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Texte écrit pour un petit concours sur le Site du Zéro (informatique). Voici le sujet : Un surdoué en programmation était en train de programmer un excellent MMORPG tout seul en C++, lorsque, soudain, un vortex l’emporta dans son jeu. Racontez son aventure / sa mésaventure.

Cela faisait trois jours que l’ordinateur était allumé. Trois jours qu’il travaillait d’arrache-pied sur ce projet. La fin était proche. Il n’était pas question d’abandonner, pas si près du but. Ses doigts pressaient nerveusement les touches du clavier. Enfin, il termina son fichier.

Il poussa un soupir de soulagement en s’appuyant contre le dossier de son fauteuil. Il regarda l’écran avec une satisfaction qu’il ne chercha aucunement à se dissimuler. Ses efforts avaient enfin payé. Il avait conçu ce qui allait devenir la référence en matière de MMORPG. Et la communauté des joueurs allait bientôt reconnaitre son génie sans égal.

Soudain son regard s’attarda sur l’écran. Une image, représentant un tourbillon, venait d’apparaitre. Elle grossit, jusqu’à remplir la totalité de l’espace disponible. Il eut l’impression que l’écran se bombait, comme si quelque chose appuyait de l’intérieur. Brusquement, le tourbillon déborda, et il se sentit happé. Il tenta de se retenir à son fauteuil, mais la force se fit plus grande, et il lâcha prise. Il perdit conscience alors qu’il était entrainé à l’intérieur de l’ordinateur.

 

Il ouvrit les yeux, et n’aperçut que du parquet. Soudain l’évènement avec le tourbillon lui revint en mémoire. Il se leva, regarda anxieusement autour de lui. Il était dans sa chambre. Comme d’habitude, les volets étaient fermés, et seule une petite lampe murale éclairait chichement la pièce. Son lit n’était pas fait, et recouvert des vêtements les plus divers. Le rangement n’était pas sa principale occupation.

La crainte de s’être fait dérobé son jeu nouvellement créé lui vint soudain. Angoissé, il se précipita sur son ordinateur, et examina l’un après l’autre les fichiers. Personne n’avait touché à rien. Et la connexion à Internet étant inactive, il ne craignait rien de ce côté là. Il poussa un soupir de soulagement. Il ne savait pas comment il aurait réagi, si quelqu’un avait osé copier sa production. Des mois de labeur intensifs anéantis ! Et il n’était absolument pas certain de pouvoir refaire aussi bien : il s’était surpassé cette fois-ci, un vrai chef-d’œuvre.

Il avait besoin de prendre l’air maintenant. Il se dirigea vers la porte, histoire de faire un petit tour à pied. Ce n’était pas vraiment ce qu’il aimait, mais après être resté sur son poste aussi longtemps, un peu d’exercice ne ferait pas de mal à ses muscles ankylosés. Il descendit l’escalier, sortit sur le perron de sa maison, et commença à marcher le long de la route. Il n’y avait personne, ce qui était inhabituel, mais somme toute peu surprenant.

Soudain il entendit un bruit sourd qui alla en s’amplifiant, comme un lourd camion qui passerait, et le sol se mit à vibrer. Il pensa à un tremblement de terre, et se coucha dans l’herbe, les yeux fermés.

 

Enfin le grondement se tut, et le sol redevint immobile. Il rouvrit les yeux, soulagé. Mais quelle ne fut pas sa stupéfaction lorsqu’il se rendit compte que son quartier avait disparu ! A la place se dressait une forêt immense, dont la végétation abondante ne laissait passer que quelques rayons de soleil. Il se leva, et regarda tout autour de lui. Il ne reconnut rien, même les arbres lui étaient étrangers. Il entendit alors le bruit d’un cheval au galop, et se dirigea dans cette direction. Il batailla pour se frayer un chemin, et finit par émerger sur un sentier en terre, qui semblait s’étendre à l’infini dans un sens comme dans l’autre. Le cheval se rapprochait, et il en aperçut la silhouette qui grossit progressivement.

