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Pauvres de nous, ils ont récidivé !

Préambule Malheureux

Ou la complainte narcissique et désabusé d’un auteur honnête bafoué

 

Contrairement à ce que je vous avais laissé entendre précédemment, vous allez trouver une suite à ce qui reste pour moi comme la plus humiliante expérience d’écriture. Effectivement, il ne devait pas y avoir de suite. Seulement, voilà, parfois, on est obligé à faire ce qu’on ne veut pas. Quand je dis OBLIGER, c’est on ne peut plus correct car c’est la loi qui me l’impose. Oui, oui, la LOI !

 

Compte tenu de la dramatique tournure des événements que j’ai contés, j’avais sereinement conduit mon action en justice pour obtenir gain de causes. On ne peut pas laisser de telles choses se passer impunément, m’étais-je dit. Mais voilà, j’ai perdu. Oui, oui, j’ai PER-DU ! Et ce n’est pas de la faute de mon brillant avocat, qui est aujourd’hui en asile psychiatrique. Non, c’est encore de leur faute à eux. Le jury n’a vu en ces deux monstres de sournoisie que d’adorables créatures insouciantes et inconscientes… Comment peut-on rester à ce point à la surface des choses ? Comment peut-on doublement pénaliser un auteur aussi droit et intègre que moi ? Ne remuons pas plus le couteau dans la plaie béante. J’ignore s’il y a machination ou conspiration d’une puissance divine qui se joue de moi, mais je me retrouve donc dans l’obligation de vous livrer la suite des si navrantes aventures des deux snotlings.

 

Si le précédent chapitre que je pensais ultime contenait des scènes à ne pas mettre entre toute main, que dire de ce qui va suivre ? Et bien, c’est pire ! Pire dans tous le sens du terme. Ne voyez pas là un procédé douteux pour attirer un public en mal de sensations fortes ! Non, non, non. Voyez là seulement une forme d’honnêteté et de dégoût de soi-même. Ne dîtes pas non plus : Zarathoustra est fini, Zarathoustra exagère, Zarathoustra est tombé bien bas, … C’est vrai, mais ce n’est pas moi, ma volonté et mon esprit veillent et restent intactes, même si cette blessure reste vive ; En toute chose, il y a du bon, me suis-je dit. Depuis, je recherche et ne trouve pas, telle est ma nouvelle quête, qui s’ajoute à mon ambition la première : Vous le savez déjà, ma mission est de ne dire que la Vérité, toute la Vérité, et c’est exactement ce que je continue de faire, celle-ci étant juste peut-être précédée d’un « v » minuscule, au lieu de la magnifique majuscule qui hante toute mon existence. C’est d’ailleurs le seul message constructif que m’a dit le Tribunal : « Zarathoustra, vous nous devez la vérité ! » J’ignore encore comment la censure n’a pas découpé davantage mon texte, il faut croire que ma mission a un sens qui m’échappe.

 

On aurait pu croire que les deux confrères se seraient arrêtés là, et bien non, ils ont en effet dépassé les bornes du soutenable avec une ardeur et une absence de complexe qui les caractérisent tant. Si ces êtres ont du brio, alors je leur reconnais cette faculté, même si je continue à les mépriser au plus profond de moi, comme une infamie à la raison du philosophe, nouvelle contradiction qu’ils m’ont distillé : oui, voilà, que je me mets à mépriser ce qui est indigne. Avant de me condamner une nouvelle fois, lisez ce qui suit et fa^tes le en connaissance de cause. Si je m’étais interrompu là où je l’avais fait, c’était précisément pour cette raison. Je ne voulais pas franchir ces bornes par décence et respect de mes lecteurs, ne serait-ce que pour offrir un témoignage au monde entier de cette infamie à l’intelligence bafouée, à ce gâchis du travail et maintenant même de toute une existence. Mais la Loi en a décidé autrement. Zarathoustra ne peut que se plier devant la loi. Soit ! Que justice soit fait (et qu’on ne me reparle plus jamais d’eux !).

