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     Nos deux héros chevauchèrent donc toute l’après-midi dans ces bois inhospitaliers, jusqu’à ce qu’ils aient en fait le derrière en compote, comparaison qui ne manqua pas de rappeler à Cornelius la faim qui le tiraillait.

Quant à savoir s’il aurait vraiment apprécié une compote de derrière, c’est une autre histoire qui ne nous intéresse pas ici. Et puis, poussé par des raisons que nous ne connaîtrons jamais, peut-être par fatigue, peut-être par lassitude, peut-être par ennui, peut-être par manque d’affection maternelle lors de son enfance, peut-être poussé par des pulsions homosexuelles, peut-être pas (je vous avais bien dis qu’on ne le saurait jamais !) , Thorval décida de faire une pause.

-Il est temps de faire une pause, dit-ill donc d’une voix claire et forte et mélodieuse et charmeuse de chanteur de variétés.

-Il est temps de faire une pause, dit à son tour Cornelius.

-C’est ce que je viens de dire, fit le bbarbare.

-Je sais, répondit le Tatouïnien sur le ton de la conversation.

-Ah bon. Vous êtes complètement con, aloors ?

-Idiot, je crois. Je n’ai jamais rien coompris à l’astrologie de toute façon, vous savez.

" Crois mois, s’il n’y avait que l’astrologie,... " commença Subconscient.

     Ignorant les sarcasmes du démon, chose à laquelle il commençait à s’habituer, Cornelius tenta de descendre de cheval. Après quelques minutes de tentatives infructueuses, il décida de se résoudre à l’inévitable et sauta la tête la première de l’animal, roulant dans la poussière.

" Voilà autre chose à quoi on commence à être habitué ", fit encore Subconscient.

" Tais-toi ou je me décapite " lui répondit Cornelius tout en s’époussetant.

     Thorval, quant à lui, avait entrepris de monter sa tante en peaux de yacks (comme le veut une vieille coutume Kislevite), et le spectacle de cette vielle femme en fourrure avec un barbare sur les épaules dissuada le Tatouïnien d’ajouter quoi que ce soit. Cornelius décida alors qu’il valait mieux partir chercher du bois dans la forêt pour faire un feu que de rester là, ce en quoi on ne lui donnera pas forcément tort.

- Je vais partir chercher du bois dans lla forêt pour faire un feu, dit-il (on notera au passage l’extrême habileté de l’auteur à faire du remplissage sans que personne ne puisse douter de rien ni de quoi que ce soit ni d’autre chose. Quel cerveau machiavélique et maléfique du crime je fais, n’est-ce pas ? Appelez-moi Kaiser Sozé. Bon allez, j’arrête !).

     Cornelius quitta donc le sentier, tel Bilbo le Hobbit mais en beaucoup plus grand, et avança pendant quelques minutes dans la pénombre, en fait jusqu’à ce qu’il soit complètement sûr de s’être perdu.

" Et maintenant, je suis sur que tu vas dire : " je suis sûr de m’être complètement perdu " ou un truc du même genre " fit Subconscient.

" Pas du tout " répondit notre héros. " Ca ne m’était même pas venu à l’idée ", ajouta-t-il, d’une voix où perçait comme un semblant de mauvaise foi.

     Décidant que de toute façon, il était déjà dans une situation assez catastrophique pour ne pas s’inquiéter de s’être en plus perdu, Cornelius continua à marcher tranquillement jusqu’à arriver dans une petite clairière au centre de laquelle se trouvait un vieux panneau en bois vermoulu sur lequel on pouvait lire en petits caractères " laissez vos objets de valeur au pied du panneau et partez ". En fait, c’est ce que l’on aurait pu lire à condition de disposer de beaucoup de tolérance à l’encontre de la grammaire et de l’orthographe et accessoirement d’une loupe très puissante. Mais toutes ces considérations étaient bien loin de Cornelius à présent :

-C’est idiot, fit-il remarquer. Ils ont oublié de marquer la direction. Aucun sens pratique, les gens du coin. C’est à croire qu’ils n’ont jamais entendu parler de tourisme. En tous cas, je ne reviendrai pas l’année prochaine.