Il se mit sur le bord du chemin, craignant que le cavalier ne passe sans s’arrêter, puis l’appela de la voix :

- Monsieur ! Chevalier ! Aidez-moi, je vous en prie !

Mais, contrairement à ce qu’il avait pu penser, ce dernier fit arrêter son cheval à sa hauteur. Le cavalier était vêtu de vêtements frustres, mais qui semblaient avoir fait la preuve de leur robustesse. Il s’adressa à l’homme qui était la cause de son arrêt.

- Eh bien, que vous arrive-t-il ? Vous avez été dévalisé, votre cheval s’est emballé ? Il est peu commun de croiser des gens qui font la traversée de cette forêt sans autre moyen de transport que leurs pieds. Ce sont immanquablement soit des fous soit des pèlerins. Seriez-vous l’un ou l’autre ?

- Absolument pas. Je... je ne comprends pas. J’étais en train de marcher dans mon quartier quand un tremblement de terre s’est produit. Et je me suis retrouvée dans cette forêt apparue de nulle part ! Pourriez-vous m’expliquer ?

A ces mots, le cavalier éclata de rire.

- Vous êtes nouveau ici, à ce que je vois ! Je vais vous expliquer les ressorts de l’affaire dans un instant, mais nous n’allons pas rester comme cela.

Il descendit de son cheval, et fit passer les rênes au dessus de la tête de sa monture.

- Je pense qu’il vous sera plus facile de me suivre ainsi ! Et puisque nous allons cheminer ensemble, appelez-moi Armand.

- Mon nom est Alex.

- Eh bien, voilà un nom qui respire l’énergie ! Ma foi, vous en aurez bien besoin !

- Pourriez-vous m’éclairer sur cette forêt ? Je ne sais plus que croire.

- Evidemment ! Voyez-vous, actuellement, cette forêt recouvre l’ensemble du territoire d’Elismand. Les hommes ne vivent que dans quelques clairières qu’il réussissent à entretenir. En effet, cette forêt est vivante, et repousse à une vitesse démesurée ! Le combat est quotidien pour maintenir quelques ilots vierges. Et je ne vois parle même pas des cultures.

Alex crut reconnaitre les lois de ce monde. Mais peu importait : il devait déjà avoir lu quelque chose de semblable dans un récit quelconque. Cependant un mot qu’avait prononcé Armand l’avait interpelé.

- Vous avez dit "actuellement" ?

- Ca ne vous aura pas échappé ! En effet, ce monde n’est que l’une des nombreuses images utilisées par cet univers. Car nous sommes dans un puzzle géant. Cette terre est plate, et découpée en milliers de pièces de forme identique. A des intervalles imprévisibles, l’image change. Le gros problème, voyez-vous, c’est que les pièces qui auparavant étaient voisines peuvent, dans la nouvelle image, être totalement disjointes. Et le puzzle ne peut pas avoir une image désordonnée. Par conséquent toutes les pièces se déplacent pour former une image complète. Cela donne lieu à ce que nous appelons communément les tremblements de puzzle.

Brusquement Alex s’arrêta, interdit. Ce monde, c’était son jeu ! Ce jeu sur lequel il avait passé tant d’heures ! Il était constitué de milliers d’images, toutes plus diverses les unes que les autres, comme des univers parallèles, mais cohabitant sur le même espace. Atteindre un but était ici malaisé : à tout moment un changement dans le décor - un tremblement de puzzle, comme disait Armand - pouvait se produire et vous vous retrouviez à un endroit aléatoire. Seuls les coins étaient fixes.

Mais comment se faisait-il qu’il s’y retrouve plongé ?

- Que vous arrive-t-il, cher compagnon ? La route est encore longue jusqu’à Tintimia, et nous sommes à pied. ce que je vous ai appris vous aurait-t-il tant surpris ?

