Lorindil
La corvette de transport atterrit en douceur sur le sable, à la manière d’un gros scarabée, les ailes remplacées par des turbines ventrales... Ce qui rassura terriblement les occupants, après les affreux loopings que leur avaient imposés les pilotes de la Flotte une fois dans la stratosphère... Cinq autres l’avaient rejointes, orientant une fois posées au sol leurs canons automatiques dans le sens du débarquement.
Les sas d’ouverture s’abattirent violemment, et des soldats en jaillirent dans le plus grand désordre, fusils Delbrow en mode laser et mitrailleur (selon les goûts) prêts à faire feu. Mais à part un ver ailé des sables de dix mètres de long, aucun être vivant ne présentait de cible convaincante. Ce qui n’empêcha pas le caporal O’Yarell d’exploser la cible d’un tir de plasma bien ajusté.
"Secteur sécurisé, sergent !", hurla-t-elle une fois la bestiole réduite à l’état de purée.
"Ouais, ben super. Au moins on crèvera pas d’faim avec toute cette soupe..."
Le sergent jeta un œil dégoûté sur le cadavre de la bête, son ventre ballonné atrocement explosé au niveau de l’emboîtement d’une des vingt paires d’ailes membraneuses rosâtres.
"Bon, c’est pas tout ça. Toi, toi et toi ! Allez voir ce que les corvettes inoccupées nous ont laissé comme matériel.", ordonna-t-il à trois soldats de sa section. Décidément, les noms et le sergent, ça faisait plus que deux : encore une fois, les noms de ses subalternes étaient passés à la trappe...
Autour de lui, les quatre autres sections débarquées prenaient connaissance du terrain. L’une d’entre elles, équipée d’un bio-senseur, indiquait qu’il y avait une forme de vie imposante mais défunte à moins de dix mètres de leurs fusils. "Vous vous foutez de moi, Defbond !", hurla un gros sergent au malheureux soldat en charge du senseur.
Les guerriers renvoyés aussitôt aux corvettes de matériel ne tardèrent pas à en décharger des scorpions blindés*. Le top en matière de transport sur un désert : quoi de mieux que de planer au-dessus des dunes en fustigeant les lourds tanks blindés de la cavalerie "cloués" au sol ? Un régal, pensa Woodkeeper. Sa section ne tarda pas à embarquer sur l’engin, sous les commentaires de Fran Gipane destinés à ses chers senso-spectateurs.
Désormais, les soldats avaient retiré leur casque de cosmonaute, pour ne garder que leur casque de combat. L’atmosphère était des plus convenables pour un organisme humain, et tout cet équipement inutile traînait désormais dans les couloirs étroits des corvettes. D’une poche de sa carapace dorsale, Woodkeeper tira sa paire de lunettes de soleil à ordinateur intégré. Un petit bijou de technologie, aussi bien pour se protéger du soleil que pour recevoir / consulter / envoyer des informations directement sur le composite des verres ! Il cligna des yeux sur un symbole en forme de chouette, et derrière lui la corvette se referma toute seule, sortant de son fuselage trois autres pièces d’armement automatique. Les autres vaisseaux l’imitèrent bientôt, et la zone d’atterrissage se transforma en une véritable petite base avancée surarmée...
O’Yarell, en tant que sous-officier, avait droit à sa propre paire de lunettes, et ne s’en priva pas. D’un clin d’œil, elle enclencha son programme préféré : "Count Kills", dont elle espérait bien pulvériser le dernier score, resté à 230 + 1 major (compte hors points)...
La chevauchée infernale commença. Comme prévu, les colonnes de blindés et d’artillerie furent rapidement dépassées, seulement trois heures après débarquement. D’ici 12 heures, l’objectif serait atteint, et les corvettes pourraient tranquillement rejoindre leur équipage. Plus d’un soldat savourait l’idée de quitter cette foutue planète déserte d’ici 24 heures tout au plus...
Un rêve de bien courte durée, lorsque sur les lunettes de Woodkeeper s’afficha un message d’alerte.
"Merde, ils nous attendent, on dirait bien...", jura-t-il.
"Qui ça, ils ?", tiqua Fran Gipane.
"Je sais pas moi... E.T., Dieu ou bien des Liors mutants... Mais ils ont déjà bombardé les blindés."
"Des pertes ?"
