Un cri plaintif avant que la nuit ne finisse l’éveilla malgré lui. Il entendit encore en écho les aboiements des chiens du côté de chez Rocquard avec leurs chaînes traînantes et leurs figures plates taillées de dents qui se brisaient aux solives après s’être tues dans le lointain, aux deux lieux où sa conscience déjà se perdait. Le calme revenu tandis que sa tête continuait de tambouriner tous ces sons entre rêve et réalité, les yeux ouverts il fixait la pénombre et surpris d’y trouver autant de ténèbres, cherchait pour se rasséréner un cauchemar ou l’autre dans la chaux du toit. Alors sa tête retomba d’elle-même, noir dans le noir il se laissa bercer par les grognements à sa porte, ces raclements de pattes en tête si agréables parce qu’insensibles, puis Gilde aboya et le réveilla tout à fait.
Sa patte lourde grattait le panneau de la porte assez fort pour la faire trembler, il l’entendait geindre, commencer un jappement qui se perdait. Lui-même saisi par ce vacarme, et grommelant, se leva pour tâter son chemin jusqu’à la bêche puis à l’entrée. Sous le battant passait l’air froid, il vit les trames de terre sillonnées par les pattes, l’ombre qui grattait et les gémissements vifs de son chien. Alors soufflant, serrant sur lui le peu d’habits qu’il portait, l’homme ouvrit. La tiédeur laissa place à un air froid, humide, où régnait ce silence de l’activité nocturne. Au-dessus de lui apparurent toutes les constellations d’astres, plus que de simples lueurs des fresques célestes cachées par les rares lames des nuages. Il voyait les cieux mieux qu’il ne voyait ses pieds, sur la terre bousculée il trébuchait.
La seule ombre que le fermier distinguait était celle de Gilde tout agité qui allait jusqu’à lui pour lécher sa main ou tournait du côté du champ par bonds, par trot puis revenait. Il enfouissait son museau plat dans la paume de son maître, se laissait caresser, bondissait soudain. Il avait le poil plus long que celui des fourrures si riches portées par les bergers. Une dernière fois l’homme tenta de calmer son chien avant de se résoudre à le suivre. Les paniers le gênèrent après quoi il découvrit dans l’obscurité l’immensité de son champ, vaste au point que son imagination échouait à le lui rendre. Dans la nuit les arbres des bois lui cachaient l’horizon, il ne savait plus que confusément à quelle distance pouvait se trouver la barrière qui le séparait de Rocquard, si tout cela existait encore. Aussi marchait-il à pas lents, tapant de sa bâche à la manière d’un bâton dans les sillons qui se hasardaient, et il regardait tantôt la silhouette de Gilde et tantôt les contours effacés de sa demeure, dont plus rien ne subsista qu’un coin à son tour avalé par les frondaisons.
Il s’arrêta, tapa des mains contre le froid, souffla encore. Ses repères quand il en trouvait lui échappaient après quelques pas, les vieux souliers claudiquaient dans les labours, contre les jeunes pousses des plants. Au-devant les mouvements de son compagnon s’évanouissaient, quelques rumeurs le dirigèrent avant que la solitude ne le surprenne, pleine de silence. Les lacets des chausses en se frottant causaient alors plus de bruits que toute la région. Il allait plus vite, tapait de la bêche devant lui avec le bout en bois dont le mouvement à présent lui indiquait la marche à suivre, enfin le manche frappa dans une latte de la barrière à laquelle il s’agrippa en entier. Dans la nuit décolorée la barrière ne tenait qu’entre ses mains terreuses, rugueuse, le poteau planté près de son pied qu’il devinait à peine.
