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De retour dans le hall les deux chroniqueurs n’avaient plus que l’embarras du choix. Le plus bonhomme des deux observait au-dessus les balcons d’étages qui offraient autant de possibilités de trouver où cette Naïa avait ouvert son livre. Les fiches étaient normalement là pour le dire, si elle l’avait emprunté d’une bibliothèque mais eux-mêmes n’en avaient pas fait usage. La perspective d’errer au hasard déplaisait à Quirinal.
Il se retourna vers son loqueteux de compagnon. Vlad tenait replié contre lui, avec le Libra, le livre de cuisine.
« T’l’avais oublié, hein ? Pas malin ça ! »
Dans ce livre se trouvait l’extrait de texte, hélas incohérent, presque à coup sûr celui que visitait à présent la chroniqueuse. Une recette de texte, voilà qui lui était décidément familier. Il fallait un esprit particulièrement analytique ou dément pour imaginer trouver la recette de la littérature et puisque le chroniqueur drogué était déjà des siens, le docteur crut deviner qui était l’inconnue. Il s’était disputé avec elle, autrefois, à de nombreuses reprises sur le sujet.
Auquel cas cette personne ne se contenterait jamais de visiter une histoire. Cette attitude passive ne lui correspondait simplement pas, elle aurait le besoin de réécrire les événements, d’en changer le cours, de plier l’histoire à sa volonté. Il ne la voyait pas s’asseoir à une table ou se contenter d’ouvrir une porte.
« Elle est en salle des presses, à écrire l’histoire qu’elle explore. Je propose de nous rendre à l’administration récupérer la clé. »
C’était elle qui avait verrouillé la salle des presses de l’intérieur. Cette prudence un peu ridicule tournait presque à la paranoïa mais enfin une longue solitude excusait ce genre de comportement. Le problème était, si elle avait pris la clé de l’administration, ils n’étaient pas sûrs d’en trouver d’autres. Au besoin, défoncer la porte serait une option.
« C’est qu’c’t’utile un bouquin d’cuisine ! »
« Hein ? »
« Tu l’regardes et paf ! T’as tout d’viné ! »
Quirinal se permit de lever les yeux au plafond. Ce n’était pas faux. Son seul indice avait été des souvenirs épars, activés par un ouvrage de recettes. Mais il était à peu près sûr de lui pour une fois, et il commençait à entrevoir un début d’explication quant à ce qui se passait aux Chroniques.
Aussi pressa-t-il le pas mi-traînant derrière lui Vlad et mi-poussé par ce dernier qui continuait sur le même ton à lui louer l’ouvrage, et derrière ces louanges à un livre sa propre bonne idée de l’avoir emporté avec lui. Encore une fois le drogué avait vu plus loin que lui : il avait certainement fait ce raisonnement bien avant le docteur.
La seule administration qu’ils trouvèrent était au côté d’un petit corridor au fond de l’aile et qui elle-même n’était qu’une étroite pièce encombrée de meubles au point qu’il était presque impossible d’y entrer. Quelques bougies allumées brûlaient sur des assiettes en cuivre, à côté des paquets de feuilles éparpillés qui jonchaient le sol, les meubles et couvraient les murs de notes diverses. Il s’agissait d’un antre comme aucune autre à l’image de la désorganisation dont souffrait l’architecture du château. Une unique chaise avait été rangée au fond et au-dessus un petit boîtier mural, aussi épais et sombre que le reste du mobilier, contenait toutes les clés à disposition.
Il leur fallut nager jusqu’à elle pour la distinguer vraiment, ouverte sur ses alignements de clés de métal froides et épaisses. La plupart étaient rouillées. Celle des presses, cela ne surprit ni l’un ni l’autre des deux chroniqueurs, manquait à son crochet.
« Oh, quelle surprise ! Et t’vas faire quoi maint’nant Quir’ ? Hein Quir’ ? »
Rien de ce que disait le drogué n’atteignait Quirinal, se disait Quirinal et il n’y croyait pas une seconde. Un rapide examen de la pièce lui fit remarquer deux choses, la première qu’elle avait été occupée récemment et la seconde qu’il y avait bien trop de papiers volants. Naïa l’avait occupée et détail amusant, tout ce papier devait venir des tiroirs du hall.

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