" Alors ça, je dois dire que ça m’étonnerai à moi aussi ", fit Subconscient qui tentait depuis un certain temps déjà d’attirer l’attention de son hôte sur les silhouettes qui approchaient à la périphérie de sa vision.

     C’est alors que Cornelius les remarqua. Il les aurait décrit comme d’horribles créatures maléfiques piaillant et s’agitant dans tous les sens, mais pour faire plus court, disons simplement qu’il s’agissait d’une bande de snotlings. Oh, bien sûr, ils tentaient de prendre des attitudes menaçantes, comme tous les snotlings d’ailleurs ; mais que voulez-vous, quand on n’a que 1 en force, honnêtement... Allez, bon, ne brisons pas tous leurs espoirs, disons qu’ils étaient au moins de taille à effrayer un hamster nain. Hélas, Cornelius ne s’était jamais senti le courage d’un hamster, même nain ; du coup, la seule chose qui l’avait empêché de fuir, c’était d’être paralysé par la peur. Le plus grand des snots, qui devait bien avoisiner les trente centimètres, s’approchait du Tatouïnien, lorsque celui-ci, prenant son courage à deux mains (et même si une seule aurait largement suffi), donna un vigoureux coup de pied dans les parties génitales du gobelin miniature qui en fut d’ailleurs fort surpris et qui décolla comme une fusée avant de s’écraser de manière fort peu élégante contre l’arbre le plus proche. Ah, j’oubliais, c’est vrai. Ces chers naturalistes de chez GW ont établi que selon toute probabilité, les peaux-vertes sont des champignons, ce qui n’étonnera personne, et qu’ils ne disposent donc pas de parties génitales. Bien sûr. Comme toute cette histoire, vous l’aurez remarquez, se veut d’une rigueur scientifique irréprochable, reconsidérez s’il vous plaît le précédent passage comme ceci : " Cornelius sortit son couteau de poche et cueillit un par un les snotlings avant de rentrer au campement, où il prépara pour Thorval une goûteuse omelette aux champignons. " Oh, et puis, non. Oubliez tout ça. Cornelius éclata donc le pauvre chef des snotlings contre un arbre avant d’en attraper un autre par les pieds et de le brandir comme une massue. Les autres passèrent à l’assaut, et il en frappa un au menton d’un vigoureux coup de snotling :

" PAF !! "

     Puis, d’un coup de poing qui se voulait puissant, il terrassa un de ses terribles adversaires :

" CHTONK !! "

     Les coups fusaient maintenant de part et d’autres, c’est à dire que Cornelius luttait contre un snotling apparemment rompu aux techniques de kung fu, alors que les autres se battaient entre eux pour savoir : -lequel était responsable de ce désastre ; -lequel fuirait le premier ; -qu’est-ce qu’on mangerait le soir (la plus censée des préoccupations, me semble-t-il). Toujours est-il que Cornelius faisait à présent face à ce que l’on pourra considérer comme le plus terrifiant de tous les snotlings de l’histoire du vieux monde. Ce dernier tenta une balayette vicieuse ne visant non pas à nettoyer le sol à l’aide d’un ustensile poilu, mais bien à faire tomber le Tatouïnien comme vous l’aviez sans doute compris :

" TZOÏNG !! "

" C’est moi, ou les bruitages sont de plus en plus minables ? "fit Subconscient.

" C’est le problème des coûts de productions, tout ça. De toute façon, c’était ça ou tourner au Mexique ", répondit Cornelius en esquivant le coup.

" Moi, j’aime bien les tacos ", reprit Subconscient. " Et aussi Salma Hayek ", continua-t-il avec un bâillement.

