Ulthuan jusqu’à la mort ! "

-Eh bien permettez-moi de douter de votre parole général ! Un espion échappé à l’embuscade tendue par les humains a rapporté que vous avez refusé catégoriquement d’envoyer ne serait- ce qu’un soldat à Limarin, même en étant conscient du danger que couraient ses habitants... " vociféra Yulmariel.

-" Depuis quand la parole d’un simple espion mythomane vaut-elle plus que celle du commandant en chef des armées cothiquoises ? " demanda d’un ton arrogant Tinuvel.

-" Depuis que le général en chef des armées cothiquoises complote contre la sûreté du royaume . "répondit simplement le cousin du roi, puis il continua " On vous a vu plusieurs fois entrer dans le campement humain...étrange n’est-il pas ? Pour ne pas parler des garnisons côtières qui ont été diminuées 80% une semaine avant l’arrivée de ces barbares...que de coïncidences ! "

 

Le général saisit une bouteille posée sur sa table de travail et remplit généreusement les deux coupes qu’il avait préparées auparavant.

 

-" Allons Ser Yulmariel, allons... asseyez-vvous et discutons tranquillement de tout ça. Goûtez-moi donc ce vin, je le fais arriver directement d’Aetienne... "dit d’une voix faussement amicale Tinuvel.

-" Vous me prenez pour un imbécile générall ? Je m’en vais de ce pas avertir la garde. Vous êtes destitu... " Il ne put terminer sa phrase, l’épée finement sculptée par les plus grands forgerons Caledoriens de Tinuvel dans le ventre.

-"Maintenant je n’ai plus une minute à perrdre ! " pensa à haute voix le guerrier elfe pendant qu’il nettoyait la lame de sa dague. Il savait qu’il avait enclenché un engrenage qu’il ne pouvait plus arrêter, et que le temps lui était compté.

 

Il sortit en hâte de sa tente et se dirigea vers le premier soldat qu’il trouva éveillé. Il lui ordonna de faire sonner les cors. La phase deux venait de commencer.


Olaf se tournait et se retournait dans les peaux de fauves qui lui servaient de couche sans parvenir à trouver le sommeil. Il avait trop mangé ce soir là, et son esprit était tourmenté par la lourde décision qu’il devait prendre. Il savait que Tinuvel attendait le moment propice pour se débarrasser de lui et de son peuple, il le savait depuis le premier jour qu’il avait rencontré cet elfe arrogant et hautain. Il avait fait semblant de suivre ses requêtes pour pouvoir débarquer en Lonkerant, le nom que les norskiens donnaient à Ulthuan.

Au fond lui et les siens ne demandaient rien de bien méchant, tout ce qu’ils voulaient était de pouvoir s’installer durablement sur l’île, d’y fonder une colonie oú vivraient leurs enfants et petits enfants. L’île se dépeuplait rapidement, et de vastes zones autrefois cultivées étaient maintenant abandonnées aux ronces et aux mauvaises herbes. Ils ne demandaient qu’à pouvoir les défricher et les cultiver, rendant ainsi son aspect d’antan à cette petite partie d’Ulthuan la blanche, berceau de la race elfique. Pourtant les elfes détestaient ses semblables, et il savait qu’ils allaient tout faire pour s’en débarrasser. Voilà pourquoi il ne pouvait pas compter sur Tinuvel, mais il lui restait peut-être une dernière chance, ce jeune prince qui était venu le voir quelques jours auparavant...il semblait être raisonnable et peut-être qu’il pourrait négocier une entente...Le chef norskien se maudissait de ne pas avoir écouté cet elfe quand il en était encore temps, épargnant ainsi la vie de centaines de ses guerriers. Mais il fallait se dépêcher, en effet la plus part de ses hommes étaient occupés dans le siège de Limarin, qui s’était révélé plus problématique que prévu. Olaf se leva péniblement, enfila ses vêtements, s’enroula dans sa cape et sortit de sa tente pour se diriger vers la cabane qui leur faisait office d’écurie. Il ordonna aux garçons d’écurie de réveiller quelques-uns uns de ses meilleurs hommes puis monta sur son destrier galopant à toute allure vers la porte du campement, suivi après peu par ses hommes. Ils galopèrent sans relâche dans la campagne cothiquoise profondément endormie jusqu’à ce qu’ils aperçurent au loin les lueurs d’un gigantesque feu, provenant des ruines de Limarin. 0laf éperonna son cheval et s’achemina au galop vers les flammes.

 

La deuxième attaque venait d’être repoussée, et Elbereth était épuisé. Il regarda machinalement autour de lui. D’innombrables cadavres d’hommes jonchaient le sol, et on entendait au loin le coassement de corbeaux et autres oiseaux charognards, attirés par les perspectives de festin qu’offre une bataille. D’autres elfes étaient tombés, et ils n’étaient plus que quelques dizaines à pouvoir combattre. Les barbares s’étaient retirés, mais pour combien ? Pour chaque elfe mort il tombait au moins trois norskiens, mais leur nombre était si imposant que le prince et les siens allaient être submergés lors de la prochaine attaque. Ils en étaient conscients et priaient avec ferveur les dieux pour qu’ils leur accordent un miracle.

