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     Les quatre aventuriers marchaient tranquillement vers l’extérieur de la ville, dans une obscurité que la pâle lueur de Morrslieb n’arrivait pas à percer.

-Et maintenant, que faisons nous ? Demanda Iggy, perplexe.

Il me semble très risqué de se réfugier dans une grotte, s’il est vrai que les monstres contrôlent les souterrains.

-Je pense que la meilleure chose à faire est sans doute d’étudier les environs, et de trouver l’entrée de l’Undgrin, commenta Skaggy. Undgrin était le nom donné au dédale de tunnels bâtis par les nains à leur apogée, et le tueur se faisait un plaisir d’utiliser des expressions Khazalides, insulte aux coutumes de l’Empire humain dans lequel il vivait maintenant depuis des décennies. On se reposera dans la journée : si ces monstres ont l’habitude de sortir de nuit, il sera plus facile d’entrer dans leur repaire.

-Hélas, je ne pense pas que nous ayons le temps de faire ces repérages, et je crains qu’il nous faille agir dès cette nuit. La nuit va bientôt prendre fin ; il sera alors temps pour nos ennemis de se reposer, ce sera le meilleur moment pour attaquer, expliqua Magnus, dont l’inquiétude semblait grandissante avec le temps. Qu’en penses-tu, Ulric ?

-Eh bien, étant donné que je n’ai pas compris grand chose aux allusions de Markus le rouge, je ne connais pas vraiment l’ampleur de la menace. Je te laisse décider : tu sauras prendre la bonne décision, confia le Middenheimer.

-Bon, si l’on veut vraiment trouver cet Ekrund avant l’aube, on devrait se dépêcher, conclut Skaggy, qui avait bien comprit que la décision de son ami mage était prise. Allons-y !

     C’est ainsi que les quatre aventuriers se mirent en route en direction du nord. Très vite, le paysage changea, et la forêt de chênes enneigés fut remplacée par un terrain rocailleux à mesure qu’ils approchaient des contreforts des Monts du Milieu. La forme d’une caverne se dessina une centaine de mètres devant eux, quand les guerriers l’atteignirent, il ne purent rien déceler qui ressemblât à l’entrée de souterrains. L’obscurité de la nuit, épaissie par les parois de la grotte, empêchait en réalité de distinguer quoi que ce soit à plus de quelques pas de distance. Beaucoup d’autres cavernes suivirent celle-ci, toutes plus ou moins identiques : stalactites, chauves-souris effrayées, toiles d’araignées et flaques de vase à demi verglacées. A vrai dire, Magnus et ses amis se lassaient de ces vaines fouilles. Iggy semblait de plus en plus distant, et Magnus comprit immédiatement que son trouble était dû au regret d’avoir eu à abandonner les siens. Ulric était sur le point de formuler une nouvelle fois son désir de mettre fin aux recherches lorsqu’un bruit fit tressaillir Skaggy.

-Silence ! Vous n’avez pas d’oreilles, pour ne pas avoir entendu ce raffut ? Ca venait de ce talus, à gauche, expliqua-t-il.

     Les regards incrédules de ses camarades changèrent lorsqu’une ombre furtive se déplaça non loin du fourré mentionné par le tueur. Alors que ses amis partaient à sa poursuite, Magnus faillit les mettre en garde contre un éventuel piège, avant de se raviser au dernier instant : c’était encore leur meilleure chance de trouver quelque chose...

 

     La mystérieuse ombre qu’avait entr’aperçue Skaggy faillit semer à plusieurs reprises les aventuriers, mais ralentit finalement sa cadence, et devint une petite silhouette humanoïde. Bientôt, elle se retrouva dos à la montagne, sans autre issue que le combat. Les guerriers s’en approchèrent, avant d’esquisser un mouvement de recul quand ils distinguèrent plus nettement ses traits : il s’agissait d’un Skaven. La hideuse créature était à peine plus grande qu’un nain, et d’une carrure beaucoup plus frêle ; son pelage brun était par endroits tacheté de noir. Il portait d’amples vêtements en toile noire élimés et troués, et une épée courte en partie rouillée battait son flanc. Pourtant, il paraissait plus dangereux que misérable : son regard d’un noir profond semblait littéralement irradier de méchanceté et son visage, en tout point commun à celui d’un rat géant, était déformé par un rictus mauvais. Sa queue battait nerveusement contre le sol, et le maudit homme-rat était de toute évidence en proie à une grande excitation. La suite, les quatre aventuriers aurait pu la prédire : une quinzaine de silhouettes encapuchonnées apparurent de droite et de gauche du Skaven, prêts à massacrer leurs ennemis. Malgré tout, aucun trouble n’était apparent tant chez Skaggy que chez ses amis, qui avaient prévu cette éventualité : Iggy attendait en retrait, hors de vue des hommes-rats, le moment crucial pour attaquer.