" Je te rappelle que je suis en train de vivre un des plus impressionnants combats de toute cette histoire. La moitié du budget du chapitre y est passée. "

" Oh, je vois. Mais où sont passés les 2,50fr restants ? "

" ...Sans doute l’événement le plus important pour l’humanité depuis le carrefour éruptif de Tungunska en 1917 " poursuivit Cornelius qui ne prêtait plus la moindre attention à son locataire démoniaque.

     Alors que le snot titubait à présent de droite à gauche dans une remarquable imitation du drunken master, notre bon héros, dans un acte de traîtrise qui prouve ses nets progrès en tant qu’aventurier, lui enfonça deux doigts dans les yeux avant de prendre la fuite à toutes jambes, bien qu’il n’en ait que deux. Dans sa course effrénée, il rencontra dans le désordre : un tronc d’arbre, dont l’écorce s’avéra plus solide que le crâne de Cornelius, les autres snotlings qui fuyaient maintenant dans la direction de la clairière suite à une erreur d’orientation, une famille de hérisson au grand complet qui coupa sa priorité à droite, et une paire d’homme-bêtes dont Cornelius aurait parié qu’elle comportait à coup sûr une femme-bête pour des raisons qui ne seront pas exposées ici afin d’éviter de choquer les plus jeunes. Suite à cette dernière vision, pour le moins cauchemardesque, notre héros ne put s’empêcher de paniquer, ce qui n’était à l’évidence pas le cas de certains homme-bêtes (on tombe dans le graveleux, là. Et bien, moi qui croyais qu’on avait déjà touché le fond avec les gags précédents !). Le plus grand des hasards, et il devait bien mesurer dans les deux mètres vingt, ramena finalement Cornelius sur le chemin où Thorval l’attendait tranquillement, philosophant avec un écureuil pour passer le temps. Enfin, si du moins par ’philosopher’, on entend planter la bestiole au bout d’une pique et la faire griller dans le but de la manger ultérieurement. Oui, je sais que ça ne correspond pas à la définition traditionnelle de la philosophie, mais comme de toute façon je n’y ai jamais rien compris, c’est pas bien grave. Enfin, toujours est-il qu’ils dégustèrent avec appétit ce plantureux repas, composé donc d’une moitié d’écureuil par personne, relevé en plus aux fines herbes après que Cornelius l’ait malencontreusement fait tomber par terre. Inutile de dire qu’à la suite d’un tel festin, nos deux aventuriers passèrent une nuit des plus agitées, emplie de rêves ou les moutons passaient plus de temps à cuire sur une broche qu’à sauter des barrières. Toujours est-il que le soleil était déjà haut lorsque le Tatooïnien se réveilla, et bien que parler de grasse matinée après le repas de la veille puisse sembler quelque peu déplacé, Thorval qui ronflait comme le moteur d’un semi-remorque semblait au moins disposé à s’offrir un rab de sommeil. Cornelius, rattrapé un instant par la lucidité, harnacha Ernest, prenant avec lui le plus de vivres qu’il pût, c’est à dire les restes d’un écureuil carbonisé et un panier de légumes qui semblaient de toute évidence génétiquement modifiés de manière à paraître aussi digestes que des blocs de ciment goût caca, griffonna un mot sur un bout de papier et partit dans le lointain sur un rythme chaotique entrecoupé de chutes fréquentes. Lorsque, quelques heures plus tard, Thorval se reveilla enfin, il ne trouva qu’un campement vide de Cornelius et de vivres, et un papier sur lequel il aurait pu lire, si du moins il n’avait pas été totalement analphabète et incapable de comprendre le Tatooïnien : " Je reviens dans cinq minutes. Surtout, attends moi là. PS : ne te lances pas à ma poursuite svp, c’est tout la faute à Subconscient " . Comme quoi, le concept de lucidité s’associait systématiquement avec celui de brièveté chez Cornelius ; quant à Thorval, il reprit la route du village, bien décidé à ne plus se laisser avoir de la sorte (c’était la dix-septième fois, quand même).

Fin de la première partie

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