"Non, rien. Que du sable vitrifié... Ces gars-là doivent avoir une civilisation de type paléo-nucléaire. Ce qu’ils nous ont envoyé dessus ne ferait même pas broncher le champ de protection d’un croiseur de la Flotte. Alors des tanks à coque anti-neutrons..."
Woodkeeper resta songeur, avant de reprendre. Juste le temps pour Fran d’effectuer un gros plan sur son long visage imberbe.
"S’ils sont massés autour de l’objectif, c’est qu’il doit avoir grande valeur à leurs yeux. Et même à leur niveau technologique, un tir de paléo-arme peut faire des dégâts sur la troupe..."
"Alors, quels sont les plans du Leader de Combat ?"
Woodkeeper consulta les menus défilant le long de ses verres de lunette.
"Apparemment, les bio-senseurs détectent un regroupement de formes de macro-vies à 10 km de là. Peut-être nos loustics. On a l’ordre d’opérer en fer de lance, à six sections. On devrait passer sans accrocs."
"Mais si on passe pas ? S’ils se révèlent bien plus développés que ça ? Je veux dire... Ils ont des paléo-bombes A, mais rien ne nous dit qu’ils ne maîtrisent pas d’autres domaines, comme, heu ..."
Woodkeeper lui lança un regard noir.
"Eh, le sergent a dit qu’on passera, alors ramène pas ta merde !", lui répondit O’Yarell.
Dune après dune, les scorpions blindés fonçaient toujours vers l’objectif. Et ne tardèrent pas à atteindre la première ligne de défense ennemie : un trait noir à l’horizon, ondulant dans la chaleur de la journée.
"Allez les gars, on se prépare. Lance-grenades en position !", lança le sergent.
Dans chaque scorpion, un soldat s’avança vers le ponton de tir avant, pointa son arme et dans son viseur verrouilla la cible. Un déclic se produisit, et le missile s’élança, d’abord projeté par le lance-grenades comme un vulgaire caillou, avant d’allumer sa minuscule turbine à hydrogène. Le microprocesseur intégré à l’ogive s’empressa de corriger la trajectoire, et rejoignit sa cible dans un sifflement mortel.
Aucun paléo-missile d’interception ne peut stopper une ogive pas plus grosse qu’un poing, et les extraterrestres n’avaient plus qu’à fondre en masse lorsque exploserait au-dessus de leur tête l’arme à fusion... La lumière devint d’un blanc éblouissant, avant de s’assombrir comme en pleine nuit. Puis, lentement, l’image de l’énorme nuage de poussière dégagé leur parvint.
"OK, ça devrait les calmer ..."
Le souffle de l’explosion se propagea dans un bruit sourd jusqu’aux scorpions, les faisant tanguer légèrement. Fran était estomaquée. Avec une telle arme, elle pouvait dire adieu à son interview de prisonniers... O’Yarell esquissa un sourire. Le plus drôle, maintenant, c’était d’abattre les survivants désemparés.
Woodkeeper saisit son fusil Delbrow. Une mission sans accrocs, comme il les aimait. Et avec ça, pas un seul signe de la Flotte à l’horizon... Que du bonheur, pensa-t-il, tandis que les scorpions blindés fonçaient vers les reliques de l’armée extraterrestre...
* Scorpions blindés : transporteurs équipés d’un puissant générateur de flux anti-gravitons, permettant de faire du rase-mottes à une altitude de 10 mètres maximum, et ce sans ailes. Sympa, non ? Et en plus, le pont avant est renforcé d’un garde-fou blindé, pour tirer à couvert, le vent soufflant dans les cheveux défaits...
Lorindil
Les scorpions blindés approchaient des positions ennemies. Le désert, profondément affecté par le souffle de l’explosion, se réduisait en cette zone à un imposant cratère de sable vitrifié. Cependant, quelque chose ne tournait pas rond : les bio-senseurs indiquaient toujours une présence extraterrestre dans la zone. Même en enlevant la composante "microbienne" et en calant les bios sur "macro-organismes".
La réponse à cette énigme leur parvint d’un tir de rafale d’arme plasma, derrière la crête du cratère. Les scorpions zigzaguèrent pour éviter les globoïdes verdâtres. L’un d’eux atteint le blindage d’un des véhicules, sans incidence.
"Merde, ils sont encore là !"
Le sergent consulta d’un regard son verre droit. Ses collègues proposaient un passage éclair, avant de continuer vers l’objectif. Woodkeeper acquiesça.
"Allez, tous derrière les garde-fous, on passe et on dégomme ces saletés !", hurla-t-il.