 

     Les Skavens, sûrs de leur fait, chargèrent leurs ennemis, les maigres rayons de Morrslieb se reflétant sur leurs lames recourbées. Le premier des mutants attaqua Skaggy, tentant de fendre son crâne en deux ; mais son épée se brisa net contre le manche de la hache du tueur. Ce dernier voulu éliminer son malheureux adversaire mais fut obligé de reculer devant la furieuse attaque d’un second homme-rat. Frappant au niveau du genou, le tueur trancha la jambe de son ennemi, surpris par la rapidité du mouvement, et l’acheva d’un second coup. Mais déjà, deux autres ennemis l’encerclaient, prêts à bondir. Aux pieds d’Ulric gisaient deux Skavens : alors que la tête du premier avait été broyée, le second disposait d’une bonne dizaine d’articulations de plus que la normale. Pourtant, la situation du Middenheimer n’était guère favorable, trois hommes-rats le forçant à reculer sans cesse, alors qu’une blessure au bras droit de l’humain semblait déjà s’infecter sous l’effet de poison. Magnus, quant à lui, réussissait à retenir avec peine ses opposants à l’aide de puissants sortilèges : une boule de feu avait calciné un Skaven, et deux autres avaient subi les effets d’un violent éclair d’origine magique.

 

     Iggy contemplait la scène avec inquiétude, ses amis étant en grande difficulté. Il s’apprêtait à passer à l’action lorsqu’à la périphérie de son champ de vision apparurent une vingtaine d’hommes-rats en embuscade. Ces derniers semblaient bien plus robustes que leurs congénères, et portaient de lourdes armures rouge sang. Iggy les voyait s’approcher lentement du champ de bataille, et, désespéré, se lança à leur encontre. Les vermines de chocs Skavens furent stupéfaites de voir sur leur chemin se dresser un nain dont la hache ne tarda pas à entonner un véritable champ de mort, et deux têtes de rats volèrent dans les airs avant que les soldats d’élite ne soient prêts à combattre. Trois d’entre eux s’approchèrent lentement vers leur ennemi, qui plutôt que d’attendre une attaque se jeta sur ses ennemis : un revers de sa hache coupa en deux un des Skavens alors qu’il chargeait le second de son bouclier, l’envoyant rouler dans la poussière.

 

     Skaggy ne cessait de bondir, faisant tournoyer sa hache avec dextérité. De multiples Skavens, ou du moins certains morceaux, gisaient à ses pieds, et les survivants devaient se tenir à bonne distance. L’un d’eux tenta un estoc ; son bras fut tranché par la lame naine dans un geyser de sang. Magnus se trouvait quant à lui en difficulté : Son énergie s’épuisait rapidement, et les hommes-rats, après avoir subi de lourdes pertes à cause du barrage magique du sorcier, reprenaient confiance, et lançaient attaque après attaque sur ce dernier. Magnus remarqua alors un Skaven ayant réussi à l’approcher discrètement, il ne se trouvait plus qu’à un mètre, prêt à frapper. Le sorcier allait commencer une nouvelle incantation lorsque la boîte crânienne de son ennemi explosa, l’éclaboussant d’une substance visqueuse. Ulric, son marteau ensanglanté à la main, sourit.

-Alors, comment tu t’en tires ? Demanda le Middenheimer, tout en empêchant ses ennemis d’approcher.

-Je commence à fatiguer, et il semble en venir de toutes parts, répondit Magnus, le souffle court. Mais que fait Iggy ?

