Rappel :
Ildaëres (Ild) est un jeune chevalier dragon du fortin de Dehergat. La cité est attaquée par d’autres chevaliers dragons et des mages noirs de la Garde de Mithril de Cardam, menés par Destan le chevalier de Bahamut, le dieu des dragons.
Tous les habitants sont sauvagement assassinés, dont Eléonore, huit ans, la sœur de Ildaëres, qu’il retrouve enfouie sous une énorme pierre. Il se retrouve comme possédé et élimine tous les chevaliers dragons. Destan le provoque en duel mais Ild est devenu trop puissant. Le chevalier de Bahamut s’enfuit et Ild s’effondre...
Ildaëres retrouve ses esprits deux jours plus tard. En se réveillant, il découvre les corps de ses amis et ceux des chevaliers dragons. Il ne sait pas ce qu’il s’est réellement passé, mais en revanche il se rappelle parfaitement du corps de sa sœur et du combat avec Destan. Il fait le tour des ruines et ne trouve aucun survivant. Il entre dans une habitation en état à la recherche de quoi se nourrir. Il trouve aussi de quoi se bander les bras et se changer. Il laisse son uniforme tombé en lambeaux et se vêtit d’un pantalon large de tissu bleu marine et d’une chemise beige. Il préfère ne pas remettre d’armure et décide de quitter la ville, direction Cardam, capitale du royaume de Palna et cité de la Garde de Mithril. Ild a retrouvé son regard habituel, c’est-à-dire calme, bien que rongé par la tristesse et la fatigue.
Après avoir récupéré du siège de Dehergat, il décide de se mettre en route pour Cardam. De temps en temps, Ild se retourne pour voir les ruines encore fumantes qu’il laisse derrière lui. Cardam est au sud-est de Dehergat. Deux chemins s’offrent à Ildaëres, soit par le sud, soit par l’est, mais il choisit de prendre celui de l’est se rappelant qu’Onelm, une cité marchande, est sur le chemin. Il n’a pris que sa lance avec lui et après une demi journée de marche, il arrive épuisé à un campement de commerçants qui ont planté la tente pour passer la nuit. Ild s’approche et voit quatre hommes autour d’un feu. A sa vue, les marchands brandissent leurs dagues, le prenant pour un pillard, mais lorsque la lueur du feu met en évidence ses blessures, ils se précipitent pour l’aider. Ild est très faible et prend appui sur l’un des hommes qui se proposent à l’aider.
« Il est épuisé le gamin !
-Amenez-le à la tente ! »
Ildaëres dort ainsi jusqu’au lendemain matin. A peine réveillé il sort de la tente des marchands, là où ils l’avaient mis. Ceux-ci sont en train de lever le camp. L’un d’eux aperçoit Ild.
« Tu es déjà réveillé ? Je croyais que tu allais dormir au moins une semaine !
-Non merci, c’est bon.
-Tiens, tes blessures ont disparu, c’est incroyable ! »
En effet, les bras de Ild sont parfaitement intacts. Le marchand lui demande :
« Au fait, tu dois avoir un nom ?
-Je m’appelle Ildaëres, mais on m’appelle Ild.
-Moi c’est Arkeron et là bas ce sont Queter, Lirévu et Thium. Au fait, que faisais-tu au bord de cette route dans cet état ? »
Ildaëres ne veut pas parler de l’attaque de la Garde de Mithril et répond :
« J’ai été attaqué...
-Par qui ?
-Je n’en sais rien...
-Dis-moi, avec ta lance tu ne serais pas un chevalier dragon ?
-Pourquoi cette question ?
-J’ai entendu dire que le roi avait envoyé ses Chevaliers Dragons et ses mages à Dehergat, ainsi qu’à d’autres cités fortifiées. Je me demande ce qu’ils voulaient...
-Alors ça vient directement du roi ? s’exclame Ild.
-De quoi ?... Tu nous caches quelque chose toi... Te faire attaquer comme ça et ne pas te défendre avec une arme comme la tienne, c’est louche !
Ild hésite et rétorque :
-En fait... Je suis le dernier survivant du fortin de Dehergat...
-QUOI ?
-Les chevaliers dragons et les mages noirs ont attaqué il y a trois jours... Tout le monde est mort... Sauf moi...
-Que comptes-tu faire ?
-Je ne sais pas ; pour le moment, je compte me rendre à Onelm.
-On devait y aller aussi et on aurait bien besoin d’un guerrier pour nous protéger.
-Pas de problème, mais s’il te plaît, essaye de cacher aux autres...
