Sam se réveilla et alla jusqu’au panneau de commande. "Mayday Mayday" répéta t-il sans conviction. Rien, encore une fois. Que des grésillements...

Il répéta le même message que celui de la veille, à savoir qu’il était bloqué quelque part. Il ne savait pas ou, il avait heurté une planète (ou une météorite) sur laquelle il s’était écrasé. Le système avait totalement disjoncté ; bloquant les issues et l’obligeant a rester. Malgré tout, il avait toujours des vivres. "Poulet frites" annonça t-il au distributeur qui recracha une saucisse-lentille. L’ordinateur avait complètement pété les plombs. Enfin, c’était toujours mieux qu’un litre de lessive qu’il recevait parfois. "Coca Cola" murmura t-il, résigné. La pauvre machine émit un grésillement, suivi d’un cliquetis métallique. Puis sorti une espèce d’huile au goût de kiwi ... Ca ou autre chose, murmura t-il. Il s’assit à sa table, qu’il nettoyait comme chaque jour. Il posa son plat et son verre, et commença à manger.

"Alors Billy, comment va aujourd’hui ?" commença t-il.

"Toujours aussi peu bavard ?".

Sam regarda le squelette assis sur la chaise d’en face. "Tu devrais te laver plus souvent... Tu le sais ?". Son camarade ne lui renvoyait aucun regard, et pour cause, il n’avait pas d’yeux dans les trous de son crâne lisse."Je t’ai raconté la fois ou j’étais en Autriche ? ". Il avait sans doute du la dire une bonne cinquantaine de fois, depuis le temps qu’il était la. A peu près dix ans.

Billy avait reçu une grave blessure pendant l’amerrissage et avait succombé deux semaines plus tard. Les deux mois suivants n’avaient pas été très agréables, à cause de l’odeur s’échappant du cadavre pourrissant. Heureusement, il avait réussi à faire marcher les ventilateurs. Depuis dix ans, il était la, attendant de mourir seul... Il n’avait pas sombré dans la folie, c’était déjà ça. Il finit ses lentilles l’air morne.

Il entendit un son. On avait tapé sur la porte. Son rythme cardiaque commença a s’accélérer, et il courut, haletant jusqu’au sas.

Il tapa lui même sur la grosse porte massive. Rien.

Ce devait être un rocher, une météorite, un caillou emporté par le vent, bref, pas de quoi hurler de joie. Ca devait être ces années ici pensa t-il.

Il alla jusqu’au "Loisir-O-matic" et demanda "A la recherche du temps perdu" par Marcel Proust. A la place, il eut un des premiers albums de Petit Ours Brun.

Pas de chance ; il l’avait déjà lu ; c’était celui ou Petit Ours Brun avait peur du noir. Mais ce bruit au sas l’avait troublé. Cela faisait dix ans qu’il n’avait pas entendu de bruits extérieurs.

Il n’avait rien à faire. Il allait poser des questions à l’ordinateur, en espérant que celui ci ne disjoncterait pas, ce qui était peu probable. D’habitude, il riait des réponses loufoques que lui donnait la machine.

"Ou est le vaisseau ?" demanda t-il d’une voix ferme.

"Au centre d’une étoile" répondit le vaisseau.

Bah voyons, murmura t-il, grognon.

"Pourrais tu ouvrir le sas ?"

"Recherche ... recherche ... Requête erronée. Le sapin est en mayonnaise et les chats sont bleus" rétorqua l’ordinateur, dans sa lucidité habituelle.

Sam prit sa tête entre ses mains. Cette réponse ne l’avait pas fait rire. Il était préoccupé. Ce bruit l’avait fait prendre conscience de sa solitude, et il commençait à déprimer fortement.

Pourquoi l’ordinateur du vaisseau était-il détraqué ? L’atterrissage, sans aucun doute.

Il entendit alors un second bruit, suivi d’un petit grésillement. Il s’approcha de la porte et aperçu des étincelles qui poursuivait son contour."On la dessoude" dit il a haute voix.

Un sourire se dessina sur son visage. Il se retourna vers le squelette "Tu as entendu Billy ? On serra bientôt libre !".

Puis il réfléchit. Et si le soudeur était hostile ? Et si c’était un soldat d’une quelconque armée ennemie de la confédération ? Si c’était une créature carnivore évoluée ? Des questions fusèrent dans sa tête.

Il n’avait pas d’armes. Et de toute façon, plutôt mourir que rester plus longtemps dans ce sanctuaire de solitude. Même le regard du cadavre Billy commençait à le faire frissonner.

Il se tint devant la porte, essuya la poussière de ses vêtements, et se tint de toute sa droiture, comme un soldat au garde a vous, prêt a accueillir dignement son sauveur, ou son ennemi...

Les flammes s’arrêtèrent. Toute la porte était maintenant dessoudée. Il ne restait plus qu’a cet homme de donner un grand coup de pied dans la porte pour qu’elle tombe. Ce qu’il fit.

Dehors il faisait nuit. Sam distingua une vague forme humanoïde, qui le rassura un peu. Un pied posa le pied sur le sol éclairé, qui était en hauteur par rapport a la terre ferme.