Les scorpions contournèrent le cratère, en deux groupes de trois, avant de se rabattre sur la crête tenue par l’ennemi : des humanoïdes en scaphandre, armées d’armes plasma en forme de trident, dont jaillissaient d’engins en forme de limules. Apparemment, ceux restés à l’intérieur de leur transport avaient survécu à la déflagration. Ils les accueillirent d’une rafale de tirs plasmas, couverts par le sifflement des mitrailleurs lourds archaïques installés sur les tourelles des "limules" blindées. Les soldats ouvrirent le feu de leurs Delbrow, alignant un bon paquet d’extraterrestres. Les turbines des scorpions hurlaient au passage, et l’air crépitait de mille détonations.
Un scorpion se prit plusieurs tirs de plasma en plein sur le ponton. L’équipage hurla de douleur, tendis que leurs corps se carbonisaient dans une gerbe de flammes jaune verdâtres. Le blindage de l’engin, sérieusement éprouvé, ne résista pas plus longtemps aux tirs, et le scorpion se désintégra au-dessus d’un pelotons de scaphandriers victorieux.
Fran se tenait planquée derrière le garde-fou, à proximité du sergent. Le caporal O’Yarell répliquait à tout va. Dégoupillant une grenade à fusion, elle la lança au passage dans le sas d’entrée d’une des limules blindées. Le véhicule explosa dans une gerbe de gaz bleuâtres, semant la confusion dans les rangs ennemis.
Les scorpions en profitèrent pour se dégager, et continuer leur route.
"Archaïques, hein ?", lança Fran, encore accroupie sur elle-même, tétanisée de peur.
"Ouais, bon, on s’en est bien sortis. Pas vrai, les gars ?"
Woodkeeper regarda autour de lui. De sa section ne subsistaient que trois soldats et la caporale O’Yarell. Quatre carcasses d’armures carbonisées traînaient sur le pont. Le sergent les regarda, l’air dépité : sur l’une d’elles, le crâne encore fumant de son ancien occupant avait en partie fondu au contact des plaques de protection surchauffées du cou...
Fran se retourna pour vomir convulsivement son petit-déjeuner.
"Bon, heu... O’Yarell, au rapport !", hurla-t-il, autant pour chasser la nausée qui l’envahissait que pour retrouver un semblant d’occupation. La caporale parcourut les verres de ses lunettes.
"Une section sur 6 annihilée. Section IX : effectifs réduits à 60 % de la section : 6 soldats valides sur 10.", récita-t-elle.
"10 ? Tu comptes la journaliste dans le tas ou quoi ?", remarqua-t-il.
"Ben, heu... Elle est pas venue pour se battre aussi ?", lui répondit-elle. Apparemment, Shanny n’avait pas tout pigé.
"Je me bats avec ma plume et mes idées, pas à coup de fusils Delbrow ! Je ne suis pas une brute !", leur hurla l’intéressée.
"Eh, ho, z’allez pas nous faire croire que vous avez atterri là par magie. Vous vouliez la couvrir, cette putain de mission, oui ou non ?"
"Oui, mais pas comme ça, pas dans ces conditions..."
Deux soldats s’occupaient d’empiler les morts dans une soute à l’arrière du pont prévue à cet effet. Fran regarda une dernière fois les orbites fumantes. Elle se retourna vivement pour vomir à nouveau.
"Alors bienvenue dans la réalité, Fran...", lui lança Woodkeeper, en lui tendant un mouchoir. La journaliste le regarda, hagarde. Elle prit le morceau de tissu synthétique blanc, et s’essuya la bouche avec. De ses yeux perlaient de grosses larmes.
"Allons, c’est dur Fran, mais c’est comme ça. Le tout c’est de ne pas y prêter trop d’attention, et de continuer son boulot. Si on rebrousse chemin maintenant, ils seront morts pour rien, non ?" Il l’aida à se relever.
"Alors on va prendre cet objectif, puis rentrer au campement. De retour chez nous, ce seront des héros, je vous le promets !"
"Sniff... ça leur fera une belle jambe de recevoir la Croix du mérite !", sanglotta-elle.
"Pas pour leurs familles : 100.000 crédits d’indemnités, c’est pas rien !", lui souffla-t-il.
"Vous êtes ignoble !" Son regard se durcit de colère.