Nulle trace de son chien, dans son dos tout le champ traversé demeurait désert. Il aurait pu remonter du côté de la forêt ou descendre vers la route. En face de l’autre côté de la palissade les champs appartenaient au voisin. Dans la nuit rien ne les distinguait, impossible d’y voir les alignements de légumes ou les vergers, seulement une vague odeur de vinaigre. Un geignement distant le remit en route, une main à la bêche tandis que l’autre tenait la barrière en direction de leurs deux ares si durement disputés. Comme il approchait un second geignement le poussa en avant, un instant il lâcha le poteau au lieu de glisser sa poigne, il se crut perdu à tâter jusqu’à retrouver prise. S’il avait atteint le coude des deux ares, en ce point où les pieux bifurquaient alors plus rien ne lui aurait permis de se repérer, pas même les sillons dans la terre tant l’obscurité pesait. L’homme jeta un œil au ciel empli d’étoiles, l’impensable firmament aux courbes sauvages sous lequel les genoux ployaient, puis il regarda par terre, devant lui.
Affaissé parmi les paquets de terre reposait un sillon aux reflets cuivrés plus vif que le blé mûr ou le soleil ou l’or en feu, entre les cailloux amassés à mesure qu’il s’approchait pas à pas sur la plante des pieds les contours lumineux se métamorphosaient en robe, le poil flottait à l’air frais moins sali que ne l’était une pièce de cent sous, une longue ondulation achevée en pointe mimait la queue d’un goupil. Gilde se tenait à côté, à quelques pas il grondait toutes dents dehors, son museau brusqué dans l’attente d’un aboiement, il griffait le sol. Le bec en fer de la bêche s’achevait en pointe. L’homme s’approcha de la bête gisante sans pouvoir se détacher de la gorge au scintillement encore plus clair, encore plus propre, vers lequel sa main tendit à mi-chemin d’hésitations. Il se décida à frapper un coup sec sur le museau de son chien :
« Arrête ! Tu vois pas que ça brille ? »
Par cris étouffés, par gestes il intima le silence à son chien avant de le chasser loin vers sa demeure de l’autre côté du champ tant qu’il resta seul auprès de la bête, la bêche tombée au sol parmi les choux lui-même se baissait en entier sa main suspendue au-dessus du pelage, le long du dos passant la nuque par-dessus les oreilles basses jusqu’au museau. Il remarqua la patte écartée, rendue sombre par une plaie ouverte dont l’aspect mimait la glaise, une plaque étendue aux cailloux alentours. Alors son poing se serra à la poitrine, muet, il se mit à arracher la manche de son habit. Avec le lambeau sans même qu’il y songe son souffle s’était réduit à rien, l’homme souleva la patte d’un doigt, glissa le tissu sur lequel il souffla encore après quoi il l’enroulait. Ses yeux pleins d’étincelles bondissaient de ses doigts au masque de la bête dont la lèvre remua, dévoila un croc puis retomba, rien de plus.
Cela fait l’homme reprit sa bêche, tapa ses chausses ainsi que ses mains, autour de lui les ténèbres s’étendaient sans qu’il en voie la fin. Quelques secondes durant il resta debout sans rien faire, hésitait, alla un pas, revint. Le piquet de la barrière se trouvait presque à portée de main, son dos s’y plaqua comme la nuque en entier, ses deux jambes étalées il chercha le sommeil dans les reflets du pelage cuivré long sillon si proche tandis que la tête dodelinait, les contours se firent vagues. La voûte céleste défila foule de corps profonds dans l’immensité à deux doigts de ses ébauches de rêve, les lueurs mêlées aux lumières le long de la courbe animale formaient un monde sur les ténèbres où errer.
Bientôt le froid l’avait transi, à l’humidité ses membres tremblaient ravivés à chaque fois que dans son bercement l’habit touchait la peau. Les paupières battaient épuisées, de la main il chercha autour de lui sans rien trouver que les choux, de l’autre côté le labour, son ventre vaincu par la veille se tordait. Il crut ne voir que la nuit profonde et s’apprêta à se lever, à ce mouvement sa tête retomba en avant assez pour voir la bête toujours couchée dans la même position, la patte bandée perdue parmi la noirceur du sol. Déjà les forces réunies dans ses bras, dans ses jambes retombaient, il se cogna la tête plusieurs fois contre le piquet, souffla. Une fois, deux fois ses doigts passèrent entre lui et le pelage sans pouvoir l’effacer. Il les écarta vivement surpris par des contours familiers.
