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Ce texte a été écrit en février 2005, après la lecture intensive d’une bonne partie du Cycle du Graal de Jean Markale. Ne soyez donc pas étonné de son style particulier, ou même de sa moralité bien légère, car ce n’est pas de ma faute du tout. Bonne lecture !

   L’Histoire du Beau Doux Chevalier   

 

Dans les temps jadis vivait en une contrée reculée un jeune garçon du nom d’Erwynn. Il avait été doté par la nature de très beaux cheveux blond cendré, de magnifiques yeux perçants et doux, et tout son corps était à l’avenant de sa mine resplendissante ; en un mot, il avait tout pour plaire aux damoiselles de son entourage, et même les jeunes gens qui participaient à ses jeux ne pouvaient qu’admirer et rendre hommage à sa beauté. De plus il était d’un tempérament si mûr, agréable et prévenant que personne ne lui cherchait jamais sérieuse querelle. Il dominait tous ses compagnons de sa haute stature, et rayonnait d’affection et de force tout autour de lui.

Or, il était dit que ce charmant gentilhomme devrait, à l’aube de ses 19 ans, partir à l’aventure pour trouver gloire et bonheur. Erwynn était pourtant bien plus intéressé par l’amitié et l’amour que par les aventures de chevalier ; et il n’avait point conscience que son coeur vaillant réclamait grandes batailles et grande renommée. Au fond de lui, il se sentait digne d’être un roi, mais jamais il n’avait pu se l’avouer. Aussi trouvait-il simplement son bonheur auprès de ses compagnons, et son plaisir auprès de ses amies, qui se battaient chaque soir pour partager sa couche.

Hélas, toutes les jeunes filles des environs s’étant éprises de lui, les jeunes hommes de la région commençaient à s’échauffer sérieusement, et malgré tout le respect et l’amitié que chacun éprouvait pour Erwynn, on finit par souhaiter son départ.

 

Or, en ce temps-là vivait dans la forêt d’à côté un vieil ermite que l’on disait sage et clairvoyant. Quelques hommes de ceux qui désiraient éloigner Erwynn se réunirent et décidèrent de rendre visite à l’ermite, afin de trouver un moyen discret de l’envoyer à l’aventure sur les chemins le plus longtemps possible, sans salir son honneur pour autant, car ils ne lui voulaient pas le moindre mal. Le vieux sage leur répondit en ces termes :

« Il est écrit dans les étoiles les plus dignes de confiance que le jeune Erwynn doit se mettre en quête d’une épouse, qui sera étrangère à cette contrée. Il la trouvera au-delà des montagnes, bien loin dans le Nord, dans un pays glacial et très pluvieux. Ainsi doit-il en être pour le salut se son âme. »

Après avoir délivré son message, le vieil homme disparut, ne laissant derrière lui qu’un petit tas de gomina.

Cette nouvelle mit les compagnons en joie, et ils se hâtèrent d’aller porter à l’oreille d’Erwynn la prophétie écrite dans les étoiles, songeant que le soir même ils pourraient sans doute enfin partager le lit d’une jeune fille douce et accueillante - car c’était bien leur devoir de gentilshommes que de consoler toutes celles qui auraient le coeur brisé après le départ d’Erwynn. Ils trouvèrent le brave jeune homme près de la lisière de la forêt, très occupé à compter fleurette à la douce Maëlle, la damoiselle la plus fraîche et enjouée du village, aux formes si gracieuses que tout homme qui la croisait n’avait de cesse de la désirer. Erwynn était en vérité en train de la déshabiller lorsque ses compagnons arrivèrent, qui lui répétèrent fidèlement les paroles du vieil ermite. Erwynn, qui se sentait très concerné par son devoir et son avenir, décida de quitter le village sur-le-champ, prenant tout juste le temps de dire adieu à ses parents. Maëlle était inconsolable de le voir se détourner d’elle si facilement, et lorsqu’Erwynn eut déserté les lieux, les compagnons restants se sentirent obligés de la réconforter de leur mieux tous en même temps, d’autant mieux qu’ils ne pouvaient plus contenir le désir violent de la posséder qui les avait tous assaillis à sa vue. Et ils n’eurent plus jamais de problème pour trouver chaque soir une dame qui les comblât de ses attentions.