 

Zarathoustra, qui s’excuse une nouvelle fois de ce qui va suivre


LA PHASE 1 : L’INTEGRATION

Grandeur et décadence de la nation Drucchie

 

(Les deux snotlings sont absolument consternants pour un auteur. Ils se montrent improbablement brillants dans certaines situations et consternants dans d’autres là où n’importe qui d’autre aurait brillé. La preuve par les mots).

 

En l’espace de quelques jours, Boubli et Grobul s’étaient parfaitement mis au diapason avec les us et coutumes des furies, aidés pour cela par l’atmosphère doucement sensuelle qui régnait dans le camp. Ces dames avaient parfois d’étranges regards et des rires inquiétants, mais ils s’y étaient habitués, considérant que tous les elfes devaient être ainsi et que les gobelins avaient peur d’eux sans doute pour ces raisons.

 

Boubli, de son côté, pensait déjà à l’heure du départ. Il attendait la venue de la matriarche pour parachever son initiation au combat. Pour l’instant, il avait surtout appris à se défendre, même si elles lui avaient enseigné quelques bottes qui étaient devenues redoutables du fait de sa petite taille. Cependant il appréhendait d’annoncer la nouvelle à son ami. Ce dernier avait vécu ces jours passés au côté de Grienlyce dans un rêve de coton. Cette dernière obtenait de lui tout ce qu‘elle voulait. Elle avait même réussi à l’obliger à se laver tous les jours, depuis Grobul aimait beaucoup se laver au milieu des furies… Pour le malheur de l’elfe, la potion avait agi sur la mémoire du snotling et ses souvenirs dans le tunnel skaven étaient nimbés de brouillard. Boubli avait bien compris que grâce aux informations que lui seul détenait, il avait un atout majeur pour connaître de nouvelles techniques de la matriarche.

 

Grien, de son côté, commençait à perdre patience. La présence de cette petite boule verte l’amusait toujours autant, mais l’échéance au cours de laquelle il faudrait rendre des comptes à sa matriarche approchait à grand pas. Quitte à employer les pires tortures, elle obtiendrait ses informations. Elle savait suffisamment mener Grobul par le bout du nez pour savoir qu’elle n’obtiendrait rien de lui. Ce n’était pas l’homme à abattre, si j’ose m’exprimer ainsi. Un soir, elle pria Grobul de lui amener Boubli dans sa tente, « pour perfectionner ses parades », rajouta-t-elle en lui déposant un gros bisou sur le nez. Pendant qu’elle se prépara pour accueillir dignement le snotling dans sa tente en tête avec une garde de robe spécialement choisie à cette occasion, ce dernier se mit à courir immédiatement dans le camp pour retrouver son ami.

- Boubli, viens vite, Grien a besoin de toi. Heu, non, elle veut te donner une leçon, heu, je sais plus en fait pourquoi mais elle veut te voir. Suis moi !

- A cette heure-ci ? C’est biizarre, tu trouves pas ?

- Non, rajouta Boubli, son gros nez toujjours humide du délicieux baiser qu’il avait reçu et son esprit tout occupé à ce petit point de son corps.

- Moi, j’te dis que c’est curieux !

- Tu vois toujours le mal partout, allons, tu sais bien qu’elle ne ferait pas de mal à une mouche, et surtout pas à nous. Allez, viens et arrête de te poser des questions.

 

Cependant, Grobul se mit aussi à réfléchir à ce pourquoi. C’est vrai quoi, pourquoi là maintenant et sous sa tente ? Soudain son cœur se vrilla dans sa poitrine. Boubli avait manigancé quelque chose dans son dos ! Il regarda son ami d’un œil bizarre, pour ne pas dire soupçonneux. « C’est vrai que c’est louche ! ».

- Dis Boubli, t’aurais pas un truc à me dire ?