     Ulric allait répondre lorsqu’un Skaven bondit sur son dos, tentant de l’égorger. Le guerrier fit parler son incroyable puissance, et il attrapa son ennemi par la tête avant de le propulser vers ses congénères. trois d’entre eux roulèrent dans la poussière alors que le dernier était réduit en cendres par le thaumaturge. Celui-ci profita du court répit pour chercher Skaggy des yeux : celui-ci, bien que blessé au coté, continuait à frapper avec la même ardeur, dans un style atypique pour un nain : il virevoltait, sans cesse en mouvement, opposant un mur de lame à ses adversaires. Mais même le tueur ne pouvait tenir indéfiniment cette cadence, et les choses ne s’arrangeaient pas pour les aventuriers. Ulric, ayant perdu son arme, se battait à présent à mains nues. Cela n’avait pas l’air de le gêner : il fracassa un museau de son poing ganté de fer, avant de piétiner un autre Skaven qu’il venait de mettre au sol. Il éructait, frappant à droite et à gauche, au bord de l’épuisement. Magnus lança un autre sortilège, à demi inconscient, envoyant deux autres ennemis ad patres. Et puis ce fut tout. Une multitude de cadavres aux pelages tachés de sang restait dans le chaos de la clairière, ainsi que des traces de brûlures sur l’écorce des arbres. Au milieu de cette scène se tenaient les trois aventuriers, hagards, recouverts d’un sang qui n’était pas le leur. Pourtant, une question ne quittait pas leur esprit : où pouvait donc être passé Iggy ? Skaggy, inquiet pour celui qu’il considérait toujours comme son élève, se leva le premier, avant que ses amis ne le suivent péniblement. Il ne mirent que peu de temps pour retrouver leur compagnon. Quelle ne fut pas leur surprise lorsqu’ils le retrouvèrent, étendu au milieu d’une vingtaine de cadavres Skavens, respirant faiblement. Bien que totalement cabossée par les nombreux chocs, l’armure du nain avait tenu bon et sauvé par là même la vie de son possesseur. Néanmoins, le bras gauche d’Iggy pendait, inerte, et du sang s’écoulait sur la terre rocailleuse. Pendant que ses amis surveillaient la route, Ulric ouvrit la sacoche de cuir qu’il portait à la ceinture et en sortit après quelques instants un baume de soins. Tout en bandant la blessure d’Iggy, il déclara :

-Nous ferions mieux de ne pas traîner. Il risque d’en arriver d’autres, ajouta-t-il, inquiet.

-Nous sommes bien d’accord, lui répondit Magnus sans cesser de scruter les alentours. La question est plutôt de savoir où est-ce que nous allons. Je ne pense pas que retourner au village soit une très bonne solution,...

-Moi non plus, coupa Skaggy, qui n’avait jusque là semblé prêter qu’un intérêt minime pour cette discussion. Mais de toute façon, on n’a pas le choix : Je ne compte pas rester dans les parages. Et puis, on a des nouvelles à apprendre aux villageois, non ?

-Leur dire que les monstres qui les terrifient sont des Skavens ne serait à mon avis pas une très grande idée, lui répondit Ulric.

-Et pourquoi donc ? rétorqua le tueur de trolls.

-Et bien vois-tu, la plupart de ces gens ne croit même pas à l’existence de ces hommes-rats. Ils les ont relégué au rang de légendes, de superstitions. Leur dire la vérité créerait un trouble bien plus grand encore, expliqua Magnus. Et nous ôterait toute crédibilité auprès de ces gens, ce dont nous n’avons pas besoin. Ceci dit, je suis d’accord avec toi, nous devons retourner à Laarsburg. A moins que la blessure d’Iggy ne nous en empêche, ajouta-t-il, pointant son regard sur le nain qui se relevait péniblement.

-Tout ira bien pour moi, confirma-t-il. De toute façon, ça vaudrait mieux : rester ici est hors de question. Il jeta un oeil sur le bandage qui lui couvrait à présent le bras. Je compte bien prendre ma revanche sur ces maudits Skavens, dit le nain sur un air de défi.

Sur cette ultime bravade, Ulric s’occupa des plaies de ses amis avant que le groupe d’aventuriers ne se mette en route avec lassitude alors que l’aube pointait.

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