 

La route fut bien longue pour le jeune Erwynn, qui voyageait tout le jour aussi vite et aussi longtemps qu’il le pouvait, et devait trouver refuge pour la nuit chez les paysans qui voulaient bien l’accueillir. Etant peu fortuné, il se voyait bien souvent offrir par ses hôtes une chambre et un repas en échange de menus services, comme couper le bois, rentrer les bêtes, ou encore partager le lit de leur jolie jeune fille qu’ils voulaient initier aux jeux de l’amour. Ainsi, sa vaillance et sa vigueur permirent à Erwynn d’accomplir son long voyage, d’autant plus fatigant qu’il passa maintes nuits peu reposantes dans les bras dévorants de maintes damoiselles. Enfin arriva-t-il un beau matin dans un pays inconnu de lui, si loin au Nord que les cartes n’allaient pas jusque là, où il fut arrosé par une torrentielle averse de bienvenue.

« Voici que je touche au but, car c’est bien là le pays le plus pluvieux qui puisse exister », se dit-il. Aussi se mit-il en quête de l’épouse qui lui était destinée par la prophétie. Bien vite, la nouvelle se répandit dans toute la région qu’un charmant jouvenceau au visage enchanteur et au corps divin recherchait une femme pour en faire son épouse, et aussitôt toutes les jeunes filles à marier et leurs familles, ainsi que les veuves, et même les femmes déjà mariées simplement désireuses d’inviter ce bel éphèbe dans leur lit au moins une nuit, toutes se présentèrent à Erwynn, qui n’avait que l’embarras du choix quant à se trouver chaque soir une compagne pour la nuit. Bien des semaines passèrent ainsi, mais Erwynn ne trouvait pas la femme qui lui était promise, celle qui apaiserait aussi bien son coeur que ses pulsions.

 

Or il advint qu’un jour, au hasard de ses recherches infructueuses, il rencontra un marchand âgé, qui avait une très belle fille, radieuse comme un jour d’été, pareille à un brasier. Le marchand voulait justement la lui offrir pour la nuit, et il avait pour cela fait bien du chemin ; Erwynn se montra fort intéressé par cette perspective. Le marchand, brave homme mais sachant où était son intérêt, déclara qu’il ne lui laisserait sa fille chérie que si Erwynn lui accordait un don [1]. Erwynn promit, et ainsi put coucher avec la fille. Au petit matin, il était vidé et savait que cette jeune fille n’était hélas pas non plus celle qu’il recherchait, et le père vint lui réclamer son don :

« Vaillant bel inconnu, toi qui ne manques point d’honneur et de force, je te demande de te hâter en direction des terres de mon cousin, qui ne sont pas à plus de deux jours de cheval, et ce pour y offrir toute l’aide qu’on y pourra requérir. Je sais que mon cher cousin est incessamment attaqué en son domaine par un ténébreux seigneur très craint et redouté. Lorsque tu auras libéré mon cousin de ce fardeau, nous serons quittes. »