- Non, pourquoi ?

- Oh rien, je croyais…

 

Il le regarda à nouveau son presque frère (les snotlings sont en gros de toute façon tous des frères, compte tenu de leur mode de reproduction très particulier qui tient autant de la grenouille que du champignon, du moins ce sont les experts les plus à la pointe des mœurs snotlings qui nous le disent, je ne me prononcerais pas personnellement sur ce sujet délicat, mais important pour l’exactitude de mon récit) et lui trouva un air malin, presque intelligent (le mot employé dans sa tête n’était pas celui-là faute de terme suffisamment approchant dans sa compréhension du monde mais le sens était le même). Boubli lui cachait quelque chose, il en était sûr ! Plus exactement, il devait savoir le pourquoi du rendez-vous seul à seule avec sa Grien adorée. Il devait même avoir tout manigancé, l’elfe ne pouvant le trahir de la sorte. Plus il y pensait et plus il trouvait la passion de son ami pour les armes bien louches. C’était ça ! Il prenait des leçons uniquement pour l’attirer à lui. Mais ça ne se passerait pas comme ça !

Bientôt ils arrivèrent vers la tente.

 

- Nous pouvons entrer ?

- Oui, Boubli peut entrer, qu’il se dépêche, j’ai besoin de lui pour me préparer pour le duel, fit l’elfe d’une voix énigmatique.

- Tu crois que je dois y aller, Grobul ?

- Ben, je sais pas. D’abord, c’est toi qui devrais savoir, après tout, pas moi, fit Grobul d’une morne voix qui surprit son collègue. Puis il s’en alla sur ces mots, l’âme bouleversée par ce qu’il devinait. Tout un monde se fissurait, lui qui n’avait jamais connu le bonheur ni même l’amour avant, et il sentait d’un seul coup la peine, l’injustice et la jalousie s’emparer de lui, sans même qu’il ait idée de l’existence de telle notion. Pour la première fois depuis plusieurs jours, il se retrouvait seul, complètement seul, ignoré du monde, dans une terre qu’il ne connaissait. Puis, soudain, une idée fit place nette, il avait faim !

 


 

Boubli pénétra dans la tente avec une bonne once d’appréhension. Lorsqu’il franchit la porte, il s’arrêta net, sa salive bloquée dans son gosier tellement sa bouche était devenue pâteuse. L’elfe finissait de chausser ses cuissardes, mais son buste était complètement découvert, laissant exprimé cet élan généreux de la nature qui vibrait au gré de ses efforts.

- Peux-tu m’aider à finir me préparer ? Je n’arrive pas à les enfiler. Ca fait dix minutes que je me bats avec elles, fit Grien dans un sourire mutin qui fit trembler d’émotion le petit être tout vert.

- Gloups !

- Tu disais ?

- Ghaaaa ! Heu, oui, tout de suite, se reprit-il, quand les informations sonores émises par la furie eurent enfin parcouru son conduit auditif pour atteindre ses neurones. Il secoua sa tête et lui demanda comment procéder.

- Et bien tu te mets derrière moi et tu tires avec moi sur ce satané cuir !

 

Il se plaça comme elle le lui avait indiqué, sauf que ces bras étaient bien trop courts pour avoir une position des plus confortable, bien que pas forcément désagréable sous d’autres points de vue. L’elfe était pliée en deux et sa croupe était pour ainsi une véritable offrande à qui la contournait.

- Alors, ça vient ou tu dors ?

- Heu, c’est-à-dire que…

- Tu as peur de moi ou quoi ? Je n’ai pas que ça à faire !

Boubli se résigna et souffla en grand coup, puis ferma les yeux en serrant au plus près la belle créature et chercha à tâtons l’extrémité de la botte. Il logea sa tête là où il put pour être le plus opérationnel possible dans sa mission délicate puis tira de toutes ses forces. A son grand regret, les cuissardes n’opposèrent nulle résistance et s’enfilèrent immédiatement. L’effort n’avait point été violent, pourtant il était en sueur. Lorsqu’il rouvrit les yeux, il se trouva nez à nez avec deux magnifiques protubérances charnelles typiquement féminines que l’elfe s’apprêtait à faire disparaître dans un bustier de cuir noir.