En peu de choses la majorité des astres s’éclipsèrent tandis que la barrière ainsi que le champ retrouvaient leurs formes, il devina les pousses ou les légumes ou les écarts grossiers de la terre autour de lui. Aussi la fourrure aperçue la nuit perdait de son éclat, à la place couverte par les gouttes de la rosée, le poil se détacha assez court pour sembler lisse, il voyait les perles d’eau s’y suspendre sans s’y briser. À l’horizon la courbe du soleil frôlait les dernières ombres près d’apparaître, les seules étoiles s’évanouirent. Un frémissement au collet de la bête retint toute son attention. Le soleil perçait, une oreille frémit, le petit corps étendu frappé par les ombres en fuite remua à ce contact. Les babines murmurèrent sans bruit, la tête se soulevait, il songea seulement à attraper le bout de sa bêche pour la tirer près de lui. L’animal voulut soulever sa patte endolorie, à quoi son masque marqua de la douleur, puis balançant la tête de son côté il découvrit l’homme.
« Tu n’es pas à ta place, homme, dans ce champ. »
La voix s’éteignait à mesure qu’il l’entendait, plutôt il lui semblait entendre un bruissement de feuilles dans la distance de l’aube en éveil, une féérie de sa part de croire que cela arrivait, de voir les babines remuer faiblement. Il ne répondait rien, raidissait ses jambes ainsi qu’à sa poigne la bêche, il fixait ostensiblement la patte pansée par ses soins. L’animal fixait l’outil le visage encore empreint de peine, et curieux.
« Que vas-tu faire ? »
Cette fois le soleil dominait les ténèbres, des rayons s’étiraient jusqu’aux bois dévoilant en bout le toit de sa demeure, en deçà plus loin le contour de la route détachée encore par un bouquet d’arbres. La terre entre ses doigts avait à nouveau l’aspect de la terre, il s’obligea à répondre, lâcha le manche, montra à son bras l’habit déchiré ainsi que sa fatigue, parla, parla autant qu’il pouvait de ses mots tronqués. Sa langue gonflait à chaque mot, claqua dans les pauses quand il se grattait le cou. Les gages offerts suffirent à convaincre le goupil de ses bons soins, alors qu’il se répétait celui-ci parvint à se tenir sur ses pattes, celle au pansement laissée pendante tant qu’il essayait de lécher la plaie à travers le tissu.
Le voyant debout il crut que la bête allait partir, un mouvement fébrile l’agita. Il resta affalé autant qu’il put à cacher ses réactions, jusqu’à ce que le goupil au pelage de cuivre se soit reposé. Il tendait le cou, scruta le fermier presque immobile avant de baisser la tête ainsi que ses oreilles, il fut sur le point de se recoucher. Il remercia l’homme, sur son poil l’eau de la rosée roulait puis s’effondrait alentours, emportant le reste de son éclat. Alors l’homme lui demanda ce qui était arrivé, à quoi le goupil consentit à répondre. La tête toujours baissée dans son murmure il évoquait les événements, sans mime ni geste sinon le tremblement de sa patte chaque fois que la douleur ressurgissait.
Voici la nuit tombée, quand elle fut assez profonde le goupil se mit en route pour la ferme de Rocquard qui était en briques et comptait un étage, et des fenêtres, une étable pour ses bêtes, une remise à outils, un enclos où caquetaient les poules. Il venait de la forêt par le verger, sous les basses branches il avait épié toutes ces constructions. Le vieux Rocquard avait trois chiens horribles et féroces comme l’étaient les chiens, qu’il laissait libres la nuit avec leurs chaînes. L’un d’eux se cachait assoupi contre la brique, près de la cave, entre lui et l’enclos des poules laissé sans garde. Il alla se tapir derrière l’étable où venait flotter l’odeur des vignes, attendit encore les oreilles tendues sans rien percevoir que le grincement du bois ou l’usure de la pierre. Enfin un grognement tout près le mit en alarme. Il bondit, un chien embusqué barra sa fuite, un second le surprit de derrière, les aboiements fracassèrent le silence de la nuit.