Erwynn partit donc accomplir la volonté du marchand, prenant soin de contenter toutes les dames sur son chemin, qui le pressaient de passer la nuit ou la moitié de la journée dans leur lit. Il mit donc un mois plein pour atteindre les terres du cousin, qui avait pour nom Nicolède. Celui-ci lui expliqua la situation dans tous les détails : son voisin, le Baron de la grande Marche, était un personnage purement malfaisant. Malgré son âge avancé, il ne possédait nulle sagesse, mais était aigri, usé et buté. Il avait, paraît-il, une fille plus belle qu’un rayon de soleil, plus douce que le plus doux des lys, la plus aimante et chaleureuse de toutes les jeunes femmes du royaume, mais personne ne pouvait avouer l’avoir déjà vue de ses yeux. Le Baron la retenait en son château, de peur qu’elle ne le quitte. Il aimait en effet énormément sa fille, mais un jour une manante qu’il avait recueillie en sa demeure seigneuriale lui avait révélé que la fille quitterait son père, par amour pour l’homme qui la sauverait de la noyade, le premier jour d’hiver ; et plus jamais ne reverrait son père. Il avait depuis ce jour redouté plus que tout que sa fille ne tombe amoureuse, d’autant plus qu’elle devenait chaque jour plus douce à la vue et aux sens. Le baron s’était mis à haïr tous les prétendants de sa fille, et ses voisins qui lui envoyaient leurs fils pour la séduire, et par extension le genre humain tout entier, sauf sa fille qu’il chérissait toujours plus que tout. Il craignait sans discontinuer qu’elle ne lui échappât ; aussi lui offrit-il un anneau enchanté, qui la liait à lui et l’empêchait de porter en son coeur un homme autre que son père, qu’elle aimait beaucoup malgré tout, n’ayant pas même conscience du tort qu’il lui faisait. Et le Baron ne lui donna jamais de cours de natation, car il ne voulait pas la voir s’approcher de près ou de loin d’un plan d’eau, en outre elle n’en eut jamais l’idée. Il menait à présent depuis de longues années une guerre d’usure à tous ses voisins, interdisant à quiconque l’accès à sa forteresse, ce qui attristait fort Nicolède.

Erwynn, ayant entendu le récit de son aimable hôte, se mit immédiatement en devoir de résoudre cette situation. Pour cela fallait-il encore qu’il se procurât des armes. Nicolède lui proposa alors de demeurer en son château jusqu’au lendemain, jour où une visite royale était prévue, car ainsi le Roi se ferait sans doute une joie de l’adouber et de l’armer. Erwynn suivit ce conseil avisé, qui lui permit en outre de disposer d’une délicieuse nuit avec la fille et la femme de Nicolède, qui s’en vinrent toutes deux le rejoindre dans sa chambre à la nuit tombée. Malgré son estime pour son hôte, Ewrynn ne les éconduisit ni l’une ni l’autre, craignant de s’attirer les foudres de la gent féminine.

Le lendemain, Erwynn était bien peu reposé pour sa première rencontre avec le Roi. Nicolède présenta cependant sa requête au Roi, d’adouber le jeune Erwynn de l’ordre de la Chevalerie, pour qu’il puisse défendre au mieux les intérêts du royaume. Le Roi, qui avait eu vent des prouesses de nature plutôt discutable du bel Erwynn, amant de toutes les femmes qui croisaient son chemin, songea qu’il était peut-être sage de poser quelques conditions avant d’armer Chevalier ce beau jeune homme. Il parla donc à Erwynn avec autorité mais douceur :

« Gentil jeune homme, je ne voudrai de Chevalier à mon service qui ne soit entièrement dévoué à son Roi, à sa Reine et à son épouse, et seulement à ceux-ci. Si je puis compter sur ta parole, tu seras alors Chevalier selon ma volonté, car tu es sans doute brave et vaillant. »

Erwynn comprit bien que le Roi voulait ainsi le détourner de son commerce avec toutes ces femmes qui succombaient à son charme, ce qui lui convenait certes assez bien, tant il aspirait à trouver une compagne de son coeur et de ses jours - n’allons point jusqu’à dire qu’il s’était lassé de jouir de son corps aussi souvent. Erwynn accepta donc les conditions du Roi, et il reçut de lui ses armes et un bon cheval. Il y eut une grande fête ce soir-là pour célébrer l’évènement, où l’on chanta beaucoup, où l’on but encore plus, et après ces festivités, tous regagnèrent leur lit très égayés. Or, après s’être couché, mais pas tout à fait endormi, Erwynn fut glacé d’entendre de légers bruits rôder dans le silence de sa chambre. Tout à fait dessoûlé, et craignant la menace d’un adversaire inconnu qu’il se serait fait depuis sa toute nouvelle popularité, il se leva prestement, nu comme un ver. Il fut alors très surpris de voir la Reine s’approcher de lui. S’attendant à tout, Erwynn, qui avait déjà entièrement changé ses habitudes envers les dames, de par le serment qu’il avait fait au Roi, entreprit de se vêtir avec hâte, mais la Reine le fit se recoucher et, laissant choir la robe légère qu’elle portait pour seul habit, vint s’allonger à son côté. Voyant que le bel Erwynn ne faisait pas mine de la toucher, la Reine lui tint ces propos :