- Peux-tu également m’aider à l’agrafer dans mon dos ? Je suis toute engourdie par l’effort que nous venons de produire.

- Oui. Pas de problème.

 

Il se retrouva donc à nouveau dos à elle sauf que cette fois-ci elle s’était agenouillée plus confortablement. Au moment de s’exécuter, une sensation de perplexité s’empara de lui devant la complexité de sa tache. Il n’avait jamais vu de tel vêtement et ignorait tout de la fermeture d’un tel ustensile, qui, en soit, lui paraissait inutile, même si indéniablement esthétique. Il prit les deux extrémités et tira dessus de manière à faire un nœud. L’elfe hurla de douleur, le snotling ayant coincé, sur le devant, entre la peau et le vêtement de cuir, une partie de ce qu’il avait précisément à recouvrir. Il sursauta d’effroi devant son erreur et laissa, sous le choc, tomber le tout à ses pieds.

- Laisse, fit la furie en se retournant vers lui et en lui souriant adorablement bien qu’elle eut grande envie de lui planter ses ongles dans ses yeux, je crois que je vais y arriver.

Le petit snotling regarda disparaître ce qui l’émouvait tant.

- Boubli, j’ai à te parler. Depuis que vous êtes arrivés, j’avoue ne plus être moi-même, la preuve, je n’arrive plus à m’habiller toute seule. Comme si votre magnétisme animal me troublait, comme si vos yeux si perspicaces voyaient tout au fond de mon âme. C’est simple mon cœur s’emballe dès que je te vois. Tu ne me crois pas ?

- Heu, c’est-à-dire que…

- J’adore la façon que tu as de dire cette expression !

- Ben, en fait heu, c’est-à-dire... Euh…

- Tiens, tu viens de recommencer ! Je me sens toute retournée. Je ne sais pas pourquoi, mais c’est comme si tu m’ensorcelais… Où en étais-je ? Ah oui ! Il faut qu’on parle.

- Ah oui ? De quoi ?

- Et bien de choses qui se passent pas loin d’ici. Oh mon cœur, comme il bat vite… Tiens, donne-moi ta main !

 

Un drôle de bruit sourd retentit. Dehors, un certain Grobul tournait en rond autour de la tente de manière à ne manquer aucune miette de ce qui pourrait se dire. Les derniers mots de la belle furie furent de véritables poignards dans son petit cœur. Ses yeux étaient couverts de larmes car, à lui aussi, son cœur lui jouait des tours mais sans aucun voile ni faux subterfuges, à le plonger dans une détresse sans nom, encore plus évidente pour un snotling que pour un humain ou un elfe puisqu’il en ignore même le vocable : est-ce pour autant qu’il en souffre moins ? Alors qu’il le maudissait, il ne savait pas que son ami venait de s’évanouir, victime d’une trop grande dose d’émotion pour un si petit être, mais il n’avait qu’une idée : l’étrangler à la première occasion pour lui avoir ainsi menti.

 

L’elfe ne tarda pas à sortir, furieuse comme elle l’avait rarement été. Partout dans le camp, on l’entendit grommeler : « Mais, c’est pas vrai, mais c’est pas vrai ! ». Et, autour d’elle, personne ne voulut savoir pourquoi l’un de ses seins sortait de son si joli bustier.

