Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives
 

L’espoir d’une Solution Pacifique

     Syrius Fenris, inquiet et anxieux, attendait la délégation naine...

     Ces prétentieux nabots réclamaient des droits sur les terres conquises par Fiann’ Fenris, le trisaïeul de Syrius. Des terres qu’il avait contribué à rendre fertiles à nouveau et qui abritaient désormais la fière cité de Daroir-Fenris.

     Les nains n’avaient pas la réputation d’êtres belliqueux. Ils étaient rancuniers, tenaces, obstinés et teigneux ; Syrius savait bien cela, tout comme il connaissait l’aversion qui existait entre les deux peuples. Nains et elfes étaient entrés en guerre dans un lointain passé ; ’la Guerre de la Barbe’ comme l’appelaient les elfes.

     Cette guerre avait semé la discorde entre les deux races à jamais. Les elfes n’avaient jamais pardonné aux nains et les nains en voulaient toujours aux elfes...

     La simple idée de penser à la Guerre de la Barbe suffisait à rappeler à Syrius que Fiann’ avait participé à cette grandiose tuerie. C’est à cette époque et là même où se dresse aujourd’hui Daroir-Fenris que Fiann’ perdit la vie... Laissant derrière lui une noble descendance...

     Bien qu’elfe lui-même, Syrius n’avait que faire des anciennes querelles raciales. Il ne se souciait pas des nains, ces derniers le laissaient complètement indifférent... Jusqu’à récemment...

     Le message qui lui avait été délivré par un nain bourru et peu courtois en disait bien assez sur les ambitions du clan Karn.

     Syrius était aussi tout à fait conscient que les nains étaient bien nerveux ces derniers temps. Grâce aux espions elfes infiltrés dans les territoires plus au Sud Est, vers le Roc du Dragon, fief de Zargal, Syrius avait appris que les nains et les orques se livraient une guerre terrible.

     C’était du Sud Est qu’était venue la waaagh de Rohrk, celle que Yalniss le sage (le puissant sorcier, ami et conseiller de Syrius) avait vaillamment repoussée à l’aide de braves guerriers elfes… La guerre qui se jouait entre les nains et les peaux vertes semblait atteindre indirectement les territoires elfiques.

     Pour recevoir la délégation naine, une grande tente avait été dressée à quelques centaines de mètres des portes de Daroir-Fenris.

     Yalniss était là, avec Syrius… Les deux elfes attendaient avec bon espoir que les nains se décourageraient et que guerroyer pour conserver leur patrimoine ne serait pas nécessaire.

     Les nains avaient cependant perdu un avant-poste très récemment contre l’armée de Morkoss, le seigneur de guerre orque ; un des lieutenants de Zargal. Il leur fallait reprendre des terres ailleurs, exploiter leurs richesses et établir un avant poste à une position stratégique. Sous prétexte que ces terres leur avaient appartenu il y a bien longtemps alors que le père du père du père du père de Syrius se battait pour garder le contrôle de la région ; ils revendiquaient le droit de s’y installer, de manière « plus ou moins définitive » ; tels étaient les mots que Syrius avait lus dans la missive qui précédait la délégation naine… Au moins, les nains avaient toujours cela en commun avec les elfes : la guerre comportait pour chacun des deux camps des règles comparables…

     Mais, ce type de délégation était souvent le prélude à une terrible bataille, car malgré tous les efforts que les elfes étaient prêts à faire pour éviter le conflit, Syrius était parfaitement au fait que les nains ne brillaient ni pour leur amour de la paix, ni pour leur haine de la guerre.

«  En cela, ces rustres ne se différencient pas tant des orques  ! » songea le prince elfique…

     Un combat était à prévoir… Toutefois, Syrius s’était promis de faire tout son possible pour ne pas en arriver à cette extrémité.

     Les nains devaient arriver dans la matinée ; ils furent présents en début de soirée… Le lendemain…

« Ces petits êtres ne savent-ils donc pas se présenter à l’heure à un rendez-vous  !? » : telles furent les premières pensées de Syrius quand on lui appris qu’aucun nain n’avait été aperçu sur tout le territoire à l’heure de midi…

     Finalement des guetteurs alertèrent le prince elfe que les nains s’étaient présentés à la frontière des « terres de conquête » et que le temps de parvenir jusque Daroir-Fenris, la soirée du lendemain serait entamée.

