Hi'.
Nous sommes le deux avril et le renard vole l'éditorial au chasseur de fantômes Zarathoustra, parce qu'une saga se termine et qu'il faut en parler.
Les Chroniques ont trois piliers, trois sagas : Alarielle, l'Échiquier et Pandemonium. Aujourd'hui, Alarielle est détrônée par sa petite soeur, le Devin, le Chant des Pierres, du cycle d'Ether. Il y a, comme souvent dans ces couloirs vides, l'impression d'un arbre qui s'achève en silence. À dire vrai, le texte a été longtemps en pause et, vers le chapitre six, le ton change quelque peu pour passer d'une atmosphère presque rêveuse et irréelle à une sorte d'aventure géopolitique dont le point d'orgue reste le chapitre neuf. Il n'y a pas ce contentement de l'oeuvre achevée, d'un récit complet qui aurait construit quelque chose de grand. Il y a juste "c'est fini" et le lecteur aura du mal à se rendre compte que c'est fini, comme si le monolithe n'avait pas cessé son appel.
En fait, et c'est la difficulté, le Chant des Pierres n'est pas entouré de la même gloire qu'Alarielle. Aynerielle, c'était Warhammer, mais c'était surtout le personnage emblématique d'une épopée assez vaste, aux multiples personnages se croisant dans ces intrigues bassement humaines qui semblent chères aux chroniqueurs. Aynerielle, inachevée, pouvait se confronter à la saga de fantasy de la bibliothèque par excellence, à celle de science-fiction, mais pas le Devin. Seul le pourrait le cycle d'Ether, avec ses monolithes, ses mythes et secrets, la grandeur suffisante pour créer un univers. Si demain le Libra devait se rendre en Eldred, qu'y trouverait-il ? Un empire impérial, un peuple en mouvement, un ordre fanatique et un magicien. Largement suffisant, pour un récit, largement suffisant pour un monde. En ouvrant ses frontières, le texte s'est soudain réduit à bien peu de choses.
Mais qu'est-ce qui, dans le texte en lui-même, laisse l'impression d'inachevé ? Peut-être les personnages eux-mêmes. La révélation de Reyv'avih est soudaine, comme une saute d'humeur, et il n'y a pas l'impression qu'il ait autrement changé, sinon à croire qu'il est contrôlé de l'extérieur par des forces qui le dépassent et qui choisissent, à leur gré, s'il est doux ou en colère. Celle de Vyréhel est presque aussi brutale, un retournement qui pourtant, s'il avait été préparé suffisamment en amont, aurait eu quelque chose de fort. L'impression, finalement, est celui de la réalité : le texte a été achevé à grands coups, par acharnement, et souffre de cette décision de passer à l'acte. On y trouve des décisions précipitées qui ne pouvaient pas être étendues indéfiniment. Dit autrement, Zarathoustra n'avait pas pour habitude de faire aussi court.
Zarathoustra - Le Chant des Pierres
Il n'est pas facile d'écrire dans le silence. Les chroniqueurs, à force, y sont habitués. Le texte n'est attendu que par une poignée et ne sera lu, commenté, qu'avec retard. Il n'y a pas ce soutien qui, ailleurs, permet de soutenir un rythme, de garder la motivation. Ici l'auteur face à lui-même ne donne que les textes qu'il a voulu face à lui-même. Achever le Chant des Pierres est un accomplissement personnel, et qu'y a-t-il au-delà ? Comme une éternité. Plus personne n'attend plus rien, sinon l'auteur, une fois encore, de lui-même. On se résigne, par manque de temps, par mille autres priorités, comme un peuple qui une fois arrivé à destination ne saurait plus quoi faire. Comme si les lois divines dépendaient des victoires et des défaites, des circonstances.
C'est donc toujours le même message adressé au renard, au maître des clés, au chasseur de fantômes, au dragon, à tous les chevaliers, à tout chroniqueur. Ce n'est pas un message pour dire de le faire, ou qu'il faut le faire. C'est un message pour dire que cela peut être fait. Malgré tout, encontre tout, s'il reste en nous cette flamme de l'écriture à attiser. C'est le message qui rappellent combien de nos textes restent accrochés, chroniqueurs,
à vos plumes !