"Non, réaliste. D’ailleurs, vous allez aussi prendre ceci." Il tira d’un caisson d’armement un pistolet laser. "Je ne sais pas ce qui nous attend là-bas, mais mieux vaut pour vous d’y arriver armée..." Fran saisit l’arme, le regard encore empourpré de colère.
"Sergent, on a un contact avec l’état-major.", annonça O’Yarell.
"Et ?"
"Blindés en approche des positions survolées, sergent. Appui de la Flotte. Accrochage H - 4. Ha ! Des nouvelles de la Flotte : tout un bataillon des Cohortes Spatiales mobilisé pour attaque sous-marine appuyée, à 15.000 km de l’objectif. Assaut contre une cité extraterrestre. Mechs-Robots de Combat en phase d’allumage aussi. Deux autres villes marines ont été bombardées à l’arme quantique. Annihilation totale confirmée dans H - 7."
"L’arme quantique...", murmura le sergent. La plus puissante arme de la Flotte. Capable de rayer de la carte une région de 200km de diamètre, pour y laisser qu’un tas d’atomes volatiles sur 5 km de profondeur. L’arme ultime. Imparable. La Folie Destructrice même de l’Humanité incarnée en un seul rayon mortel. Les huiles de l’Etat-major en savaient peut-être bien plus qu’ils n’en disaient, pour préparer au pied levé une telle force d’attaque... Peut-être leur fallait-il un premier contact sur le terrain, avant d’engager tous leurs atouts dans la partie... Woodkeeper regarda dans ses lunettes le globe planétaire s’étaler en planisphère, des points clignotants verts affichant les nouveaux objectifs stratégiques verrouillés.
"Bon, eh bien, je crois qu’on a intérêt à se grouiller, si on veut pas que la Flotte nous sucre notre objectif premier !", déclara-t-il. "Vitesse maximum !, ordonna-t-il. Et les scorpions se cabrèrent, avant de mettre la gomme...
Elfiriond
A l’approche de l’atmosphère, le bouclier thermique de la capsule d’évacuation se mit en place. Seules quelques diodes électro-luminescentes perçaient les ténèbres qui régnaient dans l’engin. Les trois occupants eurent conscience de l’entrée dans l’atmosphère à cause des terribles douleurs aux tympans auxquelles ils furent soumis à cet instant. Par la suite, une détonation annonça la libération des parachutes antigravs et l’énergie cinétique les écrasa contre les parois métalliques.
La chute était maintenant beaucoup plus lente, mais les capteurs indiquaient une vitesse démultipliée de celle du son. L’intérieur était toujours plongé dans l’obscurité quand un gros gyrophare rouge se mit en marche.
"Une minute avant impact au point 45.730.10. Merci d’avoir choisi Gicrosoft, et bon voyage."
Encore la voie synthétique qui ne pouvait, semblait-il, qu’annoncer de mauvaises nouvelles. En effet, une minute exactement après l’annonce, une terrible comète vint s’abattre sur 45.730.10.
"Trois survivant sur trois. Fiabilité capsule : 96%, début auto-réparation des systèmes endommagés. Rétractation du bouclier thermique dans 3 ; 2 ; 1..."
Le bouclier se rétracta en moins d’une seconde, mais il n’y eut que très peu de lumière qui filtra par les deux fenêtres. L’impact avait soulevé une énorme gerbe de poussière rougeâtre qui couvrait le ciel. Les Cargan devaient être assommés. Gammorin était conscient, son mal de tête et les sifflements dans ses oreilles le lui confirmaient. Tout de suite, il consulta les capteurs extérieurs. Il fut grandement soulagé en voyant apparaître que l’atmosphère était respirable. Il prit une ration en intraveineuse, car il se sentait nauséeux et entreprit de réveiller le couple.
Une demi-heure plus tard, les Cargan grognaient sur leur sort et leur mal de tête.
"Et maintenant, monsieur Jenkin ?", demanda madame Cargan, plus vite remise sur pieds que son mari.
"Vous pouvez m’appeler Gammorin... Rachel," lui dit-il les yeux dans les yeux. Elle en rougit jusqu’aux oreilles, "Maintenant, on va se restaurer, puis tenter une sortie ! L’air est respirable."
"Joie !", ironisa Volka, revenant à la conscience.
La poussière commençait à retomber, et la capsule, qui ressemblait maintenant à une petite maison avec l’activation du système de survie, semblait une bouteille de plexis sur Bluecéan*. Gammorin avait réglé l’émission des SOS, ils pouvaient sortir. La porte frappa lourdement le sol, soulevant un nouveau nuage de poussière. Les trois humains sortirent tentant de se frayer un chemin dans tout ce sable. Après quelques pas, le pied de Volka butta sur quelque chose de dur.