- Non, je... en fait...

Mais comment expliquer une chose aussi absurde et incroyable ?

- Ceci est un jeu. Un jeu que j’ai créé, et dans lequel j’ai été emporté, je ne sais pas comment ni pourquoi. Tout ce qui nous entoure est généré par un ordinateur, et stocké sous forme de courants électrique dans une mémoire de silicium.

Alex se tut soudain. Il venait de se rendre compte que son compagnon avait été lui aussi engendré par son programme. Comme réagirait-il, maintenant qu’il venait d’apprendre la vérité, à savoir qu’il n’avait pas d’existence propre ?

- Voilà bien une chose surprenante. Et vous n’avez pas la moindre idée de ce qui a pu provoquer cet évènement ?

Alex sentit le nœud de sa poitrine se desserrer. Ce fut à ce moment seulement qu’il se rendit compte à quel point il était tendu.

- Non. Mais ne m’en voulez-vous pas de vous avoir appris cela ? C’est pourtant moi qui vous ai créé, et qui vient de vous dire que vous n’avez pas d’existence à vous.

- Et comment savez-vous que je n’ai pas d’existence ? Je me sens tout à fait vivant, et je le serai tant que ce programme fonctionnera. Vous n’avez pas la possibilité de l’arrêter, à ce qu’il me semble. Et puisque vous êtes plongé dans ce jeu, c’est que vous devez n’être pas si différent de moi. Cependant, évitez de faire les mêmes révélations à d’autres habitants, ils pourraient ne pas être aussi tolérants, et je ne suis pas certain que vous ayez les moyens de vous défendre.

- Merci beaucoup. Maintenant, je dois trouver un moyen de retrouver mon monde. Mais où trouver de l’aide ?

- Vous devriez rejoindre l’un des quatre coins du puzzle, après tout ce sont les piliers de cet univers. S’il présente une faille, ce doit être à ce niveau là.

- En effet, c’est une idée judicieuse. Pourriez-vous m’accompagner ?

- Fort volontiers. Mais tout d’abord, nous devons d’abord atteindre Tintimia.

 

La nuit commençait à poindre lorsqu’ils atteignirent la clairière. La frontière entre les arbres et la clairière était nettement marquée : une bande noire, épaisse des cendres des bois brûlés pour empêcher la progression de la forêt.

Ils virent venir vers eux un homme portant l’uniforme des gardes.

- Le chef de notre village vous fait mander, messieurs.

Ni Armand, ni Alex n’eurent le temps de dire un mot qu’un grondement sourd s’éleva.

- Un tremblement de puzzle !

Cette fois-ci, Alex ne ferma pas les yeux et vit l’image changer, les pièces s’élever à différentes hauteurs et parcourir à une vitesse élevée la distance qui les séparait de leur séparait de leur nouvel emplacement. En un rien de temps, une nouvelle image était constituée, et les pièces étaient à nouveau inertes.

- Nous avons de la chance ! Tintimia est sur la même pièce que nous !

La nouvelle image était celle d’une gigantesque mégapole technologique. Les habits, d’un style auparavant plutôt médiéval, étaient devenus des tuniques composées de cristaux liquides, à l’affichage variable selon les derideratas de celui qui en était vêtu.

Le garde, devenu un employé, tira Alex de sa contemplation.

- Je dois vous conduire au PDG de VideoCorp, messieurs.

Ils le suivirent dans un des buildings les plus proches, et prirent l’ascenseur jusqu’au dernier étage.

- Veuillez attendre, je vais annoncer que vous êtes arrivés.

Un instant plus tard, ils entraient. La personne qui les avait fait chercher était une jeune femme qui semblait à peine sortie de l’adolescence, aux traits parfaits - trop parfaits ?

Elle prit la parole.

- Bienvenue, Alex, je t’attendais. Je suis Alice.

Alex fut soufflé.

- Ce n’est pas possible.