     Syrius s’était résigné et avait considéré ce retard comme un considérable manque de respect à son égard. Yalniss était parvenu à tempérer son ami. Pour que les négociations avec les nains puissent aboutir, il fallait que chacun soit serein et qu’aucune animosité supplémentaire ne vienne envenimer des relations déjà tendues. Fort de cet argument, l’archimage avait réussi à convaincre Syrius d’ignorer le retard des diplomates nains…

     Le lendemain du rendez vous fixé, alors que le soleil menaçait de disparaître à l’horizon, les guetteurs avertirent le prince elfe de l’approche de la colonne naine.

     Syrius attendait patiemment et voyait s’approcher ces petits êtres barbus au caractère taillé dans le roc.

     Swin, l’un des plus fidèles commandeurs des forces elfiques de Daroir-Fenris se présenta devant son prince, le regard inquiet.

«  Noble seigneur, je viens de recevoir un rapport de nos éclaireurs. Une vaste armée de nains est stationnée à moins de deux kilomètres de notre frontière, et il apparaît évident qu’ils ont fait le chemin en compagnie des délégataires. »

     Swin laissa un blanc et Syrius n’eu aucune réaction, aussi poursuivit il.

« Je pense que les nains savent déjà que nous n’abandonneront pas ‘terres de conquête’ et que cette armée n’a pas été constituée pour escorter leurs diplomates mais bel et bien dans un but guerrier. »

     Syrius s’exprima enfin : « Bien sur, Swin… Ces nains sont peut être bourrus, mais ils sont loin d’être idiots. Ils ne s’attendent pas à ce que nous quittions des terres pour la sauvegarde desquelles nous avons du combattre et pour lesquelles certains des nôtres sont morts… J’espère que nos contre-propositions les dissuaderont de nous attaquer. »

     Swin hocha brièvement la tête et laissa Syrius, pensif.

     Les nains avaient du traverser un large territoire depuis le fief du clan Karn. Ils avaient fait halte à Barak-Varr, une forteresse côtière plus à l’Est de Daroir-Fenris et là bas il s’étaient approvisionnés en troupes fraîches, en matériel, en provisions… Les espions de Syrius lui avaient appris qu’un accord militaire avait été conclu entre Barak-Varr et Karak Karn. Accord qui en disait long sur les intentions du clan Karn…

     Lorsque les nains se présentèrent devant Syrius escortés par une vingtaine de cavaliers elfiques, ils ne perdirent pas une seule seconde en formules de politesse ou en salutations.

    Les parlementaires prirent immédiatement place dans la tente dressée pour l’occasion et les sujets furent abordés de façon directe et sans détour.

     L’entretien fut bref, et les prévisions de Syrius s’avérèrent exactes, les nains ne voulaient pas lâcher l’idée de renoncer à ses terres, même sous la menace d’un violent combat. Désireux d’éviter le conflit, Syrius proposa de céder la forêt de Vertefeuille plus au nord de son territoire… Le refus des nains le vexa ; ils ne désiraient aucun compromis. Lorsque la délégation naine quitta la tente où s’étaient déroulés les pourparlers, Syrius regagna son palais et convoqua immédiatement son conseil de guerre...

Le Face à Face

     Syrius chevauchait Vent de Mort son fidèle griffon de combat. Il survolait le champ de bataille, définitivement convaincu du fait qu’il était impossible pour un nain de ne pas être en retard à un rendez-vous. Mais combien de temps cela allait-il durer ?

     Cette attente était insupportable, tout comme la condescendance avec laquelle les émissaires de la délégation naine s’étaient adressés à lui quelques semaines plus tôt.

     Certes, leurs deux peuples n’avaient pas toujours été en de très bons termes (pour le moins en dire étant donné le fait qu’une terrible guerre les avaient opposés), mais, Syrius était de ceux pensant que de telles rancunes devaient être enterrées dans le même trou que la hache de guerre. Le caractère on ne peut plus rancunier des nains (trait de caractère commun à toute l’espèce) faisait que ces derniers étaient incapables d’oublier les affronts subis et ceux infligés... La vieille rancœur serait éternellement et perpétuellement ressassée…

     Aujourd’hui, c’était à Syrius Fenris et à ses fiers guerriers d’en faire les frais.

     Syrius commençait à mépriser ces petites créatures ; il les jugeait inférieures à lui, incapables de surmonter leurs émotions, leur esthétique était inexistante, en fait, le seigneur elfe pensait qu’ils étaient étrangers à toute notion de raffinement.