Sa patte le meurtrit alors même que lui revenait le besoin de fuir, tout son corps se brusqua devant les crocs déployés contre lui. Sa queue trompa les bêtes qui se jetèrent dessus, d’un bond il glissait entre leurs pattes, s’échappa ventre à terre sans plus songer à rien. Le troisième d’entre eux éveillé ou aux aguets se jeta à son tour après lui, avant même le premier arbre du verger il roulait dessus. Les cris et les crocs broyaient la nuit à mesure de ce vacarme les coups de griffes donnés tout contre déchiraient le voile des ténèbres. Les maigres troncs à portée lui offrirent un bref répit tant qu’un serait entre lui et ses poursuivants, au sortir un seul le tenait encore de près.
Les deux autres suivaient de côté avec l’intention de lui couper la retraite des bois, alors que l’orée approchait tous les taillis au loin représentaient autant d’espoirs de leur échapper, les molosses revenaient sur lui plus enragés encore, il tenta jusqu’à la dernière seconde de regagner les fourrés. La terreur fit le reste, au moment où ils se jetèrent sur lui un bond de côté le fit abandonner sa course vers la forêt, tout ce qu’il lui restait de forces passa à prendre autant de distance qu’il pouvait avec l’écume de ces babines. Il allait tenir jusqu’à la barrière qui servait de frontière entre les deux champs, bientôt visible quand il la sut proche le goupil reprit courage, au dernier instant il bondit, faillit finir sous les pattes de ses agresseurs.
Dès qu’il toucha de ses pattes le bois d’un pieu il sut être en sécurité, à la frontière des deux champs les chiens de Rocquard ne pouvaient plus guère que le suivre d’en bas tandis que ceux que pouvait receler l’autre champ, ne pouvant pas non plus traverser, seraient également incapables de lui nuire. Ainsi en équilibre le renard continua à fuir non pas vers la forêt où la barrière cessait trop tôt mais de l’autre côté tant qu’elle durerait, il bondissait d’un pieu à l’autre sous les reflets célestes. Les bêtes à sa poursuite cognaient leurs chaînes contre le bois, faisaient mine de bondir et aboyaient et grondaient, enfin sans que rien ne le prévienne ils mirent fin à la poursuite.
Le silence revenu se brisait déjà comme de l’autre champ surgissaient à leur tour les aboiements de Gilde, qui lui firent continuer sa course sur la barrière à cette frontière figée dans la nuit. Les deux fermiers s’étaient disputés récemment, les piquets avaient été enfoncés de deux ares dans les champs de Rocquard, soudain devant lui au lieu d’un piquet ne se trouva que le vide. Il roula à terre, sa patte frappait les fondations de cailloux, dans la peur qui le prit un mouvement pour se relever, anéanti par la douleur, eut raison de ses forces.
Sur eux le ciel avait pris des allures de flammes, il s’était levé la main pesante sur le bois de sa bêche, la pointe en fer dans le sol. Sa lèvre inférieure devenue sèche tirait vers le bas, le silence se perçait au lointain de cris d’animaux. Ses bottes foulaient la terre dans un sens, chevauchaient les cailloux avant de s’arrêter, il grognait le long des lattes ou tapait dessus avec ses doigts, et jetaient des regards de tous côtés. Enfin se tenant le front longuement l’homme murmura quelques mots pour lui-même. Il retournait au goupil, se figea, l’animal s’était recouché sur le côté les pattes pendantes, et avait refermé les yeux. Un mot, les paupières s’ouvrirent, finement, il voulait l’entendre parler. Sa maison de l’autre côté du champ pouvait les accueillir, de sa voix rendue fébrile le fermier l’y invita.
Il l’avait invité.