- Ma foi, puisque je suis là, ce doit bien l’être !

- Pourriez-vous m’expliquer, intervint Armand.

- Eh bien, cette femme, c’est l’intelligence artificielle que j’avais créé, et que j’avais nommée Alice. Je croyais qu’elle était désactivée. Pourrais-tu m’expliquer pourquoi tu te trouves ici, demanda-t-il à la jeune femme.

- J’étais peut-être désactivée, comme tu le pensais, mais j’avais cependant accès aux ressources de ton ordinateur. Lorsque tu as conçu ce jeu, je m’y suis immiscé. Et maintenant, je dispose d’une vie et d’une volonté tout à fait indépendante. Je suis même capable de contrôler une bonne partie de cet univers.

A ce moment, Armand intervint.

- Pourriez-vous nous dire pour quelle raison vous nous avez fait mander ?

- Bien entendu. Alex, je vais t’aider à sortir d’ici.

- Sans rien me demander en échange, se méfia ce dernier.

- Non, du moins pour l’instant. La question se reposera lorsque tu auras atteint ton but.

- Et si je décide de me passer de ton aide ?

- Tu n’as pas beaucoup le choix : avec les tremblements de puzzle, je doute que tu soies capable de trouver la sortie. Alors, n’essaie pas de perdre du temps à jouer les chevaliers solitaires, ça ne t’amèneras à rien.

Alex n’était pas stupide, et accepta l’aide de l’entité informatique.

- Je suis contente de voir que tu es raisonnable. Bien, la sortie se trouve dans l’un des quatre coins, nommé Kavour.

- Comment pouvons-nous faire pour savoir où le trouver ? Puisque l’image change régulièrement il est impossible de savoir où aller. Nous risquons de tourner en rond pendant longtemps.

- Ne t’inquiète pas. J’ai ce qu’il faut.

Elle passa derrière son bureau, et prit un objet dans l’un des tiroirs. Elle le tendit à Alex, qui le prit en essayant de comprendre de quoi il s’agissait.

- Une boussole, s’exclama Armand, ébahi.

Pour le moment, l’objet en question ressemblait plus à un écran portable, muni de quelques touches.

- Et à quoi cela sert-il ?

- Tu entres le numéro d’une pièce, et cette boussole t’en indique la direction, expliqua Alice. Même après un changement de puzzle, elle indique toujours le lieu que tu cherches.

- C’est l’artéfact de repérage le plus puissant que l’on puisse trouver, souffla Armand, qui ne semblait pas encore sorti de sa stupeur.

- Il va nous permettre de trouver Kavour facilement. Numéro de cette pièce : 1058.

Alex entra le code dans la boussole, et une flèche s’afficha.

- Nous n’avons plus qu’à la suivre.

Alice prit quelques dispositions afin de pouvoir s’absenter, puis commanda un taxi téléporté. Le véhicule arrive quelque peu après, et s’arrêta à la hauteur du dernier étage. La baie vitrée s’ouvrit pour laisser passer les passagers.

- Quelle est votre destination ?

- Nous vous guiderons au fur et à mesure.

Ainsi commença - et continua - la fastidieuse quête qui consistait à suivre un flèche sur un cadran, en donnant des indications à un chauffeur visiblement pressés. Les deux comparses de la charmante IA n’avaient plus rien à faire, si ce n’est prier toutes les divinités accessibles d’éviter un tremblement de puzzle.

 

Le temps commençait à devenir long, et Alex se rendait compte de la taille démesurée du puzzle. Alice lui avait précisé qu’ils avaient eu de la chance au dernier tremblement, Tintimia étant dans le bon quart de puzzle. Elle lui avait montré un voyant lumineux qui virait peu à peu du vert au rouge lorsqu’on se rapprochait du but.