 

PHASE 2 : LUTTER CONTRE LES PLUS PUISSSANTS ET PLUS VIOLENTS POISONS

(Ou la douce vengeance de l’auteur)

 

(Ou comment j’ai tenté de reprendre le dessus sur une histoire qui m’échappait. La situation se présentait sous de bons augures et je comptais bien prendre le dessus. J’avoue que j’étais fier de mon ingénieux stratagème, oui, j’étais fier du piège dans lequel j’allais les enfermer .Mais il n’aura malheureusement pas fait long feu ! Quoi que…)

 

Les chants joyeux des oiseaux emplissaient l’air frais et humide de la clairière. Une lumière étincelante filtrait du feuillage clairsemé des arbres millénaires des alentours et ruisselait sur la rosée des fougères. Allongé contre un énorme tronc couché, Boubli était encore tout bizarre, une grande fatigue pesait encore sur tous ses nerfs. Il gisait, amorphe et allongé sur l’herbe à regarder les feuilles des arbres ou les coucous jaunes par terre, un brin d’herbe dans la bouche et le regard complètement vide, la main gauche jouant avec la carotte de malepierre qu’il avait ramenée des tunnels skavens. Rien de ce qui s’était passé hier n’avait survécu à sa violente émotion.

Qu’avait-il pu se passer dans cette satanée tente ? Tel était la question qui rongeait le pauvre Grobul. Il fixait étrangement son ami et ce dernier ne semblait même pas remarquer sa présence, choqué par la puissance dévastatrice de la furie. Etait-ce lié à la fameuse leçon de combat, auquel cas le coup porté avait dû être redoutablement violent, ou était-ce autre chose, une chose pire qu’une blessure ? Le grassouillet snotling ne pouvait s’empêcher de penser à la deuxième solution, et force de constater que c’était le pire pour lui. Il essayait bien de focaliser son esprit sur autre chose mais au fond de lui, une phrase le harcelait, telle une colère sans nom et sans équivalent sur la planète snotling : « Il m’a piqué ma Grien ! C’est plus mon copain ! ». Cela dit, en voyant son frère dans un état aussi léthargique, il commença à s’inquiéter.

Boubli émergea peu à peu du néant qui l’engourdissait depuis si longtemps et aperçut son ami. Immédiatement, l’image de Grobul le conduisant à la tente se fixa. « Mais c’est bien sûr ! La leçon de combat ! »

- Dis Boubli, ça va ?

- Hein, quoi ?

- Je disais, ça va ? T’as l’air bizarre comme tout ?

- Tu trouves ?

- Ben oui.

- T’as p’têt raison. Je crois que je serais jamais un grand guerrier. Hier, j’ai été lamentable. J’ai rien compris à la leçon de Grien. On n’a même pas combattu et pourtant elle a dû me faire quelque chose puisque je me suis évanoui. Je me rappelle plus de rien !

- Ah bon, c’était que ça ! fit Grobul, regonflé à bloc.

- Je me rappelle plus trop, tout est devenu flou. Ah si, je me rappelle d’une histoire de bottes, elle a dû m’immobiliser car j’ai souvenir d’avoir été compressé contre ses…

 

Le snotling se mit à rougir, des images beaucoup plus précises se dessinaient peu à peu, des choses que le petit être regrettait d’avoir oubliées, comme si la sensualité de la furie lui avait apporté un rayon de soleil sur son corps, il se sentait plus fort en les revoyant dans sa tête. Mais il ne se remémorait pas encore comment il avait perdu connaissance. Son hésitation avait néanmoins réveillé ce sentiment si nouveau et pourtant si oppressant de son homologue, mais ça, il l’ignorait complètement.

- Ses quoi ? Tu n’as pas fini ta phrase…, fit Grobul qui bouillait maintenant.