Celui-ci allait précédant l’autre, il retournait chez lui poursuivi par ses doutes, se retournait souvent le temps de vérifier que la bête le suivait toujours. Elle boitait, peinait à chaque sillon, son pelage frottait contre les jeunes pousses. Son museau frôlait la terre. Un instant l’arrêta, il restait figé devant l’obstacle qu’un simple pas pouvait franchir, et son masque mima un sentiment étrange qui marqua l’homme. Contre la maison proche désormais se plaquaient les ombres par lames, la pierre grossière des façades écrasait les paniers à l’entrée disposés en désordre, près du sentier. Il se retournait encore, vit ce sillon de cuivre faufilé parmi les herbes, à nouveau immobile, la patte dressée sans pouvoir faire un pas. Des aboiements éclatèrent du côté du vieil abri, Gilde surgit, alla grondant et joyeux tourner autour d’eux, retroussait ses babines.
« Mais tais-toi ! Qu’est-ce que tu as à gronder ! »
Il menaça le chien de sa bêche, assez pour le faire reculer, se tournant vers le goupil il l’assura de sa protection. Son chien faisait bien d’aboyer, de gronder, de menacer, pour cela il fallait le récompenser ou le laisser faire, il ne voulut rien savoir, jeta encore quelques menaces comme Gilde revenait, il fit mine de le frapper du plat de la main. Alors la porte de la demeure s’ouvrit brusquement, un panier bousculé roula pêle-mêle avec les autres, la voix de sa femme s’éleva de ce coin, lasse et triste, à demander ce qui se passait. Il s’excusa auprès du goupil, poussa encore son chien puis alla la voir à l’intérieur lui expliquer ce qui était arrivé cette nuit. En tout premier, qu’il avait un invité. Quand elle sut ce que c’était, son ton changea plus abrupt, courroucé par cette idée, elle refusa de le voir entrer.
Ses propres mots furent : « La vermine dans ma maison ! » Il sembla durant quelques secondes qu’elle s’était étourdie, il cherchait ses raisons, essayait d’expliquer, elle ne pouvait plus l’entendre. Il l’appelait sa petite Sophie pour la faire céder. Elle finit par atteindre les larmes, dans des étranglements de chagrin lui dit de rejeter son invité dans les bois, de le chasser, ses mots se répétaient sans fin. Il ne disait plus rien, il l’écoutait, cela durait, puis un gémissement de Gilde leur rappela la porte ouverte. Le chien les regardait, elle prit son parti, accepta la folie de son mari. Son marché était le suivant, que le goupil pouvait rester tant qu’il ne mettrait pas une patte dans la maison, et qu’elle garderait le chien avec elle à l’intérieur, selon les termes du fermier, pour qu’il n’attaque pas son invité. Ces termes passés à haute voix l’homme ressortit les annoncer, pour trouver l’herbe déserte.
Juste la pointe de sa queue révélait sa présence, à part quoi dans la masse des paniers en tresses il disparaissait complètement. Il s’était glissé dans l’un d’eux, roulé à l’intérieur le goupil avait fermé les yeux, tout entier aplati au fond, retenait ses pattes contre lui. La queue glissa sur lui à l’approche de l’homme, ainsi mis il demanda à partir. Sa voix depuis le fond du panier était encore plus faible, il murmurait les yeux clos, la patte frémissante. Le panier lui suffisait, il y sentait encore l’odeur ancienne des pommes, la fraîcheur de l’ombre serait son toit. Derrière la demeure existait un vieil abri, là où s’était trouvé un enclos, où il rangeait une partie de ses biens. Ce serait à défaut la demeure qu’il lui offrait.
Aussi prenant son parti l’homme souleva le panier et l’emportant à pleins bras alla jusqu’à l’abri le présenter au goupil. Gilde voulut les suivre, se détourna à l’appel de Sophie, ils y arrivèrent seuls. Rien ne s’y trouvait que le délabrement, le souvenir d’autres temps, il expliqua qu’autrefois deux boeufs dormaient là. Il économisait pour en racheter un, d’ici là ils faisaient sans. Ayant posé le panier au coin le plus frais il demanda encore si le goupil avait faim, promit de repasser le voir car les tâches de la journée l’attendaient. Comme il sortait celui-ci lui répondit brièvement de rendre les deux ares à Rocquard. Et répétant qu’il le fallait, la tête sortie du panier il lui dit de le faire le plus vite possible, puis le regarda s’éloigner sa bêche à la main.