« As-tu donc oublié que ton serment t’engageait envers moi aussi bien qu’envers ton Roi et ta femme ? Tu t’es mis à mon service et cette nuit je te réclame ce que tu me dois. Sache aussi que tu ne partageras plus le lit d’aucune femme après moi, hormis celui qui sera ton nid d’amour avec ton épouse jusqu’à la fin de tes jours. A présent, j’entends que tu tiennes ta parole. »

Ainsi, la jolie Reine et le tendre Erwynn se créèrent-ils cette nuit-là de très agréables souvenirs communs. Le lendemain, Erwynn, ne pouvant plus attendre de commencer son aventure, prit congé de ses hôtes et du couple royal, et s’en fut sur les périlleux chemins qui menaient à la forteresse de la grande Marche. Il rencontra bien des brigands sur la route, mais aucun ne lui résista plus de quelques secondes, le temps pour le fier Chevalier de lui enfoncer sa lance dans le ventre. Chaque être qu’il rencontrait qui lui manifestait quelque haine, Erwynn le rejoignait au grand galop de son blanc destrier et transperçait bouclier, haubert et autant de couches qu’il le fallait pour atteindre le coeur ; rien ne semblait pouvoir arrêter sa lame, qu’il n’avait pas abîmée une seule fois. Il arriva ainsi rapidement devant les portes du château du Baron. On courut bien vite prévenir le maître des lieux de l’arrivée d’un très beau et séduisant Chevalier qui portait les armes du Roi, et qui souhaitait le défier. Le Baron fut plongé dans une profonde angoisse à l’idée que sa fille voie un tel Chevalier en ces murs, ce qui n’était pas arrivé depuis... enfin, ça n’était jamais arrivé, et cela ne devait jamais arriver. Il déclara alors qu’il relèverait le défi du Chevalier au pied de la muraille Est, et il s’empressa de le rejoindre.

Le combat s’engagea rudement, les coups pleuvant des deux côtés, les mailles des hauberts noir du Baron et blanc d’Erwynn s’éparpillant à la volée dans tout le champ. Mais la fougue et la santé du jeune Chevalier lui valurent finalement un avantage certain, qui se transforma en victoire éclatante lorsque le Baron fut soudainement projeté à terre, le visage écarlate, des plaies sur tout le corps, et la pointe de l’épée d’Erwynn sur la gorge. Il demanda grâce, même s’il sentait qu’il avait sûrement perdu sa fille, et donc sa propre vie, dans ce combat ; il avait encore trop peur de la mort. Erwynn l’épargna donc, lui imposant comme condition l’exil le plus loin possible, et de ne jamais revoir ses terres et sa fille. Ainsi fut défait le Baron Noir, et les jeunes gens purent à nouveau circuler sur ses terres et rejoindre la cour de sa fille.

Erwynn, quant à lui, avait grande hâte de voir la fille du Baron, dont on disait tant de merveilles, car il sentait confusément que c’était pour elle qu’il avait vécu toutes ces aventures et chassé le Baron. Aussi alla-t-il lui rendre visite le jour même dans sa tour. Ils s’apprécièrent grandement dès les premiers instants, lui la trouvant plus qu’à la hauteur des rumeurs qui couraient sur sa beauté, elle le trouvant tout à fait charmant, attentionné et doux... sans pourtant se lier d’amour, car la jeune fille portait toujours l’anneau ensorcelé de son père, qui empêchait totalement ce genre de sentiment. Elle lui apprit son prénom, Swani, et bien d’autres choses encore, car elle était cultivée et prenait beaucoup de plaisir à entretenir Erwynn de toutes les choses du monde. Le cousin de Swani ayant pris la succession du Baron, les jeunes gens étaient libres d’étudier et de converser ensemble, de se promener et de jouer tout le jour, ainsi que de festoyer avec leurs amis toutes les nuits, si bien que leur cour fut bientôt la plus vivante et la plus réputée de la région.