     Syrius se ravisa subitement, effrayé à l’idée qu’une personne de son rang puisse se rabaisser à de vils propos ethnocentristes, il commençait à faire son autocritique quand il aperçut les premiers éclaireurs nains qui émergeaient de la forêt…

     Ca y est, ils arrivaient… Mais, ’par les extrémités du rat cornu’, qu’ils étaient ridicules, se dandinant tant bien que mal sur leurs petites jambes…

     Le reste de l’armée n’allait certainement pas tarder à arriver et par respect pour ses ennemis, ou plutôt dans le but de rester fidèle au code d’honneur qu’il s’était fixé (le respect n’étant pas de mise avec des créatures aussi grotesques), Syrius laissa aux nains le temps de déployer leur armée avant d’ordonner la charge.

     Voyant toujours plus de nains arriver sur la plaine, il repensa à ses troupes de réserve qui attendaient un peu plus loin par delà les collines qui étaient visibles au Sud. Yalniss le sage avait la tâche de mener aux combat les renforts au cas où les choses tourneraient mal durant l’affrontement. Pour le moment, l’archimage attendait et observer le déploiement des unités naines, faisant la même constatation que Syrius : les forces ennemies étaient supérieures en nombre.

     Les elfes purent remarquer que le plus gros des troupes était constitué par des guerriers en armures équipés de lourdes haches… Les nains jouissant d’une réputation de farouches guerriers que rien ne peut effrayer, Syrius s’interrogeait sur l’issue de la bataille…

     Ils installèrent leurs canons et autres machines infernales, ils avaient aussi amené une très grosse cage recouverte par un tissu non moins grand qui fut installée à l’orée du bois par lequel ils étaient arrivés.

     Syrius se demandait ce qu’elle pouvait contenir. Les nains n’étaient pas réputés pour l’utilisation de créatures quelles qu’elles soient. Une chose était sure : il garderait à l’œil cette cage et tout ce qui pourrait en sortir !

     Autre chose attirait l’œil du général elfe : une machine volante étrange… Syrius avait consulté des manuscrits qui faisaient référence au gyrocoptère nain et certains de ses conseillers lui avaient même décrit la machine. C’était cependant la première fois qu’il en voyait un de ses propres yeux ; fascinant mélange entre une créature volante et le travail de l’acier, art dans lequel les nains sont réputés exceller !

     Des troupes d’infanterie étaient déployées en retrait, près des pièces d’artillerie, sans doute en prévision d’un assaut aérien sur l’arrière garde... Syrius était conscient que ces troupes constitueraient une menace non négligeable pour ceux qui auraient l’audace de s’infiltrer si loin des lignes elfiques avec l’intention de faire taire les machines de guerre.

     Syrius scruta une fois encore l’intégralité de l’armée ennemie, il n’y distinguait pas le général, mais soupçonnait sa présence parmi les troupes d’infanterie au cœur du déploiement ; déploiement qui par ailleurs semblait être terminé… Syrius n’attendit pas plus longtemps avant d’ordonner la charge !

     Les cheveux dans le vent et le cœur battant, les auriges furent les premiers à s’élancer dans la plaine en direction de l’ennemi. D’un coté, l’équipage des Faux de la Pénitence entreprit de foncer à toute allure vers l’infanterie ennemie, tandis que les Faux de la Vengeance et les Dents du Dragon [1] avaient la lourde tâche de tenter d’attirer les tirs de l’artillerie naine.

     Syrius considérait les canons nain comme étant la seule véritable menace ; son plan était de faire en sorte d’éliminer ces machines dévastatrices en fondant sur les lignes ennemies depuis les cieux avec Swin le rapide [2] monté sur Aile d’Argent le grand aigle.

     Swin était de ceux qui méritaient le respect, son courage était un exemple pour tous, il avait été volontaire pour suivre son seigneur au cœur des lignes ennemies afin d’attaquer à ses côtés les servants des machines de guerre.

     Swin et Syrius se connaissaient très bien, ils avaient coutume de s’entraîner ensemble au maniement des armes depuis des décennies, ils étaient des amis de longue date. Syrius savait qu’il pouvait compter sur lui !