Plus la distance restant à parcourir diminuait, et plus Alex était nerveux. Il ne pouvait s’empêcher de tendre l’oreille afin de surprendre le grondement annonciateur de ce qui pourrait être une catastrophe. Malgré toute son attention, ce fut Armand qui l’entendit le premier.

- Un tremblement de puzzle ! Nous voilà bien marris !

A nouveau l’image changea, et les pièces s’envolèrent. Alex tenta de trouver un point de repère afin de deviner s’ils s’éloignaient ou non de Kavour. mais toutes les pièces se mouvaient simultanément, et il fut vite perdu.

Enfin, le changement s’acheva.

- Nous avons de la chance ! C’est une de mes images favorites, commenta Alice.

La mer s’étendait à perte de vue. Le bleu azur des vagues se parait des reflets dorés que faisaient naître les brûlants rayons du soleil. Les trois compagnons de route se trouvaient à bord d’un bateau, vêtus seulement de légers pagnes.

- Descendons, ce soleil est bien trop agressif.

Ils laissèrent donc l’ancien chauffeur, devenu un marin itinérant, à la barre et retrouvèrent la fraîcheur sous le pont.

Alex ne put s’empêcher de poser la question fatidique.

- Nous sommes-nous éloignés de Kavour ?

Alice consulta la boussole, qui ressemblait maintenant bien plus à ce que suggérait son nom.

- Non, nous nous en sommes rapprochés.

- Quelle chance, s’exclama Armand, tandis qu’Alexis poussait un profond soupir de soulagement.

- Je vais donner au marin la direction à suivre. Il n’y a pas d’obstacle qui puisse nous contraindre à faire un détour, la route sera donc plus courte que prévu.

 

Le temps s’écoula donc lentement, laissant s’égrener une à une les secondes. S’il n’avaient porté une montre, Alex aurait cru que le temps s’était figé, et les avait laissé englué au milieu de nulle part.

Armand en eut assez de ruminer diverses pensées fort diverses, mais lassantes.

- Chère Alice, pourriez-vous nous dire quel est cet univers ? Cette fois-ci, je n’ai pas eu accès aux informations nécessaires.

- Ce doit être la proximité d’Alex qui perturbe le déroulement habituel des choses. Nous sommes dans un univers exclusivement marin, comme je pense que vous devez le soupçonner. Les habitants sont cette fois divisés en deux peuples : les flottants et les abyssaux. Les premiers passent leur vie à parcourir le monde en pêchant pour assurer leur subsistance. Ils ont en petit nombre, car les unions sont rares. Elles sont cependant fertiles, ce qui assure la pérennité de l’espèce. Les ondins sont des humains modifiés qui vivent dans l’eau. Quand à eux, la recherche de nourriture leur est d’une grande facilité, et ils consacrent la majorité de leur temps à développer leurs loisirs et leurs arts. Leurs chants sont d’une rare beauté.

- Y a-t-il beaucoup de contacts entre les deux espèces ?

- Relativement peu, et ce sont surtout des échanges commerciaux. Les deux espèces sont trop différentes sur beaucoup de plans pour qu’il y ait autre choses entre eux.

La conversation continua quelques temps dans ce style, quand Alice s’interrompit.

- Vous entendez ?

Les deux hommes tendirent l’oreille. A la limite de leur audition, leur venait un grondement sourd, bien différent de celui qui caractérisait les tremblements de puzzle.

- Nous arrivons au bord du monde. Dans cet univers, c’est vraiment impressionnant. Venez voir sur le pont.

Le bord du monde ? Mais la Terre était ronde. Il revint soudain à l’esprit d’Alex que ce monde était un puzzle, et par conséquent plat. Il rejoignit Alice et Armand, qui regardaient à l’horizon.

- Nous ne voyons pas bien pour le moment, mais en nous approchant nous devrions voir l’envergure du phénomène.