 

Un après-midi de pluie où Swani, Erwynn et leurs amis s’étaient réunis à une table sous un abri isolé près de la rivière, il advint que Swani, qui se sentait souvent seule depuis l’exil de son père, ressentit en toute sa chair un vide affreux et pénétrant, qui la saisit et la choqua tant qu’elle se leva brusquement, renversant sa chaise et toute la tablée, et s’enfuit de toutes ses jambes, comme prise de démence. C’était un effet de l’anneau, qui agissait sur elle depuis si longtemps que cela lui troublait la raison. Ses amis, frappés de stupeur, ne savaient comment réagir, mais une des damoiselles les plus proches de Swani eut comme une illumination et, s’adressant à Erwynn, dit bien fort :

« Le beau doux Chevalier qui vint un jour combattre le père de Swani devrait veiller sur sa fille mieux que ça ! Erwynn, hâte-toi de rattraper Swani, car toi seul peux la ramenerà elle-même. »

Mais Erwynn s’était déjà précipité alors que la suivante ouvrait à peine la bouche, et il courait de toute sa vitesse sans parvenir à gagner sur Swani, qui se démenait au-delà de ses forces, hors de toute raison. La jeune femme courait éperdument vers le bord de la rivière, trébuchant dans les touffes d’herbe humide. Or, l’automne laissait tout juste sa place à l’hiver, et toutes les terres près du cours d’eau étaient boueuses ; Swani manquait de perdre l’équilibre à chaque pas, les monceaux de feuilles mortes cachant de vicieuses racines. Elle s’enfonçait de plus en plus dans la boue, qui lui arrivait déjà au genou, et Erwynn, qui était un peu plus habile ou chanceux, commença à la rattraper. Swani ne voyait même pas qu’on la poursuivait, elle ne voyait que les eaux tumultueuses de la rivière, qui l’attiraient follement. Elle s’élança de ses dernières forces dans la boue pour atteindre la berge, voulant livrer son corps et son âme tourmentée aux flots qui la purifieraient et l’apaiseraient. Mais Erwynn n’entendait certes pas la laisser se jeter dans la rivière, et se précipita lui aussi vers la rive. Il parvint à saisir le bas de la robe maculée de boue de Swani, mais le tissu fut arraché tant la damoiselle se débattait pour se libérer. Ses longs cheveux pleins de feuilles et d’eau boueuse volaient dans tous les sens et aveuglaient Erwynn, qui ne savait que faire pour ramener Swani à la raison. Pris dans la lutte, Erwynn ne sentit même pas qu’il arrachait un anneau de la main de Swani, qui poussa immédiatement un long cri strident, et s’évanouit. Il put alors la ramener à l’intérieur, où elle mit un certain temps à reprendre ses esprits.

Swani ouvrit de grands yeux, et vit qu’elle était entourée de tous ses chers amis. Elle leur demanda à tous ce qui était arrivé, car elle ne gardait aucun souvenir de toute cette aventure. On lui conta toute l’histoire dans les détails, espérant qu’elle recouvrerait vite la mémoire, mais elle ne semblait écouter que d’une oreille, toute occupée qu’elle était à contempler le visage doux et souriant d’Erwynn, qui lui rendait son regard, non sans embarras, mais avec tendresse, la voyant rosir délicieusement. A la fin du récit, Swani avait repris bien des couleurs, et puisqu’elle était manifestement remise et en pleine forme, toute la compagnie se retira, les amis n’étant pas dupes de ce qui se passait entre les deux jeunes gens. Erwynn ne s’aperçut même pas de leur départ, tant il était à présent absorbé dans son échange silencieux avec la jolie damoiselle. Et, alors que le maléfice de l’anneau s’était dissipé, un nouveau charme fut tissé, le plus puissant de tous, le plus doux et désirable des enchantements, entre le Beau Doux Chevalier et la compagne de son coeur.


[1] Le don est une coutume très répandue : celui qui le promet doit accorder à son demandeur la chose qu’il désire, sans savoir de quoi il retourne avant de le promettre, y engageant ainsi son honneur.

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