"Mais qu’est-ce ? Un... truc extraterrestre ?!", s’exclama t’il.
"Oh oh", fit Gammorin en serrant plus fort son fusil, "J’ai oublié les capteurs biologiques !"
* Bluecéan : planète entièrement recouverte d’océan (enfin, on dit qu’il existe une île, mais c’est une légende)
Gulzan
Les étoiles défilaient au-delà du hublot. Jaunes... dorées... lumineuses... bleues ...Bleues !
Solo sauta à bas de sa couchette et vint se coller le nez à la vitre. Il était quasi impossible qu’une étoile soit bleue à moins que... A moins que les trois intraveineuses qu’il s’était fait aient été de trop... Non ! Il devait bien y avoir une raison logique... Solo cherchait toujours lorsque l’appel résonna dans son vaisseau.
"Ceci est une zone à haut risque. La région est sous contrôle militaire. Si vous n’évacuez pas les lieux d’ici les quinze prochaines nanosecondes, nous nous verrons obligés de faire feu." Le convoyeur sursauta. D’habitude, les militaires employaient ce genre d’avertissement "pour la forme". Ayant les codes d’accès de tous les pilotes automatiques et informatiques, ils pouvaient reprogrammer à leur guise tout vaisseau violant les territoires interdits. Mais avec les problèmes qu’avait son ordinateur, il y avait de fortes chances que rien ne fonctionne. Et il n’y avait que deux cas où les pirates de la Flotte ne pouvaient contrôler un vaisseau : quand le vaisseau était extraterrestre ou s’il était extraterrestre. Dans les deux cas la destruction était imminente. Aucun doute. Solo allait se précipiter sur le téléphone/fax/console de jeux/ordinateur/portable/chaîne hi-fi/ télévision et kit de survie lorsque son vaisseau entra dans l’atmosphère. Les secousses firent à peine tanguer le vaisseau mais cela suffit à arrêter Solo en plein milieu de sa course. De nouveau résonna la voix du militaire, claire et autoritaire malgré les crachotements dus à l’entrée atmosphérique.
"Veuillez arrêter tout de suite votre moyen de locomotion. Vous êtes dans une situation illégale."
Solo se crispa. Il ne pouvait rien faire. Rien, mis à part attendre que le missile ne vienne le décomposer parmi les brasiers de l’espace.
L’explosion se déclencha en même temps que l’entrée dans la stratosphère. Les légères secousses qui se produisirent suffirent à sauver Solo, permettant au missile de ne faire exploser que la soute arrière. Tandis que le vaisseau continuait sa descente en vrille vers le sol stérile de 45.730.10, des milliers de couches s’abattirent sur les dunes, parsemant le sable jaune de taches blanches.
Kalth
"Echo non identifié sur 57-265-T." La voix de Jones était calme.
"Contre-mesure enclenchée, configuration interception."
"Quelle distance ?", demanda Elly.
"Environs 986 miles-uni."
A peine une heure s’était écoulée depuis qu’ils avaient "largué" leur chargement, et voilà déjà la première emmerde...
"Une communication du QG", annonça Lidnirol tout en basculant la réception sur le circuit général du cockpit.
"Wersus Tango Lima Zoulou, ici Golden Retriver. Objectif identifié et déclaré hostile. Vous êtes en zone alpha one*, je répète, zone alpha one. Over."
De rage, Elly explosa littéralement son pod-bracelet en frappant violemment son siège.
"Bordel de merde ! Quels enc... ! Filla d’el Puta !"
Comment avait-elle osé imaginer que ces tordus du commandement envisagent une autre voix que de se foutre sur la tronche ? Mais comment des décérébrés pareils pouvaient-ils être à de tels postes ? Par les tripes de Sangor !
Mais elle n’eue guère le loisir de poursuivre ces révoltantes constatations. En effet, un signal sonore caractéristique venait de se réveiller : bip.........Bip...............bip.........Bip...............
"Radar ?"
"Distance 456 mu, Fox-accrochage 1mn 25, signal intermittent, 7 pirates."
"De Lidn, pas de brouillage détecté."
Merde ! 456 mu, ils sont sacrément rapides ! Et Elly savait trop bien ce que cela signifiait. Un groupe de chasse. L’entraînement conditionnant chacun de ses gestes, elle se prépara à la confrontation.