     Tandis que Syrius et Swin s’apprêtaient à faire tâter de leurs lances aux servants des canons, les Pics de Lothern [3] menés au combat par Vinss’ le rêveur [4] firent pleuvoir sur les tueurs de trolls nains une averse de flèches avec une précision impitoyable… Les deux balistes en firent autant ; prenant cependant pour cibles les guerriers en armures lourdes. Mais, ces premières salves ne furent pas aussi meurtrières que l’escomptait Syrius. Bien sur, des nains tombèrent sous les tirs des balistes, mais la force des tirs était amoindrie par la vaste distance qui séparait les deux armées.

     Les sorciers commencèrent à psalmodier leurs incantations… Leurs sorts n’étaient cependant destinés qu’à un usage défensif, des champs de force s’érigèrent, Sonya la fille du ciel [5], seule présence féminine de ce champ de bataille, s’éleva dans les airs sur ce qui semblait être un escalier de brume…

     La réplique de l’armée d’en face ne se fit pas attendre davantage ; les guerriers trapus s’élancèrent dans la plaine à une vitesse incroyablement navrante… Syrius depuis son griffon de combat esquissa un sourire… qui se transforma en rictus de colère quand les Faux de la Vengeance furent consumées par une gigantesque langue de feu provenant de l’un des deux canons. Suite à cette pluie de flammes, l’autre canon gronda comme le tonnerre et envoya vers les elfes des projectiles explosifs qui eurent pour effet de détruire définitivement le char, son équipage, et son attelage.

     La cage libéra son mystérieux contenu : une espèce de caricature de griffon en fut extirpée par deux nains équipés de longs épieux... Sans doute avaient-ils espéré dresser une créature aussi noble que le griffon avec leur manque total de lucidité. Le griffon tenait plus de la bête sauvage que de la digne monture que chevauchait le seigneur elfe. Imaginant le calvaire que devait vivre au quotidien cette grotesque imitation, Syrius se promit de lui ôter lui-même la vie. Le griffon sauvage se dirigea de façon incertaine vers les troupes elfes.

     Il était prévu que tout au long de l’affrontement, les nains auraient à subir d’incessantes pluies de mortels projectiles. Les flèches tirées par les arcs elfiques transpercèrent de nombreux corps tandis que les traits propulsés par les balistes eurent raison d’un très grand nombre d’ennemis ; perçant les rangs et empalant parfois trois nains, chaque trait était mortellement ajusté par les servants.

     A l’opposé du champ de bataille, les canonniers nains se préparaient à tirer une autre salve lorsque deux guerriers scintillants descendus des cieux sur des monstres ailés aux couleurs chatoyantes fondirent sur eux ! Syrius s’attaqua au canon orgue ; les trois servants s’enfuirent aussitôt devant adversaire si impressionnant ! De sa lance ensorcelée, Syrius perça l’acier du canon et projeta celui-ci à plusieurs dizaines de mètres. Le canon retomba lourdement dans la verte prairie, éventré et désormais totalement inutilisable. Vent de Mort reprit immédiatement son envol, l’attaque éclair de Syrius sur l’artillerie avait parfaitement réussi.

     Swin, quant à lui, dut faire face aux trois servants, ceux-ci, résolus à ne pas s’enfuir, préféraient mourir en héros que de vivre comme des pleutres. La lance de Swin exhaussa leur souhait : le premier servant fut empalé, le deuxième connut le même sort et le troisième fut lacéré par Aile d’Argent ; son corps déchiqueté et inerte toucha mollement le sol au moment où une bande d’une vingtaine de nains fonça Swin. Ceux-là avaient occupé une position proche de l’artillerie pour pouvoir contre-attaquer les elfes qui auraient l’audace d’assaillir ainsi l’arrière garde naine…

     Swin attrapa son épée par la garde, la tînt fermement et tira la lame du fourreau. Contrant de son bouclier et détournant les mortelles attaques d’un revers de la lame argentée, il s’en tira indemne et exécuta même deux nains avant qu’Aile d’Argent prenne son envol ; le grand aigle avait, lui, été victime de la précision de deux attaques ; son flanc saignait abondamment.

     A l’autre bout du champ de bataille, les Faux de la Pénitence chargèrent une troupe de guerriers en amures lourdes tout en esquivant le plomb fondu que vomissait le canon du gyrocoptère. Le char faucha quelques guerriers nains et effectua une rapide retraite stratégique. L’équipage avait fermement l’intention de répéter ce petit manège autant de fois qu’il serait possible de le faire...