-T’en fais pas ! »
Ild aide les marchands à plier la tente et à charger leurs marchandises dans leurs deux chariots. Les deux jours de route sont calmes, sans attaques. Pendant tout ce temps, Ild cherche par quel miracle il a réussi à guérir en une nuit. Finalement ils arrivent à Onelm, cité d’environ dix mille habitants qui vit du commerce qu’elle exerce avec Carnam. Ildaëres descend du chariot et remercie les marchands. Il leur demande s’ils ne connaissent pas un moyen de se faire un peu d’argent. Ils lui conseillent de se rendre à l’arène des gladiateurs de la ville. Là il pourrait participer. Il écoute le conseil des commerçants et se rend à l’arène. Là il voit un stade avec une arène creusée dans le sol, d’une vingtaine de mètres de profondeur et occupant une grande surface. A l’entrée des participants aux duels, Ild voit ceux qui risquent d’être ses adversaires. Avant de s’inscrire, il est interpellé par un vieillard aux longs cheveux et à la barbe blanche.
« Dis-moi, tu n’es pas un peu jeune pour te battre ici ? Les participants sont puissants...
-Mêlez-vous de vos affaires.
-C’est une bien belle lance que tu as là !
-Que me voulez-vous ?
-Je viens voir les combats de temps à autre et la présence d’une personne comme toi m’intrigue.
-Je n’ai pas d’autre moyen de me faire de l’argent.
-Et bien je verrai ce dont tu es capable. Tu pourras me voir en tant que spectateur. »
Le mystérieux vieillard se retire. Ild reste perplexe et met une dizaine de secondes avant de se retourner vers les inscriptions.
Ildaëres est inscrit et il ne sait pas qui sera son adversaire. Dans la salle où les guerriers attendent leur tour, il voit des combattants de tous horizons, du barbare des steppes du grand nord, portant sa hache géante, au guerrier elfe venant des vallées orientales, armé de son sabre. Un homme se présente à la porte de l’arène, criant le nom des duellistes. Le tour de Ild arrive après trois combats assez longs. Toujours est-il que Ild doit affronter un certain Sueyen. Le chevalier dragon se retrouve en face d’un homme noir au crâne rasé portant un gigantesque cimeterre. L’homme est torse nu et porte un pantalon qui est retroussé jusqu’à ses genoux. Sa carrure est tout aussi impressionnante que son arme. Sueyen semble être un homme de combat loyal et va saluer Ildaëres avant que la porte ne s’ouvre.
« Ce n’est pas parce que tu es jeune que je vais faire une exception.
-Si, fais-en une pour moi, s’il te plaît, bats-toi à fond !
-Hé hé... Ton esprit me plaît ! »
Les deux adversaires se sourient, car visiblement, ce sera un combat plus pour l’honneur que pour l’argent. L’énorme double porte en acier s’ouvre et la lumière de l’arène éblouit Ild sur le moment. Ils se placent au milieu de l’arène et pendant que l’homme qui les a appelés les présente aux quelques deux mille spectateurs, Ild cherche le vieillard dans les tribunes mais en vain. L’homme se retire et le combat va pouvoir commencer. Dans les tribunes les paris clandestins s’ouvrent. Beaucoup misent sur Sueyen, l’imposant guerrier connu dans le milieu. Le jeune âge de Ild n’attire pas grand monde. Le grand père se trouve bel et bien dans les gradins et demande à un parieur de mettre une somme sur Ildaëres. Plusieurs autres essayent de le persuader de faire le contraire mais il leur explique qu’un chevalier dragon de son âge cache forcément un talent particulier.