Elbereth espérait que la prochaine attaque eut lieu le matin suivant, pour que ses hommes épuisés puissent se ressourcer quelque peu. Mais les norskiens ne laissèrent même pas le temps aux elfes d’enlever leurs blessés du champ de bataille. Après moins d’une demi-heure de leur retraite, de nouveaux soldats, frais, reposés et bien plus nombreux qu’auparavant marchaient d’un pas soutenu vers le haut de la colline qui abritait les cothiquois. Ils avaient sous-estimé la puissance de ces longues oreilles, et étaient bien décidés à en finir une fois pour toutes avec eux. La plus part était complètement ivres, ce qui les rendait encore plus impétueux et violents.

Un à un les guerriers elfiques dégainèrent leurs épées et bandèrent leurs arcs. Une nuée de flèches s’abattit sur les barbares, faisant entrer dans le Var Allah plusieurs d’entre eux. Ces pertes n’influencèrent guerre la détermination des norskiens à en finir avec leurs ennemis. Le plus robuste d’entre eux, vêtu d’une armure somptueusement décorée. Sûrement de manufacture naine, et qui devait être leur chef, cria quelques mots dans son langage barbare. Les humains répondirent comme un seul homme par un cri féroce, puis se ruèrent sur les elfes en faisant tournoyer leurs haches. Le combat venait à peine de commencer quand surgit de la pénombre un cavalier dont le visage était caché par une peau d’ours qui marquait son statut de noble. Il fut vite suivi par une dizaine d’autres cavaliers, au portement moins régal mais tout aussi impressionnants.

A leur vue, tous les norskiens arrêtèrent de combattre et s’inclinèrent humblement. Elbereth et les siens eurent vite fait de comprendre qu’il s’agissait d’Olaf Aghaerrisson, chef des norskiens de l’Est. Il prononça un mot et tous ses hommes repartirent d’oú ils étaient venus, sans poser de questions. Il descendit de selle et envoya son interprète parler à Elbereth, qui ne comprenait rien à ce qui se passait. N’ayant pas vraiment d’autre alternative, le jeune prince ordonna à ses gardes de le laisser seul avec l’humain et entama la discussion avec Olaf par l’intermédiaire de son interprète.

 

-" Que me veux-tu oh puissant Olaf, et surrtout, pourquoi as-tu interrompu cette bataille que tu étais si proche de gagner ? " dit-il timoureux de ne pas offenser son interlocuteur.

 

Après s’être consulté avec son interprète, Olaf répondit :

 

-" Je viens pour te demander la paix oh prince Elbereth. Tinuvel est un traître, il m’a aidé à débarquer sur tes terres, et maintenant il veut prendre le pouvoir, pour après m’anéantir avec mon peuple.Les soldats du général t’obéiront si tu leur dis de l’arrêter. C’est la seule chance pour nous et nos peuples ! "

 

Elbereth n’avait pas tout à fait compris ce que voulait dire le norskien, en effet l’interprète parlait d’une manière très approximative et avec un fort accent l’elfique, ce qui rendait la compréhension difficile. Il dut se faire répéter plusieurs fois la phrase et poser plusieurs questions pour comprendre tout à fait. Quand il eut enfin compris, il prit Olaf par une manche et l’amena de toute hâte vers les chevaux. Il monta sur le sien et sans même attendre le norskien il se rua vers la porte de la forteresse, galopant tel un forcené. Ils virent les premières tentes elfiques après seulement trois heures de course frénétique à travers la campagne cothiquoise. Elbereth cria quelques mots et la sentinelle qui gardait la porte d’entrée s’esquiva rapidement. La plus part des soldats étaient massés au milieu du campement, oú Tinuvel était en train de prononcer un discours du haut d’une estrade.

 

"La nation est faible ! Les pillards tuent chaque jour des centaines d’innocents ! Que voulez-vous ? Que les elfes ne soient plus qu’un souvenir d’ici quelques années ? " Criait hystériquement le général.

" NOOOOOOOOON " répondit unanimement la foule.

-" alors il nous faut agir ! Le pouvoir esst corrompu, il ne fait rien contre les barbares. Prenez-moi comme chef et je nétoyerai nos côtes de tout être répugnant qui... "

 

Il s’arrêta de sursaut, une flèche plantée à une vingtaine de centimètres des pieds. D’un geste uniforme tous les présents se tournèrent pour voir d’oú provenait le projectile. Grande fut leur stupeur quand ils virent leur prince héritier, Elbereth d’ Aoror, un arc dans les mains . et qui plus est en compagnie d’un imposant guerrier norskien et son escorte. Avant que Tinuvel n’aie pu dire quoi que ce soit, le prince prit la parole :

 

-" Soldats, votre général n’est qu’un traître, il a comploté avec les barbares pour prendre le pouvoir. Il vous sacrifierait tous si cela l’aidait à s’emparer du pouvoir. Je vous somme donc de l’arrêter sur le champ ! "

-" Non ! C’est lui que vous allez arrêter ! C’est à cause de lui et de son père si nous en sommes là aujourd’hui ! Gaaaaardes ! " cria la général, qui essayait tant bien que mal de contrôler sa peur .