Sam se demanda soudain si l’air était sain et respirable. Mais c’était trop tard pour se le demander ... Heureusement, l’air était en effet sain et respirable.

Le pied qui était posé portait une botte de la confédération, réplique exacte de celle de Sam, hormis la taille. Le pantalon qui en partait était aussi la réplique exacte de celui de Sam. C’est donc aussi un explorateur de la confédération, pensa t-il avec soulagement. Soudain, la jambe se tendit et l’homme entra. Sam regarda l’homme pétrifié et hurla : cet homme, c’était Billy.

 

Les deux hommes hurlèrent dès qu’ils s’aperçurent. Quand ils parvinrent à retrouver leur esprit, transpirant abondamment. Sam arriva à articuler "Tu.Tu... es mort !". Billy le regarda l’air intrigué. Sam pointa alors du doigt le squelette qui semblait esquisser un sourire devant cette situation pour le moins étrange.

Billy rétorqua "Mais non, c’est toi qui es mort ! Viens voir dans mon vaisseau !

_Tu as un vaisseau ? Il semblait étonné.

_Le même que le tien. Exactement le même. Mais l’ordinateur avait disjoncté, j’ai du ouvrir la porte par mes propres moyens. (Il montra le chalumeau).

_Ou as tu eu ce chalumeau ???

_Bien en fait je demandais un exemplaire de MotoMagazine et il m’a donné ça.

_Je comprend, le mien aussi disjoncte énormément

_J’ai du mal a saisir la situation, dit Billy intrigué, nous avons atterri dans deux vaisseaux similaires mais simplement, dans le premier cas tu es mort, et dans le deuxième c’est moi.

_Mais c’est scientifiquement impossible qu’il existent plusieurs Billy ou plusieurs Sam. Peut être la confédération nous a t-elle cloné ? Nous serions des clones sans le savoir ???

_Non, nous en aurions entendu parler ... Vu nos postes. Car tu es bien explorateur comme moi ?

_En effet. Au fait, a quoi ressemble cette planète ?

_A pas grand chose. De la prairie a perte de vue. J’ai aperçu ton vaisseau du mien. J’ai cru que je pourrais trouver de l’aide ou un vaisseau intact.

_Dehors pas de forme de vie ?

_Si. De l’herbe. Pas d’arbres, d’eau ou ‘animaux d’après ce que j’ai pu voir. Ni collines ou toute forme de relief.

_Une planète sans relief signifierait qu’elle n’aurait jamais eu d’activité interne, ou de plaques ... Qu’elle serait morte ... Mais dans ce cas, comment expliquer la végétation ?

_A vrai dire, je m’en fout un peu, je veux juste rentrer chez moi ...

_Nous irons explorer cette planète demain".

Et ils s’endormirent.

 

La planète était telle que l’avait décrit billy. Depuis la porte du vaisseau on ne voyait qu’herbe a perte de vue. Pas de nuages. Une étoile éclairait cette planète.

Il aperçu une grosse forme bleuté. Il reconnu le vaisseau, identique au sien. "C’est ton vaisseau ?" demanda t-il a Billy.

"Pas du tout" répondit celui ci. Il montra le sien, il était en effet à l’opposé.

Il y avait donc un troisième vaisseau ?

Ils marchèrent jusqu’a celui ci ; Billy ouvrit la porte avec son chalumeau.

Deux squelettes gisaient, par terre, près du sas.

"Apparemment personne n’a survécu dans celui ci. Enfin, nous n’avons pas survécu". Il souria, montrant des dents jaunies.

"Ordinateur, du poulet frites" tenta t-il alors. "De Balzac ? " répondit alors le vaisseau.

Apparemment, cet ordinateur « déconnait » autant que les deux autres. Il n’y avait aucun intérêt à rester ici.

Ils ne tardèrent pas à trouver un quatrième vaisseau. Celui ci était vide.

"Bienvenue" dit alors une voix avec un ton mécanique. "Est-il cassé, cet ordi la ?" murmura Sam a l’oreille de Billy.

"Non, répondit la voix qui apparemment avait entendu, mes circuits n’ont reçu aucune détérioration"

"Ordinateur, tu peut nous dire si tu sais ce qui se passe ? demanda Sam

_J’ai commencé a analyser la situation.

_Depuis quand l’analyses tu ? Seras ce bientôt terminé ?

_J’en suis a 3%. J’ai commencé il y a 10 ans. Mais je vais aller plus vite. Mon processeur s’améliore de jour en jour, et des robots d’entretiens arrivent à améliorer en permanence mon processeur, je m’adapte vite ...

_Que sais tu ?

_Des vaisseaux similaires qui possèdent deux passagers similaires tombent sur cette planète ...Mais chaque trio à une particularité propre et est unique.

_As tu une explication ?

_J’en ai bien une. Nous sommes dans une réunion spatio-temporels des différentes possibilités spatio-temporels d’une donnée exacte.

_Une sorte de point de contact entre plusieurs dimensions.

_Entre toutes les dimensions.

_Une infinité ?