"257 mu. Fox moins 52 ."
"Lidn, est-ce que tu peux nous trouver un quelconque soutien et vite ?"
"Négatif. On est seul. Attend ! J’ai le groupe Groupe Zelda à 2600 mu."
2600 mu... Largement le temps de se faire plomber le derrière avant qu’ils n’arrivent.
"OK les gars, on se cale les petites fesses et on assure !"
Inconsciemment, tous se raidirent, dans l’attente du combat.
"105 mu, Fox moins 9, attention .... Fox !"
Jones pressa vivement par trois fois sur son commutateur de tir, libérant successivement les salves de missiles radioguidés qui disparurent dans le vide de l’espace dans le temps d’un battement de cœur. 9 plots luminescents apparurent sur le visualisateur tête haute de l’équipage, progressant à grande vitesse sur le quadrillage.
"Impact moins 14, signal alternatif."
"Hostile à 65 m-u."
"10 secondes"
"58 m-u"
"6 secondes, 5, merde !"
Le navigateur bombardier pianota frénétiquement sur ses consoles.
"Merde, merde, merde, putain de bordel de merde..."
"Quoi ?"
"Plus de signature radar. Tir over. Salve dans les choux !"
"Lidn ?"
"Rien....si ça y est, je les ais. 7 à 15 mu."
C’est le moment que choisirent les voyants d’alerte pour débuter leur bal. Tous s’affolèrent, répercutant leurs éclats multicolores contre les parois de la cabine. Un avertissement strident servant d’orchestre.
"Flares ! Ils ont ouvert le feu ! Trajectoire rectiligne. Nature inconnue."
"Zelda à 2530."
"Contre-mesure sans action. Ces saloperies n’utilisent pas de radar."
"Donne-moi un top à 10 secondes."
Elly bascula en manuelle, serrant ses commandes comme si sa vie y était attachée, et c’était certainement le cas... Elle demeurait calme, mais ses pulsations cardiaques trahissait la situation.
"Top moins 7...5, 4,3,2,1..."
Il ne put finir sa phrase, écrasé par la brusque accélération qu’Elly imposa à leur vaisseau. Elle renversa leur assiette de 95 degrés, utilisa le maximum de puissance pour casser leur trajectoire, pesa de tout son poids sur les commandes. Le Wersus réagit assez vite, bien que cela parut une éternité au pilote. Malgré leur système de gestion de pesanteur, ils furent scotchés dans leur dossier, le sang remontant rapidement des parties inférieures du corps vers la tête. C’était aussi agréable que si un pachyderme d’Afrique s’installait sur leur poitrine.
Les parois tremblèrent lorsque des projectiles explosèrent à proximités, dans un fracas de fin du monde. Lind fut le premier à reprendre le contrôle.
"Echo pirate à 2 mu."
"Rapport avaries ?"
"Rien de grave, leur puissance est réduite, le bouclier a absorbé sans mal."
"Echo perdu. Ils sont de trop petite tailles pour nos capteurs, impossible de les cibler."
De nouveaux impacts atteignirent le Wersus, le secouant légèrement. Puis régulièrement d’autres vinrent, puis d’autres, et d’autres encore...
"Jones ?"
"J’arrive pas à les chopper, trop petit, trop rapide, mon pod décroche immédiatement..."
"Merde ! Même en faisant cracher ses tripes à ce foutu navire, je ne peux pas les semer ! Lidn ?"
"Le bouclier tient bon, mais à l’usure, il va lâcher... faut qu’on se barre. Zelda à ... Zelda à..."
"Zelda ?"
"Zelda vient de disparaître de mes consoles ! Panne réseaux !"
Une parties des lumières du poste de pilotage s’éteignirent.
"J’ai plus rien non plus, perdu configuration de combat. Initialisation !" Jones était incrédule.
Les lumières se rallumèrent, mais l’essentiel des fonctions étaient HS.
"Meeeeeerde !" Lidn paraissait complètement dépassé. "Regardez ça... Soit le moniteur déconne complètement, soit un putain d’écho non identifié de trois fois la taille d’un vaisseau-mère se trouve à moins de 2 mu de nous...
* Zone Alpha One : en clair, première ligne de combat.
Le reste du document est illisible à ce stade, ce qui nous prive de la fin du rapport. Nous allons tenter de lire les données sur un lecteur différent, mais aucun résultat n’est garanti.