 

La forte autorité que Tinuvel exerçait sur ses troupes semblait donner ses fruits, en effet, quelques soldats à l’air indécis commencèrent à se diriger vers Elbereth, obéissant à leur général. Le prince avait dégainé son épée, prêt à vendre chère sa peau, quand Olaf brandit son hache et fit comprendre par la mimique qu’il souhaitait défier Tinuvel en duel. Tous les présents s’arrêtèrent. En effet, d’après une coutume elfique, toute demande en duel non acceptée entraîne un déshonneur immense, et un refus de la part du général lui aurait fait perdre toute autorité sur ses troupes.

 

-" Quelqu’un parle t’il le norskan ? " criia Elbereth anxieux de faire exprimer son nouvel ami.

-" Moi... " un jeune lancier au teint blême s’avança et prit la parole

" J’ai appris le norskan lors d’un de mes voya... " il fut interrompu par Elbereth

" Oui, oui, magnifique. Traduis ce que veut dire cet homme ! " dit-il en désignant Olaf.

 

Après s’être consulté avec le chef norskien, il commença à traduire :

 

-" il dit qu’il a faim... et qu’il veut en ffinir une fois pour toutes avec cette peau de phoque mal tannée qu’est Tinuvel. "

-" Comment oses-tu ?!? " vociféra le général, le visage empourpré par la colère.

-" En synthèse, il vous défie en duel. " termina le traducteur improvisé.

-" Attendez ! Cette abomination n’est certtainement pas un elfe, et selon la loi, personne n’est tenu à accepter un duel d’une autre créature qu’un elfe... " cria triomphant Tinuvel.

 

Tous le dévisageaient. En effet il savait raison, seul un elfe pouvait défier un elfe.

 

-" C’est donc moi qui vais vous défier ! ""

Tous se retournèrent en direction d’Elbereth, et certains se mirent à applaudir leur prince. Tinuvel n’avait plus le choix. Il descendit de son estrade et se fraya un chemin parmi ses troupes. Une fois arrivé devant Elbereth, il cracha par terre en signe de mépris, puis dégaina son épée et apostropha son adversaire :

 

-" Vous me facilitez la tâche jeune inconsscient ! Je comptais vous éliminer plus tard, mais l’occasion est bien trop alléchante... " dit-il pendant qu’il portait le premier coup, facilement paré par son rival.

 

La lutte dura longtemps, aucun des deux ne réussissant à s’imposer sur son adversaire. Peu à peu, la balance commença néanmoins à pencher du côté de Tinuvel, qui, il faut l’avouer, était un véritable maître dans le maniement de la glaive. L’officier frappa d’un coup svelte et précis, faisant voler l’épée de son adversaire à plus d’un mètre de celui-ci. Elbereth recula, il savait qu’il n’avait plus aucun espoir, et une fois de plus, il se prépara à mourir dignement. Pendant que le prince recommandait son âme à Isha, Tinuvel, qui avait perdu tout le calme et la froideur qui le caractérisaient d’habitude, commença à injurier le vaincu.

 

-"Ton heure est venue jeune insolent ! Tu vas mourir comme est mort cet imbécile de Yumariel, pourfendu par ma lame ! "

 

A ces mots, tous les présents poussèrent un cri d’effroi, en effet, si beaucoup d’entre eux avaient vu le conseiller du roi franchir les murs du campement, personne ne l’avait vu sortir. Le général ne savait que dire ni que faire.Il s’était achevé de ses propres mains, emporté par la rage. Il tentait à présent de se défendre, balbutiant quelques mots que personne n’écoutait. Elbereth, profitant du moment de désarroi de son opposant s’était porté à une distance considérable de celui-ci et avait ramassé son arme.

 

-" Soldats, arrêtez ce traître ! Il sera jugé pour meurtre et conspiration envers le pouvoir royal ! " cria t’il sèchement. Une fois l’aspirant despote aux arrêts domiciliaires dans sa tente, gardé par cinq vétérans à l’air farouche, le jeune prince alla s’entretenir avec Olaf, qui avait urgeament besoin de lui parler.

-" Tu es brave jeune elfe, tu feras un excellent roi ! " dit le puissant humain par l’intermédiaire de l’interprète.

-" Merci Olaf ! Mais que vas-tu faire à prrésent ? Tinuvel est juste une des nombreuses personnes qui veulent vous voir loin d’ici... "

-" Je sais, cette aventure a coûté la vie à trop de mes hommes ! Nous allons partir vers le Nord, là-bas personne ne s’opposera à nous... "


Kanrond était furieux. Deux mois de garde nocturne comme punition pour avoir laissé s’échapper un gueux d’humain ! Pendant qu’il marmonnait des injures envers ses supérieurs du haut d’une tour de guet surplombant les falaises de Nagarroth, une voile, puis deux, vingt, trente, se dessinèrent à l’horizon.

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