_Le terme n’est pas exact. Il y a un nombre précis de possibilités qui est très élevé et proche de l’infini, mais qui le dépasse sûrement.

_Qui dépasse l’infini ?

_Contrairement a ce que l’on peut croire, l’infini n’est pas la notion d’absence de fin. L’infini est le dernier point, autant numériquement que géométriquement. Par exemple, deux droites parallèles se coupent à l’infini, étant donné que l’infini est l’aboutissement du tout.

_Je sais ; j’ai été à la faculté de la confédération. Mais le fait que cela soit l’aboutissement n’empêche t-il pas son dépassement ?

_Et bien, logiquement, la réunion de toutes les dimensions se fait à l’infini.

_Nous sommes donc à l’infini alors ? Tu viens de dire que non ! J’ai du mal à te suivre ...

_Etant donné que tout se rejoint ici, cela veut dire que nous sommes à l’infini. Mais pas tout a fait à l’infini. Si nous étions vraiment à l’infini, toutes les dimensions se superposeraient en un point.

_Oui, je comprends. Mais cela concerne l’endroit ou nous nous trouvons ... Et pas le nombre de dimensions qui se rencontrent

_Si. Car la norme de l’endroit où nous sommes est supérieure à l’infini, ainsi donc que les dimensions qui s’y rejoignent.

_Je crois que j’ai compris.

_Or ici, c’est une réunion de dimensions, mais qui n’est pas l’infini, étant donné qu’elles ne superposent pas en un point unique. Le nombre la caractérisant ne peut donc être que supérieur à l’infini. Si cela était inférieur, les dimensions seraient distinctes.

_C’est logique, j’ai compris proclama Sam

_Moi j’ai rien pigé à cet amas de maths dit Billy. C’est trop confus ...

_Et bien nous sommes dans un monde situé à un point ou un nombre supérieur à l’infini de dimensions se rencontre. Mais nous ne sommes pas à l’aboutissement de l’univers pour autant, l’aboutissement étant l’infini, nous sommes plus loin.

_L’univers fait partie de la dimension, intervint l’ordinateur. Il y a donc un nombre supérieur a l’infini d’univers.

_Bon laissez tombez, dit Billy, je suis largué...

_D’accord. Au fait, ordinateur, peut on décoller ?

_J’y ai songé. On pourrait quitter cet endroit ; mais cela serait extrêmement dangereux.

_Pourquoi ? demanda alors SAM.

_Allez a la porte et attendez 12minutes34secondesvirgule5487656777557678776"

Ils se tinrent sur la porte et attendirent. Au bout de 12 minutes, ils entendirent un bruit métallique assourdissant. Un vaisseau s’écrasa alors dans une réunion de flamme, glissant sur le sol une vingtaine de mètres avant de s’arrêter.

"Je ne vous conseille pas d’y aller, dit alors l’ordi. Vous pourriez tomber sur un de vous ayant sombré dans la folie, et cela deviendrait dangereux"

Le sas se ferma alors.

"Il faut décoller avant qu’un vaisseau nous atterrisse dessus.

_Vous voulez tenter le coup ? Mais c’est dangereux je vous préviens ...

_Pourquoi ? Il y a des météorites ? L’atmosphère est difficile à traverser ? Tu as des problèmes de carburants ? De coque ?

_Absolument pas. Le fait est que nous pourrions heurter une autre dimension ou un de ses composants, étant donné que nous sommes situés à un point supérieur ...

_Stop interrompit Billy. On ne comprend rien a ton charabia, allons y, tentons le coup, ça vaudra toujours mieux que d’être coincé ici.

_D’accord. Je vous ouvre les hublots.

_Merci et bonne chance."

Sur certains murs apparurent des hublots (rien de magique, les murs étaient des représentations holographiques).

Le vaisseau décolla dans un vacarme. Des énormes réacteurs crachaient de toute leur puissance des flammes gigantesques. Billy et Sam étaient assis devant des hublots différents. Ils virent l’herbe s’éloigner. La planète était immense. Des petits points représentants des vaisseaux apparurent par dizaines, puis par centaines, par milliers, dizaines de milliers avant qu’on ne les distingue plus.

"Attention !"Hurla l’ordinateur.

Il y eu une légère secousse. Apparemment, quelque chose les heurta dans l’espace. Billy et Sam changèrent de hublots.

Ils furent ébahis par ce qu’ils virent. Des milliards, des milliards de milliards de vaisseaux identiques étaient partis pour s’écraser sur cette planète. C’est un d’eux qu’ils avaient heurté.C’étaient donc de ces risques la que parlaient l’ordinateur.

Et sur les milliards de milliards de milliards de vaisseaux qu’ils voyaient, près du quart venaient de décoller de la planète, comme eux...

"_Je viens de finir mes calculs sur notre destinée.

_Et bien ? demanda Billy.

_Nous survivrons, répondit l’ordi. Nous regagnerons une dimension unique.

_Ouf ...

_malheur, cela ne sera pas la votre.Je viens de regarder les us et coutumes de la planète sur laquelle nous amerrirons....Est ce que vous avez quelque chose contre la torture a vie ?"

FIN

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