- Rien, rien. Je l’ai juste aidée à enfiler ses bottes…, précisa Boublie, qui lui n’avait toujours pas remarqué le changement d’humeur de son voisin, perdu qu’il était dans sa quête du passé. Je me rappelle plus de la suite… Mais comment elle a fait, bon sang ! Elle a dû me distraire pour m’assommer. C’est pas possible autrement. Oui, c’est ça, elle a dû me distraire… Oh, oui, ça me revient, elle m’a parlé de son cœur qui battait et, puis, attends, ça me revient, oui, elle m’a demandé de poser ma main sur son sein…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que Grobul lui avait sauté au cou et essayait de l’étrangler en hurlant : « T’avais pas le droit ! T’avais pas le droit ! ». Boubli, écrasé par le poids de son ami et surpris par sa réaction n’avait pu réagir ou esquivé quoi que ce soit. Ce remue de ménage attira irrésistiblement l’attention de ces dames qui firent un cercle amusé. Quand Grien comprit que la vie de Boubli était en jeu, elle s’empressa d’interrompre la bagarre.

- Mais vous n’avez pas fini ? Vous n’allez pas vous étriper, j’ai trop besoin de v…. Heu, je veux dire, vous êtes beaucoup trop mignons ! Devinant quelle pouvait être l’origine de la discorde, elle prit le plus gros dans ses bras, comme pour le protéger, et gronda amicalement Boubli, qui pourtant était une pure victime :

- Tu n’as pas fini de te battre ! Avec de si remarquables talents de guerriers, tu aurais pu le blesser ! Il va falloir que je t’apprenne à te contrôler. Je t’en aurais voulu jusqu’à ma mort si tu l’avais blessé ne serait-ce qu’une égratignure ! Tout va bien, mon petit ange ?, s’inquiéta faussement la furie.

Autour d’eux, des rires et des plaisanteries en elfique fusaient de toute part. Grien commençait d’en avoir plus qu’assez d’être pousser au ridicule par de pareils êtres. Toutes ces dérives finiraient bien par atterrir dans l’oreille de la matriarche et elle n’avait rien pour les justifier. Si encore elle était sûre d’obtenir quelque chose d’intéressant, mais avec les jours, elle commençait à en douter. Par chance, la matriarche avait, semble-t-il, beaucoup de retard, elle aurait déjà dû les rejoindre depuis plusieurs jours. Les snotlings devaient savoir quelque chose sur les skavens, elle finirait par l’apprendre. Que pouvaient-ils faire dans leur souterrain si près de leur campement ?

- Boubli, viens immédiatement dans la tente, faut qu’on parle.

Le ton était si péremptoire que le petit snotling suivit sans hésitation l’elfe. Cette fois-ci, il avait peur. A peine entrer, elle se saisit d’un poignard comme pour en jouer négligemment. Lui, regardait avec angoisse la lame brillée d’un éclat cruel. La furie s’amusait à le passer sur ses propres cuisses comme pour l’aiguiser, dessinant d’étranges motifs qui parfois laissaient une trace rouge sur sa peau blanche. Puis, brutalement, elle braqua un regard d’une grande dureté sur lui. Une idée avait germé dans sa tête, Boubli était, certes, plus futé que son confrère mais il n’était pas insensible à ses charmes, en l’amenant par jeu là où elle le voulait, elle saurait lui faire sortir les vers du nez.

- Je crois que tu n’es pas encore un grand guerrier et qu’aucun de mes efforts n’a porté ses fruits. Hier, tu n’as vraiment pas été à la hauteur. Inutile de te dire combien tu m’as déçu, dit-elle, la bouche en forme de cœur et le regard lascif. Si tu veux battre tes ennemis, il te faut que tu maîtrises tes impulsions et, quoi que ton adversaire fasse, que jamais tu ne te distrais. Hier, je t’ai testé et tu as tout fait de travers, comme si tu avais voulu délibérément me vexer. Je veux que tu fasses mieux ce matin. Vois-tu, ce que je te dis là, nous l’appliquons aux dépens de nos adversaires, car comme toi hier, ils sont faibles face à nous car leur concentration tombe peu à peu à notre approche. Je te propose donc de reprendre où nous en étions. Allez, approche !