Les deux guerriers se font face et le combat commence au retentissement du gong. Sueyen prend l’initiative d’attaquer avec son cimeterre. Le poids et la taille de son arme ne l’empêchent pas de ne laisser aucune faille dans sa garde pour Ild qui se contente de parer. Il doit rapidement abandonner sa position de défense car les assauts sont d’une rare violence. Il saute. Sueyen semble connaître la technique des chevaliers dragons et se décale de telle manière à prendre Ild de vitesse dans sa retombée. Il ne s’était pas trompé car il est bel et bien sur la trajectoire mais contrairement aux autres chevaliers dragons qu’il a déjà affrontés, Ild ne porte pas d’armure et est plus agile, il peut donc esquiver le coup de cimeterre qui lui était destiné. Sueyen a mis tout son poids pour soulever la lame et frapper avec vigueur, ce qui ouvre une brèche pour Ildaëres qui peut frapper son adversaire avec l’arrière de sa lance et essayer de l’affaiblir et ralentir ses attaques. Maintenant, Ild peut contenir en grande partie les assauts de Sueyen. Celui-ci commence à fatiguer au bout d’un long quart d’heure où toute sa musculature est mise à l’épreuve. Il essaye de frapper Ild de son cimeterre, mais celui-ci pare. Ild tente de faire un tour sur lui-même et de donner de la vitesse à son attaque et frappe l’arme de Sueyen avec la pointe de sa lance. La force mise est suffisante pour que la pointe du cimeterre tombe vers le sol. Sueyen n’a plus la force nécessaire dans le poignet pour relever sa lame et Ild le frappe au visage avec l’autre côte de son arme. Sueyen tombe ventre à terre et perd son arme. Lorsqu’il se retourne, il se retrouve avec le bout de la lance de Ild pointé sur la gorge. Sueyen n’a plus la force de se relever mais Ildaëres est, lui aussi, essoufflé du combat qu’il vient de mener avec brio. Sueyen reconnaît sa défaite et abandonne, à la stupeur des spectateurs. Un silence persiste durant quelques secondes mais il est interrompu par les cris de joie des parieurs qui avaient misé sur Ild. Ceux-ci ne doivent être qu’une vingtaine, mais cela est suffisant pour déclencher les acclamations de la foule qui félicite le jeune gladiateur qui vient aujourd’hui de marquer le tournoi à jamais. Ild aide péniblement Sueyen à se relever. Les adversaires se saluent.
« C’est un honneur de m’être battu avec toi, chevalier.
-Tu es aussi un guerrier redoutable.
-Pourra-t-on un jour se revoir et remettre ça ?
-Il y a des chances si je me réinscris ! »
Ce sont sur ces paroles que le combat se termine. A la sortie de l’arène, Ildaëres se voit remettre une bourse de cent cinquante pièces d’or.
« De quoi tenir cinq jours, se dit-il. Par contre, vu mon état, je ne pourrai pas combattre avant après demain... »
Ild, perdu dans ses pensées ne voit pas que le vieillard s’approche de lui. Il l’appelle par son nom.
« Beau combat Ildaëres !
-Ah, c’est vous...
-Dis-moi, tu n’avais pas répondu à l’une de mes questions tout à l’heure, d’où vient cette lance ?
-C’est mon père qui l’a fabriquée à ma naissance et qui me l’a remise à sa mort, et le ruban c’est ma petite sœur qui l’a mise.
-C’est ton père qui t’a appris à te battre je suppose ?
-On est des chevaliers dragons dans la famille depuis des générations. »
Le dialogue s’installe vite entre les deux personnes. Etonnement, Ild semble faire confiance au vieillard, qui semble avoir de l’expérience à partager avec lui. Il lui demande s’il a eu des difficultés dans ce combat, mais connaissant apparemment la réponse à l’avance. Le grand père explique alors brièvement à Ildaëres tout ce qu’il aurait pu corriger en cours de combat. Ild est stupéfait et demande au vieillard comment il peut décrypter une batille aussi précisément. Il lui répond que s’il veut tout savoir il devrait le suivre. Il conclut en lui disant son nom : il s’appelle Jaba.
Ildaëres le suit et ils quittent la ville pour s’enfoncer dans la forêt. Ils empruntent un chemin de terre battue qui mène à une clairière, isolée de tout regard de l’extérieur. Le seul bruit qui pourrait déranger est la douce mélodie des oiseaux. On entend au loin le bruit sourd d’une chute d’eau. Cet endroit semble être un coin de Paradis où Jaba peut méditer. Justement il en vient au fait et parle de nouveau à Ildaëres.
« Parfait, tu es venu ! Bon je vais y aller directement : tes talents m’intriguent, voila ce qui me trouble en toi.
Ild répond :
-Et alors, que puis je faire ?
-Il me semble que tu ne maîtrises en rien la puissance qui sommeille en toi. Je souhaiterais donc que tu restes ici pour que je t’apprenne comment apprivoiser ton esprit.
-Je vois... Mais c’est impossible, car ce que j’ai gagné au combat ne me paierait pas une semaine dans une auberge...
-Ha ha... Si tu crois que je fais ça pour l’argent tu te trompes. Voir mes élèves dépasser leurs limites et devenir toujours plus fort, voila ce que j’aime !
-Vraiment ? Si c’est le cas, alors je veux bien essayer.
-Parfait ! Pour le moment, donne-moi ta lance ! »
Ild obéit.
« Voila, à partir d’aujourd’hui et jusqu’à ce que je t’y autorise, je t’interdis de toucher à ta lance !
-Quoi ? s’exclame Ild.
-Ici tu subiras l’entraînement des moines et on n’a pas recours à la lance... »