     Vinss’ le rêveur, sentant affluer le pouvoir des vents magiques, agita les doigts, murmurant une incantation incompréhensible pour tous ceux étrangers aux arts mystiques, un nuage de brume ensorcelé se leva soudain et vint recouvrir le gyrocoptère privant son pilote de toute visibilité.

     Sur le flanc Nord de la force elfique, les Dents du Dragon avançaient, soulagés de ne plus être une cible potentielle pour l’artillerie ennemie.

     Ils étaient inconscients du terrible danger qui s’apprêtait à les frapper !

     Tandis qu’ils avançaient bannière au vent vers les lignes des nains, les guerriers d’élite eurent la désagréable surprise de voir se matérialiser un deuxième gyrocoptère, jusqu’alors rendu invisible par une de ces runes magiques dont les nains connaissent les secrets, à quelques mètres sur leur flanc.

     Sans hésiter, le pilote de la machine déversa la mort sur la troupe sous la forme d’un nuage de plomb fondu. Dans les rangs des elfes, ce fut la panique, cinq des combattants passèrent de vie à trépas horriblement brûlés par l’assaut du gyrocoptère. Partagés entre la peur et le désir de faire payer à leurs ennemis ce coup bas, les elfes tinrent résolument leur position.

     Désireux de porter secours à ses compagnons, depuis sa position et malgré les recommandations de Syrius, Yalniss invoqua les puissances mystiques ; il permit à l’esprit de l’un des guerriers tombés de se matérialiser sous une forme fantomatique l’espace de quelques instants, lui donnant une chance inespérée de mettre en œuvre sa vengeance. Le guerrier apparut en face du gyrocoptère qui volait en rase motte, l’assaut fut bref : l’elfe brisa sa lame sur la cuirasse indestructible avant de retourner dans les limbes d’où l’avait extirpé l’archimage.

     L’intervention ne fut repérée que par les sens exacerbés de la fille du ciel qui préparait un sortilège de protection mystique.

     C’est ce moment là que le griffon sauvage choisit pour charger furieusement les Pics de Lothern complètement pris au dépourvu par cette attaque surprenante. Les elfes posèrent leurs arcs et saisirent fermement leurs lances et leurs boucliers. Le corps à corps fut terrible ; le griffon abattait sur les frêles combattants ses lourdes pattes griffues. Il se saisit d’un des elfes et le sectionna en deux d’un coup de bec ! Les coups de lances manquaient de vigueur, mais, ce que ces guerriers n’avaient pas en force brute, ils le compensaient dans la précision des attaques ; le griffon fut affreusement blessé, une lance transperçant son puissant cou. Il en fallait plus pour venir à bout d’une créature si robuste, mais sous l’effet de la douleur, le griffon battit néanmoins en retraite.

     Il fut rejoint dans sa course pour le salut par celui qui s’était fait la promesse de mettre un terme à son existence misérable. Rien n’avait préparé le griffon sauvage à résister à si féroce assaut ! La lance enchantée de Syrius le traversa de part en part, le libérant de façon définitive de l’influence de ses maîtres…

     Myrkin, galvanisé par les actes de ses pairs entreprit de débarrasser définitivement le champ de bataille d’un des deux gyrocoptères. Attirant vers lui les puissances occultes nécessaires, son corps se dématérialisa pour se restructurer tout près de la machine volante. Le pilote prit peur devant une telle apparition ; sa fuite le mena droit sur les lances des Pics de Lothern, son destin était dès lors scellé.

     L’infanterie d’élite naine restait la cible parfaite qu’elle avait constituée depuis le début de la bataille, les petits guerriers n’avaient de cesse d’être empalés par les tirs de balistes. Cela ne freinait même pas leur si lente avancée, l’obstination des nains était à la hauteur de leur rancune. Cette dernière ne serait d’ailleurs qu’attisée par ce qui semblait vouloir définitivement être une des défaites les plus cuisantes dont la plaine des âmes criantes avait été le témoin.

     Dans la folie du bain de sang, Swin le rapide extermina des rangers nains dans leur intégralité avant de charger les servants d’une baliste. L’arrière garde n’étant plus protégée, ils constituaient des cibles faciles et stratégiquement importantes. Les trois malheureux servants ne purent pas tenir plus de quelques instants face aux talents du héros elfe. Alors que le corps du dernier des trois servants s’affaissa tel un pantin pitoyable sur l’herbe désormais rouge de la plaine, Swin eut un geste de recul ; la baliste était piégée ! Une rune scintillante était gravée sur le bois de la machine, Swin hurla à l’aigle de décoller loin de ce piège odieux. Aile d’Argent s’exposa alors volontairement à l’explosion de la rune avec l’espoir de protéger le cavalier.