Boubli n’avait encore rien fait qu’il avait déjà les joues en feu. Il s’approcha d’elle, la main prête à se saisir de sa petite épée au moindre geste suspect. Il ne voulait surtout pas se retrouver dans les pommes comme la dernière fois. Quand la furie se redressa en balançant ses cheveux en arrière, il était à deux doigts de dégainer. Elle le regardait immobile, les mains derrière le dos, un sourire mystérieux aux lèvres. Puis, quelque chose tomba, ce qui fit sursauter le notling, puis écarquiller ses yeux. Le bustier gisait au sol, libérant une magnifique poitrine d’albâtre.

- Leçon n°1 : l’auto-contrôle. Rappelle-toi, c’est là que tu as échoué ! Allez donne-moi ta main et reste sur tes gardes, et surtout ne t’évanouies pas comme hier, ou tu seras un snotling mort, ironisa-t-elle en lui posant sa main à la même place que la veille puis en la déplaçant tout doucement. Alors, c’est comment ?

- Oups… Heu.. C’est…mou !

La furie se contracta à cette réponse. Décidément, manœuvrer cette créature n’était pas chose aisée, elle en venait presque à regretter de ne pas avoir employé la méthode dure ! Cependant, elle devinait qu’elle faisait néanmoins son effet.

- Alors, petit snotling, tu as parcouru les tunnels skavens et tu les as rencontrés ?

- Heu, oui. Ils étaient très nombreux. Une sorte de sorcier donnait des ordres mais on n’a rien compris à ce qu’il disait. Mais il vait l’air en colère. Et puis, ils torturaient des humains pour leur demander des tas de trucs. Nous, on avait peur car ils nous avaient dit que c’était notre tour après.. Le snotling appréciait particulièrement le contact à la fois chaud et doux de cette chaire si lourde et d’apparence si fragile. Ses doigts se mirent à pétrir l’autre également et à sentir, au cœur de ce petit moelleux coussin, se durcir une partie de la chaire. Il entendit un soupir l’encourager. Il avait énormément de mal à se concentrer Sans trop comprendre pourquoi, il se mit à penser à son passé d’esclave chez les gobelins, aux boulettes de viandes pourries qu’il se préparait alors, à la glaise qu’ils utilisaient pour se faire des bols difformes pour se nourrir. Ce faisant, il massait la chose de plus en plus fermement, comme pour en façonner un. C’était tout aussi rigolo, mais beaucoup plus agréable et troublant.

- AAAAAAAAAAIE ! Ca va pas la tête ?

Il sursauta, et sortit son épée de peur. La furie grimaçait de douleur en se massant pour calmer la douleur. Le snotling avait fini par vouloir enfoncer ses doigts pour voir si c’était dur tout au fond. L’elfe le fixa d’un regard perçant de cruauté, puis se ravisa.

- C’est bien, tu as de bons réflexes, en tout cas meilleurs que tes caresses. Reprenons, tu me parlais de choses passionnantes. Tu pourrais nous y conduire ?

- Heu, faudrait que j’en parle avec Grobul, lui se rappelle mieux du chemin, mentit-il.

 

Pendant ce temps-là, Grobul cherchait un moyen de regagner l’attention de sa furie préférée. Il était inquiet qu’elle le délaissa autant au profit de son ami. Il souffrait, parce qu’il ne pouvait plus la voir comme il le voulait et cet affreux doute ne faisait qu’empirer. D’un autre côté, il s’en voulait d’avoir agi si sottement, mais, en même temps, il ne pouvait s’empêcher de repenser à la dernière phrase de son ami et de la proposition si indécente qu’avait sa tendre Grien. Il tournait, tournait, tournait autour d’un arbre à s’en donner le vertige. Et puis, pourquoi ce deuxième tête à tête en si peu de temps ? Pourquoi était-il écarté ? Comment reprendre le dessus ? En donnant un coup de pied dans un caillou qui atterrit dans une casserole, il eut soudain une idée : il allait leur préparer un bon repas à la mode gobeline !

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