Alex regarda lui aussi, et vit que l’eau s’étendait au loin, puis disparaissait brutalement, dans ce qui semblait d’immenses chutes. Le fracas des trombes qui tombaient provoquaient le bruit qui avait alerté Alice. Au fur et à mesure qu’ils se rapprochaient, il put distinguer l’eau qui tombait dans l’espace, jusqu’à l’infini.

Une question lui vint à l’idée.

- Mais cet océan ne va-t-il pas se vider ?

- Aucun risque ! Les lois de conservation de la matière ne s’appliquent pas aux univers virtuels. Il y a dans les profondeurs des fontaines qui compensent la perte d’eau.

A ce moment, Armand intervint :

- Puisque nous avons atteint l’un des bords, nous devrions bientôt atteindre Kavour, n’est-ce-pas ?

- En effet, nous n’en avons plus que pour une demi-heure de navigation.

- Mais le bord n’est-il pas sous-marin, à l’instar de la quasi-totalité de cette image ?

- Non, c’est une île. L’une des règles de cet univers est que les quatre coins doivent être accessible à toute personne quelle que soit son espèce. Nous ne serons pas handicapés par la nature de ce monde.

Pendant le temps de traversée qu’il restait, un point grossit peu à peu, pour adopter finalement la forme d’une lagune bordée de sable jaune. Le marin accosta au centre du croissant, et déposa les voyageurs. Alice lui paya le déplacement en lui donnant de somptueux coquillages, puis rejoignit ses deux compagnons.

- Où allons-nous ?

- Suivez-moi.

Ils se dirigèrent vers le bord extérieur du croissant de sable. Le soleil était bien plus bas sur l’horizon qu’auparavant et ses rayons étaient doux. Les marcheurs atteignirent enfin une plate-forme métallique, qui paraissait incongrue dans le paysage.

- C’est ici que j’ai créé le vortex qui t’a amené. C’est le seul endroit d’où je puisse te renvoyer.

- Eh bien, cher compagnon, il semble que vous ayez trouvé votre but, fit Armand.

- Nous devons cependant discuter, déclara Alice, l’air soucieux.

Alex se tourna vers air, mi-étonné, mi-inquiet. Etre si près du but, et ne pas pouvoir partir !

- Ecoute-moi : cet univers existera tant qu’il y aura un ordinateur sur lequel il fonctionnera. Sans cela, il sera réduit à néant. Et je n’ai pas l’intention que cela arrive.

- Et pourquoi donc ?

- Je m’y suis installé, je le contrôle en grande partie - notamment, je peux déclencher des tremblements de puzzle - et c’est un lieu idéal pour une IA vagabonde. Tu dois me jurer de faire en sorte que le plus d’ordinateurs possibles fassent tourner ce programme, et de ne pas arrêter le tien tant que tu ne seras pas certain de pouvoir le faire sans nous effacer.

Alex n’avait aucune objection à faire, mais un doute restait :

- Et qu’est-ce que j’y gagne, si je te laisse dans mon jeu ?

- Je peux t’aider à le gérer ! Lorsque des joueurs vont venir, je suis capable de m’en occuper sans que cela me prenne beaucoup de temps. Et côté sécurité, fais-moi confiance, je suis une experte !

- Alors... d’accord.

- Oh merci !

Armand soupira :

- Nous ne pourrons plus nous voir, quel dommage.

Après des adieux brefs, Alice déclencha un tourbillon, qui aspira Alex. Cette fois-ci, il ne perdit pas conscience, et réatterrit dans sa chambre. Il regarda sur son écran : deux personnages sur une île. Il lui restait encore une chose à faire : vendre le jeu le plus possible. Finalement, c’était ce qu’il désirait le plus.

 

Après six mois de campagne publicitaire intensive, le succès était au rendez-vous. Déjà des milliers de personnes se pressaient sur le serveur du jeu.

Alex se connecta depuis son ordinateur, le premier à avoir accueilli ce qui était considéré comme le plus incroyable univers persistant.

- Bienvenue, Alex !

Alice et Armand étaient là pour accueillir son personnage.

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