     Une gerbe de flamme d’essence mystique enveloppa Swin et sa fidèle monture… C’était plus que ce que l’endurance du grand aigle lui permettait de supporter, il expira près de son maître qui hurla de rage, impuissant qu’il était à pouvoir tenter de secourir celui qu’il avait toujours considéré comme son compagnon…

     Le regard lourd, Swin scruta encore une fois le champ de bataille ; tous les nains s’étaient enfuis ou avaient tenté de le faire avec autant de hardiesse que le leur permettaient leurs courtes jambes.

     Seul restait au centre du champ de bataille un nain éructant et frappant vainement une illusion créée par l’un des magiciens elfes.

     Depuis les cieux, Syrius contempla un court instant le pathétique général nain ; il était celui qui avait mené tous ces petits hommes à la mort, il n’était pas envisageable qu’il aille rendre compte d’une défaite pareil à son roi…

     De bonne grâce, Syrius ordonna à ses troupes de lui donner la charge.

L’Arrogance de Syrius

     Il serait réducteur de prétendre que les nains avaient été vaincus. Leur défaite avait été totale et les pertes elfes étaient vraiment minimes.

     Syrius considéra la situation… Il reprit son raisonnement là où il l’avait interrompu juste avant d’apercevoir les éclaireurs nains : « faire mon autocritique ? » murmura-t’il… Il estima subitement cette idée totalement superflue et injustifiée. Les nains étaient finalement et décidément des sous êtres, à moins qu’il n’ait aujourd’hui fait la connaissance des pires représentants de la race en matière de sciences martiales et de talents guerriers ?!

     Néanmoins, Syrius s’accordait à penser que leur incompétence rivalisait avec leur tenacité ; tenacité qui l’obligerait dans un futur plus que probable à devoir malheureusement être forcé de guerroyer à nouveau pour la sauvegarde de ses terres...




[1] Les Dents du Dragon constituent une infanterie d’élite experte dans le maniement des épées à deux mains, maîtrisant les arts de la guerre enseignés par les maîtres de Hoeth et venus en renfort depuis Ulthuan quelque temps auparavant. Ils font partie de l’ordre des Maîtres des Epées de Hoeth.

[2] Swin s’est vu surnommé « le rapide » lors d’une guerre contre les forces démoniaques du chaos se déroulant sur l’île d’Ulthuan de 2442 à 2458. C’est au cours de cette campagne guerrière que Syrius et Swin se sont rencontrés et ont appris à se respecter. Swin est réputé pour être un cavalier hors pair aussi bien à l’aise sur un coursier elfique que monté sur un antique dragon…

[3] Les Pics de Lothern constituent un régiment de soldats citoyens tous natifs de la ville de Lothern en Ulthuan. C’est sous les ordres du Roi Phénix que ces elfes se sont rendus en nef jusque Daroir-Fenris afin de servir sous les ordres de Syrius. Les Pics de Lothern font partie de la contribution militaire du Roi Phénix à la noble tâche entreprise par l’aîné de la descendance Fenris. Chacun de ces guerriers est un vétéran aguerri dans le maniement de l’arc et de la lance.

[4] Vinss le rêveur est l’un des mages qui prétend à la succession de Zanias Vent-du-Nord comme élève auprès de Yalniss le Sage. Ils sont deux à avoir fait cette requête : Vinns le rêveur et Myrkin Aliounis. Tous deux sont présents sur la plaine des âmes criantes et considèrent cette bataille comme un test. L’un et l’autre sont désireux de se servir de cet affrontement pour marquer des points auprès de l’archimage qui observe les évènements.

[5] Sonya est une elfe native de la forêt de Loren. Lorsque la famille Fenris et le clan Vendest scellèrent une alliance éternelle après la rencontre de Syrius et Zephyr (le seigneur du clan Vendest), les échanges furent nombreux. Les denrées produites par Syrius et les siens étaient acheminées vers la forêt de Loren. Les elfes sylvains fabriquaient des arcs avec leur savoir faire unique pour les combattants de Daroir-Fenris. Sonya accepta de rejoindre Daroir-Fenris en tant qu’ambassadrice du clan Vendest sur place. Ses talents en font une magicienne redoutable…

Connectez-vous pour commenter